Séance en hémicycle du 7 juillet 2016 à 9h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’ordre du jour appelle le débat d’orientation des finances publiques pour 2017.

La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les députés, ce débat d’orientation des finances publiques est le dernier de la législature. Nous allons donc parler de l’avenir et tracer des perspectives dépassant le moment de respiration démocratique de l’an prochain. Et, parce qu’il intervient après quatre ans de législature, ce débat est aussi l’occasion de dresser un bilan de notre politique budgétaire.

Pour établir un bilan, il faut d’abord se rappeler du point de départ. Au printemps 2012,…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

…au moment même où les Français nous confiaient les responsabilités de l’État, le pays se trouvait à la croisée des chemins entre la fuite en avant et la reprise en main. En 2012, souvenons-nous, la zone euro était encore en crise, une crise qui faisait douter les créanciers des États de la solvabilité de ces derniers et rendait envisageable l’impensable : la faillite d’un État européen. Il était indispensable de remettre nos finances publiques en bon ordre et de le faire rapidement.

Au début de cette législature, il y avait donc une décision majeure à prendre pour notre pays : soit continuer avec une politique trentenaire de dette publique, continuer la fuite en avant vers davantage de déficit, jusqu’à ce que nos créanciers cessent de nous prêter, ce qui nous aurait dirigés vers l’effondrement économique, soit assumer les responsabilités de l’État et faire face à l’urgence en prenant les mesures requises par la situation, à savoir des mesures dures, parfois impopulaires. Nous avons fait ce second choix, dans l’intérêt de l’État et des Français.

Ces mesures ont en effet été d’autant plus dures que le problème ne remontait pas seulement à la décennie écoulée : c’est une responsabilité collective, vieille de trente ans, qui est à l’origine de nos problèmes, une responsabilité globalement partagée par les gouvernements successifs qui a nourri une hausse ininterrompue de la dette publique jusqu’à plus de 90 % de la richesse nationale.

Telle était la situation financière de notre pays au début de cette législature.

Le gouvernement et la majorité actuels ont dû assumer une responsabilité historique : préserver la souveraineté financière de notre pays et rompre avec une politique trentenaire d’augmentation de la dette publique. Cette responsabilité, nous l’avons assumée et nous avons fait face. Un proverbe breton dit qu’« une mer calme n’a jamais fait un bon marin ». Nous avons navigué sur une mer en pleine tempête et avons mené le pays dans des eaux plus apaisées.

Sur le front budgétaire, nos concitoyens ont retrouvé la tranquillité car nous leur avons redonné la sécurité financière qu’ils attendent de l’État : le déficit public repassera sous les 3 % l’an prochain, pour la première fois depuis 2007 ; la dette publique est enfin en train de se stabiliser, après avoir connu une hausse de 30 points depuis 2008. La crise budgétaire est en voie de se terminer ; elle a été réglée par ce gouvernement et cette majorité, nous pouvons en être fiers.

Sur ces questions budgétaires, nous avons remis nos comptes en ordre, nous avons repris notre avenir en main. Ce règlement ne tombe toutefois pas du ciel : il est le résultat des efforts menés année après année par nos concitoyens.

Ces efforts se retrouvent évidemment dans les chiffres, qui, s’ils sont désincarnés, traduisent néanmoins une certaine réalité dans un débat budgétaire. Prenons les chiffres à périmètre constant, pour pouvoir comparer d’une année sur l’autre. Dans le premier budget de la législature – la loi de finances pour 2013 –, la dépense de l’État, hors charge de la dette et pensions, atteignait 303,2 milliards d’euros. Pour 2016, nous prévoyons une dépense de 295,2 milliards d’euros, soit une baisse de 8 milliards d’euros en quatre ans. Il s’agit de vrais euros, monsieur le président de la commission, les euros de nos grands-parents.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ce n’était pas la monnaie de nos grands-parents !

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Si l’on inclut la charge de la dette et les pensions, la baisse atteint 9,4 milliards d’euros. Je parle d’une baisse nette, en euros sonnants et trébuchants, pas d’une baisse par rapport au tendanciel.

Tel est le résultat des efforts fournis pendant quatre ans par nos concitoyens, ou plus exactement une partie de ces résultats – car je n’ai parlé ni de la Sécurité sociale, dont le déficit s’est considérablement réduit, ni du secteur local.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Ces efforts, qui étaient indispensables pour remettre nos comptes en ordre, ont été massifs.

La crise budgétaire est donc terminée et ce sont les efforts des Français qui ont permis d’y mettre fin. Que faire alors pour 2017 ? Il est impératif que le déficit public soit limité à 2,7 % du PIB, conformément à nos prévisions et à nos engagements européens. Nous avons accompli des efforts pendant quatre ans et nous n’allons certainement pas les dilapider la dernière année : le déficit doit continuer sa réduction l’an prochain, il doit repasser sous les 3 %, et nous construisons un budget qui le permettra, qu’il s’agisse du projet de loi de finances ou du projet de loi de financement de la Sécurité sociale.

Dans ce cadre budgétaire global, subsiste la liberté de choisir ce que l’on veut pour le pays. Cette liberté, nous n’y avons jamais renoncé. À chaque budget, nous avons pris des mesures pour que les choses changent dans le sens de davantage de solidarité et d’égalité, tantôt en accroissant les dépenses en faveur des Français les plus déshérités – avec, par exemple, le plan contre la pauvreté –, tantôt en allégeant la taxation des classes moyennes et modestes, comme cette année. À chaque budget, nous avons pris cette liberté, ce qui ne nous a pas empêchés, chaque année, de réduire le déficit.

Pour 2017, nous vous proposerons davantage de moyens en faveur de l’éducation, de l’emploi et de la sécurité. Un pays où l’on vit en sécurité et où chacun, quelle que soit sa condition sociale, peut avoir accès au savoir, vivre du fruit de son travail et s’élever dans la société par ses propres mérites, voilà ce que nous voulons. Alors oui, la dépense de l’État hors charge de la dette et pensions augmentera de 3,3 milliards d’euros en 2017. Cette augmentation, non seulement nous l’assumons, mais nous la revendiquons, je voudrais prendre quelques instants pour l’expliquer.

D’abord, il faut remettre les choses en perspective : cette hausse intervient après quatre années de baisse. Entre 2013 et 2017, la dépense de l’État hors charge de la dette et pensions aura baissé, en euros sonnants et trébuchants, de 4,6 milliards d’euros. Les résultats des efforts des Français sont là et, si ces efforts demeurent importants, nous leur en rendons une partie, car la sécurité retrouvée de nos finances nous le permet.

Ensuite, augmenter les dépenses ne signifie pas augmenter le déficit : cette hausse de la dépense est entièrement financée et rentre dans le cadre budgétaire global imposé par l’objectif de 2,7 % de déficit l’an prochain.

Cette hausse de la dépense est financée par deux moyens principaux. Premièrement, la dernière annuité du pacte de responsabilité et de solidarité aura un impact budgétaire plus limité que prévu en 2017, puisque sera privilégié un renforcement du CICE – le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi –, comme l’a annoncé le Président de la République, ce qui représente plus de 4 milliards d’euros. Deuxièmement, le produit de la lutte contre la fraude, c’est-à-dire les recouvrements sur contrôles fiscaux et les recettes du STDR – le service de traitement des déclarations rectificatives –, approchera, en 2017, son niveau de cette année, alors que nous avions budgété, par prudence, une forte baisse : ce relèvement représente 1,4 milliard d’euros.

En outre, pour des montants moindres, nous avons pu revoir à la baisse nos prévisions du coût des contentieux fiscaux de série, à hauteur de 700 millions d’euros tout en restant prudents, et nous tenons compte, pour 500 millions d’euros, de l’évolution sensible du taux d’intérêt depuis la publication du programme de stabilité.

Il n’y a donc pas de problème de financement des dépenses nouvelles, elles sont bel et bien financées.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Je sais bien que certains dans cet hémicycle ont un problème avec la dépense publique en tant que telle et voient dans la hausse de la dépense un mal en soi. Pour notre part, nous n’avons jamais considéré la dépense publique comme un bien ou un mal en soi : c’est un moyen pour agir, et pour le faire le plus efficacement possible.

Il faut être efficace et continuer de l’être. C’est pourquoi le budget pour 2017 contiendra aussi de nouvelles économies sur les champs non prioritaires de notre action. Ainsi, la baisse des effectifs dans la plupart des ministères se poursuit. C’est la garantie pour que l’argent des Français soit utilisé à bon escient. Il faut toutefois mettre les moyens là où ils sont nécessaires ; que ces derniers prennent la forme de dépenses publiques, de baisses d’impôts ou d’autres formes, ce n’est là qu’une modalité.

Je n’anticiperai pas les arguments de l’opposition, que j’ai déjà entendus. M. Perrut, hier, était prompt à parler – il m’avait promis d’être là ce matin, je constate qu’il n’est pas encore arrivé.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Nous l’attendons avec impatience. Je nous invite d’ores et déjà à la modération : certains documents, que j’ai lus, promettent un déficit de plus de 3,5 % du PIB en 2017 et une dette publique de 100,5 % du PIB en 2019.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Critiquer des mesures prétendument électoralistes quand on propose une disposition aussi conforme à l’intérêt général et à la justice sociale que la suppression de l’ISF – l’impôt de solidarité sur la fortune –, ce n’est guère modéré. J’entends annoncer des montants d’économies élevés mais je ne vois aucune documentation sérieuse. Quand on propose tout cela et bien plus encore, on n’est pas forcément bien armé pour aborder ce débat budgétaire.

Telles sont, mesdames, messieurs les députés, les perspectives que le Gouvernement vous propose pour nos finances publiques. Elles s’inscrivent dans la continuité de ce que nous avons fait depuis le début de la législature. Nous entendons continuer jusqu’au bout la remise en ordre de nos comptes publics. C’est la responsabilité historique de ce gouvernement et de cette majorité.

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Même le Premier ministre parle de majorité relative ! Quelle est votre majorité ? Une majorité de 49.3 ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Nous l’assumerons pour atteindre un déficit public de 2,7 % en 2017. Dans ce cadre budgétaire global, nous conservons la liberté de faire nos choix et d’accroître la dépense si cela nous paraît utile, voire nécessaire, pour le pays. Et qui prétendra qu’il n’est pas utile de dégager des moyens pour la sécurité, la justice, l’emploi et l’éducation ?

Ce dernier débat de la législature a donc un réel intérêt : il permet de mettre face à face les projets des uns et des autres. À l’issue de ce débat, les Français sauront, de manière claire et sans aucun doute possible, qui veut augmenter le déficit et qui veut le réduire.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

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Madame la présidente, chers collègues, je félicite tout d’abord M. le secrétaire d’État pour son opération vérité. Je voudrais néanmoins l’encourager à poursuivre car il s’est arrêté à la moitié de la vérité. Je lui poserai donc quelques questions afin de la compléter.

L’opération vérité consiste à admettre que les économies de 50 milliards d’euros…

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…censées être réalisées de 2014 à 2017 sur l’ensemble des dépenses publiques sont complètement virtuelles.

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D’abord, elles ont été calculées sur une base tendancielle que vous n’avez jamais détaillée, monsieur le secrétaire d’État. Ensuite, elles n’ont jamais été réellement documentées, sauf sur un point : la baisse des dotations aux collectivités territoriales, qui constitue effectivement une vraie économie.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ensuite, depuis quelques mois, selon vos propres termes, c’est « open bar » toutes les semaines, et vous n’aimez pas cela. Ainsi, 6 milliards d’euros supplémentaires ne sont pas financés pour l’exercice 2016 – c’est mon chiffre qui est le bon – et 10 milliards d’euros seront alloués en 2017 au plan d’urgence pour l’emploi, à l’agriculture, à la fonction publique, etc.

Au milieu de ce tourbillon, ne demeure qu’un seul point fixe, une seule constante dans la dérivée des dépenses : le totem des 50 milliards d’euros. Dans l’interview qu’il a accordée la semaine dernière aux Échos, le Président de la République faisait encore semblant d’y croire. Et patatras ! Il a bien fallu se rendre à l’évidence : 5 milliards supplémentaires seront nécessaires en 2017 pour le seul budget de l’État, mes chers collègues.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Ce n’est pas vrai.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette opération vérité, vous éprouvez tellement de difficulté à l’assumer, monsieur le secrétaire d’État, que le rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques ne nous est parvenu qu’avant-hier après-midi à dix-sept heures, et encore, par voie électronique. Nous sommes chanceux d’avoir une excellente rapporteure générale, qui a comblé le vide laissé par le Gouvernement en présentant un rapport de qualité, mais malheureusement très incomplet, elle l’a elle-même admis. Cette opération vérité ne traite que la moitié de la vérité.

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L’autre moitié, monsieur le secrétaire d’État, consisterait à admettre les artifices comptables auxquels vous vous livrez pour maintenir l’objectif de réduction du déficit public à moins de 3 % en 2017, malgré la très forte augmentation des dépenses publiques.

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Il ne s’agit pas d’artifices comptables mais de la réalité. Le président de la commission des finances qualifiant la comptabilité nationale d’« artifices comptables », bravo !

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Je vous poserai donc quelques questions afin de vous aider à parvenir à la transparence que vous devez à notre assemblée.

D’abord, vous gagez ce dérapage des dépenses par une nouvelle opération CICE, comme en 2013.

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Cette mesure remplacera la dernière tranche du pacte de responsabilité et de solidarité, qui, je le rappelle, consistait à supprimer complètement la C3S – la contribution sociale de solidarité des sociétés – et à diminuer fortement l’impôt sur les sociétés de toutes les entreprises, ce qui aurait coûté environ 5 milliards d’euros en 2017. Porter le CICE à 7 %, ô miracle ! ne coûte plus que 800 millions d’euros, soit une économie de 4 milliards. Mais alors, monsieur le secrétaire d’État, vous reniez complètement votre engagement d’améliorer la compétitivité de nos entreprises de taille intermédiaires, nos ETI, et de nos grandes entreprises,…

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Vous n’avez jamais rien fait de tel pour les entreprises !

