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...nes en accordant les moyens nécessaires. La réduction des risques sanitaires doit en faire partie au-delà de ce que j’évoquais précédemment, à savoir papiers, moyens de vivre et aide à la recherche d’un emploi. Vous l’avez évoqué vous-même, madame la ministre, ce matin, le taux de mortalité des personnes prostituées est beaucoup plus élevé que celui du reste de la population. Nous savons que les violences et les viols qu’elles subissent quotidiennement portent atteinte à leur santé et que les risques, s’agissant de la santé sexuelle, sont décuplés – maladies sexuellement transmissibles, VIH, lésions vaginales ou autres… La liste est longue. Nous souhaitons donc par cet amendement réaffirmer notre volonté indéfectible de mieux protéger les personnes prostituées en évoquant les risques sanitaires....
...gue Guy Geoffroy en 2011 en témoigne également. Les éléments d’explication de cet échec sont de plusieurs ordres. Ils sont d’abord d’ordre financier : les politiques d’accompagnement manquent cruellement de moyens. Ce problème n’est pas spécifique aux personnes prostituées, comme en témoigne une campagne de l’association Paroles de femmes. Cette campagne a montré que, lorsqu’une femme victime de violences cherche à joindre le 115, elle peut passer vingt et un appels pour essuyer treize refus et enregistrer huit absences de réponses ! Telle est aujourd’hui la réalité. Chaque année, les plans d’urgence se succèdent sans que les conditions d’accueil des femmes en détresse changent vraiment. Une vidéo de 8 minutes et 54 secondes réalisée par la même association montre le décalage entre les beaux dis...
Je souhaiterais insister sur le fait que cet article fait primer le droit des victimes, qu’elles dénoncent ou non les réseaux de traite et de proxénétisme. Je vous ai donné un exemple tout à l’heure, monsieur Goujon. Nous savons pertinemment que les personnes victimes de la traite ne sont en général pas capables de dénoncer les réseaux auxquelles elles sont soumises. Ces réseaux sont d’une violence inouïe, ils sèment la terreur, terrorisent les personnes prostituées, leur font subir des violences sans nom, ce qu’on appelle l’abattage. Souvent, ils terrorisent les familles restées au pays ou sur le sol français – Mme la ministre l’a évoqué ce matin. Nous pouvons comprendre qu’elles aient peur de les dénoncer. Elles sont souvent venues d’ailleurs, elles ont accumulé des dettes astronomiques p...
...icacité en matière d’éradication de la prostitution, témoignent d’une précarisation accrue des personnes se prostituant. Les effets néfastes de ces lois sont en tout point semblables à ceux unanimement constatés en France suite à l’instauration en 2003 du délit de racolage passif : éloignement des structures de soins, de dépistage et de prévention, isolement des personnes et exposition accrue aux violences et à l’exploitation, stigmatisation, accès aux droits entravé.
... » Tel est, sans détour, le bilan du « modèle suédois », dressé, non par des proxénètes ou des clients en mal de sexe tarifé, mais par le Programme des Nations unies pour le développement. L’Organisation mondiale de la santé, l’ONUSIDA et le Conseil national du sida sont par ailleurs unanimes : la pénalisation de la prostitution « nuit à la santé des personnes qui la pratiquent » et aggrave les violences dont elles sont victimes. Pour ces raisons, et dans un souci de considération pour les intérêts de santé publique, je vous invite, chers collègues, à voter cette motion de renvoi en commission d’un texte qui ne lutte pas réellement contre les réseaux et qui comporte des risques accrus de précarité pour les personnes prostituées.
... celles et ceux qui ont eu le courage de dénoncer ces réseaux. Il me semble que c’est dû à l’incertitude que ressentent ces personnes. Je ne crois pas du tout aux dénonciations mensongères évoquées, qui seraient motivées par le souhait d’avoir des papiers. Les risques encourus sont bien trop grands. Comme vous l’avez bien décrit, quand on victime de la traite, on est soumis à la contrainte, à la violence, au chantage sur sa famille. Je ne crois pas que des personnes prostituées qui vivent dans des situations de très grande violence s’amusent à jouer avec l’administration française à ce type de jeu qui pourrait très facilement se retourner contre elles. Je maintiens donc mon amendement. J’estime que l’analyse de la CNCDH est correcte, ainsi que sa préconisation.
...une condition d’examen substantielle. La notion d’ordre public est assez large pour permettre au préfet d’apprécier les choses. Nous sommes en train de bâtir un système juridique à double niveau dans lequel une personne qui prend le risque de témoigner se voit délivrer une carte de séjour temporaire et, si son témoignage aboutit à une condamnation définitive, une carte de résident. Eu égard à la violence, que nous dénonçons tous, faite aux victimes de la prostitution, ne peut-on pas passer du « peut-être » à un « est délivré » ? Si, sur 300, 400 ou 500 titres de séjour délivrés, deux ou trois sont frauduleux, le préfet aura toujours la possibilité de retirer le titre puisque c’est un titre d’un an renouvelable chaque année.
