Intervention de Marie-Lou Marcel

Séance en hémicycle du 24 janvier 2017 à 15h00
Adaptation du code minier au droit de l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Lou Marcel :

Je me félicite à mon tour de l’examen de cette proposition de loi. Élue d’un territoire minier qui a connu des exploitations souterraines puis à ciel ouvert, je mesure tous les jours les séquelles de l’après-mine.

En 2013, le Gouvernement avait confié une mission à M. Thierry Tuot, conseiller d’État, pour réformer le code minier. Cette réforme est revenue au premier plan avec le débat sur les gaz et huiles de schiste, pour lesquels des permis avaient été accordés, dont celui de Nant, qui a un impact dans plusieurs communes de l’Aveyron.

L’article 3 de ce texte renforce l’information et la participation du public grâce à des mesures spécifiques, car les élus, les citoyens et les collectifs avaient été les grands oubliés de la procédure d’octroi de ces permis.

Je me réjouis de l’adoption en commission de l’amendement interdisant l’exploitation et l’exploration des hydrocarbures non conventionnels.

Comme l’a annoncé M. Verdier, je vais évoquer, monsieur le secrétaire d’État, l’article 6 du texte, qui traite de l’après-mine ; je tiens à pointer les particularités qui existent dans certains secteurs, dont celui que je connais bien, le bassin de Decazeville-Aubin. Le plan de prévention des risques miniers est complexe, pour différentes raisons. En effet, la ville a été construite sur la mine. Pour certaines communes, les galeries ont été creusées sous la ville, si bien que leur profondeur est faible. De nombreux aléas se juxtaposent. Les réunions conduites par l’État étaient davantage des réunions d’information que de véritables comités de pilotage, et les observations formulées par les élus n’ont pas été, dans leur grande majorité, suivies d’effets.

Des imprécisions et des manques ont été relevés dans les cartographies des puits et galeries, ainsi que des incohérences entre des cartes de même nature, et les remises en sécurité opérées par Charbonnages de France n’ont toujours pas été intégrées. Les demandes de dérogation au règlement génèrent pour les communes des dépenses supplémentaires qu’elles ne peuvent prendre en charge.

Le risque de délaissement des bâtiments situés en zones d’aléas par des propriétaires qui ne pourront les vendre est important. Le devenir de ces propriétés est inquiétant car elles pourraient devenir des ruines qui entacheraient l’image de nos villes et décourageraient les investisseurs.

Le changement de destination des locaux commerciaux et leur transformation en logements sont interdits. À partir d’un principe louable, ne pas augmenter le risque, le règlement s’appuie sur un autre principe : celui du local de sommeil, qui interdit le changement de destination d’un local commercial en logement. Ainsi, un commerce ou une activité regroupant des dizaines de personnes est autorisé en zone rouge, alors qu’un logement, parce qu’il abrite l’activité de sommeil, est interdit, même s’il ne concerne qu’une seule personne. Il va en découler un risque de délaissement par les propriétaires.

L’impact de ce règlement sur les voies publiques, tant sur les routes communales que départementales, n’est abordé que de façon limitée. Les parkings, publics ou privés, sont plus contraints, alors que les voiries communales et départementales supportent un trafic souvent conséquent. Cette différence de traitement pour un même secteur n’est pas explicable.

Un point important concerne la dévaluation des biens impactés, bâtis ou non, dont la revente sera quasi impossible. Les collectivités se retrouvent confrontées à une triple peine : se voir retirer la constructibilité sur de nombreux terrains, ce qui obérera le développement du territoire ; se voir empêcher, dans des projets urbains d’aménagement et de mise en valeur de leur territoire, de modifier des propriétés délaissées, qui se retrouveront sur le marché sans trouver d’acquéreur ; devoir assumer les charges induites par les contraintes du PPRM et de son règlement. Ces contraintes entraînent la fuite des investisseurs et le découragement des propriétaires concernés, des terrains deviennent inconstructibles, notamment en zone urbaine, et les communes ne disposent pas de ressources pour démolir les immeubles devenus invendables.

J’ai déposé différents amendements à l’article 6 afin que ces problématiques soient prises en compte. Ils portent notamment sur les frais générés par le renseignement minier, les indemnisations pour les travaux de renforcement du bâti existant et le traitement des zones à aléas, les frais d’expertise et de diagnostic. D’autres, déposés conjointement avec Marie-Noëlle Battistel, visent à préciser les modalités d’instauration de la commission de suivi, à la suite de l’octroi du titre minier. Un autre porte sur l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui permettrait de pallier la dévalorisation des biens et serait compensée, pour les collectivités, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement ; une telle possibilité d’exonération existe à ce jour mais elle n’est assortie d’aucune contrepartie.

J’espère, monsieur le secrétaire d’État, que ces amendements pourront être pris en compte pour conforter les dispositifs après-mine. Comme l’a dit tout à l’heure la ministre Ségolène Royal, il est nécessaire d’en élargir le périmètre.

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