Je souhaite également remercier le président et le rapporteur pour la manière dont s'est déroulée la mission. Elle aurait d'ailleurs pu se poursuivre. A la limite, nous pourrions avoir une mission permanente sur le Liban. Comme l'a souligné l'un de nos interlocuteurs, Henry Laurens, si vous pensez avoir compris le Liban, c'est qu'on vous l'a mal expliqué. La question libanaise doit être abordée avec beaucoup d'humilité tant les paramètres sont nombreux.
Le Liban est entouré de problèmes : celui de la Syrie, qui est ancien, et celui d'Israël, à la fois au Sud et en ce qui concerne l'exploitation des champs gaziers offshore, car la délimitation des zones économiques exclusives n'est pas tout à fait claire. Cela oblige à passer par les Américains, faute de contact direct entre Libanais et Israéliens, du moins officiellement. Il y a aussi des problèmes endogènes bien connus, comme le système confessionnel. Je suis convaincu que le Liban ne peut pas exister sans ce système confessionnel, même s'il est à l'origine de difficultés. La population se mélange de plus en plus, mais les mariages entre Libanais de confessions différentes ont lieu à Chypre parce qu'ils sont impossibles au Liban. Il faut également souligner que le système confessionnel va au-delà de la division entre chrétiens, chiites et sunnites.
Comme le rappelle aussi le rapport, le Liban est quand même une démocratie, la seule démocratie arabe existante. Elle est d'un genre particulier, mais comme le sont toutes les démocraties, après tout. L'existence d'un blocage institutionnel prouve qu'il y a des institutions, même si elles ne fonctionnent pas. Les élections municipales se sont déroulées dans de bonnes conditions, avec parfois un succès des familles traditionnelles, parfois un échec, et surtout avec des alliances très diverses – entre le parti du général Aoun et les Forces libanaises contre les Kataëb ou avec eux, mais aussi parfois entre presque toutes les forces politiques, comme à Beyrouth, sous l'égide de Saad Hariri, dont la liste n'a pourtant remporté qu'une victoire sur le fil. A Tripoli, la liste « officielle » a été battue. Le Liban est donc une vraie démocratie.
Je persiste à penser que ce pays est un atout considérable pour la France, même si notre langue et notre influence sont en recul. La plupart des dirigeants libanais viennent à Paris lorsqu'ils veulent se rencontrer discrètement et ce n'est pas par hasard. Sur le plan économique, le rapporteur a eu raison d'insister sur l'existence d'une diaspora libanaise importante en Afrique, principalement chiite. Ses réseaux peuvent être utilisés par nos entreprises qui ne s'engagent pas facilement dans certains pays.