Mme Lignières-Cassou, vous avez remarqué que les sénateurs ont identifié une enveloppe plus importante pour la transition écologique. C'est sans doute parce que le nucléaire est parfois inclus dans le développement durable. Ce choix est évidemment contestable. En tout cas, il ne s'agit pas d'une énergie renouvelable. Par ailleurs, le périmètre des crédits alloués à la transition écologique est assez mal identifié et nous avons dû mener sur ce point un travail important. On affiche la transition écologique comme un objectif prioritaire, mais on ne dispose pas des outils nécessaires pour suivre l'évolution de sa réalisation. Voilà pourquoi notre première préconisation vise à permettre une meilleure identification du domaine de la transition énergétique et la mise en place d'un suivi.
Vous nous avez interrogées sur la multiplicité des opérateurs. Le nombre d'opérateurs gérant le PIA fait effectivement débat aujourd'hui. Il serait sans doute plus opportun, pour la lisibilité et l'efficacité de la gouvernance, d'avoir un nombre plus réduit d'opérateurs. Je voudrais toutefois souligner que cela ne doit pas conduire à la réduction ou à la suppression de certains programmes. Je pense à des programmes de l'ANRU ou de l'ANAH qui sont très efficaces. Une réduction du nombre d'opérateurs – par exemple, si l'ADEME devenait l'opérateur central – ne doit pas leur porter atteinte.
Vous m'avez interrogée au sujet de l'impact des redéploiements. Ils ont deux types de conséquences. D'une part, certains appels à projets n'ont pas du tout été lancés ; d'autre part, les enveloppes PIA 1 et PIA 2 arriveront à leur terme en 2019 pour les principaux programmes, au lieu de 2024, en raison de la diminution de leurs montants. D'où la nécessité d'avoir un PIA 3 qui pourra financer ces mêmes actions.
S'agissant de l'intérêt de la pluriannualité et du caractère interministériel des programmes, nous avons un avis très favorable. La pluriannualité est indispensable – contrairement à ce que Charles de Courson prône parfois –, mais elle ne doit pas permettre d'échapper au contrôle du Parlement, ce qui est aujourd'hui le cas, malheureusement.
Monsieur Kossowski, vous avez évoqué la question des ITE en indiquant que trois d'entre eux ont perdu leur label. Je pense que ce constat est plutôt positif, en ce qu'il traduit la capacité qu'a l'État à arrêter des programmes qui ne fonctionnent pas. La sélection des ITE est réelle. Vous avez suggéré de transformer les ITE et IRT. Les entreprises sont moins impliquées dans les IRT que dans les ITE, parce que ces instituts n'ont pas le statut de société par actions simplifiée (SAS). Nous avons auditionné des entreprises comme Safran et Air Liquide, qui sont tout à fait favorables aux ITE. Il est vrai que nous avons observé des difficultés dans leur mise en place. La difficulté à travailler collectivement, qui est peut-être spécifiquement française, a pu empêcher un déploiement rapide des ITE, notamment à cause de la question du partage des droits de propriété intellectuelle issus de leurs travaux. Il faut travailler spécifiquement sur ce point pour faciliter leur mise en oeuvre.
Monsieur Pancher, vous constatez la difficulté à consommer les crédits alloués. Cela a été vrai, mais cela l'est de moins en moins. Il y a une grande efficacité de l'ADEME, d'une part à traiter les projets et, d'autre part à identifier les projets qui peuvent être pertinents. Elle a adapté ses appels à projet aux PME. Pour le coup, cela a un effet de moindre consommation des crédits, car les PME consomment évidemment moins de crédits que les grandes entreprises. Globalement, un rythme de croisière a été atteint, même s'il existe deux bémols, dans le domaine de l'économie circulaire et dans le domaine de la biodiversité, où il y a encore des difficultés à identifier des projets et à développer ces secteurs.
Monsieur Plisson, vous posez une question sur le nombre de projets aboutis. Il est possible de vous donner des chiffres, mais je ne suis pas certaine que cela serait très pertinent. J'ai cité l'exemple de l'introduction en bourse de Fermentalg. Les projets sont très différents entre eux. On ne peut pas comparer un ITE et la réussite d'une PME financée par BPIfrance. En tout état de cause, les grandes entreprises et les PME que nous avons auditionnées ont toutes souligné la pertinence des PIA et l'importance qu'il y a à poursuivre ces programmes, dans un objectif de développement commercial. Il existe des opportunités de marché. La France est déjà en retard dans certains domaines de la transition écologique. Dans beaucoup de secteurs, comme les énergies renouvelables, il n'y a plus d'opportunités de marché, car d'autres pays les ont déjà saisies. À l'inverse, dans certains domaines, les réussites constatées encouragent à la poursuite de ces programmes.
Monsieur Chevrollier, je vais vous répondre sur la question du coût des énergies renouvelables. Je suis en désaccord avec ce que vous avez dit. Je voudrais rappeler qu'aujourd'hui, le coût du kilowattheure issu de l'éolien terrestre est inférieur au coût du kilowattheure de l'EPR. Il n'est plus vrai que les énergies renouvelables sont coûteuses. Il faut donc les développer et c'est un des objectifs des PIA.
Monsieur Alauzet, pour le PIA 1 et le PIA 2, un tableau figurant dans le rapport montre que, dans le cadre du PIA 2, 2,07 milliards d'euros étaient prévus pour la transition écologique. Cette enveloppe a déjà été réduite de 238 millions d'euros qui ont été redéployés, soit 11,5 % des crédits initiaux. On observe malheureusement les mêmes phénomènes que pour le PIA 1. La même part initiale de crédits, à peu près, y était consacrée à la transition énergétique et, dans les deux cas, les redéploiements risquent de se poursuivre. Il n'y a donc pas de différences fondamentales entre PIA 1 et PIA 2 et la transition écologique est toujours mise à contribution pour financer d'autres actions considérées comme plus urgentes, comme le financement des opérations de défense.
Je réponds maintenant à M. Aubert en lui indiquant qu'il a tout à fait raison de pointer la contradiction entre les annonces faisant de la transition écologique une priorité et la réalité. On aurait pu imaginer qu'une montée en charge lente aurait justifié des redéploiements de crédits internes à la transition écologique. Or ce n'est pas le cas. Donc il ne faut pas se leurrer : les redéploiements financent bien des besoins de crédits budgétaires sur des opérations qui n'ont pas été budgétées en loi de finances initiale.
Enfin, M. Jégo soulignait la complexité des programmes en matière de transition écologique. Je crois que la complexité est inhérente à ce type d'actions et qu'elle est nécessaire. Les PIA sont destinés à financer des opérations et des actions à caractère transformant. La chaîne va du financement de la recherche par l'ANR en amont, notamment à travers des ITE, au financement des start-up par la BPI en aval. Les circuits de financement sont donc divers et les opérateurs multiples. Il est vrai que le système est complexe. Je pense qu'il répond tout de même aux besoins qui vont de la recherche en amont jusqu'à l'exploitation commerciale. Cette complexité est difficile à gérer, mais elle est nécessaire pour financer l'innovation en matière de transition énergétique.