Intervention de Marc Dolez

Séance en hémicycle du 16 mai 2013 à 9h30
Amnistie des faits commis lors de mouvements sociaux — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Dolez, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

À l'issue de cette discussion générale, il me semble utile de formuler quelques remarques.

Premièrement, c'est bien le groupe GDR qui a demandé l'inscription de ce texte à l'ordre du jour. Mais contrairement à ce que j'ai entendu à plusieurs reprises au cours du débat, cette proposition de loi n'est plus celle des sénateurs communistes et du Front de gauche : elle est désormais une proposition de loi adoptée par le Sénat. Du reste, on s'aperçoit en les comparant qu'il y a de grandes différences entre la proposition de loi initiale et le texte sur lequel s'est retrouvé l'ensemble de la gauche au Sénat. J'ai considéré, en ma responsabilité de rapporteur, qu'il nous fallait partir du point d'équilibre trouvé par le Sénat, en essayant même de l'améliorer, afin que notre assemblée puisse à son tour l'adopter. Je n'ai donc pas repris les termes de la proposition de loi initiale.

Il me paraît important d'insister sur ce point : notre assemblée est saisie ce matin d'un texte adopté par le Sénat, au demeurant beaucoup plus modeste que celui qui lui avait été initialement présenté. Je me suis efforcé d'améliorer ce texte, et je m'efforcerai de l'améliorer encore en présentant quelques amendements pour en lever toutes les difficultés et toutes les ambiguïtés. Je précise d'entrée, à l'attention de notre collègue Bernard Accoyer, que sur ce plan, sa crainte que les délits financiers puissent être amnistiés à cause d'une erreur de rédaction due au Sénat, n'est pas fondée. J'ai déposé un amendement permettant précisément de rectifier cette erreur, et donc d'écarter tout danger à cet égard.

Nous nous retrouvons donc au final avec un texte que je qualifierai de modeste – j'y reviendrai dans un instant ; et c'est précisément en raison de la modestie de ses ambitions et de son périmètre rendrait son possible rejet encore plus grave à mes yeux.

Deuxième remarque : il y a à l'évidence, au sein de cette assemblée, des interrogations sur le principe même d'une amnistie. Ce débat se retrouve moins au Sénat : s'il a adopté ce texte, c'est bien qu'il y reste favorable. Mais ce débat, monsieur le ministre, existe aussi au sein du Gouvernement : au Sénat : Mme la garde des sceaux a salué l'« oeuvre utile », l'« oeuvre de justice » réalisée par les sénateurs en trouvant un point d'accord sur ce texte. Et dans cette assemblée, je crois qu'il se poursuit au sein de chacun des groupes politiques. Au cours des travaux de la commission des lois, j'ai par exemple entendu notre collègue Patrick Devedjian indiquer qu'à son sens, son opposition au texte ne remettait pas en cause le principe même de l'amnistie. Je ne crois pas non plus avoir entendu le président de notre assemblée le remettre en cause.

Pour en revenir au texte lui-même, je remercie plusieurs de nos collègues – notamment André Chassaigne, Christophe Léonard et à Patrick Menucci – d'avoir rappelé de quoi il s'agit réellement, et en particulier d'avoir relevé les sanctions parfaitement disproportionnées infligées aux auteurs d'actes tels que la réalisation d'un graffiti sur un mur, le refus de procéder à une coupure d'électricité, ou encore le jet d'un oeuf. Je crois que la justification de ce texte se trouve là : dans un climat de grande difficulté sociale, face à ce que beaucoup de salariés ressentent comme la violence de la crise, le Parlement s'honorerait en leur adressant un message de soutien et de solidarité que, pour ma part, j'appelle de mes voeux.

Enfin, je terminerai en apportant deux précisions. Premièrement, M. Tourret, il n'y a pas de désaccord entre nous sur l'interprétation historique des lois d'amnistie : de 1958 à nos jours, on a dénombré seize lois d'amnistie, mais aussi neuf autres lois comportant des mesures d'amnistie à titre subsidiaire. Deuxièmement, Mme Capdevielle, vous commettez une erreur en indiquant que les précédentes lois portaient sur le quantum et non sur le contexte et en en déduisant que celui-ci restait flou et imprécis. Cela n'est pas le cas de l'article 3 de la loi du 6 août 2002, dernière loi d'amnistie en date, dont s'est en partie inspirée la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui. L'article 3 de la loi du 6 août 2002 prévoit en effet l'amnistie des « délits commis à l'occasion de conflits du travail ou à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives de salariés ». Sur ce plan-là, le texte dont nous discutons aujourd'hui ne fait que reprendre la loi de 2002. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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