Amendement N° CL234 (Adopté)

Déontologie droits et obligations des fonctionnaires

Déposé le 30 septembre 2015 par : Mme Descamps-Crosnier.

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Après l'article 9, insérer les divisions, intitulés et articles suivants :

«  Chapitre IV
«  De la déontologie des membres des juridictions administratives et financières
«  Section 1
«  Dispositions relatives aux juridictions administratives

Article 9bis

Le chapitre Ier du titre III du livre Ier du code de justice administrative est ainsi modifié :

1° Les articles L. 131‑2 et L. 131‑3 sont ainsi rédigés :

«  Art. L. 131‑2. – Tout membre du Conseil d'État exerce ses fonctions en toute indépendance, dignité, impartialité, intégrité et probité, et se comporte de façon à prévenir tout doute légitime à cet égard.
«  Il s'abstient de tout acte ou comportement à caractère public incompatible avec la réserve que lui imposent ses fonctions.
«  Aucun membre du Conseil ne peut se prévaloir, à l'appui d'une activité politique, de son appartenance au Conseil d'État.
«  Art. L. 131‑3. – Tout membre du Conseil d'État respecte les principes déontologiques inhérents à l'exercice de ses fonctions.
«  Il veille à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d'intérêts dans lesquelles il se trouve ou pourrait se trouver.
«  Constitue un conflit d'intérêts toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif d'une fonction. » ;

2° Sont ajoutés des articles L. 131‑4 à L. 131‑7 ainsi rédigés :

«  Art. L. 131‑4. – Le collège de déontologie de la juridiction administrative est chargé d'apprécier le respect des principes déontologiques inhérents à l'exercice des fonctions des membres de la juridiction administrative. Ces principes déontologiques font l'objet d'une charte établie par le vice‑président du Conseil d'État, après avis du collège de déontologie. Cette charte énonce également les bonnes pratiques qui se déduisent de ces principes.
«  Le collège de déontologie est composé d'un membre du Conseil d'État élu par l'assemblée générale, d'un magistrat des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel élu par le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et d'une personnalité qualifiée nommée par le Président de la République en dehors des membres des juridictions administratives. Le Président de la République nomme le président du collège de déontologie.
«  La durée du mandat des membres du collège de déontologie est de trois ans, renouvelable une fois.
«  Le collège de déontologie est chargé :
«  1° De rendre des avis sur toute question déontologique concernant personnellement un membre de la juridiction administrative, sur saisine du membre concerné, du vice-président du Conseil d'État, des présidents de section du Conseil d'État, du secrétaire général du Conseil d'État, du président de la mission d'inspection des juridictions administratives, du président d'une cour administrative d'appel ou d'un tribunal administratif ou du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
«  2° D'émettre des recommandations de nature à éclairer les membres de la juridiction administrative sur l'application des principes déontologiques et des bonnes pratiques dans l'exercice de leurs activités ;
«  3° D'examiner les déclarations d'intérêts qui lui sont transmises dans les conditions prévues aux articles L. 131‑5 et L. 231‑4‑1.
«  Le collège de déontologie rend publics, sous forme anonyme, les avis et recommandations qu'il estime de nature à éclairer l'ensemble de la juridiction administrative.

 « Art. L. 131‑5. – I. – Dans les deux mois qui suivent son affectation, tout membre du Conseil d'État a un entretien déontologique avec le président dont il relève. Cet entretien a pour objet de prévenir tout conflit d'intérêts. À l'issue de cet entretien, il remet une déclaration d'intérêts.

«  Le président concerné transmet au collège de déontologie de la juridiction administrative la déclaration d'intérêts du membre du Conseil d'État. Il indique au collège de déontologie les déclarations des membres du Conseil d'État dont il ne s'estime pas en mesure d'apprécier s'ils se trouvent ou sont susceptibles de se trouver dans une situation de conflit d'intérêts.

