Intervention de Gisèle Biémouret

Séance en hémicycle du 24 juillet 2012 à 21h30
Harcèlement sexuel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGisèle Biémouret :

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, je tiens à souligner, comme nombre de mes collègues, ma satisfaction quant à la qualité du travail effectué par le Sénat lors de la première lecture du projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui.

Ce texte donne une vraie définition du harcèlement sexuel, qui offrira une meilleure protection aux victimes et permettra de réprimer celui-ci sous toutes ses formes, y compris lorsqu'il est commis dans des circonstances particulières. Je pense, en particulier, à l'introduction dans le code pénal de la notion de vulnérabilité économique et sociale en tant que circonstance aggravante. Il faut saluer cette véritable innovation qui me tient particulièrement à coeur en tant que membre de la commission des affaires sociales de cette assemblée.

Nous savons, en effet, que les situations de précarité entraînent davantage de faits de violence. Nous savons aussi que le harcèlement sexuel, si on l'observe dans toutes les catégories sociales, touche plus massivement les personnes vulnérables et fragiles, principalement des familles monoparentales, et plus précisément des femmes seules avec enfants. L'étude réalisée en Seine Saint Denis en 2007 a démontré que les femmes mariées sont moins victimes de harcèlement sexuel. Nous savons qu'aujourd'hui, un tiers de ces femmes est en situation de pauvreté.

Au cours de la précédente législature, nous avions, aux côtés de Christophe Sirugue, défendu une proposition de loi visant à lutter contre la précarité professionnelle des femmes et le temps partiel subi pour 80 % d'entre elles. Une situation économique dégradée pour toutes ces femmes ne peut, malheureusement, que mener à toutes les dérives. Vous l'avez justement rappelé, madame la garde des sceaux, lors de l'examen de l'article 1er au Sénat.

J'évoquerai également une catégorie plus particulière dont on parle moins souvent : les femmes immigrées ou issues de l'immigration. L'enquête nationale sur les violences faites aux femmes réalisée en 2000 révélait déjà que l'exposition aux diverses formes de violences pouvait être accentuée par la situation de précarité dans laquelle se trouvent de nombreuses immigrées.

Cette situation particulière est soulignée par le rapport d'information réalisé en 2009 concernant les violences faites aux femmes. Ce rapport montrait combien certaines femmes avaient des sentiments ambivalents au sujet du harcèlement dont elles étaient victimes, et hésitaient à l'étiqueter comme tel, à la fois à cause de leur situation professionnelle et du manque de droits en matière de citoyenneté.

Tous les débats au Sénat et les auditions qui ont été menées l'ont montré, les harceleurs ne choisissent pas leurs victimes au hasard. Notre message vis-à-vis de ces prédateurs doit être clair : aucune femme, quelle que soit son origine, ne peut être harcelée sur le territoire national sans impunité.

Mme la ministre des droits des femmes a été claire : une grande campagne de sensibilisation et de communication sera engagée à l'issue du vote de cette loi. Un observatoire national des violences faites aux femmes va être créé, qui, comme vous nous l'avez expliqué, sera une plate-forme d'action, de prévention et de communication, oeuvrant certes pour une réactualisation de nos données qui nous manque cruellement, mais qui débouchera aussi, je l'espère, sur des actions spécifiques en fonction des territoires.

Je veux parler ici du monde rural pour lequel nous manquons de données, même si certaines études semblent montrer que les phénomènes de violence sont plus importants dans les régions urbaines que dans les régions rurales. Vous le savez, l'accès à l'information et à la santé est une question plus délicate dès lors qu'elle se pose à nos territoires ruraux. Contrairement aux femmes victimes vivant en zone urbaine, qui peuvent être prises en charge par des centres adaptés, les femmes des zones rurales ne bénéficient pas de telles structures, d'où la nécessité pour nous de réfléchir à plus long terme au développement de réseaux dans ces territoires, notamment à l'échelon départemental.

En conclusion, je pense que ce texte dont le but est de produire une règle de droit juste, précise, lisible et applicable répondra aux attentes fortes de nos concitoyennes et donnera le courage à celles qui hésitent encore de défendre leurs droits et leur dignité. (Applaudissements sur les sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

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