Je ne voterai pas ces deux amendements, non que j'estime qu'ils ne seraient pas à leur place dans le présent texte, mais tout simplement parce que je n'en partage pas du tout la philosophie. Je crois que l'on peut se définir comme abolitionniste, en référence à la convention de 1949, sans considérer que cela doive se traduire par une criminalisation croissante à la fois des prostituées et des clients.
L'exemple de la Suède suscite débat. Plusieurs études ont montré que la pénalisation des clients n'était pas, alors que c'est ce que ces amendements proposent, la solution. Il s'est produit des phénomènes de déplacement de la prostitution aux frontières, une précarisation accrue. Certains chercheurs, intellectuels, militants s'interrogent sur l'efficacité de cette politique.
Les arguments que vous avez utilisés sont les mêmes que ceux qui ont présidé à l'adoption du fameux délit de racolage passif, qu'Esther Benbassa a eu l'intelligence et le courage de faire abolir au Sénat. La majorité de l'époque avait utilisé les mêmes termes pour criminaliser l'activité des prostituées, les rejetant dans une plus grande marginalité, clandestinité et précarité, en contradiction même avec la philosophie de la convention de 1949, qui ne présente pas les prostituées comme coupables mais comme victimes.