Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, une fois n'est pas coutume, nous avons à débattre, en deuxième lecture, d'un texte qui s'éloigne quelque peu du projet de loi originel.
L'objectif annoncé était la séparation des activités de financement de l'économie et des activités spéculatives. La réalité est autre, puisque ce texte, quelque peu fourre-tout, mêle la régulation des activités bancaires, la protection du consommateur, l'évocation d'un dispositif relatif aux contrats d'assurance-vie en déshérence, et – dissimulée après un bis et un ter et avant un quater –, à l'article 11 quater C, la possibilité offerte aux collectivités territoriales de créer une société publique de financement.
Je ne souhaite pas rejeter en bloc ce texte, puisque certaines dispositions ne sont que le prolongement de ce qui avait été décidé par le précédent gouvernement dans le cadre de la supervision des activités de marché des banques et la stabilisation financière.
Je rappelle que nous avions alors renforcé la capacité des pouvoirs publics à intervenir dans la résolution des crises et que nous leur avions donné les moyens d'éviter, autant que faire se peut, la concrétisation des risques systémiques.
Ce mouvement s'inscrit d'ailleurs, comme cela a été rappelé plusieurs fois, dans une démarche européenne : nous attendons les conclusions de M. Michel Barnier et sa proposition de directive visant à la régulation bancaire.
Le renforcement du contrôle du tradingautomatisé, facilitant la lutte contre les pratiques spéculatives nuisibles ayant recours à des techniques de trading à haute fréquence, permettra de déceler certaines pratiques abusives. J'avais d'ailleurs souligné la frilosité du texte sur ce sujet dans mon intervention en première lecture : je constate que cette défaillance a été corrigée.
Quant à l'interdiction faite aux banques de pratiquer sur compte propre certaines activités trop risquées, elle relève du bon sens.
Je ne rejette donc pas l'idée d'une plus grande transparence de l'activité des banques, même s'il faut reconnaître que l'obligation leur incombant de publier un certain nombre de données sur l'ensemble des activités de leurs filiales à l'étranger pose un vrai problème de compétitivité.
Doit-on d'ailleurs rappeler que la crise bancaire ne trouve pas sa source dans les activités des banques françaises siégeant en France, ou même à l'étranger ? Cette crise de la finance n'est que l'écho des difficultés d'un système financier international dont on ne peut pas se couper.
Il faut donc surveiller et réguler, mais dans l'intérêt de l'assainissement d'un système nécessaire à l'économie. Autrement dit, il faut encadrer les excès de la finance.
Pour autant, les banques sont aussi des entreprises, qui emploient près de 400 000 salariés sur l'ensemble du territoire français. Interlocuteurs réguliers de nos PME, elles constituent un maillon indispensable de l'économie française.
J'accueille favorablement l'amendement qui a pour objet d'imposer l'information des commerçants sur le montant annuel des frais qu'ils supportent du fait des paiements par carte bancaire. Après avoir plaidé pour une baisse des commissions interbancaires sous la précédente législature, je reconnais que cette disposition permettra aux commerçants d'évaluer l'impact de ces frais. C'était d'ailleurs une proposition que nous avions émise dans le cadre du groupe de travail sur les commissions interbancaires.
Permettez-moi de vous faire part de mon incompréhension concernant le volet du texte relatif à la protection des consommateurs, notamment s'agissant des articles ayant trait au surendettement : vous nous aviez annoncé la création d'un fichier positif, qui est absent du texte relatif à la consommation. Il semblerait que vous ayez peur du débat sur ce sujet. Pourquoi ne pas avoir créé un chapitre consacré à part entière au surendettement ? Ce problème concerne de nombreux Français, ce qui justifierait la création, au moins à titre accessoire, du fichier positif.
Enfin, je veux évoquer l'article 11 quater C, qui permet aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de créer une société publique revêtant la forme d'une société anonyme. Cet article, dont les conséquences ne sauraient être prises à la légère, a pourtant été inséré incidemment dans un texte consacré à la régulation bancaire.
Cela explique mes nombreuses interrogations. Quels agréments seront nécessaires à la création de cette société publique ? Pourquoi ne mentionne-t-on pas explicitement dans cet article les termes d'« établissement financier » ? Cette société anonyme sera-t-elle soumise aux critères bâlois ?
Par ailleurs, la rédaction du texte prête à confusion : peut-on s'attendre à ce que plusieurs agences locales de financement naissent sur le territoire français ? Apportez-vous la garantie que l'établissement ainsi créé respectera les principes imposés par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et sera soumise à son contrôle ? Quelle coordination y aura-t-il entre cette agence de financement et les véhicules créés par l'État – je pense en particulier à la Société de financement local ?
On constate, depuis la fin 2012, que les établissements bancaires reviennent sur le marché du financement des collectivités territoriales : le secteur public local pourrait bientôt avoir l'embarras du choix au moment de souscrire un crédit. Par conséquent, alors qu'elle aurait pu trouver une justification il y a quelques mois, une telle structure paraît désormais inutile et sans fondement.
Il apparaît donc très clairement que cet article doit faire l'objet d'un projet de loi à part entière, car la création d'un tel établissement n'est pas sans conséquence. Nous ne pouvons pas, d'un côté, réguler et encadrer les établissements bancaires et, de l'autre, laisser la possibilité aux collectivités de créer une structure de financement dont le texte ne dit rien.