Intervention de Patrick Vignal

Séance en hémicycle du 12 janvier 2017 à 15h00
Éthique du sport régulation et transparence du sport professionnel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Vignal :

Je tiens d’abord moi aussi à féliciter Jeanine Dubié, qui est une experte en sports et a beaucoup oeuvré, ainsi que vous, monsieur le secrétaire d’État, avec qui nous avons beaucoup travaillé sur le CICE du monde associatif. Quelle belle avancée ! Même sur les arts martiaux mixtes, si nous ne sommes pas tout à fait d’accord, nous le sommes tout de même à 90 %. Vous êtes un grand ministre. Avant vous, j’ai eu la chance de saluer Marie-George Buffet, qui était également une ministre des sports exceptionnelle.

Ce texte de loi est issu des nombreuses propositions faites par la Grande conférence sur le sport professionnel francais où plus de cinquante experts ont travaillé.

Partant du postulat que le sport est en grande difficulté, les différents articles soumis à notre examen tendent à répondre aux besoins du sport professionnel français.

Fondé sur deux axes forts, le présent texte veut garantir l’éthique du sport professionnel et améliorer la compétitivité des clubs français. Il faut impérativement renforcer la position des clubs français dans le sport professionnel mondial tout en assurant leur régulation comme la transparence de leur gestion afin de préserver l’éthique du sport.

L’éthique est constitutive du monde du sport, qu’il soit professionnel ou amateur. C’est l’une des valeurs fondamentales qui doit être respectée sur le terrain et en dehors. Elle doit être appliquée aux sportifs tout comme elle doit s’imposer aux représentants et dirigeants de fédérations sportives et de ligues professionnelles.

Préserver l’intégrité des compétitions sportives doit demeurer l’une de nos priorités quotidiennes.

L’éthique, parce qu’elle permet au sport de porter les valeurs positives qui en font l’essence et la richesse, est un fondement de la politique sportive.

Elle doit aussi être associée à une meilleure transparence, avec un renforcement des contrôles des flux financiers pour les clubs et pour les agents sportifs, afin d’éviter des montages frauduleux. De plus, les clubs professionnels, qui sont le socle de notre sport, connaissent en ce moment une fragilité financière. Ainsi, une plus grande sécurité juridique facilitera les investissements privés, renforcera leur compétitivité et créera les conditions d’un moindre financement par les pouvoirs publics. Ne dépensons pas doublement ce que l’on ne peut plus se payer.

Le principe d’une clarification du régime juridique de la rémunération de l’image du sportif permettra également de développer des ressources non exploitées pour les clubs et pour l’État. J’insiste, comme Mme Hobert, sur l’article 7 qui permettra un complément de salaire aux joueurs et aux entraîneurs qui auront accepté ce contrat spécifique. Cette disposition fait une distinction entre les deux aspects du métier de sportif ou d’entraîneur : d’une part, la participation à des compétitions sportives dans le cadre d’un contrat de travail bien précis et, d’autre part, une prise en compte de l’exploitation de l’image liée à des attributs de personnalité.

Il faut préciser que la rédaction de cet article n’oblige en rien le sportif ou l’entraîneur à contracter avec son club. Le seuil des 10 % initialement prévu a été supprimé – je vous remercie, madame la rapporteure –, afin que les syndicats puissent négocier du pourcentage opportun. Comme en témoigne l’affaire des « Football Leaks », il était nécessaire d’encadrer ce contrat, qui existe déjà pour les artistes ou les mannequins, tout en préservant le dialogue social. Ainsi, sans accord des deux parties, le club ne pourra pas exploiter leur image à des fins promotionnelles ou publicitaires. Les droits sociaux des sportifs et des entraîneurs seront préservés. Le salaire lié à leur activité principale demeurera prépondérant.

Il est aussi indispensable de répondre aux attentes des fédérations et des ligues professionnelles qui souhaitent accélérer le développement du sport professionnel. Il est essentiel d’accompagner la professionnalisation des sportifs avec des garde-fous éthiques, afin que ce surcroît de moyens ne conduise pas à des dérives comme en témoignent les différents scandales sportifs.

