Intervention de Philippe Duron

Séance en hémicycle du 19 juillet 2016 à 15h00
Régulation responsabilisation et simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Duron :

Je tiens à saluer son travail remarquable et son investissement personnel depuis six mois sur ce dossier.

Il a, dans un premier temps, formulé des propositions qui ont été reprises en avril par le Gouvernement dans la feuille de route pour l’avenir du secteur, ce qui permet d’aboutir aujourd’hui à un texte de loi équilibré, soutenu par la majorité des organisations de taxis et de VTC.

La présente proposition de loi apporte cinq améliorations majeures au système.

D’abord, elle vient améliorer le régime déclaratif pour les plateformes, qui seront considérées comme des centrales de réservation organisant des déplacements ; elles seront contraintes de vérifier que les personnes mises en relation respectent bien les règles d’accès à la profession de VTC. Cela permettra d’harmoniser les règles en vigueur et que chacun travaille dans le cadre d’une concurrence plus loyale.

Ensuite, la proposition de loi complète le dispositif de l’Observatoire national du transport public particulier de personnes et des commissions locales, dont le secrétaire d’État a parlé tout à l’heure et qui sera créé par décret dans les semaines à venir, en vue d’améliorer la connaissance de ce domaine d’activité, aujourd’hui très lacunaire. Le texte imposera aux professionnels, notamment aux centrales de réservation, de transmettre des données sur leur activité et à l’administration de publier régulièrement des informations sur l’économie générale du secteur. Il ne s’agit en aucun cas de dévoiler des données sur les passagers ; l’objectif est de fournir à l’État des métadonnées sur le secteur, telles que le nombre de réservations, le nombre de conducteurs affiliés, le nombre de courses réalisées ou le temps d’attente moyen. Cela permettra d’avoir une connaissance plus fine du marché, et éventuellement d’adapter les politiques publiques de mobilité pour rendre l’offre de déplacement toujours plus attractive pour les usagers.

La proposition de loi interdit en outre aux centrales de réservation d’imposer des clauses d’exclusivité ou des obligations de chiffre d’affaires aux entreprises de transport, afin de ne pas créer des oligopoles dommageables non seulement aux conducteurs en termes de revenu, mais aussi aux consommateurs en termes de tarif. Le texte vise ainsi à favoriser la mise en concurrence des centrales pour les conducteurs, dont l’indépendance sera renforcée en matière de choix d’intermédiaires, de courses et d’affichage pour le véhicule.

La proposition de loi limite le champ d’intervention des véhicules capacitaires LOTI, qui ont contribué ces derniers mois à la déstabilisation du secteur en milieu urbain. Ces véhicules, destinés initialement à transporter des groupes d’au moins deux personnes, sont en effet aujourd’hui largement utilisés par les centrales pour réaliser des trajets relevant du transport individuel. Pour répondre à ce contournement de la loi, le texte limite strictement le champ d’intervention des LOTI en milieu urbain, leur interdisant la réalisation de services occasionnels avec des véhicules de moins de dix places dans les périmètres des autorités organisatrices de mobilité couverts par un plan de déplacement urbain, c’est-à-dire dans les soixante et une agglomérations françaises de plus de 100 000 habitants.

Enfin, la proposition de loi confie aux chambres de métiers et de l’artisanat – CMA – la mission d’organiser les examens qui seront désormais communs aux taxis et aux VTC. Les CMA, en tant qu’établissements publics, ont depuis de très nombreuses années fait la preuve de leur compétence en la matière et de leurs grandes capacités logistiques. De surcroît, elles sont réparties équitablement sur tout le territoire français. La combinaison de ces qualités permettra de rendre ces examens effectifs dans les plus brefs délais, dans des conditions de réalisation sérieuses, fiables, éprouvées, ce qu’attendent aujourd’hui légitimement les acteurs du secteur.

Des interrogations peuvent toutefois subsister concernant les modalités de mise en oeuvre du dispositif, qui seront définies par voie réglementaire. L’éventuelle cession des licences à titre onéreux via la création d’un fonds de garantie en fait partie : cela n’est pas traité dans le texte de loi. Le secrétaire d’État a fait en la matière des propositions qui ont reçu un avis très réservé de la part des organisations représentatives des taxis. Pourtant, chacun aura fait l’expérience en discutant avec les chauffeurs de taxi, notamment ceux qui ont acheté récemment leur licence, qu’ils attendent des solutions, parmi lesquelles cette proposition.

Au final, il convient de souligner les quatre objectifs prioritaires qui guident cette loi.

Un objectif d’ordre public, d’abord. Il importe en effet d’apaiser un secteur inquiet pour son avenir et d’éviter la résurgence de nouvelles mobilisations d’envergure qui paralysent les grandes villes, les aéroports et constituent une gêne grave pour les usagers.

Une forte préoccupation sociale, ensuite. Il s’agit de faire en sorte que la modernisation du secteur n’ait pas pour corollaire la précarisation des chauffeurs, donc de leurs familles.

Troisièmement, la conviction que les taxis ont un avenir. Notre rapporteur le rappelle avec insistance : il faut faire en sorte que cet avenir soit assuré et que les taxis puissent répondre à leur mission première, à savoir la prise en charge des usagers sans réservation dans les gares, les aéroports, sur la voie publique. Comme l’a très bien noté le rapporteur, il y a un avenir pour les taxis ; la meilleure preuve en est que dans toutes les grandes capitales européennes ou nord-américaines, leur statut et leur activité ont été maintenus dans des conditions satisfaisantes.

Enfin, il s’agit de répondre aux besoins nouveaux des usagers, ce que font aussi les VTC, en élargissant la clientèle du transport public particulier de personnes et en ouvrant des perspectives d’emplois non délocalisables à de nombreux salariés, notamment à beaucoup de jeunes.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste, écologiste et républicain soutiendra avec conviction et détermination la proposition de loi que nous a brillamment présentée Laurent Grandguillaume.

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