Intervention de Serge Perrot

Réunion du 7 juin 2016 à 9h30
Commission d'enquête sur la fibromyalgie

Serge Perrot, vice-président de la Société française d'étude et de traitement de la douleur et chef du centre d'étude et de traitement de la douleur, CETD de l'Hôtel-Dieu de Paris :

Il y a quelques années, une étude évaluant le « prestige » de 45 maladies a été réalisée au Danemark auprès de médecins, d'enseignants et d'étudiants. En haut de cette classification, se situent l'infarctus et le cancer ; tout en bas, l'anxiété et la fibromyalgie… Autant dire que souffrir d'anxiété ou de fibromyalgie n'est pas « prestigieux » et que soigner ces affections ne l'est pas davantage. En bref, le rhumatologue soignera avec ardeur les patients atteint de polyarthrite rhumatoïde, une maladie « noble », et m'adressera volontiers ceux qui souffrent d'une fibromyalgie à laquelle il n'entend goutte. Il faut revoir les schémas de pensée en enseignant ce qu'est une maladie dans les facultés de médecine.

Pour la prise en charge, on se focalise sur les formes les plus sévères. Quand les symptômes sont multiples dans des sphères elles-mêmes multiples, il est impossible de traiter tout cela avec un médicament. L'avenir est à la prise en charge graduée. En première intention, pour les formes peu sévères, un médicament et quelques séances de kinésithérapie suffiront. Dans les cas plus sévères, il faudra une prise en charge psychosociale. Dans les cas encore plus graves, le malade devra être suivi dans un centre de la douleur. Il en va de la fibromyalgie comme de la lombalgie chronique : dans cette affection aussi, les anomalies révélées par un scanner lombaire sont sans corrélation avec la douleur ressentie. Plus le trouble est chronique, plus les choses se passent dans la tête. Le schéma de soin des lombalgies est le même que celui de la fibromyalgie : une lombalgie aiguë appelle un anti-inflammatoire ; quand elle devient chronique, on travaille sur le milieu professionnel, et on en vient à une prise en charge plus complexe dans les formes graves qui emportent des conséquences psychologiques, sociales et familiales. Un algorithme mis au point par les Anglais permet de graduer la gravité de l'affection et d'adapter la prise en charge à la sévérité de l'état des patients. Tel doit être l'avenir du traitement des maladies chroniques ; il serait illogique de traiter tout le monde de la même manière.

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