Intervention de Daniel Fasquelle

Réunion du 15 juin 2016 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle, co-rapporteur :

S'agissant des baux commerciaux, les décrets ont été pris il y a quelques mois seulement. Comme les baux ont une durée de trois, six ou neuf ans, nous n'avons pas encore de recul suffisant sur l'impact de la loi sur les renégociations des baux commerciaux.

S'agissant de la proposition d'un système de médiation, la loi a prévu que la compétence de la commission départementale de conciliation soit étendue aux baux commerciaux. Mais nous n'avons pas assez de recul pour savoir si cela a permis d'atténuer les litiges, ni s'il faudrait inclure les chambres de métiers dans cette procédure. Ces litiges sont d'ailleurs plus nombreux qu'on ne le croit ; les commerçants font face à des propriétaires dont la location d'espaces commerciaux est le métier et ils sont souvent pris au dépourvu et cèdent face à des menaces de procès dont ils savent qu'ils n'ont pas les moyens de les soutenir dans la durée. Espérons que l'intervention de la commission départementale permette à ces commerçants de trouver une oreille attentive, et à ces conflits de s'atténuer rapidement, sans que le coût en soit excessif pour les commerçants.

Sur le FISAC, ses moyens diminuent chaque année, toutes majorités confondues. C'est un phénomène ancien. Nous sommes quelques-uns à nous être battus pour que ses crédits soient maintenus, car le FISAC a montré son efficacité. Le passage d'une logique de guichet à une logique d'appel à projets peut se justifier, mais on s'aperçoit que ce changement met beaucoup de temps à se mettre en place, pour les opérations individuelles comme collectives. S'agissant des opérations individuelles, le comité de sélection du FISAC s'est réuni le mois dernier sur 191 dossiers seulement : je trouve cela très peu. La réforme introduite par la loi est-elle un moyen de gérer la pénurie de moyens ou s'agit-il d'un redéploiement efficace de la politique du FISAC ? Un bilan devra être fait, mais je suis, pour ma part, assez sceptique. Je pense qu'il faut établir à nouveau un lien entre la taxe sur les surfaces commerciales et le FISAC, afin que l'argent payé par les grandes surfaces serve effectivement à aider le petit commerce et le commerce de centre-ville.

Concernant les baux commerciaux, j'étais très hostile à leur extension à trois ans. La durée de deux ans pour les baux dérogatoires était satisfaisante. Maintenant que leur durée est de trois ans, ils offrent une protection juridique inférieure au bail de droit commun. En conséquence, le bail de droit commun leur est préféré, et on résilie de plus en plus au bout de trois ans. La souplesse et l'intérêt du bail dérogatoire sont remis en cause par cette extension. Il faudra réfléchir à un retour à la durée initiale de deux ans. Les auditions ont montré que c'était le souhait des acteurs de terrain.

En matière d'urbanisme commercial, il faudrait passer à une durée de cinq ans pour les autorisations d'exploitation commerciale car il y a un décalage entre la durée du permis de construire, qui est de cinq ans, et l'autorisation d'exploitation commerciale, qui est de trois ans. Or certaines opérations commerciales sont complexes, notamment lorsqu'elles ont lieu en centre-ville ou en centre-bourg. Dans ces cas, une durée de trois ans est insuffisante. Le bon sens voudrait qu'on aligne la durée des autorisations d'exploitation commerciale sur celle des permis de construire, soit cinq ans.

S'agissant d'un statut unique de l'entrepreneur, la fusion des différents statuts a, en effet, été à l'étude. Mais la commission d'experts réunie sur ce sujet a conclu qu'un statut unique serait trop compliqué à mettre en oeuvre techniquement, et qu'il créerait plus de problèmes qu'il n'apporterait de solutions. Cette piste qui paraissait prometteuse a donc été abandonnée pour des raisons techniques.

Sur le droit de préemption, il est trop tôt pour savoir si les dispositions nouvelles introduites par la loi sont efficaces. L'ouverture de ce droit aux établissements publics de coopération intercommunale est une avancée. Mais on sait que la difficulté est plutôt de trouver les moyens financiers pour préempter et surtout de trouver un nouveau commerçant pour occuper la place vacante. Il y aura sans doute à retravailler sur ce droit de préemption pour le rendre vraiment efficace.

Madame Annick Le Loch a posé la question de la vente sur internet. La déstabilisation des commerces de centre-ville tient, en effet, à la fois aux baux commerciaux et au montant excessif des loyers, mais aussi au développement de la vente sur internet. C'est tout le commerce de détail qui est aujourd'hui remis en cause.

S'agissant de la loi de modernisation de l'économie et du relèvement du seuil de 300 à 1 000 mètres carrés, la question est de savoir s'il y a concurrence ou non entre les moyennes surfaces à la périphérie des villes. Le fonctionnement des commissions départementales d'aménagement commercial et l'existence de seuils relativement bas avaient entraîné des situations totalement figées dans certaines parties du territoire, avec des grandes surfaces qui avaient conquis des parts de marché en demeurant à l'abri de ces règles, et acquis, à certains endroits, une situation de monopole qui les mettait en capacité d'empêcher l'arrivée de tout nouveau concurrent. Or il faut garantir au consommateur un degré minimal de concurrence.

Sur le statut de l'auto-entrepreneur, la loi de 2014 a peut-être corrigé sur certains points une forme de concurrence déloyale entre ceux qui étaient auto-entrepreneurs et ceux qui ne l'étaient pas. Mais je pense que ce statut est utile. Certains commencent comme auto-entrepreneurs, développent leur activité, et il est normal qu'ils basculent ensuite sur un autre statut. D'autres peuvent s'installer durablement dans le statut d'auto-entrepreneur car leur activité est partielle, annexe ou secondaire : ceux-là ne souhaitent pas aller au-delà d'un certain niveau d'activité, et ce statut leur suffit parfaitement. Quant aux contraintes nouvelles que la loi leur impose, les auto-entrepreneurs se plaignent de l'obligation d'immatriculation, qui implique des procédures parfois très lourdes, alors que ce statut vise précisément à faciliter la création d'entreprise, et du stage de préparation à l'installation, qu'ils trouvent lourd, coûteux et parfois pas vraiment utile. Il faudra poursuivre la réflexion sur ce point car je pense que l'équilibre n'est pas encore totalement trouvé.

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