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Quelles analyses, quelles études vous ont subitement fait changer d’avis ? Oubliée, la récente promesse présidentielle de transformer le CICE en baisse directe de charges sociales !

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Et, pour que le compte soit bon, on nous colle une petite louche supplémentaire de recettes du STDR, c’est tellement facile.

Même si, pour moi, c’est une conviction, je vous pose la question, monsieur le secrétaire d’État : les calculs comptables, pour ne pas dire politiciens, ne l’ont-ils pas emporté sur l’intérêt général ? Pouvez-vous d’ailleurs nous indiquer quel est le montant de la charge que vous repousserez à 2018 et aux années suivantes ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le CICE entraîne déjà un ressaut de 6 milliards d’euros en coupes budgétaires pour 2017, et cette charge va s’accroître. Mais quelles charges renvoyez-vous au-delà de 2017, en conséquence de décisions de dépenses comme l’augmentation du point d’indice de la fonction publique, l’extension de la garantie jeunes, le maintien de la prime à l’embauche dans les PME ou la prolongation du sur-amortissement ? À quoi sert-il, monsieur le secrétaire d’État, d’élaborer une loi de programmation des finances publiques si son premier objectif, pour la dernière année de la législature, est de transférer les dépenses sur les exercices ultérieurs ?

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Ne pensez-vous pas qu’il conviendrait de compléter notre loi organique relative aux lois de finances, l’excellente LOLF adoptée en 2001, afin de limiter les reports de dépenses sur les exercices ultérieurs ?

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je termine, madame la présidente, en vous remerciant de votre mansuétude. Que le président de la commission des finances dispose d’un temps de parole de cinq minutes dans le débat d’orientation budgétaire…

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Il est effectivement scandaleux que le président de la commission et moi n’ayons que cinq minutes chacun pour nous exprimer…

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En effet, et vous y participez chaque mardi matin, monsieur le président.

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L’héritage de 2017 sera terrible, chers collègues. Le projet de loi de finances initial pour 2017, dont nous débattrons à l’automne, sera le texte de tous les dangers, et nous devrons tous être très vigilants. Quant à celui de 2018, il sera truffé de mines budgétaires.

Ma dernière question pourra donc être entendue comme un conseil, monsieur le secrétaire d’État : qui faudra-t-il choisir pour réaliser, à l’été 2017, l’indispensable audit qu’exigeront des finances publiques minées par les contorsions comptables, les sous-budgétisations et les surestimations de recettes ?…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

N’importe quoi !

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…faudra-t-il appeler la Cour des comptes, que vous appréciez tant ? faudra-t-il mettre en place une commission spéciale, voire une troïka à la grecque ? La question est posée.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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La parole est à Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, après avoir débattu, lundi, du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2015, nous débattons ce matin des orientations des finances publiques pour les prochains exercices.

Ce débat se déroule alors que les objectifs en matière de finances publiques pour 2015 ont été atteints, chers collègues de l’opposition :…

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…diminution du déficit public en deçà de ce qui avait été voté, légère baisse des prélèvements obligatoires et stabilisation des dépenses publiques inédite dans notre histoire, madame Dalloz. Oui, mesdames et messieurs les députés de l’opposition, les objectifs en matière de gestion des finances publiques ont bel et bien été atteints, ce qui met un terme à la dérive des finances publiques, constante depuis de nombreuses années.

L’objectif, pour les années 2016 et 2017, consiste à poursuivre cette amélioration tout en activant plus encore les leviers de soutien à la croissance économique. Ces leviers sont pluriels ; pour que la croissance économique devienne solide, ils doivent tous être au vert.

Dans sa dernière note de conjoncture, l’INSEE, L’Institut national de la statistique et des études économiques, confirme la reprise de la croissance économique en 2015, avec 1,2 % – après 0,7 % en 2014 – et table sur 1,6 % pour 2016.

Il relève toutefois un déficit de convergence de quelques facteurs qui seraient susceptibles d’accélérer cette reprise. À conjoncture externe inchangée, l’économie française, en 2016 et 2017, est confrontée au challenge suivant : activer ses facteurs internes de création de richesse, au premier rang desquels l’investissement.

Je salue, à cet égard, les efforts initiés en 2015 et poursuivis en 2016 par les entreprises. Grâce au CICE et au pacte de responsabilité et de solidarité, entre autres, elles ont réussi à reconstituer leurs marges : en 2016, selon les prévisions de l’INSEE, celles-ci devraient atteindre 32,3 % de leur valeur ajoutée et elles devraient investir 12 milliards d’euros de plus qu’en 2015.

Je ne pratiquerai par la langue de bois : l’investissement des ménages et l’investissement public demeurent insuffisants, alors que ces deux axes sont cruciaux pour affermir notre croissance.

Aussi, je salue les mesures annoncées ces derniers jours par le Président de la République et le Gouvernement selon lesquelles le fonds de soutien à l’investissement local sera maintenu et même porté à 1,2 milliard d’euros en 2017, ce qui renforcera les orientations d’ores et déjà mises en oeuvre depuis 2012. Les administrateurs de la commission des finances, que je remercie, ont procédé à un recensement exhaustif des subventions à l’investissement versées par l’État, tant aux communes qu’aux EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale : depuis 2012, les communes et les EPCI de soixante-seize départements de France ont vu ces subventions à l’investissement en euros sonnants et trébuchants augmenter, monsieur le président de la commission. Le fonds de soutien à l’investissement local, opérationnel depuis cette année, renforcera encore leur effet.

Je salue également l’annonce du Président de la République selon laquelle une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu pour les classes moyennes est envisagée ; leurs investissements aussi s’en trouveront renforcés.

Revenons-en à présent aux objectifs en matière de finances publiques stricto sensu.

Tout d’abord, monsieur le secrétaire d’État, je me permets de déplorer l’envoi tardif par le Gouvernement du rapport préparatoire à ce débat d’orientation des finances publiques ; nous ne l’avons en effet reçu que mardi après-midi, en pleine réunion de la commission des finances.

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Comme l’a rappelé le secrétaire d’État, le Gouvernement maintient l’objectif de réduction du déficit public à 2,7 % du PIB en 2017, conformément à nos engagements européens. Cette perspective, retenue par le Gouvernement, se fonde notamment sur une réorientation, en faveur des PME, des dernières mesures du pacte de responsabilité et de solidarité. La dernière tranche, d’un montant de 5 milliards d’euros, prendra la forme d’une baisse du taux de l’impôt sur les sociétés versé par les PME, d’une augmentation du taux du CICE et d’une prolongation jusqu’au 31 décembre 2017 du sur-amortissement de 40 % des investissements productifs.

Parallèlement – le secrétaire d’État l’a également rappelé –, la maîtrise continue des dépenses publiques demeure le levier essentiel pour assurer nos objectifs en matière de solde budgétaire.

Il n’en demeure pas moins que les crédits de l’État seront relevés, en 2017, de 5,6 milliards d’euros par rapport à ce qui était planifié dans le programme de stabilité. Par ailleurs, les collectivités locales bénéficieront, en 2017, d’une baisse de la diminution de leur dotations de 1,2 milliard d’euros par rapport à ce qui était initialement prévu. La somme des deux aboutit à 6,8 milliards d’euros de dépenses nouvelles. Celles-ci seront intégralement financées par un décalage des mesures en faveur des entreprises à hauteur de 4,2 milliards d’euros, un surcroît de rendement de la lutte contre la fraude à hauteur de 1,4 milliard d’euros, une baisse du coût des contentieux fiscaux à hauteur de 700 millions d’euros et une réduction de la charge de la dette à hauteur de 500 millions d’euros.

En conclusion, je rappellerai le dilemme auquel est confrontée notre économie. Un redressement des finances publiques est nécessaire. Ne pas y procéder, comme certains, sur les bancs de la droite, le recommandent, induirait une perte de confiance de la part de nos partenaires et des investisseurs qui financent notre dette. Néanmoins, il faut y procéder à un rythme équilibré, pour préserver la croissance, qui a repris en 2014 et en 2015, et doit poursuivre sur cette voie en 2016. Le Gouvernement propose cette voie médiane, préservant les moteurs de la croissance économique et de la reprise, en particulier l’investissement, qui, je crois, sera le grand sujet des années 2016 et 2017. Je salue les orientations allant dans ce sens retenues par le Gouvernement.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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En matière de temps de parole, la rapporteure générale bénéficie d’une tolérance refusée à au président de la commission…

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous voilà donc réunis pour ce quatrième et dernier débat d’orientation des finances publiques de la législature.

Je commencerai par évoquer les propos, en forme d’aveu rétrospectif, tenus l’autre jour par Éric Woerth en commission, qui m’ont un peu stupéfié : quand il affirme que débattre de l’orientation des finances publiques à la veille de l’élection présidentielle n’a aucun sens, même si je n’étais pas député en juin 2011, cela me semble illustrer l’état d’esprit de la droite en 2011, à la veille de l’élection présidentielle, et surtout constituer une grave erreur. En réalité, le débat qui nous anime aujourd’hui a du sens ; c’est un débat important, que nous devons aborder par des questions simples.

Tout d’abord, d’où venons-nous ? Je sais que la droite de cet hémicycle n’aime pas que nous nous posions cette question mais je vous rappelle, mes chers collègues, que vous avez un passé, et par conséquent un passif.

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Monsieur le président de la commission, votre intervention de ce matin, comme celle que vous avez faite en commission, m’a stupéfié. Pendant les dix années durant lesquels vous avez été rapporteur général du budget, la dette publique a augmenté de 1 000 milliards : vous êtes donc responsable, voire coupable, d’une hausse de la dette de 100 milliards par an. Avoir un tel passif devrait conduire à faire preuve de modestie plutôt que de donner des leçons en matière de finances publiques.

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Posons-nous donc trois questions simples : d’où venons-nous ? où en sommes-nous ? où voulons-nous et où devons-nous aller ? Nous devons remettre nos choix en perspective dans le temps – dans le temps long, aurait dit Michel Rocard, à qui nous rendrons hommage tout à l’heure aux Invalides –, pour pouvoir faire sens et, à la veille de 2017, les envisager au regard du projet de société que nous formons pour le pays.

Les orientations et les priorités politiques du Gouvernement sont partagées par le groupe socialiste, écologiste et républicain, monsieur el secrétaire d’État. Ce sont des choix politiques forts, que nous assumerons, que nous expliquerons. Ce sont des choix d’avenir, des choix d’espoir.

Comme je m’y attendais, Gilles Carrez nous a offert le discours habituel de la droite, un vrai festival : dérapage de la dépense publique, promesses non tenues, cadeaux préélectoraux, chèques en bois pour l’avenir. Ce sont des paroles d’experts.

Nous savons ce que diront, ici ou là, les commentateurs, apôtres de l’ajustement budgétaire pour l’ajustement budgétaire, des économies pour les économies, de la rigueur pour la rigueur, de l’austérité pour l’austérité, comme une vis sans fin : ils nous accuseront de faire preuve d’un laxisme forcené et de vouloir reporter, si ce n’est abandonner, tout objectif de retour à l’équilibre des finances publiques.

En vérité, il n’en est rien, comme en atteste la présentation des orientations par Christian Eckert. Que se passera-t-il en 2017 ? Le déficit marquera un recul significatif de 0,6 point de PIB. L’effort structurel sera donc important : au moins 0,5 point. Les prélèvements obligatoires baisseront. L’effort d’économie sera poursuivi sur les secteurs non prioritaires.

Bien sûr, dans ces orientations, les priorités politiques d’avenir sont affirmées, les exigences du présent sont prises en compte, ce qui amène, au bout de quatre années durant lesquels la dépense de l’État a baissé de 8 milliards si l’on ne tient pas compte de la charge de la dette ni des pensions et de 9,4 milliards dans le cas contraire, à une progression du budget de l’État de 3 milliards, soit 0,7 %.

M. le président de la commission des finances prétend que l’effort reposera sur les collectivités locales. Monsieur Carrez, les dépenses des collectivités locales progresseront-elles de 0,7 % en 2017 ? Elles progresseront bien davantage, vous le savez, ce qui signifie que l’État maîtrise mieux la progression de ses dépenses que les collectivités locales.

Ajoutons même, puisque nous sommes engagés dans une bataille de communication, que, contrairement à ce que vous affirmez, la loi de programmation des finances publiques que nous avons adoptée sera pleinement respectée, du fait de ces orientations. Bien évidemment, pour la Cour des comptes, seules comptent, au-delà de la loi organique, les orientations des pactes de stabilité et la discussion avec la Commission européenne. Il n’en demeure pas moins que les objectifs et orientations que nous avons arrêtées dans cet hémicycle seront respectés.

Remettons donc tout cela en perspective : d’où venons-nous ? où en sommes-nous ? où allons-nous ? J’y reviens, après le secrétaire d’État et la rapporteure générale.

En 2012, nous étions en pleine dérive budgétaire, la dette explosait, le chômage ne cessait de s’aggraver, les inégalités se creusaient, notre industrie perdait sa compétitivité et nous n’étions plus crédibles vis-à-vis de nos partenaires européens, à force de ne jamais tenir nos engagements, le déficit public volait allégrement vers les 5,5 % du PIB et le déficit structurel s’établissait à 4,8 %.

Vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État, nous avons fait des choix forts, difficiles, en matière de politique économique, industrielle, sociale, budgétaire, dans un champ de contraintes inconnu jusqu’alors. Vous avez eu raison, madame la rapporteure générale, de rappeler la situation paradoxale à laquelle nous avons dû faire face : alors que l’état de notre économie supposait de soutenir l’activité et la croissance, nous avons dû assurer le redressement des finances publiques en demandant un effort fiscal supplémentaire à nos concitoyens, aux entreprises, tout en maîtrisant la dépense. Nous l’avons fait avec un mix qui a suscité des critiques, à droite – mais je n’ai jamais vu la droite épargner une seule mesure d’économie venant de nous – comme à gauche. Quoi qu’il en soit, nous avons eu le courage de prendre des mesures pas toujours populaires, pas toujours bien comprises ; aujourd’hui que les résultats sont là, le temps de l’explication est venu.

Je le répète encore, monsieur le président de la commission des finances, messieurs les députés de droite…

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Absolument, chère collègue ! Mesdames et messieurs les députés de droite,…

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…ces mesures, que nous avons prises depuis 2012, y compris celles contenues par le projet de loi travail, dont nous venons de débattre, vous n’aviez jamais voulu les prendre pendant dix ans. Et bien souvent, lors de nos discussions hors de l’hémicycle, vous reconnaissez que nous avons osé prendre des mesures que vous n’aviez pas osé prendre.

Où en sommes-nous aujourd’hui ? Je vous renvoie au débat de lundi, qui était relatif au règlement du budget de 2015 : le déficit, nominal comme structurel, a été constamment réduit depuis 2012 ; la dette a été stabilisée ; la dépense de l’État est, en valeur, inférieure de 8 milliards d’euros à celle de 2012 ; le déficit de la protection sociale a été divisé par trois, sans reculs sociaux et même, au contraire, avec une amélioration des prestations ; la croissance est de retour ; les créations d’emplois sont toujours plus nombreuses ; la compétitivité de nos entreprises est restaurée ; l’investissement redémarre ; la situation du commerce extérieur s’améliore.

Parallèlement, nous avons affirmé des priorités politiques que vous n’avez cessé de combattre, dans le domaine de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche, des solidarités, et même, pour répondre aux exigences de l’heure, de la police et de la gendarmerie, en revenant sur vos mesures inconséquentes de baisses d’emplois.

Et nous avons répondu à ces exigences de l’heure tout en engageant la baisse des prélèvements obligatoires. Monsieur le président Carrez, vous prétendez que, du fait de l’accroissement du CICE, nous ne tenons pas nos engagements. Mais vous savez fort bien que pas un Gouvernement avant nous n’avait baissé de 41 milliards les charges et impôts sur les entreprises pour leur permettre de retrouver leur compétitivité. Vous savez bien, au contraire, que vous nous avez laissé les affaires après avoir augmenté les impôts des entreprises de 15 milliards, augmentation que nous avons complètement effacée.

Où voulons-nous et où devons-nous aller ? Nous avons trois exigences fortes : soutenir la croissance et l’emploi pour préparer l’avenir ; préserver et conforter la cohésion sociale pour rassembler nos concitoyens plutôt que les opposer et les diviser, comme nous en menacent déjà les programmes des différents candidats aux primaires des Républicains ; poursuivre le redressement de nos finances publiques, conformément à nos engagements.

Oui, monsieur le secrétaire d’État, notre premier objectif politique est bien de maintenir le déficit public sous 3 % du PIB en 2017, afin de tenir nos engagements européens, en présentant, dans le projet de loi de finances initiale, un déficit maximal de 2,7 %. C’est notre choix et c’est le bon choix.

Oui, notre deuxième priorité est de poursuivre la baisse des prélèvements obligatoires sur les entreprises et les ménages, de mettre en oeuvre l’intégralité du pacte de responsabilité et de solidarité, de choisir les mesures les plus efficaces, dans le contexte actuel. Vos propositions, monsieur le secrétaire d’État, qu’il s’agisse de la baisse de l’impôt sur les sociétés pour les PME, de la poursuite de la prime à l’embauche, de la prolongation du sur-amortissement, du renforcement du CICE, de la baisse des prélèvements obligatoires, sont de belles mesures. D’ailleurs, s’agissant de ce dernier point, je suis stupéfait que la droite, qui dénonçait les hausses d’impôts, parle de cadeaux préélectoraux quand nous les baissons. Il faut choisir. Il est normal, dès lors que nous tenons la trajectoire de déficit et le rythme d’ajustement que nous avons choisis, de restituer les fruits des efforts ; cela fait partie de la pédagogie.

Dans ce cadre, avec un déficit nominal à 2,7 %, nous pourrons baisser les prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises et les ménages, financer des priorités d’avenir, des priorités politiques claires. Vous les avez énoncées, monsieur le secrétaire d’État : l’éducation, l’enseignement supérieur et la recherche, la défense et la sécurité, l’emploi et la cohésion sociale. Elles sont claires et incontestables.

Au fond, nous comprenons que tout le monde, dans un débat d’orientation budgétaire, veuille interpeller le Président de la République, le Premier ministre, le Gouvernement, à propos de ses choix de redressement. Je crois au contraire, monsieur le président Carrez, que c’est la droite qui se retrouve interpellée par ces orientations : c’est à vous de nous présenter vos propositions, par rapport à ces choix clairs et assumés.

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Contesterez-vous les efforts annoncés par le Gouvernement dans les domaines de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche, madame Dalloz, après ce que vous avez dit en commission des finances concernant le décret d’avance ? Contesterez-vous les mesures en faveur de l’emploi ? Contesterez-vous les mesures en faveur de la défense ? Contesterez-vous le recrutement de policiers et de gendarmes ainsi que de personnels dans le secteur de la justice ? Contesterez-vous ces augmentations de dépenses ? Si oui, cela constituera une clarification extrêmement utile à la veille de 2017. En revanche, si vous ne les contestez pas, vous devrez nous dire comment vous les auriez financées, en plus des baisses d’impôts que vous promettez.

Quand nous parlons de réduire les impôts des classes moyennes, monsieur le président Carrez, vous nous accusez de faire des cadeaux pré-électoraux. Mais comment qualifiez-vous la suppression de l’ISF, que vous annoncez ? Chacun sait à quelle catégorie sociale elle s’adresserait. Si cela, ce n’est pas un cadeau électoral !

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C’est sûrement une mesure de justice sociale !

Sourires

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Voilà, ça doit être ça.

En réalité, par ce débat d’orientation des finances publiques, nous structurons le débat de 2017, qui portera sur nos bilans respectifs, nos orientations et notre projet de société. Ces choix, monsieur le secrétaire d’État, s’insèrent bien dans une action cohérente, inscrite dans le temps et, contrairement à ce que l’on entend souvent, clairement annoncée en 2012, lors de la dernière élection présidentielle, par le candidat François Hollande : faire des efforts, redresser le pays puis, sur cette base, redistribuer les fruits. Vos orientations sont ambitieuses, certes relativement utopiques pour ce qui concerne quelques politiques publiques, mais pour l’essentiel empreintes de réalisme. Le vieux rocardien que je suis ne peux que s’y retrouver et les soutenir, avec le groupe socialiste, écologiste et républicain.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, chers collègues, un débat d’orientation des finances publiques, à l’approche d’une année électorale, est évidemment un exercice particulier, délicat. Le Gouvernement a l’obligation de prévoir mais aussi, assez traditionnellement, la tentation de ruser. Mais, si ce rendez-vous n’est plus l’occasion de démontrer un certain sens de l’État, autant le supprimer du calendrier de nos débats.

Cet exercice exige du sérieux ; nous vous en faisons bien volontiers crédit, monsieur le secrétaire d’État.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

C’est gentil !

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Nous doutons davantage que le Gouvernement et la majorité y soient aptes, ce qui nous a été annoncé à l’occasion de ce débat le prouve.

De fait, le Gouvernement ne tient pas ses engagements ; il le reconnaît d’ailleurs, car arrive un moment où le principe de réalité s’impose. Les 50 milliards d’économies, totem dénoncé par le président de la commission, ont été mille fois évoqués par Michel Sapin, alors même que vos équations budgétaires changeaient. Mais il vous faut bien finir par reconnaître qu’il n’y a pas de miracle en matière budgétaire et que ces 50 milliards ne sont pas au rendez-vous – la Cour des comptes elle-même a constaté récemment que 6 milliards manquaient. Vous y renoncez, c’est une forme d’aveu ; c’est aussi une forme d’honnêteté.

Vous renoncez à des choix budgétaires, économiques et sociaux majeurs. La « barémisation » du CICE était un engagement fort, la reconnaissance que le CICE n’était pas parfait. Même si ce dispositif n’a pas été inutile – personne, ici, ne peut dire le contraire –, il était temps de le transformer en une mesure beaucoup plus structurante pour le marché du travail et la compétitivité de notre économie. Cette « barémisation » aurait été une mesure compliquée à mettre en oeuvre – j’y reviendrai – mais courageuse, monsieur le secrétaire d’État. Elle exigeait des arbitrages : comment « barémiser » alors que les charges sociales sur les bas salaires sont faibles ? sur quel champ de salaire agir ? J’attendais ce débat car il aurait pu avoir de l’allure. Je trouvais cela très courageux, à l’approche des élections. Malheureusement, vous y avez renoncé. Quant à la suppression de la C3S, je doute que les entreprises puissent vous croire demain, alors que le recul succède aussi rapidement à l’annonce de la mesure.

Hélas ! monsieur le secrétaire d’État, compte tenu de ce que vous nous proposez, la France n’est pas crédible à Bruxelles. Quand bien même nos finances publiques ont connu quelques progrès sur certains points, ceux-ci ont été bien en deçà de ce qu’exige la situation de la France, bien moindre que dans les autres pays de l’Union européenne, la comparaison le démontre.

Un programme de stabilité a été débattu et envoyé à nos partenaires. Vous nous l’avez présenté avec beaucoup de conviction, insistant sur sa cohérence. Mais à peine deux mois plus tard, il est modifié, dans des proportions importantes. On a bien entendu, au fil des discussions budgétaires, que le Gouvernement pouvait, pour justifier de tels changements, invoquer des circonstances exceptionnelles, des changements majeurs dans le climat du monde – sécurité, évolution de la situation financière. Mais, que je sache, aucun événement exceptionnel ou majeur survenu ces deux derniers mois ne peut justifier un tel changement de pied de votre part, ces 6 milliards de crédits supplémentaires pour l’État.

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Vous continuez de défendre l’objectif des 3 % mais c’est compliqué quand la majorité de votre majorité n’y croit pas et ne le veut pas. La réalité est que vous ne tiendrez pas cet objectif, la Cour des comptes l’a elle-même souligné.

Enfin, et c’est un élément de sa crédibilité, la France ne défend pas ses intérêts à Bruxelles. Notre contribution au budget de l’Union pourrait être bien mieux négociée, j’en suis convaincu. Par ailleurs, je regrette le manque de prévision du Gouvernement, même si ce n’est pas un enjeu pour 2017, ainsi que les propos curieux de Michel Sapin, déniant toute conséquence budgétaire au Brexit. Tout cela n’est pas sérieux.

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Vous le regrettez en votre for intérieur, monsieur le secrétaire d’État, la dépense publique n’est pas tenue : un surcroît de 6 milliards en 2016, bien plus de 10 milliards en 2017, sans compter les reports au-delà.

Nous avons parlé de la dette publique il y a quelques jours : la loi de règlement, sorte de juge de paix, a démontré, s’agissant de 2015, qu’elle a augmenté, malgré votre politique d’émission plus qu’audacieuse. Et le Gouvernement lui-même reconnaît qu’elle augmentera de 0,4 point de PIB en 2016.

Vous menez une politique marquée par la facilité. Certes, nombre d’entre nous l’ont dit et je le répète, il serait totalement irréaliste de considérer qu’il ne fallait pas débloquer, à un moment, le point d’indice de la fonction publique. Mais, en contrepartie, cela exigeait des mesures structurelles, des mesures d’évolution, d’organisation et de temps de travail.

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Le courage vous a manqué, comme lors des arbitrages sur le régime des intermittents du spectacle. Et, s’agissant des mesures pour les jeunes, que personne ne pourrait exclure a priori de prendre, vous avez puisé dans l’arsenal le plus usé et le moins efficace que l’on puisse imaginer. De la même manière, vous avez déformé les investissements d’avenir. Enfin, vous évoquez, pour 2017, les recettes supplémentaires attendues de la lutte contre la fraude et des déclarations rectificatives. Bien sûr, ce complément de recettes est bienvenu et il s’agit, à n’en pas douter, d’une question de justice, mais prenez garde, monsieur le secrétaire d’État, à ne pas en abuser lorsque vous écrivez vos équations budgétaires.

Bien des problèmes restent en suspens et ils sont graves, voilà la réalité. Je vous l’accorde, vous n’êtes pas toujours aidé par le débat public, qui prend parfois des détours quelque peu démagogiques.

Il y a un vrai débat, dans notre pays, sur la part que les collectivités locales doivent prendre dans l’effort de réduction de la dépense publique. La manière de faire du Gouvernement, brutale…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Non !

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Non plus !

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…a provoqué un certain nombre de réactions, en conséquence de quoi vous avez décidé de réduire d’1 milliard l’effort demandé. Cela dit, si nous voulons être cohérents avec notre volonté de réduire les dépenses publiques, nous ne pouvons constamment crier haro dès qu’il s’agit de réduire les dépenses locales. Dans ce domaine, le débat n’a pas toujours été le plus sain.

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Acceptez toutefois, monsieur le secrétaire d’État, de faire preuve de davantage de finesse, de justice et de justesse.

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C’est, en particulier, l’enjeu de la péréquation.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Vous soutenez donc la réforme de la dotation globale de fonctionnement ?

