Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 28 juin 2016 à 15h00
Égalité et citoyenneté

Manuel Valls, Premier ministre :

Soyons clairs ! Comme le Parlement européen l’a demandé ce matin, le Royaume-Uni doit activer le plus tôt possible la clause de retrait de l’Union européenne, prévue dans le traité de Lisbonne, pour éviter à chacun une incertitude qui serait préjudiciable et protéger l’intégrité de l’Union. Il n’y a pas de temps à perdre. Il n’y aura pas de négociations tant que l’article 50 ne sera pas déclenché. Si les Britanniques veulent garder un accès au marché unique, il leur faudra alors respecter l’intégralité des règles. La France tiendra un langage de fermeté, mais elle doit aussi tenir un langage de vérité.

Il faut inventer une nouvelle Europe. Inventer, c’est-à-dire passer à une nouvelle grande étape. Il y a eu la reconstruction après la Seconde Guerre mondiale, puis, pendant la guerre froide, la consolidation et l’élargissement. Nous avons accueilli de jeunes démocraties : la Grèce, l’Espagne et le Portugal. Après la chute du Mur de Berlin, nous avons oeuvré à la réunification du continent.

Les acquis historiques de la construction européenne, à laquelle la France a toujours pris une part essentielle, sont irremplaçables. Et la France est garante du maintien de ces acquis. Malgré la paix, malgré les formidables échanges économiques et culturels, malgré la création d’une monnaie unique à laquelle les Français sont attachés, malgré Airbus, Ariane ou Erasmus, malgré tout cela, une fracture s’est ouverte, qui n’a cessé de grandir.

Cette fracture a des causes profondes. Ce n’est pas uniquement une question de normes tatillonnes. C’est aussi une question de souveraineté démocratique et d’identité. D’identité, car les peuples ont l’impression que l’Europe veut diluer ce qu’ils sont et ce que des siècles d’histoire ont façonné. Or, une Europe qui nierait les nations – Philippe Séguin l’avait prédit avec une grande lucidité (« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe Les Républicains) – ferait simplement le lit des nationalismes. Ce modèle au-dessus des nations, niant les particularités de chacun, serait un échec, et certains ont laissé croire qu’il était le seul possible.

C’est une question d’identité, mais une question aussi de souveraineté et de démocratie. Nous avons cru pouvoir agrandir, élargir, à marche forcée ; que les « non » seraient oubliés grâce à « plus d’Europe » ; que les référendums pouvaient être contournés ; que le rejet croissant de l’Europe se soignait uniquement par de la pédagogie.

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