Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cela fait près d’un an que ce projet de loi a été déposé par le Gouvernement. Voilà donc une année que dans cet hémicycle, nous discutons de mesures fortes auxquelles nous sommes profondément attachés, à commencer par la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs, instaurés par la majorité précédente, qui avait oublié qu’un enfant ne se juge pas de la même manière qu’un adulte.
J’insisterai sur l’esprit de ce texte et sur ce qu’il peut changer dans la vie quotidienne de nos concitoyens. Il y a les grandes affaires judiciaires qui agitent les médias, les affaires d’État qui font jurisprudence et touchent à l’essence même de notre société et à ce que la loi en fera demain. Et puis il y a la justice du quotidien, celle à laquelle nos concitoyens font appel parce que leurs droits sont entravés, parce que leur quotidien est perturbé, parce que leur situation individuelle nécessite la protection et la réparation de l’État. Il n’y a pas de hiérarchie à établir entre de grandes et de petites affaires. Seul existe le besoin d’adapter les procédures à la spécificité des litiges, le temps judiciaire à la nature des différends et de conforter les Français dans l’idée que la justice a su s’adapter à l’évolution de la société et à leurs attentes.
Après la disparition de Michel Rocard, il y a quelques jours, plusieurs personnalités politiques ont décrit sa méthode comme la volonté de concilier les valeurs avec le réel. C’est cette même volonté qui a animé Christiane Taubira dès son arrivée au Gouvernement dans les travaux qu’elle a engagés pour valoriser la justice citoyenne. Les valeurs, c’est évidemment la volonté d’aboutir à une justice plus efficace et plus accessible, de faire en sorte que toutes les Françaises et tous les Français soient égaux devant la justice et puissent obtenir protection et réparation rapidement.
Et puis il y a le réel parce que parler de justice, c’est aussi se préoccuper des injustices : des délais d’instruction souvent longs, les freins liés au fait que la justice est encore trop éloignée de certains de nos concitoyens en raison de leur méconnaissance de leurs droits ou de freins économiques qui restreignent leur capacité à être conseillés et orientés.
C’est pour modifier cette réalité que ce projet de loi, ambitieux par son appellation, l’est aussi par son contenu puisqu’il instaure une véritable justice de proximité. En février 2015, Christiane Taubira s’est rendue à la Maison de la justice et du droit de ma circonscription pour dialoguer avec les acteurs de terrain de la justice citoyenne. Elle a notamment rencontré à cette occasion des conciliateurs de justice et des médiateurs. Ces derniers, qui favorisent le règlement des litiges entre les citoyens en évitant une procédure judiciaire longue et souvent coûteuse, sont désormais au coeur du processus judiciaire, puisqu’ils sont devenus un préalable à la saisine du juge pour les petits litiges et la justice familiale.
Complétant ce dispositif, la création d’un service d’accueil unique du justiciable visant à favoriser l’accès au droit constitue une autre avancée majeure et tangible pour nos concitoyens.
Enfin, répondre aux attentes des Français, c’est aussi faire en sorte que la justice prenne en compte l’évolution des liens qui régissent les individus – vous l’avez précisé dans vos propos.
Si l’on ne peut que se réjouir de l’indépendance des magistrats, celle-ci n’est pas pour autant synonyme d’autonomie. Elle doit se traduire par une harmonisation des décisions rendues sur l’ensemble du territoire.
Le désengorgement des tribunaux par le transfert d’actes administratifs permettra un service plus rapide et surtout libérera le temps nécessaire aux acteurs de la justice, qui réalisent un travail considérable – et à qui je rends hommage –, pour qu’ils se concentrent sur leur coeur de mission.
Tel est le sens de ce texte, tel est le sens de la politique conduite par le Gouvernement : se soucier d’améliorer le quotidien de chacun, dans une logique de progrès et de protection.
Monsieur le garde des sceaux, vous avez dans votre intervention évoqué avec courage la pauvreté de la justice : j’espère que vous avez été entendu. Nous serons vigilants à vos côtés.