Amendement N° 330 rectifié (Adopté)

Projet de loi de finances rectificative pour 2014

Sous-amendements associés : 374 375 402 403 404 406

Déposé le 23 juin 2014 par : le Gouvernement.

I. – Le code du travail est ainsi modifié :

1° L'article L. 5423‑8 est ainsi modifié :

a) Le 1° est ainsi rédigé :

«  1° Les ressortissants étrangers ayant été admis provisoirement au séjour en France au titre de l'asile ou bénéficiant du droit de s'y maintenir à ce titre et ayant déposé une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, s'ils satisfont à des conditions d'âge et de ressources ; »

b) Après le 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

«  1°bis Les ressortissants étrangers dont la demande d'asile entre dans le cas visé au 1° de l'article L. 741‑4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'ils satisfont à des conditions d'âge et de ressources ; »

2° Le 1° de l'article L. 5423‑9 est abrogé ;

3° L'article L. 5423‑11 est ainsi rédigé :

«  Art. L. 5423‑11. – I. – L'allocation temporaire d'attente est versée mensuellement, à terme échu.
«  Pour les personnes en possession de l'un des documents de séjour mentionnés à l'article L. 742‑1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le versement de l'allocation prend fin au terme du mois qui suit celui de la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides ou, en cas de recours, de la cour nationale du droit d'asile.
«  Pour les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 742‑6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'allocation est versée tant que ces personnes ont le droit de se maintenir sur le territoire.
«  Pour les personnes mentionnées au dernier alinéa de l'article L. 742‑6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le versement de l'allocation prend fin à la suite de leur départ volontaire ou de leur transfert effectif à destination de l'État membre responsable de l'examen de leur demande d'asile.
«  II. – Le versement de l'allocation peut être refusé ou suspendu lorsqu'un demandeur d'asile :
«  1° N'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités, n'a pas répondu aux demandes d'information ou ne s'est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d'asile ;
«  2° A dissimulé ses ressources financières ;
«  3° Présente, à la suite d'une décision de rejet d'une première demande de réexamen, une nouvelle demande de réexamen.
«  La décision de refus ou de suspension est prise après examen de la situation particulière de la personne concernée.
«  Dans le cas prévu au 1°, il est statué sur le rétablissement éventuel du bénéfice de l'allocation lorsque le demandeur d'asile est retrouvé ou se présente volontairement aux autorités compétentes.
«  III. – Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. II. – Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° L'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans le cas visé au 1° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à son départ volontaire ou son transfert effectif à destination de l'État membre responsable de l'examen de sa demande d'asile. ». ;

2° Le 7° des articles L. 762-1, L. 763-1 et L. 764-1 est ainsi modifié :

a) Au d, après le mot : « phrase », est insérée la référence : « du deuxième alinéa » ;

b) Il est ajouté un e ainsi rédigé :

« e) Le dernier alinéa n'est pas applicable ; »

3° Le 6° des articles L. 766-1 et L. 766-2 est complété par un d ainsi rédigé :

« d) Le dernier alinéa n'est pas applicable ; ». »

Exposé sommaire :

Le présent amendement a un double objet :

1. Il tire d'abord les conséquences des arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne et du Conseil d'État (CE 16 juin 2008, Association La Cimade, n° 300636, 300637 ; CE 7 avril 2011, La Cimade et Gisti, n° 335924 ; CJUE 27 septembre 2012, La Cimade et Gisti, C-179/11 et CE 17 avril 2013, La Cimade et Gisti, n° 335924).

En vertu de ces jurisprudences, tout demandeur d'asile doit pouvoir en principe, tant qu'il bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français, accéder aux conditions minimales d'accueil prévues par la directive 2003/9/CE du Conseil du 27 janvier 2003 relative à des normes minimales pour l'accueil des demandeurs d'asile dans les États membres, directive dite « Accueil », et, en particulier, à l'allocation temporaire d'attente (ATA) prévue aux articles L. 5423‑8 et suivants du code du travail. Sont éligibles notamment le demandeur sollicitant le réexamen de sa demande d'asile ; le demandeur ayant fait l'objet d'un refus d'admission au séjour en vertu des 2° à 4° de l'article L. 741‑4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) dont la demande d'asile étant examinée selon la procédure prioritaire ; le demandeur ayant fait l'objet d'un refus d'admission au séjour en vertu du 1° de l'article L. 741‑4 du CESEDA et dont l'examen de sa demande d'asile relevant de la compétence d'un autre État en application du règlement (CE) n°343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des État membres par un ressortissant d'un pays tiers, règlement dit « Dublin ».

