Il ne s'agit pas de construire plus mais de construire mieux, là où il y a des besoins. Vous avez, cher collègue, cité quelques zones géographiques, et je partage votre analyse, mais pour aller au bout du raisonnement, il fallait aussi parler de la qualité des logements. Il est inutile d'augmenter le nombre de résidences secondaires : ce n'est pas répondre au problème du logement en France.
En faisant passer en force et dans l'urgence la loi du 20 mars 2012, Nicolas Sarkozy, Benoist Apparu et les parlementaires de droite ont contribué à fragiliser nos institutions politiques et à remettre en question le rôle des collectivités locales. Non seulement ce texte témoigne d'une défiance certaine à l'égard des élus locaux, mais il traduit une profonde méconnaissance de l'action des collectivités en matière de logement.
Faire valider la majoration des droits à construire dans une commune ou une ville par une consultation publique, voilà qui empêche, entrave et anéantit nombre de projets coûteux qui s'inscrivent dans le long terme et font l'objet d'études, de réflexions menées par des spécialistes en collaboration avec l'ensemble des acteurs du logement.
La loi du 20 mars 2012 est en contradiction totale avec les projets entrepris par les collectivités dans le cadre de plans locaux d'urbanisme. Elle va à l'encontre des décisions prises par les établissements publics de coopération intercommunale pour les communautés de communes ou d'agglomération. Une aggravation des déséquilibres, des dysfonctionnements et des dissensions au sein des collectivités locales et de leurs groupements : voilà le résultat induit par cette loi.
Faut-il rappeler la précipitation du projet ? Nicolas Sarkozy en formule l'idée en janvier, le texte est promulgué en mars. Refus de toute concertation avec les acteurs du logement, refus de mener une politique du logement cohérente, refus d'harmoniser cette loi avec les dispositifs de majoration existants, refus enfin d'associer à ce texte la réflexion et la discussion parlementaires. Le degré de précipitation et d'improvisation avec lequel ce texte a été élaboré, imposé et promulgué est inversement proportionnel à celui qu'aurait mérité et que mérite une question comme celle du logement. « Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage. »
Sur le plan économique et social, ce dispositif est inefficace, voire contre-productif. Il passe à côté des véritables problèmes et favorise, une fois de plus, les plus aisés. Le véritable problème, ce n'est pas tant la dimension du logement que son coût. Or une telle loi facilite l'augmentation de la surface habitable mais n'en réduit pas pour autant le prix, au contraire. Et c'est faire preuve d'une bien grande naïveté ou, pire, d'un profond mépris à l'égard des plus démunis, que de prétendre que cette majoration est une réponse adaptée à apporter aux trois millions et demi de demandeurs de logement et aux six millions de Français logés dans des conditions indécentes ! C'est faire un bien beau cadeau aux couches les plus aisées de la population que de leur offrir la possibilité d'agrandir leur résidence principale ou secondaire. Comme si c'était l'essentiel !
Le problème du logement se pose en termes quantitatifs, certes, mais surtout qualitatifs, et force est de constater que cette loi n'apporte aucune réponse, ni à court ni à long terme, aux deux aspects de ce problème.
On m'a reproché, durant la campagne des élections législatives, d'avoir appliqué la loi SRU dans ma commune avec « un zèle militant ». Assurément ! Et avec l'objectif de loger décemment et à un prix correct tous les habitants de ma commune, quels que soient leurs revenus. Car la priorité réside dans le logement social. La seule solution est le renforcement de la loi SRU, une loi bien différente de celle que nous abrogeons car elle apporte une réponse ciblée aux besoins de logements sociaux, non une réponse globale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Si majoration il doit y avoir, il faut qu'elle porte sur les crédits alloués au logement social. Et ce n'est pas à vous, chers collègues, que j'ai besoin de rappeler quels sont ceux qui n'ont eu de cesse de les siphonner au cours des dernières années. Une véritable politique sociale du logement, voilà ce que nous nous emploierons à reconstruire, pour la justice, l'égalité, l'efficacité.
Ainsi, la majoration des droits à construire a participé à la fragilisation de l'édifice politique, juridique, économique et social français en matière de logement. Mais l'abrogation n'est qu'un préalable : réparer n'est pas construire. Cette abrogation ne saurait faire office de politique du logement. Abroger, c'est d'abord réparer. Abroger aujourd'hui, c'est préparer pour demain le terrain des nécessaires réformes à venir en matière de logement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)