Intervention de Sylvain Berrios

Séance en hémicycle du 16 mai 2013 à 9h30
Amnistie des faits commis lors de mouvements sociaux — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvain Berrios :

Par ailleurs, vous avez indiqué être inspirés par le souci d'un acte républicain. Considérant votre inspiration politique, on peut désormais en douter, car tout aussi grave est le caractère de défiance à l'égard de l'institution judiciaire que recèle la volonté d'amnistier des actes graves de violence, de dégradation, d'intimidation, de séquestration commis lors d'actions de revendications sociales et qui relèvent du code pénal.

Comme l'a rappelé Mme la garde des sceaux au Sénat, « la justice elle-même prend déjà en considération cette situation particulière. Lorsqu'un conflit social aboutit à une issue judiciaire, les juges usent en effet de leur pouvoir d'appréciation de l'opportunité des poursuites pour contribuer à l'apaisement. » Cette loi d'amnistie que vous nous proposez est donc un procès en illégitimité des décisions prises par la justice.

Vous vous plaisez à rappeler sans cesse que le Gouvernement et, je le suppose, la majorité, sont attentifs à la séparation des pouvoirs de telle sorte que l'exécutif se mêle le moins possible du travail de l'autorité judiciaire. Mais quelle valeur peuvent avoir de telles déclarations si une loi d'amnistie vient balayer en quelques minutes le travail de la justice ? Pour démontrer l'indépendance de la justice, Mme la garde des sceaux a indiqué, par ailleurs, qu'aucune instruction individuelle n'était adressée aux parquets généraux et aux parquets. Or chacun s'est accordé à indiquer qu'il était difficile d'évaluer l'impact de cette proposition de loi et que la Chancellerie elle-même n'est pas en mesure d'évaluer précisément le nombre de condamnations prononcées. Mme la garde des sceaux a ajouté que seule une estimation générale était possible et conduisait à identifier au plus quelques dizaines de condamnations concernées.

Dès lors, au regard du faible nombre de faits commis et de personnes concernées, la loi d'amnistie qui nous est proposée revient en réalité non à donner des instructions individuelles, mais, pire, à amnistier individuellement. Par cette amnistie, vous encouragez ceux, minoritaires, qui choisissent délibérément le désordre et la violence contre les lois de la République. Et vous découragez ceux, majoritaires, qui choisissent le dialogue républicain, la paix sociale et le respect de l'autorité de l'État.

Cela nous conduit à évoquer votre troisième source d'inspiration, celle de la concorde sociale. Cette loi d'amnistie est le contraire de la concorde sociale, son exact opposé.

Tout d'abord, elle accélère, pour un petit nombre de casseurs, que vous considérez comme légitimes, un processus judiciaire existant.

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