 « II. – Le vice-président du Conseil d'État transmet au collège de déontologie de la juridiction administrative les déclarations d'intérêts des présidents de section du Conseil d'État. Dans les deux mois qui suivent sa prise de fonctions, il transmet sa déclaration d'intérêts au collège de déontologie.

 « III. – Le collège de déontologie apprécie si le membre du Conseil d'État dont la déclaration d'intérêts lui est transmise se trouve ou est susceptible de se trouver dans une situation de conflit d'intérêts.

«  Lorsque sa situation n'appelle pas d'observation, le collège de déontologie en informe le vice-président du Conseil d'État.
«  Lorsque le collège de déontologie constate que le membre du Conseil d'État se trouve ou est susceptible de se trouver dans une situation de conflit d'intérêts, il l'invite à mettre fin à cette situation ou à la prévenir et il en informe le vice-président du Conseil d'État.
«  Dans tous les cas, le collège de déontologie transmet les déclarations d'intérêts au vice-président du Conseil d'État.
«  IV. – La déclaration d'intérêts ne comporte aucune mention des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l'intéressé, hormis lorsque la révélation de ces opinions ou de ces activités résulte de la déclaration de fonctions ou de mandats exercés publiquement. Elle est versée au dossier de l'intéressé selon des modalités permettant d'en garantir la confidentialité.
«  Au cours de l'exercice des fonctions, toute modification substantielle des intérêts du membre du Conseil d'État donne lieu, dans un délai de deux mois, à une déclaration dans les mêmes formes. ».
«  Le modèle et le contenu de la déclaration d'intérêts, ses modalités de dépôt, de mise à jour et de conservation sont fixés par décret en Conseil d'État.
«  Art. L. 131‑6. – I. – Dans le cadre de ses fonctions juridictionnelles, sans préjudice des autres dispositions prévues au présent code en matière d'abstention, le membre du Conseil d'État qui estime se trouver dans une situation de conflit d'intérêts s'abstient de participer au jugement de l'affaire concernée. Son remplacement est assuré en application des règles de suppléance prévues au présent code.
«  Le président de la formation de jugement peut également, à son initiative, inviter un membre du Conseil d'État dont il estime, pour des raisons qu'il lui communique, qu'il se trouve dans une situation de conflit d'intérêts, à ne pas siéger. Le remplacement est assuré dans les conditions prévues au premier alinéa. En cas de doute, il est fait application des règles applicables aux décisions en matière de récusation.
«  II. – Dans le cadre de ses fonctions consultatives, le membre du Conseil d'État qui estime se trouver dans une situation de conflit d'intérêts s'abstient de participer aux délibérations.
«  Art. L. 131‑7. – Dans les deux mois qui suivent leur prise de fonctions, le vice-président du Conseil d'État, les présidents de section du Conseil d'État et les présidents de cour administrative d'appel, à peine de nullité de leur nomination, transmettent une déclaration de situation patrimoniale à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
«  Les II à V de l'article 25sexies et l'article 25septies A de la loi n° 83‑634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires sont applicables. »

Article 9ter

Le chapitre Ier du titre III du livre II du même code est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 231‑1, il est inséré un article L. 231‑1‑1 ainsi rédigé :

«  Art. L. 231‑1‑1. – Les magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel exercent leurs fonctions en toute indépendance, dignité, impartialité, intégrité et probité, et se comportent de façon à prévenir tout doute légitime à cet égard.
«  Ils s'abstiennent de tout acte ou comportement à caractère public incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions.
«  Ils ne peuvent se prévaloir, à l'appui d'une activité politique, de leur appartenance à la juridiction administrative. » ;

2° L'article L. 231‑4 est ainsi rédigé :

«  Art. L. 231‑4. – Les magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel respectent les principes déontologiques inhérents à l'exercice de leurs fonctions.
«  Ils veillent à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d'intérêts dans lesquelles ils se trouvent ou pourraient se trouver.
«  Constitue un conflit d'intérêts toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif d'une fonction. » ;

