Amendement N° CF23 (Rejeté)

Lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière

Déposé le 11 juin 2013 par : M. Moreau, M. Le Ray, M. Fasquelle.

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Après l'alinéa 10 est inséré l'alinéa suivant :

Au premier alinéa de l'article L.228 du livre des procédures fiscales, les mots« Sous peine d'irrecevabilité » sont remplacés par les mots« Hors les cas de connexité avec d'autres infractions faisant l'objet d'une procédure judiciaire ou de découverte incidente dans le cadre d'une procédure pénale, sous peine d'irrecevabilité ».

Exposé sommaire :

A l'heure où l'on demande énormément d'efforts aux français en augmentant la pression fiscale, il convient aussi de chercher à améliorer significativement la lute contre la fraude, car c'est une voie plus juste que celle de l'augmentation des prélèvements obligatoires.

L'amendement propose en partie de « faire sauter le verrou de Bercy » en matière de poursuites pénales pour fraude fiscale.

Aujourd'hui, en matière de fraude fiscale, le ministère de la justice ne peut pas s'autosaisir ; il peut seulement être saisi par l'administration fiscale.

Évidemment, il en résulte une limitation extrêmement importante d'un principe essentiel du fonctionnement de la justice française, et notamment des pouvoirs dévolus au parquet, à savoir le principe d'opportunité des poursuites.

En principe, dès que le ministère public a connaissance de faits, quels qu'ils soient et de quelque manière qu'ils aient été portés à sa connaissance, il a la possibilité d'engager des poursuites. En matière de fraude fiscale, au contraire, l'engagement des poursuites est subordonné à l'existence d'une plainte préalable de l'administration fiscale, elle-même autorisée par la Commission des infractions fiscales, la CIF.

Cette succession de filtres en matière de poursuites pénales des fraudes fiscales obère le fonctionnement classique de la justice française. La situation actuelle n'est donc pas satisfaisante. En effet, moins de mille poursuites pénales sont déclenchées chaque année pour des faits de fraude fiscale. Ce modeste bilan est évidemment dû au blocage que le système actuel institue.

Par ailleurs, avec la création d'un délit de fraude fiscale en bande organisée, il apparaît indispensable de supprimer la règle du dépôt de plainte préalable qui avait été introduite en 1977 et reverser la fraude fiscale dans le « pot commun » des infractions en matière de règles d'action publique.

Il s'agit ici d'un amendement de composition entre la position de l'administration fiscale qui refuse de laisser la Justice travailler librement sur les fraudes fiscales et la nécessité de laisser l'autorité judiciaire pouvoir exercer ses compétences conformément au droit commun.

Cet amendement conserve le schéma actuel spécifique à la procédure pénale en matière de fraude fiscale (plainte préalable du ministre du budget obligatoire, sur avis conforme de la commission des infractions fiscales), tout en permettant à l'autorité judiciaire de se saisir plus rapidement des infractions de fraude fiscale qu'elle découvre de manière incidente dans le cadre des enquêtes judiciaires ouvertes pour d'autres motifs.

Cet amendement permet donc de concilier la volonté de l'administration fiscale de conserver la maîtrise des suites pénales à donner aux dossiers qu'elle instruit, et la possibilité pour l'autorité judiciaire de poursuivre les infractions qu'elle découvre de manière autonome en la matière.

Par exemple, la Justice pourrait alors poursuivre directement et rapidement pour fraude fiscale un trafiquant de stupéfiants sans devoir attendre de longues années les résultats d'un contrôle fiscal intervenant à la suite de la procédure pénale.

Cette suppression partielle du passage par la CIF et du dépôt de plainte préalable du ministre du budget apparaissent d'autant plus indispensables que le projet d'inéligibilité des élus condamnés pour fraude fiscale, est en cours d'adoption au parlement.

On ne peut en effet pas concevoir que les poursuites pour fraude fiscale, donc l'éventualité d'une condamnation et d'une inéligibilité, soient laissés à l'appréciation de l'autorité politique qui sera dès lors immanquablement accusée d'avoir là une arme évidente pour protéger ses amis et contraindre ses adversaires.

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