Madame la présidente, monsieur le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, mesdames et messieurs les députés, le Conseil d'État, dont nous avions demandé l'avis au moment de la préparation de ce texte, nous avait invités à faire figurer dans le texte de loi un critère numérique, le critère de plus ou moins 20 %, ainsi que les exceptions venant tempérer, pour des raisons liées à nos territoires, ce critère arithmétique.
Au fil des différentes lectures – nombreuses, vous l'avez souligné avec joie –, les exceptions pouvant être apportées à ce critère ont été précisées et affinées, et nous tenons tous à ces exceptions. J'ajoute que personne ne devrait se plaindre du nombre de lectures, car elles nous permettent d'avancer.
L'Assemblée nationale, après le Sénat, a souhaité conforter à 30 % le tunnel que nous avons fixé, c'est-à-dire l'écart. Je n'ai jamais caché, à l'Assemblée comme au Sénat, tant dans mon intervention à la tribune que lors de l'examen des amendements, les risques constitutionnels. Cela a encore été le cas cet après-midi.
En revanche, Alain Vidalies et moi-même avons toujours recherché une solution avec vous, avec Mme Frédérique Massat. Nous étions conscients qu'il fallait, pour reprendre le terme que vous avez employé, monsieur Ciotti, de la souplesse. Car il y a là un cadre auquel nous ne pouvons pas, les uns et les autres, échapper. Certains parlementaires, fins connaisseurs de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, que je n'oublie pas pour ma part – jurisprudence du Conseil constitutionnel qui a déjà été appliquée à d'autres textes de loi – l'ont rappelé avec beaucoup de sagesse. M. Tourret, me semble-t-il, l'a également souligné.
Si nous gardions cet écart de 30 %, l'article 23 risquait la censure du Conseil constitutionnel et tout le travail accompli par l'Assemblée et par le Sénat aurait été vain. Aucun d'entre nous ne souhaite cela, en tout cas pas moi.
Je veux préserver les réalités territoriales françaises et leur diversité. Nous l'avons tous dit, la France est diverse : elle est urbaine, rurale, périurbaine, vallonnée, montagneuse, insulaire, maritime. Je ne doute pas que le Conseil constitutionnel, en examinant le texte, tiendra compte de cette diversité. Quant au Conseil d'État, lorsqu'il examinera le découpage départemental, il tiendra compte à la fois de cette diversité et de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Le risque constitutionnel que représente l'article 23 tel qu'il est rédigé poserait des problèmes majeurs. Comme je ne peux accepter que les garanties apportées par le texte soient balayées, je vous propose de ne pas retenir un chiffre. C'est la solution. Vous ne pouvez pas dire que nous ne vous écoutons pas, alors qu'au fur et à mesure qu'avance le débat nous faisons une proposition pour permettre précisément d'introduire de la souplesse. Cela n'enlève rien aux convictions des uns et des autres et je ne vous demande pas de revenir sur votre vote sur l'article 2. Mais tenez compte du fait qu'il y a une majorité, même si vous la qualifiez, et nous essaierons d'avancer.
Je vous propose donc de nous référer à la formule retenue par le Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence et de partir de ce que beaucoup d'entre vous ont déjà eu l'occasion d'exprimer sur ces questions. Vous l'avez fait il y a un instant, monsieur Sauvadet, monsieur Breton, monsieur Foulon, monsieur Aubert, monsieur Larrivé, dans un débat avec Mme Bechtel qui était là cet après-midi.
Je le répète, je vous propose de nous référer à la formule retenue par le Conseil constitutionnel et d'indiquer que le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques. Je vous propose également de nous en tenir là. Nous aurons le débat dans un instant à travers l'amendement que vous présentez, monsieur Sauvadet, mais intégrer la notion de territoire risque d'être contradictoire avec la proposition du Conseil constitutionnel.
En tout cas, cette formulation nous permet de préserver les exceptions au critère d'égalité démographique puisque c'est pour l'essentiel ce qui était attendu par tous ceux qui ont défendu avec force cette notion dans les critères que nous avons présentés. Le Gouvernement les a entendus.
Voilà pourquoi le Gouvernement a évolué, voilà pourquoi nous voulons éviter le risque constitutionnel, voilà pourquoi nous voulons garder la souplesse nécessaire en ce qui concerne les critères !