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Quels sont les dangers courus par le marché de l’emploi ? Ce n’est pas en maintenant les pratiques actuelles, qui concentrent l’effort sur les bas salaires, dans une logique de « smicardisation » et de tiers-mondisation de l’économie française, que l’on prépare l’avenir. La difficulté à « barémiser » le CICE, compte tenu du niveau des charges sociales, montre bien que quelque chose ne fonctionne pas dans la géométrie d’ensemble du système. J’ai du reste trouvé très judicieuses et très honnêtes les remarques de Valérie Rabault à propos des charges sociales pesant sur les salaires au niveau du SMIC.

Au passage, chers collègues, cela souligne combien les propos de Manuel Valls sur la suspension de la directive relative aux travailleurs détachés sont inconséquents. D’abord, il s’agit de gérer sérieusement le pays, monsieur le secrétaire d’État. Aussi conviendrait-il que le Gouvernement nous éclaire sur la portée profonde d’une suspension de directive : s’agit-il d’un propos d’estrade ou cela peut-il avoir des conséquences juridiques ? Ensuite, comme l’a rappelé Valérie Rabault, la réalité veut qu’un travailleur détaché, aujourd’hui, ne coûte pas moins cher qu’un salarié français au SMIC. Je ne dis cela ni pour m’en réjouir ni pour le regretter ; c’est un constat objectif, qui a le mérite de souligner rudement la gravité de nos problèmes structurels. Si le problème ne se situe pas exclusivement ou principalement au niveau de la rémunération, il est dans la structure du marché du travail. La loi El Khomri, évidemment, ne faisait pas le compte et n’était pas à la hauteur de ce débat.

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Enfin, monsieur le secrétaire d’État, je suis arrivé un peu en retard – je vous prie de m’en excuser – mais il me semble que vous n’avez pas été très disert sur la retenue à la source. Je croyais que celle-ci constituait un élément majeur des perspectives budgétaires de 2017. Où est-elle passée ? Je suis contre, le groupe Les Républicains est contre et si, par malheur, cette réforme était votée dans la loi de finances pour 2017, nous sommes nombreux à nous engager, et je m’y engage, à la remettre en cause après l’alternance que nous espérons l’an prochain.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

On verra.

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Mais enfin, les dangers de la retenue à la source sont là. Pouvez-vous nous dire quelques mots des difficultés que vous rencontrez, semble-t-il, devant le Conseil d’État ? Quand le texte sortira-t-il ? Non pas que l’on puisse imaginer en débattre en commission au mois de juillet !

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Il sortira aujourd’hui.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Je m’y apprête.

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En vérité, la seule manière de justifier la retenue à la source serait de l’intégrer dans une réforme fiscale beaucoup plus vaste, allant au-delà de la logique d’anesthésie de l’impôt qui est la vôtre, au profit d’une logique de simplicité, de transparence et d’efficacité. C’est le projet de flat tax, que je porte avec plus d’une vingtaine de nos collègues.

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Ce nombre est appelé à croître, chère collègue.

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Au fond, depuis le début de ce mandat, le Gouvernement a refusé le chemin des réformes structurelles et choisi celui de l’impôt, parfois en nuançant son approche, en s’adaptant, lorsque le matraquage était trop violent pour l’économie et par égard envers les citoyens. Mais la réalité est là : le compte n’y est pas en termes de réformes structurelles et la dose, s’agissant de l’impôt, est insupportable. D’autres, à d’autres périodes, avaient choisi de baisser l’impôt sans réformer suffisamment l’État. Votre voie est une impasse, l’autre n’était pas une bonne solution.

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Je suis sûr que vous avez compris, monsieur le président de la commission, et peut-être même sommes-nous d’accord.

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Nul besoin de faire preuve d’une clairvoyance extraordinaire. La nécessité et l’urgence commandent simplement, pour notre pays, de mener à la fois des réformes structurelles et des baisses d’impôts, menées à un rythme cohérent, avec l’audace, le courage et l’esprit d’innovation que cela exige. Réformes structurelles et baisses d’impôts n’auront pas été la marque de votre mandat. Les orientations de 2017 ne les rattrapent pas mais nous les voulons vraiment.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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J’invite les orateurs suivants à ne pas dépasser de 20 % leur temps de parole, comme l’ont fait les précédents.

La parole est à M. Charles de Courson.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, chers collègues, François Hollande aura-t-il amélioré la situation des finances publiques de notre pays au terme de son mandat ? Ce débat devrait nous éclairer sur cette question puisque le Gouvernement, après plus de quatre années au pouvoir, présente aujourd’hui ses orientations en matière de finances publiques pour la dernière année du quinquennat.

Même si ceux qui y participent ne sont qu’une poignée, ce débat, rendez-vous essentiel de la procédure budgétaire, devrait être un moment démocratique fort, au cours duquel le Gouvernement associerait pleinement les parlementaires, de la majorité et de l’opposition, aux décisions économiques sur le point d’être mises en oeuvre dans notre pays. Il n’en est toutefois rien. Je déplore à cet égard, monsieur le secrétaire d’État, que le Gouvernement, au mépris de la LOLF, nous ait transmis le tome I du rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques il y a seulement deux jours, soit cinq jours après le délai constitutionnel – fin juin – et même après la réunion de la commission des finances. Quant au tome II, personnellement, je ne l’ai obtenu qu’hier à vingt heures seize. Vous avouerez que ce manque de respect à l’égard du Parlement est inacceptable. Pour couronner le tout, le rapport de la rapporteure générale n’est toujours pas disponible à la distribution.

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Mes chers collègues, où en sommes-nous, quatre ans après les engagements relatifs aux finances publiques pris par le candidat François Hollande ?

Parmi ses soixante engagements, je rappelle qu’il avait promis une croissance de 1,7 % en 2013, de 2 % en 2014 puis de 2,25 % en 2015, en 2016 et en 2017. La croissance a finalement été limitée à 0,4 % en 2013, à 0,6 % en 2014, à 1,3 % en 2015, à 1,5 % en 2016, et, pour 2017, la prévision s’établit à 1,5 %, ce qui n’est pas déraisonnable en l’état actuel des choses. Ainsi, sur le quinquennat, le taux cumulé de croissance sera de 5,3 %, contre 11 % dans ses promesses, soit moitié moins. Il reste d’ailleurs très inférieur aux taux de croissance que connaissent nos partenaires européens.

François Hollande avait également promis que la dette serait ramenée de 88,7 à 80,2 % du PIB entre 2012 et 2017. En fait, sur cette période, elle est passée de 89,6 à 96 % en 2017, augmentant de 6,4 points au lieu de baisser de 8,5 points. C’est presque du Brel : « T’as voulu voir la hausse et on a vu la baisse, T’as voulu voir la baisse et on a vu la hausse ».

Sourires.

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Mais 15 points d’écart ne représentent jamais que 330 milliards d’euros…

D’après les prévisions gouvernementales, la dette culminera à 96,2 % du PIB à la fin de cette année. Le Gouvernement n’aura donc pas réussi à éviter de décrocher en fin de mandature la médaille que je lui avais promise : la dette publique à 100 % du PIB.

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En effet, grâce aux émissions sur souches anciennes, qui donnent l’illusion d’une moindre hausse de la dette, il ne fait que reporter ce fardeau sur les années suivantes. Le montant cumulé des primes d’émission de 2012 à 2015 a atteint 45,3 milliards. Si l’on extrapole des ordres de grandeur pour 2016 et 2017, on atteindra 80 à 90 milliards, soit plus de 4 points de PIB. Je vous félicite donc une nouvelle fois, monsieur le secrétaire d’État, car vous avez, de fait, déjà dépassé les 100 %.

Le candidat François Hollande avait enfin promis – accrochez-vous bien, mes chers collègues – que le déficit public serait ramené à 3 % dès 2013 et à 0 % en 2017. En réalité, d’après vos propres prévisions, on en sera à 2,7 % de déficit en 2017, soit 60 milliards d’écart par rapport à vos promesses. Et le taux sera encore de 3,3 % en 2016, plaçant la France en queue de peloton puisque seuls quatre pays de l’Union européenne conservent un déficit effectif plus dégradé que le nôtre.

À ce sujet, je me suis livré à un petit calcul consistant à additionner les montants des déficits constatés de 2013 à 2015 et ceux des montants évalués pour 2016 et 2017 afin de comparer la somme totale aux engagements de François Hollande. Le résultat est le suivant : 17,6 points de PIB de déficit cumulé sur les cinq ans, contre 7,7 points si l’on s’en tient aux engagements. C’est plus du double.

Si le déficit de la Sécurité sociale recule légèrement en 2015, principalement d’ailleurs grâce à la réforme des retraites effectuée par l’ancienne majorité, celui de l’État – même si cela ne vous fait pas plaisir de l’entendre – est stable en 2015 : il n’a pas reculé. Je sais que cela vous gêne, mais la Cour des comptes réévalue le PIA – programme d’investissements d’avenir – pour tenir compte, comme tous les gens de bon sens sont d’accord pour le faire, de la dépense effective réalisée pour ce programme et non pas des sorties de crédits dont une bonne partie revient dans la trésorerie de l’État.

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Elle formule la même remarque au sujet du MES – mécanisme européen de stabilité –, qui avait perturbé le calcul du déficit en 2014.

En réalité, la modeste réduction du déficit en 2015 repose à 70 % sur les collectivités locales. Vous menez à leur égard une politique de Shadok. La réduction excessive de leurs dotations – 10 % en 2015, 10 % en 2016 et 6 % ou 6,5 % en 2017 –, loin de contribuer au redressement de nos comptes publics, conduit au contraire à une chute dramatique de leurs investissements, avec des conséquences néfastes sur l’emploi. Et vous n’avez ensuite d’autre choix que de compenser ce mouvement par un fonds de soutien à l’investissement de 0,8 milliard en 2016, destiné à faire face à une chute des investissements des collectivités locales de l’ordre de 4,8 milliards en 2015.

Quant aux 2,7 % promis par le Gouvernement pour 2017, notre rapporteure générale indique qu’il faudrait abaisser le déficit d’environ 15,9 milliards d’euros sur les années 2016 et 2017 pour que l’objectif soit atteint. Ni la Commission européenne ni la Cour des comptes ne jugent un tel miracle possible, cette dernière soulignant même qu’« aucune indication n’est donnée sur les réformes à mettre en oeuvre pour l’atteindre ».

Un mot sur les dépenses fiscales. Le candidat François Hollande avait promis de les réduire de 29 milliards, c’est-à-dire de 40 % puisqu’elles s’élevaient à 70,8 milliards en 2012. En fait, elles atteindront 83,9 milliards en 2016, ou, si l’on retire le CICE, 71,9 milliards tout de même. Là encore, les promesses n’ont pas été tenues.

François Fillon l’avait dit : l’État français est techniquement en faillite, puisque sa situation nette est négative d’environ 1 100 milliards d’euros – 1 600 milliards de dette pour 500 milliards d’actif, pour faire simple. Comme je n’ai plus beaucoup de temps de parole, je vais donc aborder tout de suite la question des économies.

Où en sommes-nous des 50 milliards d’économies annoncés ?

Tout d’abord, vous n’avez cessé de décaler l’effort vers la fin du quinquennat. En 2015, seulement un gros tiers des économies promises pour l’État a été réalisé : 3,3 milliards d’après la Cour des comptes, contre les 8,4 milliards que vous aviez annoncés. Quant aux économies faites sur les collectivités territoriales, je me tue à répéter qu’elles ne constituent pas une économie au niveau de la dépense publique consolidée, car cela dépend de la façon dont les collectivités territoriales réagissent à la baisse de 3,6 milliards de leur dotation.

Certes, on assiste à un début de freinage des dépenses de fonctionnement, mais les collectivités territoriales ont augmenté les impôts et massivement diminué les investissements. Cette politique est donc tout le contraire d’une stratégie d’avenir.

De plus, les 3,2 milliards d’économies chaque année sur les dépenses d’assurance maladie sont fictifs, puisqu’ils sont calculés par rapport à un tendanciel d’augmentation des dépenses qui remonte à plus de cinq ans. Il ne s’agit plus que d’une variation annuelle.

Bref, ces 50 milliards d’économies sont une plaisanterie.

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Je vous ai démontré que pas plus d’un tiers n’a été réalisé.

Comme il me reste un peu plus d’une minute seulement, je terminerai mon propos en vous informant, monsieur le secrétaire d’État, que vous êtes désormais médaille d’argent de la dépense publique en Europe, juste derrière le Danemark. Mais toutes les dépenses nouvelles annoncées pour 2016, dont le poids s’amplifiera nettement en 2017 et les années suivantes, vous permettront sans doute de hisser la France sur la dernière marche du podium.

Vous faites ainsi peser sur vos successeurs non seulement vos cadeaux électoraux – depuis plusieurs mois en effet, vous ne cessez de faire des chèques sans provision –, mais également vos réformes inabouties, puisque la réforme de la DGF et le prélèvement à la source n’entreront en vigueur qu’en 2018. Vous donnez vraiment l’impression d’être en fin de cycle, reportant tout sur vos successeurs.

Mais il est une autre promesse non tenue : la promesse de pause fiscale, qui me permet aujourd’hui de vous décerner la médaille d’or européenne des prélèvements obligatoires puisqu’en 2016, la France, avec ses 44,5 % de prélèvements obligatoires par rapport au PIB, dépasse désormais le Danemark et la Finlande.

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Je vous remettrai tout à l’heure cette médaille que je vous avais promise.

Alors que nos voisins se sont engagés dans une politique de baisse des prélèvements obligatoires, vous avez emprunté le chemin inverse jusqu’en 2015, et ce ne sont pas les maigres baisses d’impôts, notamment sur les ménages modestes, décidées dans l’urgence pour calmer la révolte fiscale de nos concitoyens, qui permettront d’annuler ces hausses massives.

