Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du 28 juin 2016 à 15h00
Égalité et citoyenneté

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

L’inefficacité du dispositif européen censé éviter le dumping social a ouvert la voie à l’exploitation de travailleurs low cost. En l’absence de toute harmonisation sociale, le statut de travailleur détaché est devenu un instrument de la compétition économique et de la concurrence sociale en Europe, notamment dans les secteurs de la construction, du BTP et de l’agroalimentaire.

Ces logiques ont aussi des conséquences désastreuses en matière agricole. L’Europe et la France viennent de perdre 25 % de leurs exploitations agricoles et de leurs actifs agricoles en seulement dix ans. Les prix d’achat de presque toutes les productions sont en chute libre. Privés de revenus, les paysans n’ont d’autre choix que de cesser leur activité.

Dans le même temps, pour les 500 millions d’Européens, la question alimentaire redevient une préoccupation centrale, en lien direct avec les conséquences de la crise financière, de la perte d’emplois et de revenus et de l’explosion de la précarité.

Quand aurons-nous le courage de reconnaître que l’échec actuel est celui du néolibéralisme promu par l’Union européenne ?

L’Union européenne n’offre ni emplois ni croissance, malgré les gesticulations oratoires des libéraux et leurs pâles copies sociales-libérales. Jean Jaurès proclamait, en ces murs même : « Il serait temps que votre régime, dont la maxime fondamentale est "chacun pour soi, tout pour l’argent !" mesure enfin les conséquences de ses actes. » Combien ces mots sont d’actualité !

Il est donc urgent d’agir, mais dans un sens et selon une logique rénovés. Si nous voulons sauver la construction européenne, lui redonner un sens pour les peuples, il est impératif de définir un projet européen digne de ce nom, un projet qui ne se résume pas à de simples effets de tribune et à du cabotage à vue.

Formulons des propositions concrètes, comme devrait le faire la France au sein du Conseil européen. Pour ce qui nous concerne, nous en avons présenté au Président de la République ce week-end. Tout d’abord, il convient de prendre des mesures contre le dumping social et fiscal. Cela passe par la suspension des négociations sur les traités de libre-échange, TAFTA – Transatlantic free trade area –, CETA – Comprehensive economic and trade agreement – et TISA – Trade in services agreement –, autant d’acronymes derrière lesquels se cachent les pires régressions sociales, mais aussi économiques et écologiques. Ces traités sont négociés en notre nom par des technocrates bruxellois, dans l’opacité la plus complète, au mépris de l’initiative citoyenne qui vise à sortir l’Europe de ces négociations commerciales et qui a réuni plus de 3 millions d’Européens.

Cela suppose aussi de renégocier immédiatement la directive relative aux travailleurs détachés et de stopper la mise en oeuvre des réformes structurelles de déréglementation sociale exigées par Bruxelles, à commencer, ici même, par le projet de loi « Travail », expression d’une injonction bruxelloise. Ces mesures doivent être complétées par la remise en cause fondamentale des règles de l’austérité budgétaire. Pour cela, il faut renégocier le fameux traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, le TSCG, signé en 2012, conformément à la promesse faite en son temps par le candidat François Hollande et reniée dès son arrivée au pouvoir : c’est là le péché originel de cette majorité.

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