J’ai eu la chance d’être adjoint aux sports de la ville de Montpellier pendant quatorze ans. Le scandale des pieds nickelés, des sales gosses du Montpellier Handball, je l’ai vécu de près. Je me félicite, monsieur le secrétaire d’État, que l’on interdise à nos joueurs de parier non seulement sur un match, mais également dans leur discipline. Je pense qu’il faudra aller plus loin et réfléchir à la situation de leurs compagnes. Dans l’affaire de Montpellier, c’était elles qui avaient parié. Entre l’appât du gain et l’emballement médiatique, l’argent roi rend fou, comme le dénonçait François Mitterrand il y a plus de quarante ans : « l’argent qui corrompt, l’argent qui achète, […] l’argent qui pourrit jusqu’à la conscience des hommes ». Paroles, malheureusement, terriblement d’actualité !

Nous avons trop longtemps mésestimé le sport business, qui, j’ose le dire, n’est pas un gros mot. Combien il pourrait être bénéfique, s’il était rigoureusement encadré par des principes éthiques et des garanties de transparence.

Enfin, le développement d’internet et de sites sur le web a permis à certaines plateformes de diffuser des contenus audiovisuels sans droit internet. Il y a donc lieu de lutter non seulement contre la promotion et la mise à la disposition en ligne de façon illicite, mais également contre l’accès illicite à de tels contenus.

La conclusion d’un accord professionnel établissant les engagements respectifs des différentes parties pour lutter contre le piratage des compétitions sportives est une solution pragmatique, puisque les acteurs seront armés afin de lutter contre l’accès au sport diffusé en direct, et efficace, comme le montre l’exemple des pays ayant déjà mis en place ce type d’accords professionnels. Plusieurs accords pourront être conclus entre les acteurs, afin de tenir compte des différents niveaux d’engagements pris selon les intervenants et leurs prérogatives, et selon les règles européennes et de droit interne en vigueur en ce domaine.

Pour finir, je tiens à ajouter que, face au faible remplissage des stades ou des salles, il est nécessaire que le sport professionnel français se modernise et devienne plus attractif pour tous. Donnons les moyens aux mécènes, à des gens comme Louis Nicollin, patron du club de football de Montpellier, ou Mohed Altrad, qui investissent leur fortune personnelle dans le sport professionnel. In fine, le contribuable ne doit plus payer pour le sport professionnel. Il faut que les clubs puissent investir sur la durée dans des infrastructures innovantes, en créant des lieux de vie autour des stades, afin de générer une activité économique créatrice d’emplois.

Par exemple, la municipalité ou les collectivités pourraient mettre à disposition un terrain, des sorties d’autoroute, des tramways ou des gares, parce que la fluidité est indispensable, et que l’argent qui ne sera pas mis là soit mis au service de l’excellence pour tous du sport amateur. C’est bien la proposition faite avec la possibilité pour les collectivités territoriales de garantir les emprunts contractés en vue de l’acquisition, de la rénovation ou de la réalisation d’équipements sportifs par les sociétés sportives.

Je me félicite aussi que, d’un commun accord en commission, sous la présidence de Patrick Bloche, la disposition relative au plafond des investissements des collectivités locales à 50 % du montant total de la construction de nouvelles enceintes ait été supprimée.

En conclusion, je tiens à souligner que cette proposition de loi va dans le sens de l’évolution de notre société et pose les jalons du sport professionnel à venir. Ce texte a fait l’objet d’une très large consultation de tous les acteurs du sport professionnel : tous ont salué les avancées proposées qui étaient attendues. Il est équilibré entre mesures éthiques et transparence et mesures destinées à renforcer la compétitivité du sport professionnel français.

Il permettra de renforcer économiquement les clubs professionnels afin qu’ils soient en mesure de conserver leurs meilleurs sportifs et de mener des politiques sportives ambitieuses, dans un contexte de marché ouvert et très concurrentiel au plan européen. C’est une nécessité pour l’attractivité des championnats nationaux de nos différentes disciplines, qui doivent continuer à être composés de clubs issus de grandes villes et de villes moyennes, notamment de Lyon, monsieur le secrétaire d’État.

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