La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
suite
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
La parole est à M. Laurent Baumel.
Madame la présidente, monsieur le ministrede l'économie et des finances, madame la rapporteure de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, mes chers collègues, alors que nous examinons le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires en deuxième lecture, je veux rappeler la satisfaction qui fut la nôtre de discuter et d'adopter ce texte en première lecture. Nous avions eu en effet conscience, en janvier et en février derniers, de participer à l'une des réformes majeures de ce quinquennat.
Cette réforme traduit d'abord la promesse faite par François Hollande, lors de sa campagne électorale, de réduire l'emprise de la finance sur l'économie réelle, en séparant les activités bancaires utiles à l'économie des activités spéculatives et en cantonnant ces dernières dans des structures ne pouvant s'adosser, pour prospérer, à la ressource gratuite des dépôts.
En soumettant nos banques et l'ensemble du système financier à un nouveau système de contrôle préventif, cette réforme a pris à bras-le-corps l'enjeu primordial du rétablissement de la confiance et de la lutte contre l'aléa moral.
Après vous, monsieur le ministre, je veux rappeler ici que la première lecture nous avait fourni l'exemple, pour ne pas dire un modèle, d'une coopération législative réussie entre l'exécutif et le Parlement. À l'écoute des réflexions et parfois des interpellations émanant de la société civile et des citoyens, les députés, en particulier du groupe SRC mais également des autres groupes de la majorité, ont pu, grâce à vous, initier et faire adopter plusieurs amendements substantiels pour renforcer le projet de loi.
Je pense évidemment aux amendements relatifs à la lutte contre les paradis fiscaux, à ceux relatifs à la tenue de marché – ces amendements, je le répète, pourraient profondément changer l'ampleur de la filialisation des activités de marché – et aux amendements concernant le plafonnement des frais bancaires.
Ce processus itératif et coopératif, qui devrait d'ailleurs constituer la règle, s'est poursuivi au Sénat et continue à l'Assemblée à l'occasion de cette deuxième lecture.
Au nom de tous les députés SRC, monsieur le ministre, je veux saluer votre décision éminemment politique d'introduire, à l'occasion de cette deuxième lecture, par voie d'amendement, un plafonnement des bonus des traders et le renforcement des obligations faites aux banques en matière de lutte contre l'évasion et la fraude fiscales.
Je veux aussi vous remercier par avance de l'esprit d'ouverture dont vous ferez à nouveau preuve pour nous permettre, à la faveur de cette deuxième lecture, de continuer à perfectionner le texte de loi, en particulier en renforçant l'encadrement de la spéculation sur les matières premières agricoles et en étendant aux grandes groupes internationaux les obligations de transparence en matière d'activité dans les paradis fiscaux.
Cette deuxième lecture, comme cela a été le cas lors de la première lecture, offrira certainement l'occasion de quelques débats, quoique sans doute moins longs et moins passionnés.
Sur la question du plafonnement des frais bancaires, le groupe SRC réaffirmera son souhait de mettre en place un mécanisme d'encadrement effectif des frais bancaires pour tous les Français – pas seulement pour les plus fragiles, mais pour tous ceux qui, dans le contexte actuel, peuvent traverser des périodes difficiles. Autrement dit, notre groupe souhaite rétablir le texte initial.
Voici, résumé en quelques mots, monsieur le ministre, de quelle manière nous abordons cette nouvelle nuit bancaire, avec la satisfaction d'oeuvrer avec vous pour prévenir la survenance des crises, réguler les excès d'un secteur qui demeure vital pour notre économie et, surtout, améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, une fois n'est pas coutume, nous avons à débattre, en deuxième lecture, d'un texte qui s'éloigne quelque peu du projet de loi originel.
L'objectif annoncé était la séparation des activités de financement de l'économie et des activités spéculatives. La réalité est autre, puisque ce texte, quelque peu fourre-tout, mêle la régulation des activités bancaires, la protection du consommateur, l'évocation d'un dispositif relatif aux contrats d'assurance-vie en déshérence, et – dissimulée après un bis et un ter et avant un quater –, à l'article 11 quater C, la possibilité offerte aux collectivités territoriales de créer une société publique de financement.
Je ne souhaite pas rejeter en bloc ce texte, puisque certaines dispositions ne sont que le prolongement de ce qui avait été décidé par le précédent gouvernement dans le cadre de la supervision des activités de marché des banques et la stabilisation financière.
