Au moment où la participation directe des Parisiens à la gestion de la chose municipale est régulièrement promue par l’Hôtel de ville, pourquoi ces mêmes Parisiens ne peuvent-ils toujours pas choisir plus directement leur maire ? Si le Gouvernement et sa majorité étaient réellement soucieux de démocratie, ils moderniseraient le mode de scrutin des municipales, afin de permettre à tous les Parisiens de choisir directement leur édile !
Mais alors, quelles sont les vraies raisons de la fusion ? En fait, fusionner dans un secteur unique les 1er, 2e, 3e et 4e arrondissements, c’est, plus prosaïquement, transformer le centre de Paris en forteresse du socialisme municipal. Eh oui, les pauvres ! Jugez-en vous-mêmes : en 2014, il a manqué 55 voix à l’actuelle opposition municipale pour remporter le 4e arrondissement ; en 2020, à résultats constants, avec la fusion des quatre arrondissements, il faudra près de 3 000 voix. Vous le voyez, cela change beaucoup de choses. C’est arithmétique !
Une fois écartés les sophismes municipaux et les visées électoralistes, nous pouvons nous concentrer sur l’essentiel. C’est une certaine idée de la démocratie qui est en jeu. Celle d’une démocratie de proximité, d’une démocratie qui s’appuie sur des élus accessibles et disponibles, qui connaissent le terrain et les habitants de leur arrondissement. Renoncer à la démocratie de proximité, c’est faire le choix d’une démocratie dégradée, à contre-courant des besoins et des attentes de nos concitoyens. C’est éloigner, là où il faut rapprocher. C’est aggraver la perception d’une déconnexion croissante des élus.
À l’opposé de cette approche, nous avons défendu une vision pragmatique du fonctionnement de Paris, qui permette l’exercice des compétences au niveau le plus pertinent pour résoudre efficacement les problèmes concrets des Parisiens. Ces derniers comprennent mal l’absence criante de moyens d’action réels des maires d’arrondissement. C’est dans cet esprit que nous avons proposé l’attribution aux arrondissements d’une compétence sur les enjeux de proximité : le nettoyage, l’entretien et la réfection des voiries, au sujet desquels les habitants se tournent très régulièrement vers leur maire d’arrondissement ; la délivrance des permis de construire, ainsi que les autorisations d’élagage et de terrasse ; la création, l’organisation et la gestion du service de la petite enfance ; la restauration scolaire ; l’attribution des logements sociaux ; l’attribution des subventions aux associations concernant le seul arrondissement ; ou encore la mise en oeuvre des actes d’acquisition et de préemption.
Pourquoi cela ? Pas pour faire plaisir aux maires d’arrondissement, mais bien parce que c’est à cette échelle-là que les choix les plus pertinents peuvent être faits ; parce que c’est à cette échelle-là que les Parisiens interpellent leurs édiles. Sur ces sujets, il faut avoir une bonne connaissance du terrain, mais aussi des habitants – ce qui est difficile dans une ville de plus de 2 millions d’habitants.
Permettez-moi de prendre deux exemples assez parlants, et d’abord celui de la propreté – un sujet qui parle à tout le monde. Le manque de propreté des rues parisiennes est la principale source d’insatisfaction des Parisiens, mais aussi des touristes. Le co-pilotage entre la mairie centrale et les mairies d’arrondissement n’a produit aucun effet, tant la marge de manoeuvre de ces dernières est limitée. En confiant aux maires d’arrondissement l’autorité fonctionnelle sur les personnels et les moyens techniques et financiers pour assurer cette mission, le service aurait gagné en réactivité et en efficacité. Les maires d’arrondissement auraient pu ainsi mieux répartir les opérations en fonction des animations locales, qu’il s’agisse des marchés récurrents ou des manifestations festives occasionnelles.
Deuxième exemple : la cantine. Alors que la maire de Paris n’a pas définitivement renoncé à recentraliser les caisses des écoles, il aurait fallu, à l’inverse, renforcer les pouvoirs des maires d’arrondissements dans ce domaine. L’amélioration de la qualité des repas n’est pas compatible avec un marché unique gigantesque, chargé de préparer les repas de 140 000 élèves. En revanche, les arrondissements ont la dimension idoine pour promouvoir les circuits courts et les composantes biologiques, pierres angulaires d’une alimentation durable. Alors, certes, il faut trouver le bon dosage et la bonne méthode pour garder un minimum d’unité au sein de la ville de Paris, mais entre la situation actuelle, où les arrondissements n’ont strictement aucun pouvoir, et la transformation de ceux-ci en communes autonomes, avouez qu’il y a de la marge !
Dans le cas où la motion de rejet préalable que je vous présente ne serait pas adoptée, ce que je regretterais infiniment, nous défendrons en séance plusieurs amendements à ce sujet. Nous proposerons notamment un dispositif différent de celui adopté par le Sénat, afin de tenir compte des réticences exprimées par les commissaires aux lois de la majorité. C’est vous dire, chers collègues, si nous sommes disposés à faire un pas vers vous !