Intervention de Jean-Yves Le Bouillonnec

Séance en hémicycle du 4 juin 2013 à 15h00
Réforme du conseil supérieur de la magistrature — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Bouillonnec :

Le projet de loi constitutionnelle soumis aujourd'hui au vote de notre Assemblée veut s'inscrire dans l'histoire constitutionnelle de notre pays.

En réformant les articles 64 et 65 de la Constitution, relatifs au Conseil supérieur de la magistrature, il vise à renforcer l'indépendance de l'institution judiciaire en donnant davantage d'autonomie au Conseil supérieur de la magistrature et une plus grande indépendance aux magistrats.

Ce projet emprunte ainsi le long chemin de l'évolution des institutions de la Ve République. Il reprend la perspective infructueuse de 1999 et vient améliorer la dernière réforme constitutionnelle de 2008, portant modernisation des institutions. Malgré les progrès indéniables qu'elle a traduits, progrès soulignés par beaucoup lors de nos débats – je pense à la suppression de la présidence du CSM par le Président de la République et de la vice-présidence par le Garde des Sceaux, ou encore à la possibilité de saisine donnée au justiciable –, la réforme de 2008 était par trop insuffisante au regard des objectifs qu'imposent les impérieuses exigences d'impartialité et d'indépendance des magistrats.

Insuffisante, car le pouvoir politique continuait à nommer des personnalités extérieures, entamant très sérieusement ces principes.

Insuffisante, car la nomination des magistrats du parquet relevait encore du pouvoir politique, ce dernier conservant la faculté de pouvoir passer outre l'avis négatif du CSM.

Insuffisante, mais aussi régressive, en ce qu'elle mettait en minorité les magistrats au sein du CSM, singularisant ainsi notre institution par rapport à celles de la presque totalité des démocraties européennes et augmentant la suspicion dont notre organisation judiciaire était l'objet.

Au nom du groupe SRC, je veux réaffirmer solennellement que l'indépendance de la justice est un des piliers fondateurs de notre démocratie et que le Président de la République, comme notre Gouvernement, ont eu raison de vouloir répondre à l'attente de nos concitoyens, qui exigent une justice dédiée à la seule application de la loi, inaccessible aux pressions et influences des pouvoirs politiques.

En ce sens, cette réforme, est donc très loin d'être mineure. Elle poursuit le double objectif de mettre la justice à l'abri des pressions politiques, tout en l'éloignant des écueils du corporatisme.

Elle répond à l'enjeu crucial, pour l'équilibre de notre démocratie, de restaurer la confiance des citoyens dans les institutions.

Cette réforme, mes chers collègues, veut renforcer la légitimité du Conseil supérieur de la magistrature et lui donner les moyens d'assurer la plénitude de ses missions. Elle place les magistrats, qu'ils soient du siège ou du parquet, en capacité d'exercer pleinement leur mission.

Je vous invite à partager les avancées certaines que ce projet traduit, qui ne peuvent être sérieusement contestées : constitutionnalisation de l'avis conforme pour la nomination des magistrats du parquet, consécration de la formation plénière, alignement des statuts des magistrats du siège et parquet pour les questions disciplinaires, relevant exclusivement du CSM. Ces avancées sont certaines et indiscutables.

Madame la garde des sceaux, vous avez réservé, comme à votre habitude, une grande attention aux travaux de notre assemblée et je vous remercie d'avoir pris en compte les propositions que notre excellent rapporteur, Dominique Raimbourg, a présentées, dans la perspective d'améliorer encore le texte.

Il nous a semblé fondamental, en effet, de rétablir la parité entre magistrats et personnalités extérieures, en portant leur nombre à huit.

Ces personnalités gagneront en légitimité, puisqu'elles seront nommées individuellement et feront l'objet d'un vote à la majorité des trois cinquièmes des voix exprimées des commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat. Le Parlement, par cette nouvelle attribution, s'en trouvera conforté, ce qui ne manquera pas de lui ouvrir d'autres perspectives dans le contrôle et l'approbation des nominations.

Il était tout aussi essentiel de confier la présidence du CSM à une personnalité extérieure.

Enfin, eu égard à l'essence même du Conseil supérieur de la magistrature, il nous a semblé logique et utile d'ouvrir sa saisine à tout magistrat en matière de déontologie.

En conclusion, le Conseil supérieur de la magistrature, organe de nomination, organe disciplinaire, organe de gestion des carrières, gardien de l'impartialité et de l'indépendance de la justice, est au coeur de notre système judiciaire. Il participe de la garantie d'un service public de la justice exclusivement inspiré par l'intérêt de la loi et des justiciables.

Cette réforme est indéniablement un progrès parce qu'elle renforce sa légitimité, conforte son autorité et étend ses attributions dans le seul dessein de donner les outils nécessaires à une justice indépendante et impartiale.

Au nom du groupe SRC, je vous invite, mes chers collègues, à voter en faveur de cette avancée majeure pour notre démocratie, qui consolide la séparation des pouvoirs en sanctuarisant la justice indépendante et impartiale.

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