3° Après le même article L. 231‑4, sont insérés des articles L. 231‑4‑1 à L. 231‑4‑3 ainsi rédigés :

«  Art. L. 231‑4‑1. – I. – Dans les deux mois qui suivent son affectation, tout magistrat des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel a un entretien déontologique avec le chef de juridiction dont il relève. Cet entretien a pour objet de prévenir tout conflit d'intérêts. À l'issue de cet entretien, le magistrat remet une déclaration d'intérêts.
«  Le chef de juridiction transmet au collège de déontologie de la juridiction administrative les déclarations d'intérêts des magistrats dont il ne s'estime pas en mesure d'apprécier s'ils se trouvent ou sont susceptibles de se trouver dans une situation de conflit d'intérêts. Il transmet au vice-président du Conseil d'État les déclarations d'intérêts des autres magistrats.
«  II. – Dans les deux mois qui suivent leur prise de fonctions, les présidents de cour administrative d'appel et de tribunal administratif déclarent leurs intérêts auprès du président de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives, qui transmet leur déclaration au collège de déontologie.
«  III. – Le collège de déontologie apprécie si le magistrat dont la déclaration d'intérêts lui est transmise se trouve ou est susceptible de se trouver dans une situation de conflit d'intérêts.
«  Lorsque sa situation n'appelle pas d'observation, le collège de déontologie en informe, selon le cas, le chef de juridiction ou le président de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives.
«  Lorsque le collège de déontologie constate que le magistrat se trouve ou est susceptible de se trouver dans une situation de conflit d'intérêts, il l'invite à mettre fin à cette situation ou à la prévenir et il en informe, selon le cas, le chef de juridiction ou le président de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives.
«  Dans tous les cas, le collège de déontologie transmet les déclarations d'intérêts au vice-président du Conseil d'État.
«  IV. – La déclaration d'intérêts ne comporte aucune mention des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l'intéressé, hormis lorsque la révélation de ces opinions ou de ces activités résulte de la déclaration de fonctions ou de mandats exercés publiquement. Elle est versée au dossier de l'intéressé selon des modalités permettant d'en garantir la confidentialité.
«  Au cours de l'exercice des fonctions, toute modification substantielle des intérêts du magistrat donne lieu, dans un délai de deux mois, à une déclaration dans les mêmes formes. ».
«  Le modèle et le contenu de la déclaration d'intérêts, ses modalités de dépôt, de mise à jour et de conservation sont fixés par décret en Conseil d'État.
«  Art. L. 231‑4‑2. – Le magistrat qui estime se trouver dans une situation de conflit d'intérêts s'abstient de participer au jugement de l'affaire concernée. Son remplacement est assuré en application des règles de suppléance prévues au présent code.
«  Le président de la cour administrative d'appel ou du tribunal administratif peut également, à son initiative, inviter un magistrat dont il estime, pour des raisons qu'il lui communique, qu'il se trouve dans une situation de conflits d'intérêts, à ne pas siéger. Le remplacement est assuré dans les conditions prévues au premier alinéa. En cas de doute, il est fait application des règles applicables aux décisions en matière de récusation.
«  Art. L. 231‑4‑3. – Dans les deux mois qui suivent leur prise de fonctions, les présidents de tribunaux administratifs, à peine de nullité de leur nomination, transmettent une déclaration de situation patrimoniale à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique

 « Les II à V de l'article 25sexies et l'article 25septies A de la loi n° 83‑634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires sont applicables. »

Article 9quater

«  I. – Dans les deux mois suivant la date d'entrée en vigueur du décret mentionné, respectivement, au dernier alinéa du IV de l'article L. 131‑5 et au dernier alinéa du IV de l'article L. 231‑4‑1 du code de justice administrative, les membres du Conseil d'État et les magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel établissent une déclaration d'intérêts selon les modalités prévues aux mêmes articles.
«  II. – Dans les deux mois suivant la date d'entrée en vigueur du décret mentionné au III de l'article 25sexies de la loi n° 83‑634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le vice-président du Conseil d'État, les présidents de section du Conseil d'État, les présidents de cour administrative d'appel et les présidents de tribunal administratif établissent une déclaration de situation patrimoniale selon les modalités prévues au même article. »