Je rappelle que nous avions alors renforcé la capacité des pouvoirs publics à intervenir dans la résolution des crises et que nous leur avions donné les moyens d'éviter, autant que faire se peut, la concrétisation des risques systémiques.
Ce mouvement s'inscrit d'ailleurs, comme cela a été rappelé plusieurs fois, dans une démarche européenne : nous attendons les conclusions de M. Michel Barnier et sa proposition de directive visant à la régulation bancaire.
Le renforcement du contrôle du tradingautomatisé, facilitant la lutte contre les pratiques spéculatives nuisibles ayant recours à des techniques de trading à haute fréquence, permettra de déceler certaines pratiques abusives. J'avais d'ailleurs souligné la frilosité du texte sur ce sujet dans mon intervention en première lecture : je constate que cette défaillance a été corrigée.
Quant à l'interdiction faite aux banques de pratiquer sur compte propre certaines activités trop risquées, elle relève du bon sens.
Je ne rejette donc pas l'idée d'une plus grande transparence de l'activité des banques, même s'il faut reconnaître que l'obligation leur incombant de publier un certain nombre de données sur l'ensemble des activités de leurs filiales à l'étranger pose un vrai problème de compétitivité.
Doit-on d'ailleurs rappeler que la crise bancaire ne trouve pas sa source dans les activités des banques françaises siégeant en France, ou même à l'étranger ? Cette crise de la finance n'est que l'écho des difficultés d'un système financier international dont on ne peut pas se couper.
Il faut donc surveiller et réguler, mais dans l'intérêt de l'assainissement d'un système nécessaire à l'économie. Autrement dit, il faut encadrer les excès de la finance.
Pour autant, les banques sont aussi des entreprises, qui emploient près de 400 000 salariés sur l'ensemble du territoire français. Interlocuteurs réguliers de nos PME, elles constituent un maillon indispensable de l'économie française.
J'accueille favorablement l'amendement qui a pour objet d'imposer l'information des commerçants sur le montant annuel des frais qu'ils supportent du fait des paiements par carte bancaire. Après avoir plaidé pour une baisse des commissions interbancaires sous la précédente législature, je reconnais que cette disposition permettra aux commerçants d'évaluer l'impact de ces frais. C'était d'ailleurs une proposition que nous avions émise dans le cadre du groupe de travail sur les commissions interbancaires.
Permettez-moi de vous faire part de mon incompréhension concernant le volet du texte relatif à la protection des consommateurs, notamment s'agissant des articles ayant trait au surendettement : vous nous aviez annoncé la création d'un fichier positif, qui est absent du texte relatif à la consommation. Il semblerait que vous ayez peur du débat sur ce sujet. Pourquoi ne pas avoir créé un chapitre consacré à part entière au surendettement ? Ce problème concerne de nombreux Français, ce qui justifierait la création, au moins à titre accessoire, du fichier positif.
Enfin, je veux évoquer l'article 11 quater C, qui permet aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de créer une société publique revêtant la forme d'une société anonyme. Cet article, dont les conséquences ne sauraient être prises à la légère, a pourtant été inséré incidemment dans un texte consacré à la régulation bancaire.
Cela explique mes nombreuses interrogations. Quels agréments seront nécessaires à la création de cette société publique ? Pourquoi ne mentionne-t-on pas explicitement dans cet article les termes d'« établissement financier » ? Cette société anonyme sera-t-elle soumise aux critères bâlois ?
Par ailleurs, la rédaction du texte prête à confusion : peut-on s'attendre à ce que plusieurs agences locales de financement naissent sur le territoire français ? Apportez-vous la garantie que l'établissement ainsi créé respectera les principes imposés par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et sera soumise à son contrôle ? Quelle coordination y aura-t-il entre cette agence de financement et les véhicules créés par l'État – je pense en particulier à la Société de financement local ?
On constate, depuis la fin 2012, que les établissements bancaires reviennent sur le marché du financement des collectivités territoriales : le secteur public local pourrait bientôt avoir l'embarras du choix au moment de souscrire un crédit. Par conséquent, alors qu'elle aurait pu trouver une justification il y a quelques mois, une telle structure paraît désormais inutile et sans fondement.
Il apparaît donc très clairement que cet article doit faire l'objet d'un projet de loi à part entière, car la création d'un tel établissement n'est pas sans conséquence. Nous ne pouvons pas, d'un côté, réguler et encadrer les établissements bancaires et, de l'autre, laisser la possibilité aux collectivités de créer une structure de financement dont le texte ne dit rien.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, chers collègues, le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires a été fortement enrichi en première lecture par notre assemblée.