L’année 2017 s’annonce donc comme la preuve ultime que le quinquennat de François Hollande aura bien été celui des illusions perdues.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Vous voudrez bien m’excuser de ne pas avoir de médaille à décerner, monsieur le secrétaire d’État, même si j’ai des choses à dire. Mes collègues me pardonneront de ne pas céder à la tentation des bons mots et des outrances, c’est-à-dire des insignifiances puisque, selon le mot de M. de Talleyrand, « tout ce qui est excessif est insignifiant ». Talleyrand se disputait d’ailleurs avec le baron Louis, n’étant pas lui-même, c’est le moins qu’on puisse dire, un modèle de rigueur budgétaire !

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C’est le moins qu’on puisse dire, en effet !

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Je rappellerai à mes collègues de l’opposition un petit détail. Le montant de la dette contractée chaque année n’est que très marginalement la conséquence du déficit annuel : c’est principalement la conséquence du remboursement des emprunts qui ont été contractés bien avant, avec une maturité moyenne de six ou sept ans. Lorsque l’on emprunte une année, on finance marginalement le déficit de l’année et principalement le renouvellement des emprunts contractés six ou sept ans auparavant. C’est incontestable, aussi devriez-vous utiliser cet argument avec prudence.

Au-delà des interprétations de la presse, des commentaires divers et variés, il ressort tout de même des faits et des chiffres que la France connaît, depuis quelques années, un redressement de ses finances publiques tout à fait exceptionnel en raison d’un effort que l’on n’avait pas enregistré, sans doute, depuis plusieurs décennies. Il ne s’agit pas de faire la comparaison avec la précédente législature, qui a été confrontée, c’est incontestable, à la récession mondiale, alors que la présente législature a connu une période de stagnation. Relativisons les choses de tous côtés.

On constate jusqu’à présent un respect incontestable du cadre de la loi de programmation des finances publiques pour 2014-2019, en particulier si l’on observe le tableau de comparaison des trajectoires qui figure à la page 39 du rapport préparatoire. Si je comprends bien ce rapport, on prévoit de s’écarter de l’objectif en 2018-2019, même si le déficit continue d’être en réduction régulière.

Plus importants peut-être sont les programmes qui, année après année, tendent à améliorer l’efficience de nos finances publiques. On peut en donner deux exemples. Ainsi, le montant des redressements fiscaux est en augmentation, avec pas moins de 21 milliards d’euros en 2015, soit une augmentation de 10 % en un an, sans parler de la facilité avec laquelle aujourd’hui un contribuable peut satisfaire à ses obligations déclaratives et au paiement de sa contribution en quelques clics informatiques. Le deuxième exemple concerne la politique immobilière de l’État, qui correspond aujourd’hui à ce que l’on peut attendre d’une optimisation du patrimoine public.

Face à ces résultats globalement tangibles, les risques d’écarts, qui restent pour le moment hypothétiques mais qui incontestablement existent, sont tout de même marginaux. Qu’il s’agisse de mesures nouvelles ou des conséquences d’une sous-budgétisation, ils ne portent que sur quelques milliards d’euros, c’est-à-dire quelques dixièmes de point du PIB.

Si l’on regarde plus finement les choses, on se rend compte que ces risques, ces écarts, ces dépassements, peuvent être regroupés sous trois catégories.

D’abord, des allégements de charges devraient conduire logiquement, dès l’année n+1, à des surplus d’activité donc de recettes.

Ensuite, des dépenses incontournables entraînées par un consensus politique fort, par exemple pour les interventions militaires, alors que le resserrement budgétaire joint à l’augmentation des missions et de leurs coûts conduisait à une impasse, et, dans un premier temps et pour quelques-uns des exercices précédents, à une présentation acrobatique, pour ne pas dire insincère, de notre budget de la défense nationale. Aujourd’hui, ce budget est ce qu’il est et correspond à un consensus sur à peu près tous les bancs de cette assemblée.

Enfin, des remises à niveau qui ne pouvaient tout de même pas être différées éternellement même si le rattrapage reste modeste et raisonnable, comme pour la variation du point d’indice de la fonction publique dont M. Mariton lui-même a reconnu qu’il était au fond inéluctable.

Reste que nous vivons dans une immense incertitude quant au contexte économique et financier mondial.

En premier lieu, le risque de crise financière généralisée est de plus en plus prégnant. Il provient, un peu partout dans le monde, de la bulle immobilière, et on le voit ces jours-ci à Londres. Il existe aussi sur les marchés obligataires à haut rendement – le marché des junk bonds –, qui sont en train de « turbuler ». Il existe également sur des marchés financiers d’autant plus volatils qu’ils sont très largement surévalués. Il tient enfin aux menaces multiples qui pèsent sur une des premières économies de la planète, l’économie chinoise. En effet, on observe les indices d’un début de récession, ou au moins de ralentissement spectaculaire de l’activité économique en Chine – de même, d’ailleurs, qu’aux États-Unis. Bien loin des chiffres officiels, qui se situent vers 6 % de croissance, l’évolution du PIB chinois est évaluée objectivement entre 0 % et 3 % par les observateurs spécialisés.

Il existe également une incertitude majeure sur les taux d’intérêt et la politique monétaire. Les banquiers centraux savent que la liquidité qu’ils ont apportée au monde de la finance engendre des bulles spéculatives, mais hésitent malgré cela à lancer un mouvement inverse qui, à l’évidence, peut provoquer une nouvelle crise financière. Voilà bientôt plus d’un an que la banque centrale américaine tient en haleine tous les analystes de la plomberie financière, parlant toujours de refermer le robinet – on a même forgé le mot tapering à cette occasion – sans l’avoir fait jusqu’à présent. D’ailleurs, le simple fait d’approcher la main du robinet crée de telles turbulences qu’on y renonce aussitôt.

Compte tenu de leur âge moyen, je suppose que les banquiers centraux dans cette situation, qui sont des économistes de grand talent, se disent chaque jour : « Je ne changerai probablement rien à la politique monétaire, mais j’espère que Dieu fera que l’explosion de la bulle financière ne se produira pas avant mon départ à la retraite. »

On a beaucoup parlé de reprise, de lendemain de crise, de perspectives encourageantes. La réalité, c’est que la croissance mondiale reste atone et que les prévisions la concernant sont plutôt en diminution, avec comme indice ou, comme on voudra, comme conséquence, des prix de l’énergie plutôt bas, des prix de l’acier terriblement déprimés et une absence quasi générale d’inflation.

En conséquence, tout ce que commentateurs, analystes, Gouvernement, services de prévision disent et écrivent peut être remis en cause par des évolutions brutales dont la probabilité s’accroît à mesure que le temps passe.

Je voudrais pour conclure avouer mon incompréhension ancienne et toujours actuelle des politiques d’encadrement budgétaire dans un contexte d’expansion monétaire débridée. Nous raisonnons, dans un pays comme le nôtre – c’est d’ailleurs tout à fait légitime et le Gouvernement ne peut que s’y conformer –, sur des comparaisons de projection et de résultats qui, dans le pire des cas, montreront un écart de l’ordre de 10 milliards, c’est-à-dire de l’ordre d’un demi-point de PIB.

Pendant ce temps-là, dans la zone euro, dont le PIB global est de l’ordre de cinq fois celui de la France, les autorités monétaires injectent chaque année, par le biais de prêts gratuits sans cesse renouvelés, des montants qui correspondent peu ou prou à 5 % à 10 % du PIB, ce qui représente 500 à 1 000 milliards par an d’injections de liquidités monétaires.

Nous accordons une importance démesurée à un dérapage portant sur 0,5 % du PIB, et j’ai choisi une fourchette très large – ce n’est pas un dérapage mais un résultat moins bon que celui qui était prévu – et nous passons sous silence des injections de liquidités dix à vingt fois supérieures.

Sur le plan macro-économique, l’impact des deux types de mesures est quantitativement le même. Il s’agit, d’une manière ou d’une autre, de donner des moyens à l’économie. La grande différence est qualitative : le déficit budgétaire alimente plutôt l’économie réelle, via la dépense publique, les ménages, l’investissement ou tout ce que vous voudrez, tandis que l’injection monétaire de liquidités gonfle plutôt les bulles spéculatives et n’a jamais eu, à ce jour et dans aucun pays, même si cela peut changer, d’impact mesurable sur les économies réelles. Elle a sans doute évité une crise financière plus grave et évité le trou noir absolu que nous avons connu en 1929, mais elle n’a pas produit, c’est absolument certain, d’augmentation de la croissance de l’économie réelle.

Je redoute aujourd’hui que le déséquilibre vienne de l’excès spectaculaire des politiques monétaires plutôt que de modestes dérapages de budgets qui sont, finalement – et pour ce qui concerne la France –, rigoureusement tenus.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, après avoir clôturé, lundi dernier, les comptes de l’année 2015 et alors même que le budget de l’année 2016 est en cours d’exécution, nous abordons aujourd’hui un débat important qui concerne l’orientation des finances publiques pour 2017 et qui doit nous permettre de préparer sereinement l’examen, à la rentrée, du projet de loi de finances pour 2017.

Au préalable, je tiens à remercier Mme la rapporteure générale car elle travaille dans des conditions tout à fait délicates. En effet, une nouvelle fois, nous déplorons les conditions dans lesquelles se déroule ce débat.

Il convient ici de rappeler, comme cela a été fait en commission, que ce débat doit normalement se tenir sur la base du rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques que le Gouvernement remet au préalable au Parlement. Or ce rapport nous a été remis trop tardivement : nous avons eu moins de quarante-huit heures pour l’étudier. Dès lors, nous sommes aujourd’hui amenés à prendre part à un débat tronqué, qui ne permet pas de discuter de manière constructive. Nous le regrettons – je tenais à le souligner, car ce débat est essentiel.

En tout état de cause, l’actualité a mis en lumière les grandes options retenues par l’exécutif pour l’année 2017 à la suite de celles retenues précédemment. Vous venez en effet de souligner, monsieur le secrétaire d’État, les efforts que le Gouvernement a réalisés et qui, dites-vous, se retrouvent dans les chiffres. Vous avez également insisté sur les succès enregistrés – il y en a, sans aucun doute, mais ils ont été obtenus au prix de sacrifices répartis de façon trop inégalitaire et injuste.

Force est de constater que le Gouvernement entend maintenir le cap de la politique de l’offre, cette politique qui vise à réduire inconditionnellement la fiscalité des entreprises et dont on a bien du mal à voir les résultats tant sur l’activité que sur l’emploi, l’investissement, les inégalités et la prise en compte, pourtant essentielle, des enjeux environnementaux.

En annonçant coup sur coup une diminution de la fiscalité des artisans, la diminution de l’impôt sur les sociétés des PME et, surtout, une nouvelle augmentation du CICE, qui passerait ainsi de 6 % à 7 % de la masse salariale correspondant aux salaires inférieurs à deux fois et demie le SMIC, l’exécutif persiste et signe, ignorant une gestion saine et responsable de nos finances publiques que la situation appelle pourtant, ignorant également les véritables urgences auxquelles nous devons faire face et que j’évoquais précédemment.

On chiffre cette hausse du CICE à 4 milliards d’euros pendant quatre ans, qui viendront s’ajouter aux 21 milliards que coûte d’ores et déjà le dispositif. Ainsi, en rythme de croisière, le CICE coûtera à nos finances publiques la bagatelle de 25 milliards d’euros par an. En cinq ans, la majorité sera donc parvenue, de fait, à diviser par deux l’impôt sur les sociétés, puisque celui-ci rapportait, il y a encore quelques années, environ 50 milliards par an.

Ainsi, notre pays prend pleinement sa part dans la course mortifère au moins-disant social et fiscal qui est menée au sein de l’Union européenne. Le Royaume-Uni ne vient-il pas d’annoncer une baisse probable de son taux d’impôt sur les sociétés, qui pourrait passer de 20 % à 15 % ? Les effets de l’absence d’harmonisation fiscale et de la concurrence effrénée entre États au sein d’une zone économique intégrée sont là, devant nous.

De fait, nous assistons à l’érosion progressive des bases fiscales car, en plus de cette concurrence entre États, les cancers que sont la fraude et l’évasion fiscales nous plombent. Mais qui paie le prix fort de ces pratiques ? Ce sont bien évidemment ceux qui ont peu de moyens, ceux qui ont les services publics pour seule richesse, ce sont les TPE et les PME, qui paient plein pot, victimes de la capacité des grands groupes à transférer leurs bénéfices vers les boîtes aux lettres des paradis fiscaux ou à utiliser toutes les ficelles de l’optimisation fiscale que notre système, hélas, permet grandement.

Dès lors, mes chers collègues, soyons très clairs : l’Europe ne se fera que si elle parvient à dépasser ces fléaux. Telle doit être la priorité politique du moment.

En réalité, avec la réduction progressive de la contribution des entreprises au financement du pays et du bien commun, c’est toute l’architecture fiscale qui est aujourd’hui bouleversée.

Les effets du CICE sur l’économie et l’emploi nous laissent pour le moins songeurs, et c’est un euphémisme. En revanche, ils sont tout à fait sensibles sur les finances publiques : l’impôt sur les sociétés constitue désormais moins de 10 % des recettes fiscales de l’État. Et c’est la fiscalité des ménages, que ce soit la TVA ou l’impôt sur le revenu, qui compense cette diminution, ce qui pose des questions essentielles en termes de justice fiscale et sociale car on assiste à un transfert progressif de la contribution des entreprises au financement de l’État vers les ménages. Ainsi la TVA, qui est la fiscalité la plus injuste en ce qu’elle touche les riches et les précaires de la même manière, représente quasiment 50 % des produits fiscaux de l’État.

