Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs et présidents de commission, mes chers collègues, ce débat porte sur un douloureux problème de société. Oui, le harcèlement sexuel est un fléau, qui fait beaucoup de victimes et dont les conséquences sont souvent dramatiques.
Le harcèlement sexuel est trop souvent banalisé. Pire, les victimes sont culpabilisées. Or le harcèlement est souffrance, meurtrissure, humiliation, torture morale. Certes, depuis trente ans, la lutte contre le harcèlement sexuel a accompli d'importants progrès. Aujourd'hui, il est unanimement condamné par le droit français, mais aussi européen et international. Cependant, malgré la gravité de ses conséquences, l'ampleur de ce phénomène demeure encore largement méconnue, et même cachée. C'est pourquoi j'encourage le Gouvernement à mettre en place un observatoire du harcèlement, ainsi qu'il l'a annoncé.
Le texte qui nous est soumis a été adopté le 12 juillet à l'unanimité par le Sénat. Il nous faut maintenant l'examiner avec sérénité. Ce texte n'est ni de gauche ni de droite ; il répond à une demande sociétale. Il permettra de combler le vide juridique qui existe depuis la décision du Conseil constitutionnel du 4 mai. Il vise à protéger les victimes du harcèlement sexuel – en très grande majorité des femmes mais aussi, aujourd'hui, de jeunes garçons. Enfin, il vise à condamner avec fermeté les auteurs de tels actes.
C'est pourquoi il apparaît essentiel de donner une définition claire de l'infraction de harcèlement sexuel, prémunissant ainsi les victimes de tout nouveau risque d'anticonstitutionnalité.
Le harcèlement sexuel est un fléau qui a des répercussions néfastes, voire dramatiques : sur la santé des victimes, sur leur moral car il peut entraîner des actes désespérés, jusqu'au suicide, sur les familles, sur les entreprises par la perte de productivité ou une image de marque ternie et, enfin, sur la société tout entière par les conséquences des arrêts de travail, par exemple.
L'article 1er propose de réintroduire le délit de harcèlement sexuel dans une définition conforme aux exigences constitutionnelles, et de créer un délit assimilé.
J'ai cosigné l'amendement de Marie-Christine Dalloz qui propose de supprimer les mots « même non répété » à l'alinéa 3 de cet article. En effet, la définition même du harcèlement suppose une répétition d'actions sur une certaine période. Répété, en droit pénal, veut dire au moins deux fois dans un intervalle de moins de trois ans.
Rappelons que la jurisprudence n'a sanctionné jusqu'à aujourd'hui que des comportements multiples, des « agissements répétés à l'égard d'une victime », selon les textes mêmes du ministère.
Necessitas probandi incumbit ei qui agit : la nécessité de la preuve incombe à celui qui se plaint. J'en mesure la difficulté, mais il est également important de respecter la présomption d'innocence. C'est une lourde responsabilité pour les magistrats, mais c'est à eux seuls d'apprécier les faits.
Il n'y a qu'environ quatre-vingts condamnations pour harcèlement par an. C'est bien trop peu par rapport à l'ampleur réelle du phénomène.
Enfin, j'ai cosigné l'amendement de Philippe Goujon relatif à l'alinéa 7 de l'article 1er. En effet, pensez-vous vraiment qu'il faille faire une distinction entre les mineurs de moins de quinze ans et de plus de quinze ans dans un cas de harcèlement sexuel ? Un grand nombre d'articles du code pénal utilisent le simple terme de mineur, sans distinction entre la majorité sexuelle et la majorité civile.
Ce texte constitue un progrès certain dans la lutte contre le fléau du harcèlement sexuel, mais il ne faut pas tout attendre du législateur. L'éducation de nos enfants, dans nos familles et nos écoles, la prévention, dans le secteur public, mais aussi associatif et privé, permettront, en complément de la loi, de rendre la lutte encore plus efficace.
C'est pourquoi je voterai ce texte avec conviction (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe SRC.)