Nous doutons davantage que le Gouvernement et la majorité y soient aptes, ce qui nous a été annoncé à l’occasion de ce débat le prouve.
De fait, le Gouvernement ne tient pas ses engagements ; il le reconnaît d’ailleurs, car arrive un moment où le principe de réalité s’impose. Les 50 milliards d’économies, totem dénoncé par le président de la commission, ont été mille fois évoqués par Michel Sapin, alors même que vos équations budgétaires changeaient. Mais il vous faut bien finir par reconnaître qu’il n’y a pas de miracle en matière budgétaire et que ces 50 milliards ne sont pas au rendez-vous – la Cour des comptes elle-même a constaté récemment que 6 milliards manquaient. Vous y renoncez, c’est une forme d’aveu ; c’est aussi une forme d’honnêteté.
Vous renoncez à des choix budgétaires, économiques et sociaux majeurs. La « barémisation » du CICE était un engagement fort, la reconnaissance que le CICE n’était pas parfait. Même si ce dispositif n’a pas été inutile – personne, ici, ne peut dire le contraire –, il était temps de le transformer en une mesure beaucoup plus structurante pour le marché du travail et la compétitivité de notre économie. Cette « barémisation » aurait été une mesure compliquée à mettre en oeuvre – j’y reviendrai – mais courageuse, monsieur le secrétaire d’État. Elle exigeait des arbitrages : comment « barémiser » alors que les charges sociales sur les bas salaires sont faibles ? sur quel champ de salaire agir ? J’attendais ce débat car il aurait pu avoir de l’allure. Je trouvais cela très courageux, à l’approche des élections. Malheureusement, vous y avez renoncé. Quant à la suppression de la C3S, je doute que les entreprises puissent vous croire demain, alors que le recul succède aussi rapidement à l’annonce de la mesure.
Hélas ! monsieur le secrétaire d’État, compte tenu de ce que vous nous proposez, la France n’est pas crédible à Bruxelles. Quand bien même nos finances publiques ont connu quelques progrès sur certains points, ceux-ci ont été bien en deçà de ce qu’exige la situation de la France, bien moindre que dans les autres pays de l’Union européenne, la comparaison le démontre.
Un programme de stabilité a été débattu et envoyé à nos partenaires. Vous nous l’avez présenté avec beaucoup de conviction, insistant sur sa cohérence. Mais à peine deux mois plus tard, il est modifié, dans des proportions importantes. On a bien entendu, au fil des discussions budgétaires, que le Gouvernement pouvait, pour justifier de tels changements, invoquer des circonstances exceptionnelles, des changements majeurs dans le climat du monde – sécurité, évolution de la situation financière. Mais, que je sache, aucun événement exceptionnel ou majeur survenu ces deux derniers mois ne peut justifier un tel changement de pied de votre part, ces 6 milliards de crédits supplémentaires pour l’État.