Dès lors, nous ne pouvons que déplorer l’enterrement de l’une des promesses de campagne de 2012, la grande réforme fiscale. Celle-ci, pourtant essentielle, est tombée aux oubliettes. Nous la revendiquons toujours.

Progressivité de l’impôt sur le revenu, fiscalité tournée vers l’avenir et l’emploi durable, révision intégrale des niches fiscales et autres crédits d’impôt inutiles et inefficaces, démontage progressif des barrières contre-productives en matière de lutte contre la fraude fiscale comme le « verrou de Bercy » ou la Commission des infractions fiscales : telles devraient être les autres priorités de cette fin de quinquennat.

Les inégalités sociales sont devenues insupportables.

Quand on connaît l’écart minime entre le niveau du SMIC et le seuil de pauvreté – à peine une centaine d’euros – les rémunérations perçues par certains prétendus « super-patrons » ne sont plus tolérables. Or notre fiscalité, cela a été prouvé, ne garantit pas la juste contribution des plus hauts revenus à la vie collective – le fameux 0,1 %. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui m’ont poussé à déposer une proposition de loi visant à encadrer « à la source », en quelque sorte, les rémunérations dans les grandes entreprises – proposition de loi qui visait bien sûr les grandes entreprises du CAC 40. Adoptée dans le cadre de notre niche parlementaire, les dispositions qu’elle contenait ont été retoquées, une par une, lors de la discussion du projet de loi sur la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique, dit « Sapin 2 ».

Le choix a été fait de déréguler le marché du travail, quitte à utiliser la violence du 49.3 et à envisager l’interdiction d’une manifestation, plutôt que d’encadrer les rémunérations inacceptables de certains dirigeants d’entreprise.

Notons néanmoins que le Président de la République a fait preuve de lucidité en réduisant la diminution des moyens alloués par l’État aux collectivités. Après la fronde légitime des maires et des élus locaux, le Président de la République a en effet annoncé, début juin, que la réduction de la dotation globale de fonctionnement, fixée initialement à 3,6 milliards d’euros pour 2017, serait finalement deux fois moins importante. Cela témoigne de la prise de conscience par l’exécutif des effets néfastes des coupes opérées dans le budget des collectivités territoriales depuis trois ans afin de financer les cadeaux fiscaux accordés aux entreprises, et cela sans contrepartie.

À cet égard, le constat dressé par la Cour des comptes dans son dernier rapport est très clair : la réduction drastique des moyens alloués aux collectivités a conduit à mettre en berne l’investissement public local, en retrait de 9 % en 2014 et de 10 % en 2015, ce qui se traduit par le fléchissement de l’emploi et de l’activité et, plus globalement, participe de la politique déflationniste qui est menée et dont les méfaits sont très clairement sous-estimés.

Pour conclure, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur ce que certains d’entre nous appellent les « artifices comptables » qui conduisent à reporter l’impact budgétaire de certaines mesures sur un exercice ultérieur. Il en va ainsi de la hausse du CICE, qui se traduira dans les comptes de l’année 2018, ou encore de l’émission par l’Agence France Trésor de titres de dettes sur des souches anciennes ayant généré des primes d’émission, ce qui a eu pour effet de réduire facialement notre taux d’endettement.

Parlons de la dette, mes chers collègues, car c’est bien la mère des batailles. Comment affranchir notre pays et sa souveraineté de cette épée de Damoclès ? Comment regagner en liberté dans nos choix budgétaires ? Il est temps de prendre les mesures qui s’imposent. C’est pourquoi nous interviendrons dans le débat budgétaire de l’automne en faisant des propositions fortes, basées sur la qualité des travaux menés par la mission d’évaluation et de contrôle sur la transparence de la dette, qui a rendu ses travaux hier matin.

Plus globalement et comme à l’accoutumée, c’est dans un état d’esprit constructif que nous abordons les discussions budgétaires mais, une nouvelle fois, avec la conviction profonde qu’il nous faut faire preuve de courage politique et opérer ce changement de cap qu’appelle l’urgence sociale, économique et environnementale.

Nous proposerons donc de remettre la justice et la progressivité au coeur de notre système fiscal, afin que chacun contribue selon ses moyens, en proposant en particulier une nouvelle fiscalité locale qui assoie en partie l’effort collectif sur les actifs financiers des entreprises. Nous proposerons des mesures fortes pour qu’enfin soient mis derrière les barreaux ceux qui fraudent aujourd’hui impunément le fisc. Enfin, nous proposerons de mettre un terme à la politique de l’offre, qui paupérise les peuples.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, ce débat pourrait être un exercice formel, sans grandes surprises. Ce serait sans compter sur les habitudes qu’a prises le Président de la République au cours des derniers mois puisque chaque déclaration présidentielle nous apprend la création de nouvelles dépenses. Les journaux ont donc la primeur des promesses présidentielles qui, à n’en pas douter, auront un impact sur nos finances publiques.

Nous devons débattre de la future loi de finances et des priorités de l’État. Nous sommes soulagés, monsieur le secrétaire d’État, que vous n’ayez pas besoin de recourir au 49.3 à l’occasion de cet exercice. C’est une bonne nouvelle. Cela dit, nous débutons ce débat dans un flou totalement inacceptable. C’est d’ailleurs devenu une pratique coutumière pour le Gouvernement qui, une fois encore, méprise ouvertement le Parlement, c’est-à-dire les représentants du peuple français.

Selon le premier alinéa de l’article 48 de la LOLF, le Gouvernement est censé remettre un rapport au Parlement sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques. Quelle ne fut pas notre surprise lorsque nous avons découvert cette semaine, en commission des finances, que ce rapport n’avait pas été remis. Il a fallu attendre la fin de la réunion de la commission pour qu’il nous soit distribué. Cette situation est ubuesque. Vous bafouez ouvertement les droits du Parlement, monsieur le secrétaire d’État.

Ce débat pourrait se révéler insincère car le Président de la République annonce très régulièrement une nouvelle dépense, c’est-à-dire, disons-le clairement, un nouveau cadeau électoral. Voilà donc où nous en sommes !

Les nouvelles dépenses, pour le seul exercice 2016, représentent environ 6 milliards d’euros. On peut citer le plan d’urgence pour l’emploi, le plan en faveur de l’élevage, le dégel du point d’indice de la fonction publique. Je rappelle au passage, monsieur le secrétaire d’État, puisque vous critiquiez l’explosion des dépenses des collectivités territoriales, que le dégel du point d’indice de la fonction publique aura lui aussi un impact sur les finances des collectivités locales, que ce soient les départements, les régions, les communes ou les communautés de communes.

On peut également citer les mesures en faveur des jeunes, dont le « plan UNEF », qui s’élève à 400 millions d’euros, le dépassement de crédit pour les demandeurs d’asile, le fonds de soutien aux intermittents, ou encore l’échec des négociations dans le cadre de l’UNEDIC – et j’en passe.

D’autres mesures annoncées ne prendront effet qu’en 2017, voire en 2018 ou, pire encore, en 2019 : la hausse programmée des dépenses militaires, les mesures pour l’emploi, la modération de l’effort demandé aux communes et intercommunalités, mais aussi les mesures relatives à la masse salariale – au total, 10 milliards d’euros.

Lundi, lors de la discussion du projet de loi de règlement du budget, j’ai parlé de « tripatouillages ». J’ai le sentiment que vous n’avez pas apprécié ce terme, monsieur le secrétaire d’État, mais expliquez-moi en quoi ce que vous avez fait pour le CICE ne relève pas de tripatouillage, car il s’agit bel et bien de dépenses dont vous reportez le règlement.

Comprenons-nous bien : certaines de ces dépenses se justifient. Je ne les remets pas toutes en cause. Mais l’honnêteté voudrait que vous nous indiquiez comment vous les financez, c’est-à-dire quelles économies budgétaires vous allez réaliser pour les mettre en oeuvre.

Pourtant, là aussi, le Gouvernement dérape. Sur les 18,1 milliards d’euros que vous affirmez avoir économisés, la Cour des comptes n’en trouve que 12. Les économies réalisées par l’État sont évaluées à seulement 1,7 milliard pour 7,3 milliards programmés.

Vous allez ainsi faire peser vos cadeaux électoraux sur la prochaine majorité et le prochain gouvernement. Est-ce cela que l’on appelle la sincérité budgétaire ? Je n’en suis pas sûre. Pire encore : vous risquez l’avenir de notre pays pour assurer votre hypothétique réélection.

Les recettes n’y sont pas, même si nous pouvons nous accorder sur le taux de croissance, ce qui est plutôt une bonne nouvelle.

En revanche, divers chiffres circulent en matière de recettes, ce qui pose à nouveau la question de la sincérité. J’ai retenu qu’en 2016 nous perdrions 8,4 milliards d’euros de recettes, selon l’excellent rapport de notre rapporteure générale. Comment allez-vous financer cette perte, ainsi que les dépenses nouvelles ?

Monsieur le secrétaire d’État, au vu de tous ces éléments, vous comprendrez que les députés Les Républicains attendent pour le moins, au nom des principes de la sincérité et de l’annualisation, une loi de finances rectificative pour l’exercice 2016. Mais nous l’avons bien compris : l’enjeu de la présidentielle vous amène à renoncer à toutes les économies que vous aviez promises. Les fameux 50 milliards sont devenus un leurre.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Arrêtez !

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L’exercice d’autosatisfaction par lequel vous avez ouvert la séance ne trompe personne.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Achetez un boulier, madame Dalloz !

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, chers collègues, le prix de la Banque de Suède en sciences économiques, autrement appelé prix Nobel d’économie, existe depuis 1969. Il a couronné des études sur la monnaie, sur les échanges internationaux et même sur les théories du développement. Pas un seul ne concernait cette obsession de la classe politique française : le marché du travail. SMIC, RMI, RSA et autres acronymes sont d’abord et avant tout les petits satisfecit pour les ministres qui prétendent trouver des onguents miraculeux mais ne parviennent finalement qu’à réinventer la poudre de perlimpinpin pour défendre les intérêts acquis.

Le théâtre ridicule qui a réglé le débat sur la loi travail nous l’a parfaitement montré. Un mot d’ailleurs à ce sujet : j’ai entendu que, même dans les partis de l’opposition, le relèvement des seuils, le renouvellement de la représentativité syndicale ou encore la défiscalisation des heures supplémentaires posaient problème. Par souci de cohésion politique et pour prendre en compte le contexte, il est temps que les élus politiques suivent le mouvement de la population vers les libertés. Cessons donc d’être les copies apeurées d’une gauche désunie.

De nombreuses théories montrent les conséquences économiques du travail accompli dans les assemblées : le cycle électoral, l’instrumentalisation monétaire, l’accroissement des échanges par l’amélioration des facteurs de production. Aucune d’elles ne peut nous intéresser aujourd’hui, puisque l’absence de courage de la classe politique, depuis quarante ans, a mené la France vers l’étourdissement.

Nous ne disposons pas de marges budgétaires du fait du coût abyssal du grand remplacement et du traitement social du chômage. Nous n’avons aucune liberté monétaire puisqu’aucune partie de nos finances ne nous permet de négocier entre égaux à Francfort. Quant à la flexibilité de l’économie, elle est impossible, tant le matraquage fiscal a déconsidéré les services de l’État aux yeux des Français.

Nous en sommes à l’heure de l’État intrus, un État qui ne sait plus quel est son périmètre – situation politique inédite dont votre génération d’élus porte la responsabilité. Ce n’est pas tant que les administrations interviennent trop ou pas assez, mais, après le désordre imposé par l’idéologie du progrès et la matrice libérale-libertaire, l’État ne sait plus ce qu’il doit faire.

Nous avons donc des ministres qui rabaissent les libertés scolaires sans être présents en séance, des fonctionnaires projetés ministres qui dictent quels festivals sont ou non fréquentables, des ministres qui rejettent le Comité consultatif national d’éthique pour faire plaisir à des lobbies.

Ces mesures, contrairement à ce que pensent les hommes d’appareil, ont une incidence extrême sur la manière dont vous considérez l’économie et sur les orientations budgétaires. Un individu dépendant de l’État, des familles féodalisées, une nation ramenée aux discours idéologiques, et tout le cadre naturel de économie s’effondre. L’Europe sait pourtant cela depuis Aristote et la différence entre l’oikos et la chrématistique.

Le tome I du rapport sur l’orientation des finances publiques commence mal : « L’économie française a pris le chemin d’une reprise solide. » C’était bien la peine de confier à tous les ministres des éléments de langage pour minimiser les implications déjà infimes de la faible surprise – heureuse, certes – de la croissance en 2015 ! Ni les marges ni les investissements ni les réformes structurelles nécessaires ne sont mis en place pour que notre pays retrouve sa stature internationale et le chemin de la solvabilité.

Les 50 milliards d’économies pour les deux ans à venir sont introuvables, tout comme la volonté de mieux gérer les multiples strates administratives. Tout n’est qu’échec dans ce gouvernement : la loi croissance est sans cesse à fignoler, la loi NOTRe est inapplicable, le CICE ne trouve pas son application, et je vous épargne le résumé des conséquences du massacre de notre politique familiale.

Reste une consolation : il ne nous reste peut-être plus qu’un an à supporter une idéologie aussi bornée et un tel suicide économique.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, un débat d’orientation des finances publiques est fait pour apporter une vision claire de l’avenir, du moins pour l’année budgétaire à venir. Mais la vôtre est aussi claire qu’une prévision météorologique à un ou deux mois. Cela ne marche pas, surtout en période d’élection présidentielle – plus particulièrement celle-ci, et pas une autre, monsieur Lefebvre !

