…mais nous devons tenir compte d’éléments extérieurs favorables, comme la baisse des taux d’intérêt, qui nous donne une marge de manoeuvre de 2 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale, la diminution, à laquelle personne ne s’attendait, d’1 milliard d’euros par rapport à la prévision du prélèvement en faveur de l’Union européenne, et l’excédent des comptes d’affectation spéciale de près de 2 milliards d’euros. Quand on met tout cela de côté, on constate que le coeur des dépenses de l’État, c’est-à-dire les dépenses assumées chaque année, les dépenses récurrentes – et là aussi, monsieur le secrétaire d’État, je tiens mes chiffres à votre disposition –, ont progressé de 2,6 milliards d’euros, en exécution, entre 2014 et 2015, ce qui est beaucoup trop.
Un poste, en particulier, voit son augmentation repartir : la masse salariale, qui progresse de 0,4 %. Je le dis à cette tribune, imaginez quel sera le résultat en 2016 et en 2017, lorsque se conjugueront l’augmentation du point d’indice et celle des effectifs réels.
Finalement – notre rapporteure générale nous a fait une présentation très intéressante en commission des finances –, si la masse salariale a été à peu près tenue, en 2012, 2013 et 2014, c’est grâce au grand écart entre les postes ouverts et les postes effectivement pourvus. En particulier, le nombre d’emplois dans la sécurité – police et gendarmerie –, a diminué entre 2012 et 2014, pour remonter un peu à partir de 2015 ; je le souligne pour M. Cazeneuve, qui, à chaque fois que nous l’interrogeons sur ce sujet, nous répond que nous avions supprimé des emplois.
L’analyse rigoureuse de la réalité des économies sur le budget de l’État et celui des opérateurs montre que celles-ci ne s’élèvent qu’à 1,7 milliard d’euros. Nous sommes donc bien loin des 7,7 milliards prévus, dans la tranche 2015, au titre des fameux 50 milliards intangibles – le monde change partout, des dépenses nouvelles apparaissent, mais on en reste toujours à ces 50 milliards d’économies pour les trois exercices 2014, 2015 et 2016. On est vraiment loin du compte, je suis prêt à discuter des chiffres, sur ce sujet aussi.
Je terminerai par le sujet peut-être le plus préoccupant : la méthode utilisée pour faire face au dépassement budgétaire et aux dépenses décidées mais non financées, c’est la réserve de précaution, la régulation budgétaire, finalement la méthode du rabot – pardonnez-moi pour ce mot, madame la rapporteure générale (Sourires) –, le recours exclusif au rabot, du fait de l’absence totale de réformes structurelles. En résumé, nous subissons le dérapage des dépenses sur les transferts sociaux. Il y a quinze jours, par exemple, on a observé un dérapage sur les centres d’hébergement d’urgence et sur les aides au logement.
Pour compenser ces dérapages ou ces dépenses non financées, il existe une réserve de précaution, qui atteint des montants considérables – 8 % des crédits, 11 milliards d’euros en comptant les reports –, ce qui conduit, en fait, à annuler ce qu’il est possible d’annuler, c’est-à-dire les crédits pilotables, des dépenses d’investissement ou des dépenses de fonctionnement dans les missions régaliennes de l’État. Souvenez-vous de la grande surprise de Jean-Jacques Urvoas, qui, à peine nommé garde des sceaux, découvrait la paupérisation absolue de son ministère. C’est le résultat de bien des années de régulation budgétaire – pas seulement d’ailleurs, j’ai l’honnêteté de le reconnaître, depuis le début de cette législature.