Intervention de Elisabeth Pochon

Séance en hémicycle du 19 juillet 2016 à 15h00
Rénovation des modalités d'inscription sur les listes électorales — Présentation commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaElisabeth Pochon, rapporteure des commissions mixtes paritaires :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage, chers collègues, en ce moment de chagrin national, nos pensées vont vers les victimes du terrible attentat perpétré à Nice. Notre compassion pour les blessés, pour les familles endeuillées, est sans limite. C’est dire si reprendre le cours de notre travail parlementaire est difficile. Il est cependant de notre devoir de résister collectivement à ces attaques qui visent à fragiliser notre démocratie. Nos textes sont les premières briques d’un édifice qui s’appelle République et qui veut consacrer le droit de vote des citoyens.

Notre mission, à Jean-Luc Warsmann et à moi-même, a mis en évidence la nécessité de rénover les modalités d’inscription sur les listes électorales. C’est à la fin de l’année 2014 que la commission des lois nous a confié la tâche de dresser un bilan des règles applicables et d’évaluer leur impact sur la participation des citoyens au processus électoral.

La mission d’information que nous avons conduite a démontré l’inadaptation des règles d’inscription au calendrier des élections comme à la mobilité résidentielle croissante des électeurs. Cette inadaptation contribue, entre autres facteurs, à éloigner ces derniers de l’institution électorale.

Après de longs mois de réflexion et d’échanges avec le ministère de l’intérieur, et grâce au travail commun des inspections générales de l’administration, des finances et de l’INSEE, nous voici saisis des textes adoptés par les commissions mixtes paritaires sur les trois propositions de loi de rénovation des modalités d’inscription sur les listes électorales.

La première proposition de loi, ordinaire, concerne le droit commun des électeurs résidant en France. Les deux autres, organiques, portent la même réforme pour les Français établis hors de France et pour les ressortissants européens résidant en France et souhaitant participer aux élections municipales.

Le compromis auquel les commissions mixtes paritaires sont parvenues la semaine dernière préserve l’architecture générale comme les grands principes de la réforme initiale : l’instauration d’un répertoire électoral unique géré par l’INSEE à partir duquel seront extraites les listes électorales de chaque commune ; le transfert au maire – en lieu et place des commissions actuelles qui fonctionnent mal – de la compétence de l’inscription et de la radiation ; le contrôle des opérations de mise à jour des listes électorales par des commissions communales transpartisanes et publiques ; la suppression de la double inscription des Français établis hors de France – qui était source de complexité et de difficultés juridiques soulignées à deux reprises par le Conseil constitutionnel – et, enfin, le report de l’entrée en vigueur de la réforme à partir de 2018, pour laisser aux acteurs de la procédure d’inscription le temps de s’adapter à ces nouvelles règles.

Deux sujets ont plus particulièrement retenu l’attention des commissions mixtes paritaires et ont donné lieu à de très longues discussions : d’une part, l’instauration d’une phase pré-contentieuse – et de son corollaire, les délais d’inscription sur les listes électorales ; d’autre part, le rôle des commissions de contrôle.

En premier lieu, le Sénat avait introduit, à la différence de l’Assemblée, un mécanisme de recours administratif des décisions du maire devant la commission de contrôle, préalable obligatoire à tout recours contentieux.

M. Warsmann et moi-même étions favorables, sur le principe, à cette proposition, car nous l’avions imaginée au tout début de nos réflexions. Nous la trouvions en effet utile tant pour l’électeur – qui dispose ainsi d’une voie de règlement de sa situation plus souple que la voie juridictionnelle –, pour le maire, dont les décisions peuvent être réformées par une instance collégiale, que pour le juge, qui se voit ainsi déchargé de trop nombreux recours.

Cependant, afin de permettre à cette phase pré-contentieuse de se dérouler, il convient d’adapter des délais d’inscription que nous avions fixés à trente jours avant le scrutin. Il nous a fallu, pour nous adapter à la réalité, ramener ce délai à trente jours ouvrables. En effet, les dimanches nous empêchaient de respecter les trente jours calendaires.

Nous avons cherché une solution qui soit la plus proche possible de l’engagement que nous avions pris auprès des électeurs. Nous avons dégagé une règle assez simple : les électeurs pourront s’inscrire jusqu’au sixième vendredi précédant chaque scrutin. Il s’agit d’une règle bien connue en droit électoral : elle est donc, pour les électeurs, à la fois claire et lisible.

En second lieu, le Sénat avait revu à la baisse le rôle de la commission de contrôle en la cantonnant à l’examen du recours préalable formé par les électeurs. Il avait également complexifié sa composition en prévoyant la présence du maire et en ajoutant celle de délégués du tribunal de grande instance et de la préfecture.

À l’initiative de M. Warsmann et de moi-même, les commissions mixtes paritaires ont élargi le rôle des commissions de contrôle dans le sens souhaité par l’Assemblée nationale : celles-ci pourront continuer de s’autosaisir de tout sujet en vue d’examiner la régularité des listes électorales.

Elles pourront, le cas échéant, réformer les décisions du maire et procéder à l’inscription ou à la radiation d’un électeur omis ou indûment inscrit. Dans les communes de plus de 1 000 habitants, leur composition a également été revue. Comme le souhaitait le Sénat, la majorité municipale y demeurera majoritaire.

En revanche, dans ces mêmes communes, la présence des délégués du tribunal de grande instance et de la préfecture, qui soulevait des difficultés, a été supprimée.

De même, le maire, qui ne pouvait être à la fois juge et partie, ne siègera pas en leur sein. Il pourra cependant, s’il le souhaite, présenter ses observations.

Je vais maintenant laisser M. Warsmann compléter mon propos en précisant certains aspects du compromis soumis à votre approbation. Je tenais à le remercier d’avoir rendu notre mission bipartisane riche et cordiale. Ces trois textes auront un impact direct sur les modalités d’exercice du droit de vote par nos concitoyens. Je me félicite de l’esprit comme des conditions dans lesquelles ils ont été préparés et discutés, notamment grâce à la saisine, par le président de notre assemblée, du Conseil d’État.

Ce dernier a, à juste titre, rappelé l’intérêt général qui s’attache à la réussite de cette réforme pour le renforcement de la démocratie et de la participation électorale, comme pour la simplification des démarches et pour la modernisation des relations entre le public et l’administration.

Je vous invite donc à adopter ces trois textes.

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