Que d’attention pour notre chère capitale, que de développements, d’embrouillaminis, de distorsions, que de débats dans les conseils municipaux et les agglomérations, que d’alliances, de soubresauts, d’ententes ministérielles ! Dernièrement, la polémique s’étendait même à la presse, quand le maire de Paris décida d’attaquer le président Hollande. D’Évry à Longjumeau, de Neuilly à Montreuil, la politique française a décrété qu’elle tournerait autour de petites et de grandes couronnes.
Si l’alinéa 4 de votre premier article procure une certaine joie, avec la disparition de la commune de Paris, la création d’un statut de Ville de Paris marque tout de même une iniquité absolue avec les autres territoires. Monsieur le ministre, depuis vos lois absurdes, que vous les appeliez NOTRe ou Égalité et citoyenneté, nous savons l’entier mépris du Gouvernement pour les élus locaux.
Vous leur avez ôté le cumul des mandats afin d’empirer la sociologie de la Chambre, la réduisant pour partie lors de la prochaine législature à une cumulation d’asservis des partis politiques.
Vous leur avez ôté les libertés locales en faisant de l’intrusion préfectorale dans les politiques locales une force de mise au pas insupportable, et vous leur demandez de s’adonner à des liturgies républicaines qui miment de vieux rêves des pires idéologues de la IIIe République.
Je vous assure que toutes les villes importantes de France seraient ravies que les compétences économiques n’allassent pas à des centres régionaux impalpables. Je vous assure que toutes les villes importantes de notre pays se réjouiraient qu’aucun conseil départemental ne dictât des politiques contraires aux intérêts de certains bassins de vie. Je vous assure que toutes les villes de France seraient mieux gérées si leurs différents conseils pouvaient travailler ensemble, sans supporter une architecture administrative absurde dont les effectifs pléthoriques grèvent davantage les budgets qu’ils ne donnent d’espoirs économiques et sociaux.
Je reste tout de même solidaire des élus des EPCI concernés par l’article 42 du texte. Nous y voyons la lourde main de l’État grimer ses diktats en une forme renouvelée de décentralisation. Quel dommage qu’une si belle idée, assise sur le mouvement fédéraliste du début du XXe siècle, soit réduite à des caprices technocratiques ! Mais ce sont là des privilèges que vous n’accordez qu’à Paris. Nous autres, Vauclusiens, en avons l’habitude : Louis XIV fit détruire notre château ; Robespierre fit assassiner trente religieuses et trente prêtres en un mois ; et les radicaux luttèrent incessamment contre nos églises et notre langue. Comprenez que les privilèges accordés à la capitale, quand nos territoires sont discriminés, nous posent quelques soucis.
L’article 21 de votre texte traite des prérogatives de l’édile, et notamment de la salubrité des bâtiments. Je crains que nous ne puissions pas du tout faire confiance à la municipalité de Paris sur ces questions. Prenons par exemple le patrimoine religieux, patrimoine volé en 1905 avec promesse de bonne gestion des biens. Dans un article du 5 janvier, Valeurs Actuelles titre « Miséricorde pour les églises de Paris » : Notre-Dame de Lorette, Saint-Philippe du Roule, Sainte-Croix des Arméniens sont autant de paroisses laissées à l’abandon, et, disons-le, avec un fort soupçon de partialité idéologique quand on connaît les déclarations christianophobes de certains élus de Paris…
Au-delà du patrimoine religieux, c’est toute la question des affaires culturelles à Paris qui est posée. L’éloignement du service en charge du coeur de la capitale ne fait qu’accroître les dégradations. De là à penser que le Gouvernement soutient l’accroissement des prérogatives pour une mairie inefficace, mais qui sera la dernière à soutenir le libertaro-progressisme de la rue de Solférino, il n’y a qu’un pas.
Ce même article 21 précise les rapports que la mairie de Paris et le préfet de police peuvent entretenir pour assurer l’ordre public – une précision qui intéressera bien des Français, humiliés devant le monde entier par la tolérance d’État pour les groupuscules gauchistes qui s’en prirent notamment à des hôpitaux et au musée des Invalides lors des manifestations contre la loi travail.
Un esprit chagrin rappellerait quelques histoires politico-mafieuses sur les cercles de jeux à Paris, évoqués à l’article 28. Tout cela serait très improbable, personne n’en doute.
D’ailleurs, qui comprendrait que les élus veuillent par exemple des engagements de transparence et des normes mieux établies à l’article 37 sexies sur la société de livraison des ouvrages olympiques ? Comment des Français pourraient-ils trouver que la composition du conseil d’administration ressemble de très près à une magouille ? Vraiment, ils iraient trop loin dans leur volonté de saisir les enjeux afférents à ce mandat.
La fin du texte donne une nouvelle perspective : la fusion du conseil département des Bouches-du-Rhône avec la ville de Marseille – du moins, une demande de rapport qui orienterait cette décision. Encore une fois, je ne voudrais pas importuner mes collègues marseillais, mais après un découpage électoral proverbialement réalisé au mépris de toute logique économique et géographique, les habitants de Provence ont le droit de penser qu’il serait temps pour l’État de combattre la charia à Avignon, la misère économique en Vaucluse, les bouchons de Violès et l’explosion de la violence sur la côte, plutôt que de se livrer à une étrange construction institutionnelle.
En somme, ce texte montre que le Gouvernement est parfaitement déconnecté des souffrances de nos compatriotes. Au lieu de combattre efficacement le grand remplacement et la misère économique, il s’amuse, souvent entre collègues, au jeu concours du plus beau projet de la haute administration sur nos territoires. Une beauté tout administrative cependant, car de ses effets sur le peuple, nous ne connaissons que trop les faiblesses.
Aussi, monsieur le ministre, faites votre Grand Paris si vous le voulez, vous ferez encore plus pour la suspicion dans laquelle le peuple vous tient.