Nous proposons de supprimer par la loi la délégation du contingent préfectoral : c'est un choix très réfléchi. Si nous avions pu faire autrement pour récupérer ces contingents, nous l'aurions fait.
Il faut préciser que beaucoup de communes qui pensent disposer de cette délégation n'en disposent en réalité pas. Ce que nous visons ici, ce sont les contingents délégués par des conventions signées entre le préfet et la commune. Vous connaissez tous des territoires qui utilisent une partie des contingents, mais par accord tacite, ou bien sur la base de délégations qui n'ont pas été renouvelées ; sur certains territoires, il y a une cogestion ou à tout le moins une discussion sur l'utilisation de ces contingents. Ce ne sont pas ces situations que nous souhaitons bousculer aujourd'hui.
Ce que nous visons, ce sont des situations où les territoires agissent en lieu et place du préfet. Si l'on veut demander à l'État de faire mieux et plus vite, notamment en matière de relogement DALO et en matière de relogement des publics prioritaires, alors il faut le laisser prendre la main. Il n'est pas normal, à mon sens, que l'État ne connaisse pas son propre contingent, ne le gère pas, le laisse même s'évaporer au fil du temps.
Ma position n'est pas dogmatique ; j'ai forgé ma conviction en observant, au Comité régional de l'habitat et de l'hébergement (CRHH), les taux de relogement de publics prioritaires sur les contingents préfectoraux, dont des contingents délégués. Je donne quelques exemples.
À Paris, où les besoins de relogement sont très forts, le contingent préfectoral est mobilisé à plus de 70 % pour reloger des publics prioritaires – DALO, habitat insalubre, femmes victimes de violences… Mais, dans les Hauts-de-Seine, c'est 10 % l'année dernière ! Châtenay-Malabry, 32 600 habitants, taux d'attribution prioritaire : 4 % en 2014, DALO : 2 %. Ville-d'Avray, 0 %. Dans le Val-d'Oise, Bezons, 27 900 habitants, taux d'attribution prioritaire : 11 %, taux d'attribution DALO : 7 %.
Parlons un peu du Var : Cavalaire-sur-Mer, 7 000 habitants, taux d'attribution DALO : 8 % ; Saint-Maximin-la-Sainte-Baume, 15 600 habitants, taux d'attribution DALO : 8 % ; Fréjus, 53 000 habitants, taux d'attribution DALO : 9 %.
À Beauvais, le taux d'attribution DALO est de 3 %.
Il faut dire les choses comme elles sont : notre dispositif ne fonctionne pas. Les conventions ne sont pas respectées. Il y a des territoires où le système marche, mais les contingents n'y sont pas délégués. Notre proposition est dure, je le reconnais – dure pour les communes, mais aussi pour les services de l'État qui devront se remettre au travail pour gérer leur contingent, en utilisant des outils informatiques qui en permettent une connaissance fine. Franchement, je regrette de devoir en arriver là. Nous sommes nombreux à dire que la politique du logement doit être à la fois nationale et territorialisée, que l'État et les élus doivent travailler ensemble ; mais, en l'occurrence, je le redis, cela ne fonctionne pas.
Au moment où l'État demande un effort à tous les territoires sur le relogement des publics qui ont peu de revenus ou qui sont en grande difficulté, il doit reprendre son contingent – et ses responsabilités. Rien n'empêchera de discuter avec les territoires où la cogestion donne de bons résultats.
Nous faisons une exception pour les EPCI qui prennent la charge du DALO : il est alors nécessaire que ces intercommunalités aient la main sur le contingent préfectoral.
Ce sujet, qui n'est pas neuf, n'a pas été abordé dans les deux dernières lois relatives au logement. Au fond, la suppression de la délégation des contingents préfectoraux est un aveu d'échec ; mais c'est aussi un moyen d'affirmer que l'État prendra toutes ses responsabilités. Cette position est soutenue par les associations de défense des mal-logés.
Avis défavorable.