Le 25 mai dernier, la commission mixte paritaire a échoué après la discussion de l’article 2 et, plus particulièrement, du principe de non-régression du droit de l’environnement. L’inscription de ce principe dans le code de l’environnement fait partie des fondements de ce texte ambitieux, et il n’était pas envisageable qu’elle ne soit pas prévue par ce projet de loi. Lors du premier Congrès mondial du droit de l’environnement, réuni à Rio, auquel j’ai eu l’honneur de participer, une motion invitait d’ailleurs à prendre des mesures pour mettre en oeuvre et renforcer le principe de non-régression dans les politiques et le droit de l’environnement, sur l’ensemble de notre planète.
Plus largement, le titre Ier du projet de loi définit les principes fondamentaux qui conduiront l’action publique pendant les prochaines décennies, tels que l’absence de perte nette, la solidarité écologique et le principe de compensation.
Il nous faut être à la fois intransigeants, ambitieux et pragmatiques. Ce texte est marqué par notre volonté forte de lutter contre l’érosion de la biodiversité, mais surtout de permettre à cette dernière de gagner du terrain. Il s’agit aussi de changer notre système de valeurs, afin de nous concentrer sur les fonctions écologiques avant de prendre en compte les services écosystémiques. Nous devons laisser de côté les arbitrages individuels et notre vision anthropocentrique du monde pour nous mettre au service de la biodiversité : c’est un véritable choix de société qu’il nous appartient de mettre en oeuvre.
D’autres points de discorde demeurent dans la version du texte détricotée par les sénateurs. Je pense notamment à la police de l’eau et de la nature, à la gouvernance des agences de l’eau, aux obligations réelles environnementales, mais aussi à l’interdiction des néonicotinoïdes.
Je me réjouis néanmoins des échanges et des améliorations permis par la navette parlementaire sur la question importante du préjudice écologique. À ce titre, les sénateurs se sont beaucoup engagés : l’inscription dans le code civil de la spécificité du préjudice écologique et de sa réparation est une très grande avancée.
Nous sommes à une étape clé de notre politique environnementale, attendue depuis de nombreuses années – plus de quarante ans – par les différents acteurs concernés par la biodiversité. Je n’oublie pas les territoires d’outre-mer, qui abritent justement 80 % de notre biodiversité.
Les activités liées à la protection de la biodiversité témoignent de son impact économique. Ainsi, 2 millions d’activités dépendent de la biodiversité et des services écosystémiques comme l’agriculture, la pêche et la sylviculture. Par ailleurs, les parcs nationaux et régionaux représentent 40 000 emplois.
Ce texte constitue aussi une opportunité formidable pour les jeunes pousses du domaine de l’écologie. La création de l’Agence française pour la biodiversité permettra de donner plus de lisibilité aux politiques en matière d’environnement et de les décloisonner. Cette agence sera un formidable accompagnateur pour l’ensemble des acteurs et des parties prenantes des politiques de l’eau et de la biodiversité.
Pour les raisons que je viens de vous exposer, nous ne pouvons pas nous résoudre à soutenir un texte d’affichage. Il est impératif de maintenir le cap sur les objectifs environnementaux que nous portons depuis maintenant deux ans. Climat et biodiversité sont intimement liés. Dans le cadre de la COP21, la France a su amener les États à prendre leurs responsabilités. Il nous appartient désormais de prendre les nôtres afin de préserver la biodiversité.
Les députés de la majorité ont à coeur de restaurer l’ambition initiale de ce texte déterminant. Ce projet de loi doit être un texte de référence au-delà de nos frontières. Nous devons être fiers de le porter.