...ue cette demande de renvoi en commission m’étonne. En effet, la commission spéciale a fait un travail précis et rigoureux, auditionnant un nombre important de personnes, de toutes opinions et de tous statuts, et ce travail avait été précédé par un travail tout aussi remarquable de la mission animée par M. Geoffroy et Mme Bousquet. Si l’on ajoute à cela tout le travail réalisé sur la question des violences faites aux femmes, nous avons, je le pense, tous les éléments pour prendre une décision hautement politique, qui représente une nouvelle avancée pour les droits des femmes, pour une vision tout simplement humaniste de notre société. Si le renvoi en commission ne me paraît pas justifié, une des questions posée par les auteurs de la motion est celle de la pertinence même d’une loi. Or, si l’on ex...
...avec leur argent, du corps des femmes qui n’en ont pas, et qui n’ont donc pas la liberté de refuser. J’invite tous ceux qui ne sont pas convaincus à écouter ces témoignages de prostituées qui nous ont parlé. Elles racontent l’alcool et la drogue au petit-déjeuner pour supporter l’insupportable. Elles racontent la peur au ventre le matin et le mal au ventre le soir. Elles disent la souffrance des violences, des pénétrations à répétition et souvent des viols. Elles disent les mutilations du vagin et les maladies : MST, VIH, hépatites et autres infections. Non, se prostituer, ce n’est pas « joindre l’utile à l’agréable », comme on l’entend trop souvent chez les « 343 salauds » et leurs avatars, qui disent tout haut : « Touche pas à ma pute », mais qui pensent tout bas « touche pas à mon calbute ».
...ni leurs contradicteurs ne les foulent aux pieds. Je citerai, par exemple, un droit pour lequel, sur l’ensemble de ces bancs, beaucoup se sont battus : celui des femmes et des hommes à disposer de leur corps. Si c’est pour se voir envoyer à la figure que c’est le droit pour quelqu’un de disposer du corps d’autrui, ce débat de principe n’est alors pas intéressant. S’il s’agit de la question de la violence faite aux femmes, de celle la domination masculine, que dire alors de la prostitution masculine, y compris entre deux hommes ? On voit bien que tel n’est pas le sujet. Il en va encore différemment si le débat porte sur le point de savoir si l’acte sexuel peut ou non faire l’objet d’une transaction marchande et financière. J’ai entendu certains dire que s’opposer à cette proposition de loi revena...
... je tiens à l’en féliciter. Cependant, j’ai le sentiment que cette discussion est inaboutie, en particulier sur le plan juridique. Que nous propose-t-on finalement, si ce n’est de sortir du système de l’abolition pour s’orienter vers celui de la prohibition par la sanction pénale du client ? M. Germain, que j’ai écouté avec attention, considère ainsi que la prostituée, du fait qu’elle a subi des violences, des coups, éventuellement des viols collectifs, se trouve dans un état de vulnérabilité tel qu’elle est incapable d’exprimer valablement un consentement, soumise qu’elle est à la violence masculine et au pouvoir de l’argent. À partir de ce moment, qu’on le veuille ou non – c’est en tout cas votre postulat de principe –, son consentement n’est plus éclairé. Or, que signifie avoir un rapport sex...
Nous devons aborder ce débat de société avec toute la hauteur qu’il convient. Nous avons choisi, pour notre part, comme l’a fait la ministre ce matin, de mettre des mots sur les situations, de nous exprimer le plus clairement possible et de ne pas masquer les violences en recourant à des formules convenues. Nous devons dénoncer les comportements, les violences, avec des mots qui, sans blesser personne ici, décrivent les situations réelles. C’est ce qu’a fait, après la ministre ce matin, Jean-Marc Germain. C’est ce que nous allons essayer de faire dans chacune de nos interventions, afin de bien poser le problème. Nous pouvons comprendre que les analyses diffèr...
... porte en elle un objectif d’émancipation humaine. Cette loi représentera une nouvelle étape dans le combat des femmes pour leur libération. Souvenons-nous de ce long chemin marqué par les luttes des femmes et par des lois actant leurs droits, du droit de vote à la maîtrise de leur corps en passant par le droit au travail, de la parité à la prise de responsabilité en passant par la loi contre les violences faites aux femmes. La prostitution, en effet, n’est pas le plus vieux métier du monde, comme certains se plaisent à le dire. Non, ce n’est qu’une des plus violentes expressions du système patriarcal. C’est une violence qui touche d’abord les femmes, qui représentent plus de 85 % des personnes prostituées. Cette réalité doit être dite car elle entre pour beaucoup dans la mise en place ancestral...
