Intervention de Pascal Terrasse

Séance en hémicycle du 24 janvier 2017 à 15h00
Adaptation du code minier au droit de l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Terrasse :

Il était important que notre assemblée s’empare à nouveau de ce sujet. Vous connaissez mon engagement sur le dossier des gaz de schiste, engagement que je partage d’ailleurs avec le président de Rugy qui préside aujourd’hui notre séance et ne peut à ce titre intervenir dans notre débat. J’ai écouté, comme beaucoup d’entre vous j’imagine, le débat entre les candidats au premier tour de la primaire de la gauche : il s’y est montré très engagé sur le sujet, et je tenais à le dire ici !

Dès 2010, j’ai été en première ligne, aux côtés de mes collègues Jean-Paul Chanteguet, Pierre Morel A l’Huissier et d’autres, pour m’opposer aux gaz de schiste. J’avais d’ailleurs créé un comité de surveillance parlementaire, que j’ai animé de longues années avant de céder ma place à Sabine Buis et Fabrice Verdier.

Voilà sept années que la mobilisation citoyenne sur la question des risques liés aux gaz de schiste ne faiblit pas. Nous l’avons encore vu il y a moins d’un an, en février 2016, à Barjac, dans le Gard, où près de 15 000 citoyens ardéchois, drômois, gardois, vauclusiens et d’ailleurs ont défilé pour dire non aux gaz de schiste. Notre premier devoir en tant que législateurs, et vous me rejoindrez sur ce point, est évidemment de prendre en compte cette indignation et cette inquiétude largement partagées par nos concitoyens. Notre rôle consiste donc à examiner, à partir de l’ensemble des éléments techniques, juridiques et scientifiques dont nous disposons, les mesures qui nous sont proposées.

La réforme du code minier que nous examinons aujourd’hui doit permettre de répondre aux ambiguïtés – je dis bien ambiguïtés – de la loi du 13 juillet 2011, dite loi Jacob. Ce texte est en effet sujet à interprétations et laisse la porte ouverte à qui voudrait bien l’enfoncer. Il n’offre en aucun cas les garanties nécessaires permettant d’éviter tout projet d’exploration ou d’exploitation d’hydrocarbures non conventionnels dans notre pays.

Certes, cette loi a interdit la possibilité d’utiliser la technique de la fracturation hydraulique. Mais ce qui vaut aujourd’hui ne vaudra pas nécessairement demain. La proposition de loi portant adaptation du code minier au droit de l’environnement doit donc s’inscrire dans la durée en prévoyant l’ensemble des éventualités. Elle a aussi vocation à répondre aux questions minières, énergétiques et environnementales qui pourront se poser dans dix, quinze ou vingt ans.

Cette réforme du code minier doit avant tout faire prévaloir les principes de précaution et de prévention, et plus généralement la préservation de l’environnement, de la santé et de la qualité de vie de nos concitoyens.

La loi de transition énergétique prévoit, dans son article 2, que les politiques publiques « soutiennent la croissance verte par le développement […] de processus sobres en émissions de gaz à effet de serre ». Or nous savons tous que l’exploitation des gaz de schiste est très fortement émettrice de gaz à effet de serre, notamment de méthane.

Au-delà du principe de précaution, la Charte de l’environnement insiste quant à elle sur le principe de prévention. Dans son article 6, elle dispose que les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable et concilier la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social. À ce titre, l’impact que pourraient avoir les activités de recherche et d’exploitation des gaz de schiste sur le tissu économique de nos territoires doit être pris au sérieux. En effet, la préservation de l’environnement apparaît essentielle au maintien de l’équilibre économique de certains territoires. C’est le cas dans mon département de l’Ardèche. Qu’il s’agisse d’activités touristiques ou du secteur agricole, des pans entiers de l’économie de nombreux départements reposent sur un environnement et des paysages fragiles, qui doivent être préservés.

En 2011, je fus, avec Jean-Paul Chanteguet, le premier signataire de la proposition de loi présentée par les membres du groupe socialiste, républicain et citoyen visant à interdire l’exploration et l’exploitation des gaz de schiste en France. La majorité de l’époque avait rejeté ce texte au prétexte que celui qu’elle défendait était plus adapté.

Force est aujourd’hui de constater que la loi du 13 juillet 2011 ne l’était pas. Je considère par conséquent que notre devoir, en tant que législateurs, est de moderniser le code minier afin de répondre à ces incertitudes. Je défendrai donc avec mes collègues une vingtaine d’amendements, qui reprennent pour l’essentiel les dispositions du texte que j’avais présenté à l’époque. Ces amendements aux articles 2, 3, 4 et 7 ont été minutieusement étudiés par Sabine Buis, mais aussi par Jean-Paul Chanteguet, président de notre commission, dont je voudrais saluer comme il se doit l’engagement et l’expertise sur ce sujet.

Mes chers collègues, il faut bien sûr interdire la fracturation hydraulique et abroger les permis d’exploration et d’exploitation déjà délivrés, mais ce n’est pas suffisant : il nous faut aussi créer les conditions qui nous permettront d’envisager sereinement l’avenir. Le Sénat doit donc se saisir rapidement de ce texte qui ne peut pas attendre.

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