Le débat d’orientation est impossible. On s’en rend compte au fil du temps, tandis que nous égrenons les dépenses qui s’accumulent et sont plus dictées par le clientélisme et l’électoralisme que par le souci de l’intérêt général. En somme, le budget est construit pour l’élection présidentielle et non pour la France.

Monsieur le secrétaire d’État, où est passé votre sérieux budgétaire ?

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Oui ! Je pense que M. Eckert est réellement convaincu qu’il faut du sérieux budgétaire. Seulement, il n’est pas tout seul. D’autres ministres, malheureusement, décident des finances publiques. Il y a un Président de la République et un Premier ministre qui dépensent beaucoup.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

On sent le vécu !

Sourires.

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Et tout cela s’effectue non sur la seule base de ce qui est possible, c’est-à-dire sur une politique publique réformée, mais sur une politique publique de circonstance, une politique budgétaire conjoncturelle.

Faisons un bref tour d’horizon.

Le Gouvernement se félicite systématiquement de la baisse des déficits publics. Le moins qu’on puisse dire, c’est que hors période de crise, la performance est assez faible. En 2012, le déficit était de 4,8 % du PIB.

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Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

De 5,1 % !

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Je cite les chiffres les moins contestables. En 2015, il est de 3,6 %, soit une baisse de 1,2 point en quatre ans. Faites la moyenne vous-même ! Il ne s’agit pas là d’une performance héroïque ou historique. Votre vitesse est celle de l’escargot, non du pur-sang.

En outre, le déficit se réduit grâce à des conditions exceptionnelles. En effet, l’environnement général est meilleur.

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Des facteurs externes couvrent donc les faiblesses internes.

En ce qui concerne la dette publique, vous opérez quelques tours de passe-passe. On a beau nous expliquer que, techniquement, ça ne se passe tout à fait comme ça, le président de la commission l’a bien dit : vous avez tout fait pour éviter que le ratio atteigne les 100 % du PIB.

Vous y êtes parvenu. L’affaire des coupons est assez exceptionnelle !

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La situation budgétaire est également le fruit de la non-réduction du nombre de fonctionnaires, lequel aura même augmenté pendant le quinquennat. Que sont devenues vos promesses ?

Le Président de la République répète sans arrêt que la France va mieux. Comparativement, ce n’est pas le cas. Il suffit d’ailleurs pour s’en convaincre de se référer au rapport annuel de la Banque de France pour 2015 : « La France déçoit encore ». J’ajoute qu’une performance ne se lit jamais dans l’absolu ; elle est relative. Or la relativité ne va pas dans votre sens.

Pour 2017, vous prévoyez beaucoup de dépenses non financées et l’abandon des fameux 50 milliards d’économies – le président de la commission des finances l’a rappelé. Au détour du projet de loi de finances pour 2017, que nous découvrirons à l’automne, vous renoncerez à un objectif que vous vous étiez fixé vous-même, alors que le plafonnement des déficits publics à 2,7 % du PIB, que vous prévoyez toujours, comme par magie, est très incertain.

En réalité, vous allez dépenser 7 milliards de plus que prévu : vous aviez promis de réduire les dépenses de l’État de 3,5 milliards euros, alors qu’elles augmenteront presque de 3,5 milliards en 2017. Vous ne pouvez compenser cette augmentation, même en réduisant le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne. Voilà pourquoi vous recourez non à des artifices mais bien à un feu d’artifice comptable,

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

assez malin au demeurant.

Du reste, Bercy n’a pas d’autre choix, dès lors qu’il n’y a pas de solution pour agir sur le fond. Certains font de l’optimisation fiscale, ce que vous contestez, à juste titre ; d’autres, de l’optimisation comptable. C’est votre cas.

Les mesures concernant le CICE et la C3S sont dictées plus par l’envie de jouer sur le calendrier de décaissement que par une volonté économique, mesurée, évaluée, de gonfler le CICE et de renoncer à votre promesse sur la C3S.

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En réalité, ce sera au prochain gouvernement, donc peut-être à vous, peut-être à nous, de payer la facture. Ce n’est pas une bonne manière de faire.

Vous créez de l’instabilité économique. Le Président prévoit une baisse de l’impôt sur le revenu – peut-être, éventuellement, selon le niveau de la courbe, non du chômage mais de la croissance. En vérité, vous créez une incertitude, une instabilité perpétuelle. Or, vous le savez, la confiance, c’est aussi de la croissance.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, en guise de propos liminaire, j’évoquerai comme mes collègues les conditions de travail que la commission des finances a eu à connaître ces derniers temps. Est-il utile de rappeler que les finances de l’État sont contrôlées par le Parlement ? Or force est de constater que le Gouvernement ne nous a pas facilité la tâche.

Nous travaillons sur des données inexistantes – je pense à la page blanche en lieu et place de la partie consacrée au budget de l’État dans le rapport distribué mardi – ou sur des documents remis hors délai. Les rapports qui nous sont soumis sont le plus souvent incomplets et tardifs. Permettez-moi d’ores et déjà de douter de la solidité des données de ce débat d’orientation des finances publiques, tant j’ai la sensation qu’il a été préparé à la va-vite.

Ayant avant tout le souci de ne pas décevoir Dominique Lefebvre,…

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…je formulerai plusieurs commentaires pour conforter ses dires.

Le poids de la dette a continué à augmenter et se rapproche des 100 % du PIB, tandis que nos voisins ont su prendre les mesures nécessaires pour se désendetter et donner du souffle à leur économie.

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La question de la dette a pourtant son importance en raison de nombreux problèmes, dont le moindre n’est pas la transparence. Certes, les taux sont bas et la politique de la BCE pour contrer l’inflation ne changera pas la donne dans l’avenir proche. Pour autant, il est totalement déraisonnable de s’endetter davantage pour promettre toujours plus. A-t-on songé aux marges de manoeuvre contracycliques des politiques budgétaires et monétaires, qui permettraient de faire face aux effets négatifs du Brexit ?

Certes, ce scénario dégradé n’est pas certain, mais il n’en demeure pas moins que l’émergence d’un risque systémique existe, ce qui crée l’obligation de revoir la croissance à la baisse et donc de minimiser la contribution au désendettement.

Nul n’ignore que le léger regain de l’activité ces deux dernières années est essentiellement dû à des phénomènes exogènes. Dans ce contexte favorable, la France, contrairement à ses voisins, n’a pas engagé les réformes structurelles d’envergure qu’il aurait fallu.

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Aussi la reprise ne lui profite-t-elle que très timidement, ce qui est confirmé par la Banque de France, laquelle annonce que la croissance ne devrait augmenter que de façon limitée au cours des trois prochaines années : du mieux, mais très lentement. La demande intérieure devrait gagner en dynamisme, mais là aussi, la défiance des marchés peut entraîner un changement de comportement des ménages et des entreprises par rapport à leurs projets d’investissement et d’embauche.

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Quand bien même tous ces clignotants sont à l’orange, vous annoncez – sans complexe – le dérapage des dépenses publiques pour traduire l’ensemble des nouveaux choix politiques du Président de la République, qui sont autant de cadeaux pré-électoraux.

L’impact des mesures nouvelles annoncées par ce dernier s’élèverait à pas moins de quelque 6,5 milliards d’euros de dépenses supplémentaires. Vous avez pourtant affirmé dans votre programme de stabilité, adressé à Bruxelles il y a deux mois, la volonté implicite de contenir les dépenses. De surcroît, vous annonciez la main sur le coeur que toutes les dépenses nouvelles devaient être compensées par autant d’économies. De la parole aux actes, il y a de la marge.

Ainsi, la masse salariale de l’État devrait augmenter de 1 %, une première depuis 2009. Premier constat : l’augmentation de cette masse n’est pas détaillée. II s’agit certainement du recrutement de nouveaux fonctionnaires, qui aura des conséquences pendant les quarante années à venir.

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Plus de fonctionnaires pour les impératifs régaliens, oui. Mais cet accroissement aurait dû s’accompagner d’un non-renouvellement par ailleurs afin que le solde soit nul.

À cela s’ajoute le dégel du point d’indice. Or l’augmentation du traitement des fonctionnaires a souvent un effet d’entraînement sur les salaires du secteur privé. Le CICE absorbera-t-il ce surcoût ? N’aurait-il pas été plus judicieux d’éviter les trappes à bas salaires par une politique généralisée de baisse de charges ?

Outre les nouvelles dépenses affichées, dont on ne mesure nullement l’impact à long terme, il y a lieu de constater une sous-budgétisation récurrente, notamment en matière de défense, sans compter la magie du hors bilan. Ainsi, le troisième volet du programme d’investissements d’avenir, ou PIA 3, qui a été présenté récemment, sera doté de plus de 10 milliards d’euros. Ce dispositif, à l’origine exceptionnel, tend à une lente pérennisation et permet une débudgétisation dans des domaines qui devraient être intégrés au budget de l’État et dont les contours flous ont plusieurs fois été dénoncés par la Cour des comptes.

Malgré tous ces efforts, les résultats ne sont pas à la hauteur des défis à relever. La France reste à la traîne en matière d’effort de recherche ; le crédit d’impôt recherche reste perfectible.

Après quatre années de matraquage fiscal, vous avez promis la stabilité. Or nous apprenons que vous envisagez la perception de 1 % supplémentaire sur la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, et sur la taxe foncière au profit des nouvelles régions, prétendument pour financer le développement économique des territoires, mission qui leur était pourtant déjà dévolue. Où est la logique ?

Quant aux recettes fiscales, elles sont d’ores et déjà jugées trop optimistes, ce qui est corroboré par la promesse d’une baisse supplémentaire d’impôt pour les ménages modestes. Il est pourtant évident que les contentieux fiscaux ne sont pas des vannes ouvertes.

Force est de constater que les arguments sonnants et trébuchants pour réduire les craintes et éteindre les incendies nous éloignent du sérieux budgétaire, et plus encore de votre objectif de 50 milliards d’économies sur la période 2015-2017. À vrai dire, l’élaboration du budget pour 2017 ne risque pas d’être une sinécure : bon courage !

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure générale, chers collègues, il est difficile de s’exprimer pour commenter un rapport du Gouvernement qui n’a pas été présenté en commission des finances – ou, pour être plus exacte, qui ne l’a été que partiellement. J’en profite pour saluer le travail de la rapporteure générale, réalisé dans des conditions inacceptables, comme d’ailleurs celui du président et des membres de la commission des finances.

Ce débat d’orientation des finances publiques me donne envie de fredonner la célèbre chanson de Ray Ventura Tout va très bien, Madame la Marquise. Mais ni le temps ni le lieu ne se prêtent à la gaudriole.

En valeur, les dépenses de l’État augmenteront de plus de 3 milliards d’euros en 2017, ainsi que vous l’avez indiqué, monsieur le secrétaire d’État. Le Gouvernement, sous l’impulsion de François Hollande, est en train d’engager des dépenses qui ne pourront être financées, si ce n’est virtuellement, ce qui correspond à l’optimisation comptable dénoncée par Éric Woerth. La hausse programmée des dépenses militaires, les mesures annoncées en début d’année en faveur de l’emploi et des jeunes, l’atténuation de l’effort demandé aux communes, et surtout l’augmentation de la masse salariale de l’État, devraient à elles seules entraîner 0,3 point de PIB de dépenses en plus en 2017, et encore davantage ensuite. Or nous ne sommes que début juillet 2016.

Alors qu’elles représentent près du quart de la dépense publique, les dépenses de rémunération des fonctionnaires sans contrepartie devraient augmenter l’année prochaine « à un rythme supérieur à celui enregistré sur l’ensemble de la période 2009-2015 ». Le premier président de la Cour des comptes a d’ailleurs lui aussi exprimé ses craintes sur la baisse du déficit en 2017.

Mais rassurons-nous, mes chers collègues : le Président de la République a trouvé une parade pour contrer ses inquiétudes. Il diffère une perte de recettes prévue pour 2017. Il a en effet annoncé que la dernière tranche du pacte de responsabilité serait modifiée.

Alors, le Gouvernement tiendra-t-il la trajectoire de réduction du déficit public qu’il s’est lui-même fixée, comme il le clame régulièrement ? Rien n’est moins sûr. En effet, la hausse annoncée du CICE n’aura d’impact sur le budget de l’État que dans deux ans, puisque ce crédit d’impôt ne sera remboursé qu’en 2018, sur la base des comptes de l’année précédente. François Hollande tente donc d’économiser – provisoirement – près de 3,5 milliards d’euros pour respecter son objectif de déficit en 2017 à 2,7 % du PIB. Si nous pouvons nous satisfaire de ce taux, il faut savoir ce qu’il représente. Est-il atteignable ?

Les magistrats chargés de contrôler les comptes publics tiennent des propos sans ambiguïté. Je les cite : « L’objectif de réduction à 2,7 % du déficit en 2017 a, sur la base des décisions connues aujourd’hui, un risque élevé de ne pas être atteint. »

Les résultats de la France sont attendus et seront scrutés par ses partenaires européens. Elle avait, en effet, depuis l’arrivée de François Hollande, bénéficié de deux délais pour revenir sous la barre fatidique des 3 %.

En termes d’équilibre budgétaire, il faudra aussi compter, à l’avenir, avec la baisse supplémentaire d’environ 2 milliards d’euros de l’impôt sur le revenu pour les ménages.

Ce sont autant de mesures qui fragilisent la trajectoire de redressement des comptes présentée par le Gouvernement en avril. François Hollande a assuré que la France devrait atteindre sa cible de déficit de 2,7 % en 2017 « si la croissance était ce que l’on pense pouvoir estimer aujourd’hui à 1,7 % l’année prochaine, si nous continuions nos efforts en matière de maîtrise de la dépense et si nous étions extrêmement vigilants sur l’exécution de notre budget ».

