Nous examinons deux programmes de la mission Égalité des territoires et logement. Il aurait été intéressant de traiter aussi d'un troisième programme, le 177 Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables, qui concerne les dispositifs d'hébergement d'urgence, de veille sociale et de logement adapté.
Au sein des programmes 109 et 135, les trois plus lourds blocs de dispositifs sont les aides personnalisées au logement, les aides à la pierre et les dépenses fiscales, ces dernières atteignant presque 13 milliards d'euros.
S'agissant du programme 109, et plus particulièrement de la contribution de l'État au financement du Fonds national d'aide au logement (FNAL), la forte hausse de ces dépenses est bien un effet d'optique, pour l'essentiel, et il est important de souligner qu'il n'y a pas eu besoin de rallonge budgétaire pour couvrir les besoins de l'exercice, contrairement aux années précédentes, qui ont nécessité plusieurs abondements substantiels. Il demeure néanmoins une interrogation à propos de la dette du FNAL, c'est-à-dire de l'État, vis-à-vis des organismes de sécurité sociale. L'exercice 2014 avait généré une dette de 171 millions d'euros ; la loi de finances rectificative du 29 décembre 2015 a ouvert 70,3 millions d'euros pour régulariser une partie de cette dette. Cependant, ces 70 millions ainsi que 230 millions des crédits initiaux n'ont finalement pas été consommés en 2015. En réalité, cela ne correspond pas à de moindres dépenses mais à un blocage de 300,3 millions d'euros de crédits de paiement, décidé sans en informer le Parlement et qui n'ont pas été reportés sur 2016, aggravant la dette de l'État à 401,3 millions d'euros. Je souhaiterai donc quelques explications sur cette mesure de « régulation budgétaire ». Que deviendra, enfin, la dette du FNAL vis-à-vis de la sécurité sociale ?
Je rappelle aussi que le Parlement a voté en loi de finances pour 2016 plusieurs mesures de réforme des aides personnelles au logement. Nous en reparlerons en fin d'année. Mais nous n'avions défini qu'un cadre général et je souhaiterais connaître les modalités réglementaires précises que vous avez finalement retenues.
Concernant le programme 135, la production de logements sociaux est remontée en 2015, avec près de 109 000 logements agréés sur le territoire métropolitain – hors Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) –contre 106 414 en 2014. Mais elle reste inférieure aux résultats de 2013 (117 065 logements agréés) malgré la politique volontariste du Gouvernement. Pourquoi la mobilisation, soutenue depuis 2012, de moyens importants, fiscaux et partenariaux notamment, ne donne-t-elle pas de meilleurs résultats ? Quelles sont selon vous les principales difficultés ?
On constate parallèlement de vrais progrès en termes de recentrage territorial de la production de logements sociaux. C'est très important au regard d'un des grands objectifs de la politique du logement de construire les logements sociaux là où ils sont indispensables. Même s'il existe des besoins ailleurs, ils sont particulièrement criants en zones tendues. De fait, la part cumulée des financements en zones A et B1 est passée de 65 à 70 % entre 2014 et 2015 ; elle était de 56 % en 2009. Ce recentrage est le résultat d'une stratégie volontaire de l'État dans la répartition de ses agréments. Mais ne pourrait-on l'accompagner d'une modulation des aides fiscales accordées aux organismes de logement social qui accentuerait la priorité donnée aux territoires les plus tendus ?
Autre problème que je souhaite évoquer : l'essentiel des crédits de paiement de l'action 1 du programme 135 correspondent à la couverture d'engagements antérieurs, les opérations de logements sociaux qu'ils financent s'étalant sur plusieurs années. À chaque exercice depuis quatre ans, l'État a annulé une part significative de ces crédits de paiement (hors ceux issus des fonds de concours) pour contraindre certains délégataires de compétence pour les aides à la pierre à réduire leurs excédents de trésorerie. De mon point de vue, c'était une bonne démarche. En 2015, ce sont encore 125,7 millions d'euros de crédits de paiement qui ont été annulés en cours de gestion, soit 37,7 millions d'euros de plus qu'en 2014. Or, ces nouvelles annulations ont inversé la situation : la trésorerie totale des délégataires est devenue négative à hauteur de 29 millions d'euros en 2015 ; certains d'entre eux sont désormais créanciers de l'État. Pouvez-vous expliquer pourquoi l'État est allé aussi loin dans ces annulations ?
Une dernière question enfin sur le dispositif d'aide aux maires bâtisseurs, que je trouve très intéressant. Il a été mis en place au second semestre 2015. Sur les 100 millions d'euros prévus par an, 50 millions d'euros avaient été affectés au programme 135 (action 5 Soutien) en 2015 ; 33,8 millions d'euros ont été engagés sur l'exercice, mais seulement 13,7 millions d'euros de crédits de paiement ont été consommés. Pouvez-vous nous en dire davantage sur la mise en oeuvre de ce dispositif ? Il s'agit d'un encouragement donné aux collectivités qui font des efforts importants pour produire des logements, apportant un soutien financier de 2 000 euros par logement autorisé au-delà d'un seuil minimal traduit en pourcentage du parc existant.
Quelques mots également sur la cinquantaine de dépenses fiscales rattachées à la mission Égalité des territoires et logement : une quinzaine d'entre elles présentent un coût très significatif, supérieur à 100 millions d'euros ; d'autres sont en voie d'extinction comme les premiers dispositifs de soutien à l'investissement locatif. Dans la mesure où l'on cherche à faire des économies, les autres ne pourraient-elles faire l'objet d'une révision ?
La plupart de ces dépenses fiscales sont en stabilisation, voire en régression, à quelques exceptions notables comme le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE). Sa forte évolution était souhaitée par le législateur, mais je remarquerai que la dépense est passée de 619 millions d'euros en 2014 à 900 millions en 2015.