Exposé sommaire :

Cet amendement tend à réintroduire dans le projet de loi les dispositions relatives à la déontologie des membres des juridictions administratives. Ces dispositions figuraient dans la version initiale du projet de loi, avant d'être renvoyées à une future ordonnance (1° du I de l'article 25) par la lettre rectificative du 17 juin 2015.

L'amendement reprend les dispositions du projet de loi initial (anciens articles 10 à 12), en y apportant les modifications suivantes :

– introduction de l'obligation d' « intégrité » (par parallélisme avec la modification de l'article 1er par la lettre rectificative) ;

– alignement de la définition du conflit d'intérêts sur celle de la loi n° 2013‑907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique (remplacement du verbe « compromettre » par le verbe « influencer ») ;

– précision selon laquelle la charte de déontologie de la juridiction administrative est arrêtée par le vice-président du Conseil d'État (le texte initial étant muet sur ce point) ;

– transmission, sans filtrage préalable, de l'ensemble des déclarations d'intérêts des membres du Conseil d'État au collège de déontologie (le filtrage étant en revanche maintenu, compte tenu de leur nombre, pour les déclarations d'intérêts des magistrats des cours administratives d'appel et des tribunaux administratifs) ;

– communication de l'ensemble des déclarations d'intérêts au vice-président du Conseil d'État ;

– principe du versement au dossier des déclarations d'intérêts (par parallélisme avec la modification de l'article 4 du projet de loi par la lettre rectificative) ;

– obligation d'actualisation de la déclaration d'intérêts en cas de modification substantielle affectant les intérêts détenus (par parallélisme avec un autre amendement de votre rapporteure à l'article 4 du projet de loi) ;

– renvoi, pour le contrôle des déclarations de situation patrimoniale, aux pouvoirs de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique prévus au nouvel article 25sexies de la loi n° 83‑634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires (modifié par un autre amendement de votre rapporteure à l'article 4 du projet de loi) ;

– au futur article L. 231‑4‑2 du code de justice administrative, transfert au président de la cour administrative d'appel ou du tribunal administratif du pouvoir d'inviter un magistrat à ne pas siéger en raison d'un conflit d'intérêts. Le projet de loi attribuait ce pouvoir au président de la formation de jugement, mais il paraît préférable de le transférer à une autorité plus éloignée de l'affaire concernée et, de ce fait, plus objective. C'est, au demeurant, la solution retenue dans la version initiale du projet de loi au sein des chambres régionales des comptes (futur article L. 212‑9‑4 du code des juridictions financières, introduit par un autre amendement de votre rapporteure après l'article 9) ;

– suppression de la disposition prévoyant la fin des fonctions en cas de non remise d'une déclaration de situation patrimoniale pour les magistrats déjà en poste (par parallélisme avec un autre amendement de votre rapporteure à l'article 5) ;

– diverses améliorations rédactionnelles, notamment en vue d'harmoniser les formulations applicables à la juridiction administrative avec celles du statut général des fonctionnaires (article 4 du projet de loi).

Conformément à la version initiale du projet de loi – et à la différence de la solution retenue pour les fonctionnaires dans la lettre rectificative –, cet amendement ne prévoit pas, pour les membres de la juridiction administrative, de transmission préalable à leur prise de fonctions des déclarations d'intérêts (en raison de la spécificité de la procédure d'entretien déontologique, à l'issue duquel est remise la déclaration) et des déclarations de situation patrimoniale (par parallélisme avec les dispositions prévues pour les magistrats judiciaires à l'article 21 du projet de loi organique relatif à l'indépendance et l'impartialité des magistrats et à l'ouverture de la magistrature sur la société).

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