Tout comme nombre de députés, les sénateurs ont, pour leur part, plaidé pour un renforcement de la régulation des banques. Plusieurs modifications ont ainsi été adoptées par le Sénat, qu'il convient de souligner.
La répression des abus de marché a été renforcée : pourront ainsi être condamnées, non seulement des personnes convaincues de délits d'initié ou de diffusion de fausses informations, mais également les personnes qui auraient tenté de commettre de tels délits.
Toutefois, les moyens doivent être à la hauteur des intentions, ce qui implique qu'ils soient accrus. On peut raisonnablement penser qu'une augmentation des moyens de contrôle et de répression sera nettement moins coûteuse pour l'économie mondiale que les conséquences de l'affaire Madoff ou la manipulation du LIBOR.
De réelles avancées ont également été introduites par les sénateurs s'agissant de la régulation du marché des matières premières agricoles. Notre assemblée doit maintenir la disposition prévoyant de limiter les positions sur les instruments financiers dont le sous-jacent est une matière première agricole. Nous devons nous assurer qu'au-delà d'un certain seuil, toute personne détenant de tels instruments financiers devra communiquer ses positions à l'AMF. Ce contrôle doit permettre de distinguer, d'une part, les agriculteurs qui se protègent des risques de retournement de marché – ce qui est tout à fait légitime –, et d'autre part, des opérateurs qui spéculent, mettent en danger des populations et déstabilisent certaines régions du monde.
Au-delà du maintien des avancées obtenues à l'Assemblée et au Sénat, les députés du groupe RRDP souhaitent que plusieurs améliorations soient apportées au projet de loi. Certaines annonces du Président de la République relatives à la lutte contre la grande délinquance économique et financière peuvent et doivent être mises en place dès à présent.
Un dispositif significatif de lutte contre les paradis fiscaux a été introduit par notre assemblée : les banques devront indiquer la liste de leurs implantations dans chaque État et fournir plusieurs types d'informations.
Nous avions demandé que le montant des impôts soit également dévoilé. Refusée à l'Assemblée, cette disposition a été adoptée au Sénat. À l'Assemblée nationale, on nous a soutenu qu'elle risquait de déstabiliser les banques ; au Sénat, le Gouvernement y a trouvé une vertu en donnant un avis favorable. Le livre de la révélation fiscale avait sans doute dû être consulté pour nous éviter de plonger dans l'apocalypse bancaire… Il est en tout cas absolument indispensable que ces informations soient disponibles le plus rapidement possible ; non pas en 2015, mais en 2014.
Par ailleurs, il nous semble trop restrictif de limiter cette obligation d'information aux seules banques ayant leur siège social en France. Pourquoi toutes les banques réalisant des activités bancaires en France ne seraient-elles pas soumises à une telle obligation ? Si l'on dispense les banques qui interviennent marginalement en France, au moins faudrait-il que celles qui y réalisent des chiffres d'affaires conséquents soient soumises aux mêmes obligations que les banques françaises. Certains expliqueront qu'on ne peut pas prendre de telles décisions de façon unilatérale, sans consulter nos partenaires. Les États-Unis le font pourtant ! Ils n'hésitent pas à requérir des banques étrangères les mêmes ratios de liquidité qu'ils imposent à leurs propres banques.
L'autre point qui nous paraît crucial est l'encadrement par la loi des rémunérations des dirigeants de banques. Il est regrettable de s'en remettre, une fois de plus, à l'autorégulation. Cette méthode a été utilisée à plusieurs reprises ; elle a échoué. Il faut légiférer, tout particulièrement dans le domaine bancaire.
La crise financière de 2008 l'a montré : le système de rémunération actuel fait préférer le court terme au long terme, la prise de risque inconsidérée à l'audace raisonnée. L'encadrement des rémunérations dans le secteur bancaire répond non seulement à l'exigence de décence, mais aussi à un impératif de maîtrise des risques. Réguler les rémunérations dans un secteur aussi stratégique que la banque, c'est aussi envoyer un signal clair aux autres grandes entreprises : « Si vous ne faites rien, alors nous passerons par la loi ». Imposer que la part variable des rémunérations ne dépasse pas la part fixe, ce serait, monsieur le ministre, rendre crédible votre demande d'autorégulation.