...st désastreuse, sur le plan humain, sur le plan social et sur le plan sanitaire. Mon propos n’est pas idéologique, il est pragmatique. C’est en tant que médecin que j’ai choisi de vous lire cette description de l’un de mes confrères gynécologues, parue dans le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales sur l’état de santé des personnes prostituées : « Ces femmes ont été exposées aux violences de la part des clients, incluant des menaces avec couteaux ou pistolets, des positions acrobatiques imposées avec les membres liés au lit. Elles ont aussi fait l’objet de brûlures de cigarettes assez récurrentes sur les seins et la face interne des cuisses. Elles peuvent aussi subir les violences des proxénètes, qui commencent souvent chez les jeunes vierges par une défloration rapide mais viole...
Dans l’immense majorité des cas, les violences sont imposées par le client, et les personnes prostituées ne portent pas plainte, car elles se sentent pourchassées et méprisées par la société.
C’est cette injustice qu’il convient de faire cesser aujourd’hui, en abrogeant le délit de racolage pour décriminaliser les personnes prostituées. C’est ce que nous faisons avec cette proposition de loi. Que faut-il faire de plus pour faire diminuer les violences que subissent les personnes prostituées ? Faut-il organiser l’activité prostitutionnelle afin de faire reculer la clandestinité, qui serait, selon certains, la cause de tous les maux ? Certains pays l’ont fait, comme les Pays-Bas ou l’Allemagne. Aux Pays-Bas, où la prostitution est bien visible, dans des vitrines, sous des néons, une étude des services de police a montré qu’entre 50 % et 90 % de...
... sont des femmes, pour des clients qui sont, quant à eux, des hommes à plus de 90 %. Autre fait notable : l’emprise croissante des réseaux de traite sur la prostitution. Alors qu’en 1990, 20 % des femmes qui se prostituaient en France étaient de nationalité étrangère, elles sont aujourd’hui près de 90 % à venir de Roumanie, de Chine, de Bulgarie ou du Nigeria. Enfin, les prostituées subissent des violences physiques et psychiques particulièrement graves. Des enquêtes menées aux États-Unis, au Canada et en Allemagne montrent que, dans ces trois pays, plus de 50 % des personnes prostituées interrogées ont été violées, souvent plus de cinq fois au cours de leur activité. Elles auraient également entre soixante et cent vingt fois plus de risques de mourir assassinées. Voilà le constat édifiant de la p...
...eurs, donc aussi celui qui recourt aux services de la prostituée. Responsabiliser le client, oui ; reste à savoir si la pénalisation est le bon moyen. Elle risque d’avoir des effets pervers, ne serait-ce qu’en matière de santé et de sécurité pour les prostituées. Ces dernières vont probablement continuer leur activité, mais de manière clandestine, ce qui engendrera des risques accrus en termes de violence et de contamination. De plus, la pénalisation a vocation à être dissuasive mais, si elle n’est jamais effective, les clients continueront à solliciter des prostituées. Sur ce point, j’estime que nous avons eu bien peu de réponses. Le ministre de l’intérieur n’a pas manqué de faire part du désarroi des services de police lors de son audition par la commission spéciale : comment sera concrètement ...
...e autorisation provisoire de séjour, tandis que celles qui témoignent peuvent se voir accorder une carte de séjour. À mon sens, il faudrait donner une carte de séjour temporaire à toutes les prostituées, soit qu’elles témoignent, soit qu’elles s’engagent avec des associations dans un parcours de sortie de la prostitution. En effet, cette différence de traitement ne se justifie pas au regard de la violence que subissent les femmes prostituées, et que nous voulons combattre grâce à la proposition de loi dont nous sommes en train de débattre et que nous allons, je l’espère, adopter. Voilà pourquoi je vous invite, monsieur Coronado, à retirer vos amendements et à réfléchir à un amendement de ce type, que vous pourriez déposer en deuxième lecture.
...teste l’une des formes d’esclavage qui subsistent dans notre société. C’est d’autant plus vrai que la prostitution « traditionnelle » de rue a peu à peu laissé place à de nouvelles formes de prostitution, essentiellement organisées par des réseaux, dont la grande majorité – on dit que c’est presque 90 % – concerne des personnes étrangères, parfois en situation irrégulière. Dans ces réseaux, où la violence est omniprésente, les prostituées sont bel et bien des victimes à la merci de leurs proxénètes. En second lieu, nous devons légiférer pour une raison simple : les prostituées ne sont pas libres. On entend souvent l’argument selon lequel certaines prostituées auraient choisi et aimeraient leur « métier ». Pourtant, mes chers collègues, que diriez-vous si vous appreniez que votre propre fille ou v...