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J’allais le dire, monsieur de Courson ! Et cela alors que le Gouvernement parie encore officiellement sur un taux de croissance de 1,5 % en 2017.

Le Gouvernement ne se laisse par ailleurs aucune marge de manoeuvre pour les événements extérieurs qui pourraient avoir des conséquences sur la croissance, tel que le Brexit. Il renonce par ailleurs à son plan de 50 milliards d’euros sur trois ans.

Le Gouvernement aurait dû s’inspirer des propositions faites par les candidats à l’investiture suprême pour 2017 pour trouver comment réduire le déficit et baisser les dépenses, en d’autres termes redresser nos finances publiques pour retrouver notre souveraineté et mettre fin au matraquage fiscal. Car la France, qui fait figure d’exception en Europe pour le niveau de l’impôt, doit s’inscrire à nouveau dans une convergence fiscale européenne.

Il faut d’abord définir une politique pour pouvoir établir une prévision. Or la prévision est aujourd’hui aléatoire car la politique budgétaire est électoraliste.

En conclusion, je m’interroge. Vous avez parlé dans votre intervention, monsieur le secrétaire d’État, du bilan de vos prédécesseurs. Quel sera celui que vous laisserez prochainement à vos successeurs ? « Mais à part ça, Madame la Marquise, tout va très bien, tout va très bien. »

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Permettez-moi de répondre, comme l’exige la courtoisie, aux orateurs qui se sont exprimés sur un certain nombre de points. Pardon à ceux que je ne citerai pas, et merci à ceux qui ont soutenu les positions et les propositions que nous avons développées.

Commençons par l’idée qu’il y aurait des artifices comptables. M. Woerth l’a dit, M. le président de la commission aussi ; Mme Dalloz, avec sa modération habituelle, a même parlé de « tripatouillages ». Rappelons que c’est l’INSEE qui décide quand et comment les impôts et crédits d’impôt sont comptabilisés.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

En ce sens, nous appliquons strictement les règles de l’INSEE.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

On a tout de même parlé d’artifices comptables et de tripatouillages. Il me semble donc bon de rappeler, pour celles et ceux qui nous écoutent, que ce gouvernement – dont le Parlement contrôle l’action – applique strictement les règles comptables en vigueur en France et en Europe sur la méthode et les délais de comptabilisation des dépenses comme des recettes,…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

…si tant est qu’il faille le rappeler, monsieur le président de la commission.

Venons-en au deuxième point. L’un d’entre vous – M. Mariton, si je ne me trompe – nous a dit que nous avions présenté un programme de stabilité que nous changions complètement à peine deux mois plus tard. Non ! Qu’avons-nous changé ? Les indicateurs macroéconomiques – prévision de croissance, prévision d’inflation – n’ont pas varié. Nous avons conservé une prévision de 1,5 % de croissance et de 1 % d’inflation.

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Mais les dépenses de l’État ont changé !

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

La prévision de solde n’a pas changé. Oui, nous avons modifié – je vais y revenir – la ventilation entre un certain nombre de dépenses et de recettes. À quelle hauteur ? Certains parlent de 4 milliards d’euros environ, d’autres 6 milliards.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Sur 1 200 milliards de dépenses publiques, vous m’accorderez que ce n’est tout de même pas la révolution. Il n’y a d’ailleurs rien d’anormal à ce qu’un gouvernement puisse bouger quelques milliards d’euros dans le courant de l’année en fonction des événements auxquels il doit faire face.

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Quels sont les éléments qui ont bougé depuis deux mois ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Je vais y revenir, monsieur Mariton. Vous avez été parfaitement courtois, et plus modéré que d’habitude – en dépit des primaires qui se profilent –,…

Sourires

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

…permettez-moi donc de prendre le temps de vous répondre.

Il n’y a pas eu de changement radical, disais-je, loin de là. Le solde et les indicateurs macroéconomiques sont les mêmes. Nous avons intégré – j’y reviendrai – un certain nombre de modifications dans les dépenses et les recettes. Cela peut paraître beaucoup aux Français qui nous regardent, mais pour nous qui travaillons sur 1 200 milliards d’euros, c’est quasiment l’épaisseur du trait. J’y viens.

Il y a, nous dites-vous, de nouvelles dépenses annoncées chaque semaine qui sont autant de cadeaux électoraux et qui ne seraient pas financées.

C’est faux. Premièrement, ces dépenses sont parfaitement budgétées.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

C’est le cas des mesures qui concernent l’évolution du point d’indice, les schémas d’emplois – notamment dans la police et la justice – ou encore la jeunesse. Toutes ces mesures sont budgétées, monsieur le président de la commission. Vous semblez dire que nous avons annoncé des dépenses et que nous ne les aurions pas inscrites dans le budget. Mais c’est justement parce que nous les avons inscrites…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

…dans le budget pour 2017 – nous n’allons tout de même pas budgéter en 2016 des dépenses qui ne seront pas réalisées en 2016 – que les dépenses de l’État augmentent de 3,3 milliards d’euros,…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

…ce que nous assumons.

Oui, nous assumons un certain nombre de décisions qui nous conduisent à prévoir pour 2017, par rapport aux prévisions antérieures, environ 3,3 milliards de dépenses supplémentaires. Et vous nous dites que ce n’est pas financé ! Mais si ! Si vous le souhaitez, je peux répéter ce que j’ai dit à la tribune tout à l’heure.

Vous me confiiez en aparté tout à l’heure, monsieur le président de la commission, avoir rencontré hier la directricedu budget de l’Union européenne. Oui, nous assumons une baisse du budget de l’Union européenne qui permet à notre pays d’économiser 1,1 milliard d’euros. Ce n’est pas contesté, les crédits européens sont sous-consommés et le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne va diminuer de 1,1 milliard d’euros. Ce n’est pas du vent, ce n’est pas artificiel : c’est sûr !

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Mais c’est tous les ans que nous observons des évolutions du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne ! Et des budgets modificatifs de l’Union européenne, il y en a six ou sept par an. On enregistre tantôt une hausse, tantôt une baisse. Aujourd’hui, c’est une baisse.

On verra les conséquences du Brexit mais, la Grande-Bretagne étant un pays contributeur…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

…– de l’ordre, vous avez raison, de 8 milliards d’euros –, il faut probablement s’attendre, le jour où tout sera soldé, à une nouvelle baisse du budget européen ainsi que, sans doute, à des conséquences sur nos finances publiques. Mais que voulez-vous que j’intègre aujourd’hui, si ce n’est ce qui est certain, c’est-à-dire une baisse du prélèvement sur recettes au profit du budget européen ?

Les taux d’intérêt s’élèvent – je viens de le vérifier – à 0,16 %, alors que nos prévisions portaient sur un taux avoisinant les 2 %. Dès lors, est-il stupide de dire que nous avons aujourd’hui la quasi-certitude – même si une explosion peut se produire tous les jours – que, grâce à ces taux presque dix fois inférieurs à nos prévisions, nous aurons 500 millions d’euros de moins à rembourser sur la charge de la dette par rapport aux chiffres prévus au moment où les taux étaient aux alentours de 1 % ? Nous intégrons ces 500 millions à notre trajectoire budgétaire.

Aucun jugement ne nous a condamnés, à l’heure où je parle, s’agissant des contentieux européens sur les organismes de placement collectif en valeurs mobilières – les OPCVM – originaires d’outre-Atlantique. Nous n’aurons donc pas de paiement à effectuer, alors que nous provisionnons habituellement 1,75 milliard d’euros, chaque année, au titre de ces contentieux. Le Conseil d’État n’a pas encore rendu son jugement. Nous sommes sûrs de ne pas avoir à dépenser cette somme. Je n’ai pas parlé de l’origine des contentieux pour ne pas vous mettre mal à l’aise, monsieur le président Carrez.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Vous devez vous en souvenir. Pour ma part, j’ai bonne mémoire, vous étiez rapporteur général, et j’ai encore à l’esprit votre émotion. Quoi qu’il en soit, est-ce du tripatouillage, est-ce scandaleux que d’intégrer cette moindre dépense pour la mettre en regard de dépenses supplémentaires que nous avons lancées ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Je tiens à votre disposition le tableau d’équilibre des dépenses supplémentaires qui sont mises en regard soit des moindres dépenses – telles que la charge de la dette, les contentieux fiscaux – soit des recettes supplémentaires. Nous avions prévu de l’ordre de 500 millions d’euros de recettes en provenance du service de traitement des déclarations rectificatives, le STDR, au titre de la régularisation des comptes détenus à l’étranger. Nous recevons, chaque année, de l’ordre de 2,4 milliards de recettes. Des dossiers arrivent encore chaque semaine, et 30 000 affaires n’ont pas encore été traitées. Dès lors, est-ce du tripatouillage que de prévoir, pour 2017, un relèvement global de 1,4 milliard du produit de la lutte contre la fraude par rapport à nos prévisions, que je qualifierais de prudentes ?

Vous nous dites que certaines recettes ne sont pas pérennes. Revenons sur ce point, monsieur le président de la commission, car c’est une vraie question, qui alimente souvent nos discussions. Il est aussi des dépenses qui ne sont pas pérennes. Ainsi, le fait que le suramortissement ait été prolongé n’implique pas qu’il ne s’arrêtera pas. Il appartiendra…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

…à celles et ceux qui seront majoritaires dans cet hémicycle de décider de leur poursuite ou non. De même, la prime à l’embauche pour les PME, inscrite au budget du ministère du travail, d’un montant de 2 000 euros par embauche, a une durée déterminée : nous l’avons budgétée. Or, cela fait partie des dépenses supplémentaires que vous avez dénoncées, dont vous avez semblé dire qu’elles étaient inutiles. Cette mesure s’arrêtera pourtant à un moment donné. Parmi les dépenses que nous avons intégrées pour 2017 figurent donc aussi des dépenses non pérennes.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Je ne voudrais pas prolonger le débat à l’excès, compte tenu de la cérémonie à venir aux Invalides, mais je ne voudrais pas non plus donner l’impression de ne pas répondre à M. Mariton sur le prélèvement à la source. Le Conseil d’État se réunit, si je ne me trompe, cet après-midi pour examiner les projets que nous lui avons transmis à ce sujet. Il a déjà tenu des réunions de section, et doit se réunir cet après-midi, en assemblée générale, comme il est de coutume, me semble-t-il, le jeudi. Nous aurons son avis. Nous avons déjà, au vu de ce qui a été examiné en section, procédé à des saisines rectificatives sur quelques points, en toute transparence vis-à-vis du Conseil d’État. Il n’y a pas de problème majeur, que ce soit sur les crédits d’impôts, les réductions d’impôts ou l’année de transition.

Quelques sujets demeurent en discussion – au sujet desquels nous attendons l’avis du Conseil d’État en fin de journée –, dont la confidentialité s’agissant des personnes disposant de faibles revenus salariaux et de forts revenus secondaires et éventuellement, si je puis dire, extérieurs. Nous avons d’ailleurs proposé une solution de remplacement pour gommer cette difficulté. Quelques discussions ont également lieu sur le niveau des sanctions en cas de fausse déclaration ou de non-versement, mais, sans vouloir préjuger de l’avis de l’assemblée générale du Conseil d’État, il n’y a pas, à ma connaissance, à cet instant, de difficulté particulière en la matière.

Dès lors que nous aurons l’avis du Conseil d’État, comme je m’y étais engagé, probablement d’ici à quelques jours, une fois que nous aurons examiné et tiré les conséquences de ce qui pourrait être disjoint, nous vous transmettrons, aux alentours du 14 juillet, le projet de texte, de façon à ce que vous ayez le temps de l’examiner. Je le répète, il n’y a pas, à ma connaissance, de problème particulier. Il appartiendra à chacun de dire ce qu’il souhaite en faire : s’y opposer, le combattre ou le soutenir. Il me souvient que M. de Villepin et M. Breton avaient annoncé, en leur temps, pour l’année suivante, la mise en oeuvre de la retenue à la source.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

Chacun pourra méditer la chose.

Un dernier mot, s’agissant de la dette, du niveau de 100 % et des primes d’émission. Je suis en train d’examiner attentivement un document, long de 368 pages, sur les intentions d’un grand parti de l’opposition pour 2017. Il y est indiqué que ce parti propose de porter la dette à 100,5 % du PIB en 2018 ou 2019.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget

J’ai vu aussi le taux de réponse. Il est indiqué, à la fin de chaque chapitre, qui est favorable ou défavorable aux propositions formulées. On sera amené à en reparler.

Je veux donc bien recevoir toutes les médailles que vous voulez, monsieur de Courson, mais, en tout cas, certains revendiquent la médaille du dépassement des 100 %. Aujourd’hui, nous n’avons pas dépassé ce seuil d’endettement et ne prévoyons pas de le faire, ni à la fin de cette année ni l’année prochaine : c’est notre engagement, notre conviction et notre travail. Cela est vrai toutes choses égales par ailleurs, bien entendu, car on n’est jamais à l’abri d’un événement international d’ampleur. Comme le disait M. Giacobbi tout à l’heure, l’influence de l’environnement économique ou financier mondial sur nos questions budgétaires est probablement plus importante que les quelques milliards que nous déplaçons, même si cela reste évidemment significatif.

Je vous remercie, mesdames, messieurs les députés, de votre participation nombreuse.

Sourires.

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Le débat d’orientation des finances publiques est clos.

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Prochaine séance, lundi 11 juillet, à seize heures :

Discussion de la proposition de loi sur le stockage des déchets radioactifs ;

Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi organique relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats, ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature ;

Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de modernisation de la justice du XXIe siècle.

La séance est levée.

La séance est levée à onze heures quarante.

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly