Intervention de Laurence Rossignol

Séance en hémicycle du 1er décembre 2016 à 9h30
Extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse — Présentation

Laurence Rossignol, ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes :

J’aborde ce débat avec confiance et vigilance. À moins que quelqu’un n’assume le paradoxe qui consiste à défendre le droit à l’IVG tout en souhaitant, dans le même temps, limiter son libre exercice, il ne devrait pas y avoir matière à controverse.

Chacun en conviendra : un droit qui ne peut être librement exercé, un droit qui ne serait donc qu’une abstraction, un droit formel, n’est pas un droit. La proposition de loi que vous allez examiner est l’expression de cette évidence : elle n’a d’autre objectif que de consolider le droit fondamental des femmes à disposer de leur corps et de garantir à toutes nos concitoyennes un égal accès à l’IVG.

Toutes les grandes modifications législatives apportées à la loi Veil ont exprimé cette unique préoccupation.

Permettez-moi d’en rappeler quelques-unes : en 1979, la pérennisation des dispositions de la loi de 1975 dépénalisant l’avortement ; en 1982, la couverture des frais médicaux afférents à l’IVG ; en 1993, la création d’un délit d’entrave ; en 2001, l’allongement du délai légal de dix à douze semaines de grossesse et l’assouplissement des conditions d’accès à la contraception et à l’avortement pour les mineures ; en 2014, la suppression de la notion de détresse et la création d’un délit d’entrave à l’accès à l’information sur l’IVG – j’y reviendrai ; et cette année, la suppression du délai de réflexion d’une semaine préalable à l’intervention.

Dans le droit fil de cette histoire déjà longue, c’est la même exigence que nous nous fixons aujourd’hui en vous proposant d’adapter le délit d’entrave à l’IVG à la réalité numérique, car, nous le savons bien, s’il n’est plus contesté dans son principe, le droit des femmes est encore menacé dans son effectivité. Les adversaires du contrôle des naissances n’ont jamais vraiment désarmé et de multiples résistances s’exercent encore contre la reconnaissance pleine et entière de la liberté des femmes de choisir le moment de leur maternité. Malgré un arsenal juridique continuellement renforcé, notamment pour prévenir et sanctionner toute forme d’entrave à l’IVG, ses opposants n’ont jamais cessé de vouloir restreindre ou empêcher l’accès à ce droit fondamental.

Il y a trente ans, des commandos s’attachaient aux grilles des centres d’orthogénie ou aux tables d’opération pour empêcher les femmes d’y accéder. Aujourd’hui, c’est sur la toile que leurs héritiers continuent de mener la bataille, à la faveur du développement croissant des usages numériques.

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