Enfin, le trading à haute fréquence doit être tout simplement interdit. Il contribue en effet à la délinquance économique en raison du danger qu'il fait peser sur les économies et il échappe à tout contrôle. Les députés du groupe RRDP avaient voté en faveur du texte en première lecture, tout en émettant le souhait que les lectures ultérieures au Sénat et à l'Assemblée permettent d'aller plus loin. Nous réitérons ce souhait.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, lors de la première lecture de ce texte, j'avais, de manière isolée,…
…déposé des amendements afin que le dispositif de séparation des banques d'affaires et des banques de dépôt soit renforcé. Minoritaire sur cette ligne, je remercie mes collègues de me permettre néanmoins de m'exprimer ce soir lors de cette deuxième lecture. Je ne déposerai cette fois aucun amendement ; j'évoquerai seulement un certain nombre de faits qui, en se croisant, laissent mes interrogations, voire mes inquiétudes, intactes.
Monsieur le ministre, madame la rapporteure, permettez-moi tout d'abord de rappeler une conviction – largement partagée, me semble-t-il – sur la question initiale de la séparation. En décembre 2012, Angel Gurria, le secrétaire général de l'OCDE, organisation qui n'est pas réputée pour son gauchisme déviant
Sourires
, a déclaré, s'agissant des banques : « Le modèle préféré de l'OCDE est la séparation juridique et le cantonnement sous la forme d'une holding non opérationnelle ». Il a affirmé qu'une banque scindée pouvait parfaitement survivre et il a rappelé qu'un niveau de fonds propres non pondéré de 5 % des actifs était « recommandé par l'OCDE ». Or, je rappelle que nos grandes banques systémiques ont un niveau moyen de fonds propres inférieur à 3 % et que l'OCDE a également chiffré le besoin de recapitalisation minimal à 150 milliards d'euros, soit 7,4 fois le PIB français, ce qui fait de notre pays est celui qui a les plus grands besoins de recapitalisation après la Grèce.
Mes chers collègues, nous avons encore en mémoire les déclarations du directeur général de Crédit agricole SA, que nous avons auditionné en commission des finances. Il avait alors déclaré : « Les grandes banques françaises ont cependant mieux traversé les crises que leurs homologues internationales », ajoutant un peu plus tard : « Les banques ont d'ores et déjà réduit leurs activités de marché ». Moins de quarante-huit heures plus tard, cette banque annonçait une perte de 6 milliards d'euros pour 2012. Nous avons appris par la suite que la taille au bilan des activités de marché de cet établissement avait augmenté de 130 milliards d'euros pendant que les prêts accordés à ses clients baissaient de 70 milliards d'euros ; à l'évidence, nous n'avons pas la même notion de ce qu'est une réduction. Le fait que cet établissement est désormais la banque systémique la moins capitalisée du monde, après avoir été la plus capitalisée dans les années quatre-vingt, devrait pourtant inciter ses dirigeants à faire preuve de plus d'humilité et à opérer une sévère analyse critique du modèle suivi.
Bien au contraire, les activités spéculatives à très haut risque ne cessent de croître. Ainsi, en une vingtaine d'années, le montant brut des engagements de toutes les banques françaises sur les produits dérivés a progressé, pour passer d'un montant à peu près nul – nous nous en passions alors fort bien – à plus de 100 000 milliards d'euros, selon le bilan des banques et l'Autorité de contrôle prudentiel, ce qui correspond à cinq siècles de recettes de l'État !
Le 22 mai dernier, en commission, les représentants de la société Dexia SA nous ont confié que cette dernière avait une perte économique latente de 29 milliards d'euros sur ces produits, alors que leur exposition n'était « que » de 450 milliards d'engagements ; eh oui, 450 milliards d'euros, pour la finance, c'est désormais peu ! Comment ne pas être inquiets face à ce déluge de montants et de pertes qui semblent sortis d'un jeu de Monopoly, à cette différence près que les contribuables et les banques centrales doivent remettre au pot quand les joueurs perdent gros ?
Enfin, nous avons vu en mars que désormais, quand les banques perdent très gros, ce sont les déposants qui renflouent, en particulier les entreprises, quitte à déchaîner des dépressions dantesques : on parle désormais d'une décroissance à deux chiffres pour Chypre, et ce n'est que le début… J'imagine que cet épisode final a probablement changé le regard de la population sur le choix stratégique d'une prolifération sans limite du secteur bancaire. Certaines leçons d'évidence sont, hélas ! bien cruelles.
Sombre tableau que la situation de notre paysage bancaire ! Notre projet de loi apporte les premières solutions, mais nous sommes encore loin des préconisations de l'OCDE, du FMI, de nombreux anciens banquiers, de prix Nobel, et même des libéraux.