En conséquence, le présent amendement modifie les articles L. 5423‑8 et L. 5423‑11 du code du travail afin d'intégrer dans la loi ces solutions jurisprudentielles et de permettre aux demandeurs d'asile placés en procédure prioritaire ou en procédure dite « Dublin » de bénéficier de l'ATA et ce, tant qu'ils bénéficient du droit de se maintenir sur le territoire français.

Le présent amendement modifie également l'article L. 742‑6 du CESEDA afin de consacrer le droit des personnes faisant l'objet d'une procédure « Dublin » de se maintenir en France jusqu'à leur départ volontaire ou leur transfert effectif à destination de l'État responsable de l'examen de leur demande d'asile.

Le coût du versement de l'ATA peut être estimé à environ 10 M€ pour les demandeurs d'asile placés en procédure prioritaire et à 14 M€ pour les personnes faisant l'objet d'une procédure dite « Dublin » et ce, la première année de la mise en œuvre de ce dispositif. Le rapport des inspections générales sur l'hébergement et la prise en charge financière des demandeurs d'asile, d'avril 2013, avait retenu cette évaluation concernant les personnes faisant l'objet d'une procédure « Dublin » (annexe I, p. 8).

La modification de ces deux articles régularise la situation actuelle dans la mesure où la jurisprudence est déjà appliquée actuellement. Il n'y a donc ni économies ni surcoûts engendrés.

2. Le présent amendement a également pour objet de transposer partiellement l'article 20 de la directive 2013/33/CE du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale (refonte), qui autorise les États membres, dans certains cas précisément définis, à limiter ou retirer le bénéfice des conditions matérielles d'accueil, notamment lorsque le demandeur d'asile ne coopère pas avec les autorités compétentes, dissimule ses ressources financières ou présente une demande de réexamen.

Or, dans son arrêt n° 335924 du 17 avril 2013, le Conseil d'État a jugé, s'agissant des personnes placées en procédure « Dublin » qu' « en l'absence de dispositions nationales prises pour la transposition de l'article 16 de la directive du 27 janvier 2003, le bénéfice de l'allocation ne saurait être interrompu ». Ainsi, en l'absence de transposition des dispositions pertinentes de la directive « accueil », le coût du versement de l'ATA aux personnes faisant l'objet d'une procédure de transfert en application du règlement « Dublin » est beaucoup plus élevé en année pleine – de l'ordre de 25 M€ soit un surcoût de 11 M€ – dès lors qu'en cas de fuite caractérisée de l'intéressé, le versement de l'ATA ne peut être suspendu : les droits continuent à courir et ce, pendant la durée maximale allouée à la France pour mettre en œuvre la mesure de réadmission après accord de l'État membre responsable, qui est de dix-huit mois.

C'est pourquoi, sur la base des préconisations du rapport d'information du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques relatif à l'évaluation de la politique d'accueil des demandeurs d'asile d'avril 2014 (pp. 108‑109), le présent amendement modifie l'article L. 5423‑11 du code du travail afin de permettre la suspension de l'ATA dans le cas où le demandeur « n'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités, n'a pas répondu aux demandes d'information ou ne s'est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d'asile », ce qui vise principalement les personnes placées en procédure « Dublin » en situation de fuite.

Par conséquent, l'introduction de cet amendement permettra une économie potentielle de 11 M€ en année pleine.

La même logique légitime le deuxième cas de suspension de l'ATA : celui où l'intéressé a dissimulé ses ressources financières. L'économie est ici marginale (moins de 0,3 M€) car dans les faits, la quasi-totalité du public considéré est sans ressources.

Enfin, toujours dans un souci de bonne gestion des deniers publics et conformément aux préconisations du Rapport d'information précité du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques, l'article L. 5423‑11 du code du travail prévoit la possibilité de suspendre l'ATA à partir de la deuxième demande de réexamen : il s'agit en effet d'éviter que l'accès à l'allocation ne constitue un élément d'attractivité suscitant des demandes de réexamen multiples. L'économie générée serait de l'ordre de 0,7 M€.

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