Intervention de Michel Sapin

Séance en hémicycle du 16 mai 2013 à 15h00
Interdiction des licenciements boursiers et des suppressions d'emplois abusives — Présentation

Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

Je ne suis pas persuadé qu'il répondra à votre invitation… Mais là n'est pas l'essentiel.

On le voit bien, deux logiques s'affrontent, même si l'objectif de lutte contre les licenciements abusifs est le même. D'un côté, une proposition, la vôtre, qui relève plus de la proclamation de convictions – légitimes – que de la volonté d'avoir un effet sur le réel ; de l'autre, notre logique, et celle de la majorité des partenaires sociaux, qui consiste en une recherche du compromis par la négociation, dans un espace de droits garantis, en prise avec la réalité des entreprises et celle des salariés à qui elle offre une arme de dissuasion concrète contre les licenciements abusifs.

Je conçois et je respecte le fait que certains ne croient pas au compromis au motif que les intérêts sont divergents dans l'entreprise ; je sais la tradition intellectuelle et politique qui est la leur. Je crois, pour ma part, que c'est parce que les intérêts ne sont en effet pas les mêmes que la négociation, aussi dure et âpre soit-elle quand s'engage le rapport de force, peut aboutir.

Enfin, l'article 7 de votre proposition de loi, qui vise à supprimer la rupture conventionnelle, relève de la même problématique. Depuis sa mise en place en août 2008, plus d'un million de ruptures conventionnelles ont été homologuées. En moyenne, ce sont 26 000 ruptures qui ont été validées chaque mois par l'administration en 2012 ; après une phase de montée en charge, le volume de recours à ce dispositif semble s'être stabilisé.

L'avis des salariés sur le dispositif a été analysé par le centre d'études pour l'emploi ; il est plutôt positif. Des garanties existent aussi. La Direction générale du travail s'appuie sur l'homologation obligatoire des conventions par l'administration pour vérifier – ce qu'elle doit faire – que le nombre de celles conclues sur des périodes de trente jours, d'un trimestre ou d'une année civile, par un employeur confronté à un contexte économique difficile, ne dissimule pas un plan de licenciement collectif. L'administration enjoint, dans ce cas, l'employeur de renoncer à son projet de convention.

Le bilan de l'accord national interprofessionnel de 2008 est prévu par l'accord lui-même. Il s'appuiera sur une publication, le 23 mai prochain, par la DARES, une des directions de mon ministère, des dernières données disponibles et sur les premiers résultats de l'enquête quantitative menée en 2012.

Le sujet sera abordé lors de la grande conférence sociale de juin prochain, dont je rappelle que les partenaires sociaux ont tous, à l'exception de la CGT, été signataires de l'accord en question. Il leur revient donc, en premier chef, de juger de l'opportunité de revenir sur ce dispositif.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement ne peut que donner un avis défavorable à cette proposition de loi et renvoie chacun aux dispositions déjà votées, qui ne manqueront pas de s'appliquer dans les semaines qui viennent et qui seront autrement plus efficaces. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion