Ne serait-ce qu'en termes de méthode, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, tout en prenant les sujets à bras-le-corps, ne travaille pas de cette manière.
Ma feuille de route est claire : je mettrai tout en oeuvre pour concrétiser l'engagement présidentiel de construire 500 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux, pour permettre à nos concitoyens de se loger dans de bonnes conditions, tout en luttant contre l'étalement urbain.
Cet objectif, je le sais, est particulièrement ambitieux, compte tenu de la situation économique et financière de notre pays. C'est la raison pour laquelle, loin de tout miser sur des gains de constructibilité qui renchérissent le coût du foncier constructible, nous mobiliserons l'ensemble des acteurs concernés, nous actionnerons les différents leviers disponibles pour dégager des marges de manoeuvre et conjuguer nos actions au service de cet objectif.
En premier lieu, pour construire, il faut des terrains. Il s'agira de mobiliser l'ensemble des terrains constructibles disponibles.
S'agissant du foncier privé, nous travaillons à l'instauration d'une fiscalité spécifique sur les terrains constructibles qui permettra de lutter contre la rétention foncière : nous souhaitons que les particuliers mettent sur le marché leurs terrains à bâtir dans des délais aussi courts que possibles. Les dispositions correspondantes s'inséreront dans le futur projet de loi de finances.
Un programme sans précédent de mobilisation du foncier public sera lancé très rapidement par le Gouvernement. Il s'agira de mettre le foncier public de l'État et de ses établissements publics à la disposition des collectivités locales pour la réalisation de leurs programmes de logements. Pour la construction de logements sociaux, le foncier utile sera non seulement gratuit, mais libéré très rapidement. Le travail est déjà en cours pour faire évoluer les textes et mettre en place un dispositif simple, lisible et efficace.
S'agissant du foncier public des collectivités locales, il sera mobilisé à due proportion des efforts consentis pas l'État. Ainsi, pour les collectivités qui souhaitent construire, le foncier sera rendu disponible. Celles qui ne le souhaitent pas seront le cas échéant rappelées à la loi. La mixité sociale ne sera plus un voeu pieux, mais une obligation de résultat. Le Président de la République a souhaité que les pénalités soient durcies. Elles le seront dans le cadre d'un dispositif plus efficace qui ne donnera plus de prime à l'inaction.
Je compte sur vous, mesdames et messieurs les députés, pour l'adoption, le moment venu, de ces dispositions.
Ensuite, il faudra des droits à construire sur ces terrains, et pour cela des élus volontaires, qui seront soutenus. La question essentielle est bel et bien celle de l'échelle pertinente pour élaborer et mettre en oeuvre des projets qui répondent tant à l'objectif d'une consommation limitée de l'espace qu'à celui d'un logement accessible. Plutôt que de majorer uniformément les droits à construire, ce gouvernement travaillera à donner aux élus les outils les plus pertinents pour organiser leur territoire. Il travaillera à la cohérence des dispositifs et au développement d'une ingénierie territoriale de qualité à leurs côtés.
Enfin, il faut des investisseurs intéressés par la pierre. Je crois véritablement que l'enjeu est de permettre le retour des investisseurs institutionnels sur le segment du logement intermédiaire. C'est la condition essentielle de la constitution d'un parc locatif privé pérenne et de qualité.
L'objectif sera de construire là où sont les besoins, en préservant la qualité du cadre de vie, en luttant contre la consommation excessive de terres agricoles et naturelles et en arrêtant l'étalement urbain.
Qu'on ne me dise pas que la loi des 30 % permettait de lutter contre l'étalement urbain, alors que la majoration automatique devait s'appliquer jusque dans des zones à urbaniser non encore équipées de réseaux publics !
La densité, si elle est nécessaire, doit être envisagée autrement. Elle est acceptée, plébiscitée même quand elle s'accompagne d'une densité de services, d'offre de transports et de solutions, dans une dynamique urbaine. Elle est rejetée quand elle est synonyme de concentration de populations et de difficultés. La densité est très bien vue dans les quartiers haussmanniens et décriée dans les grands ensembles. On comprend bien pourquoi…
C'est la raison pour laquelle il ne suffit pas de majorer les droits à construire pour faire de la ville dense. Et pour toutes ces raisons, je n'admets pas qu'on me fasse un procès en « sous-densité » au motif de cette abrogation.
À n'en pas douter, si le gouvernement précédent avait pu imposer la majoration automatique aux collectivités, il l'aurait fait. Seulement, il y a la libre administration des collectivités locales ! Il fallait bien leur permettre de délibérer contre, dans un délai raisonnable.
Cela s'est fait au prix de contorsions sur les modalités d'association des citoyens à l'élaboration des documents, et quitte à permettre au passage à une commune membre d'un EPCI compétent en matière de PLU de prendre une décision contraire à celle prise par l'organe délibérant du même EPCI dans le cas d'un plan local d'urbanisme intercommunal !
Dans sa sagesse, le Sénat a introduit des dispositions transitoires permettant aux collectivités qui ont souhaité appliquer ce dispositif d'en garder le bénéfice. On a beau ne pas partager leur philosophie, on n'en garde pas moins certains principes : leurs délibérations, prises valablement, doivent continuer de s'appliquer.
À propos de principes, j'en profite pour réaffirmer devant vous la confiance que ce gouvernement accorde aux élus pour faire face à leurs obligations, dans un esprit de responsabilité et de solidarité.
Le Gouvernement souhaite donc l'abrogation de cette loi le plus rapidement possible, pour éviter aux collectivités de s'engager dans des procédures et de se voir enfermer dans des délais très contraints.