Cet article apporte des aménagements concernant les contentieux judiciaires relatifs au droit du travail. Je souscris volontiers à la volonté des partenaires sociaux à ce sujet telle qu'elle est exprimée dans l'article 25 de l'ANI. Mais des amendements ont été déposés sur l'article 16 du présent projet de loi qui à mon sens en rompent l'équilibre général. Ces amendements étendent les exceptions de fond à l'application de la prescription biennale des actions relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail, pour y inclure notamment des actions en requalification du contrat de travail.
Il s'agit de secteurs où le recours aux CDD d'usage successifs est autorisé par le code du travail, comme les instituts d'études de marché et de sondages d'opinion. Mais je comprends que les sondeurs d'opinion n'aient guère la cote en ce moment auprès de vous… Ces secteurs sont victimes d'une évolution de la jurisprudence très insécurisante. En effet, depuis janvier 2008, la Cour de cassation exige que le juge du fond vérifie que le recours à des contrats d'usage successifs soit justifié par « des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi ». Ce caractère objectivement temporaire ne peut plus être présumé, comme auparavant, par le seul rattachement de l'employeur à l'un des secteurs énumérés par le code du travail.
Or, les sociétés d'études de marché et de sondages d'opinion ont régulièrement recouru aux CDD d'usage pour les emplois d'enquêteurs, ce qui se comprend d'ailleurs, sans avoir, conformément au code du travail et à la jurisprudence antérieure, à justifier pour chacun d'eux d'éléments concrets et précis. Cette jurisprudence récente, par hypothèse rétroactive, fait donc courir un risque juridique significatif de requalification en CDI de l'ensemble des CDD d'usage conclus avec les enquêteurs pendant les cinq années précédentes.
La prescription biennale du projet de loi permettait, en contrepartie d'une surcotisation employeurs de 0,5 point pour les CDD d'usage de moins de trois mois, acceptée par la profession, de limiter un risque économique structurel pour l'ensemble des entreprises d'études de marché et sondages d'opinion.
Finalement, ces amendements remettent en cause la globalité du texte. Nous attendons la position du Gouvernement et le sort qui leur sera réservé pour déterminer notre position.