Hélas ! en France, monsieur le ministre, « ce que banquier veut, banquier a », plusieurs membres influents de l'inspection des finances veillant à ne surtout pas égratigner la fabuleuse poule aux oeufs d'or pour dirigeants que sont nos méga-banques. N'oublions pas que c'est l'équivalent d'une promotion de l'ENA – près de quatre-vingts personnes – qui dirige désormais les quatre banques françaises soumises au risque systémique, allant y faire fortune après ne les avoir surtout pas réformées...
Alea jacta est pour la séparation. Puissions-nous au moins, au cours de cette deuxième lecture, poursuivre l'amélioration du mécanisme de résolution pour lui donner plus de transparence, afin de garantir en pratique l'intégralité des dépôts des Français !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.
Monsieur le ministre, votre texte sur la séparation et la régulation des activités bancaires, largement complété par le Parlement, était présenté comme un texte phare de la moralisation de l'économie et de la protection des épargnants.
Il faut certes saluer de bonnes intentions, qui entendent remédier aux récents scandales. On ne peut, par exemple, qu'être favorable à une sanction des manipulations d'indices, à l'encadrement du recours des collectivités aux produits structurés ou à un meilleur contrôle des bonus.
Il est regrettable que le Liborgate, les emprunts toxiques des communes et les années de bonus indécents aient déjà enrichi les banquiers peu scrupuleux ; mais la finance a toujours eu un coup d'avance sur la loi…
Alors, sans entrer dans le détail des dispositions du texte, il convient de regarder si celui-ci s'est donné les moyens d'atteindre ses principaux objectifs, à savoir mettre en place des garde-fous pour éviter que des activités spéculatives ne viennent menacer l'épargne des ménages et prévenir le risque systémique en cas de faillite d'une banque.
L'aveu de départ des grands patrons reste inchangé : moins de 1 % des activités des grandes banques sera touché par l'obligation de filialiser. La montagne accouche donc toujours d'une souris.
Mais ce qui est bien plus inquiétant, c'est que loin de protéger les épargnants, le projet de loi semble rendre possible un scénario à la chypriote. Il prévoit en effet, dans son titre II, un nouveau mécanisme de résolution des crises bancaires, articulé autour d'une autorité de contrôle et d'un fonds de garantie.
L'autorité de contrôle se voit imposer des objectifs clairement hiérarchisés dans l'article 5 : préserver la stabilité financière et la continuité des établissements dont la défaillance aurait de graves conséquences et, ensuite seulement, protéger les déposants et éviter le recours aux soutiens financiers publics. Tout est dit : d'abord la finance, ensuite les autres, comme en 2008.
Mieux encore, dans l'article 6, on découvre que c'est le fonds de garantie des épargnants qui pourra désormais être utilisé pour renflouer un établissement financier jugé défaillant. Cela aboutit de fait à supprimer la garantie de l'épargne pour les dépôts inférieurs à 100 000 euros afin de renflouer les pertes financières des banques qui iraient spéculer. C'est la privatisation des profits et la collectivisation des pertes.
Un tel mécanisme s'avérerait en outre parfaitement insuffisant pour prévenir un risque systémique, compte tenu de sa dotation et des sommes en jeu.
Comment ne pas faire le rapprochement avec le sauvetage de Chypre cette année ?
Pour que les États paient les intérêts de leur dette et qu'ils remboursent ce qu'ils doivent, l'Union européenne pense sans doute que la solution réside dans une ponction généralisée sur les avoirs bancaires. C'est peut-être la surprise qui nous attend dans la directive européenne à venir...
Par le passé, on a déjà pratiqué l'emprunt forcé. Ici, on prendrait sans avoir l'intention ni de rendre ni de verser un intérêt, à la manière de Don Salluste spoliant le bon peuple qui, étonné de ne pas se voir lynché, s'exclame : « J'aurais dû leur prendre le triple ! »
Même si elle est nécessaire, la filialisation des activités à risque doit s'inscrire dans une réflexion plus large sur la finalité des banques. Le véritable problème vient de la nature du système financier, qui s'apparente toujours plus à un casino : plus les banques prennent de risques, plus elles peuvent faire de profits.
Dès lors, leur inventivité est sans limites : junk bonds, subprimes, hedge funds, produits structurés, effets de leviers, swaps, produits dérivés en tous genres, tout ce que la déréglementation mondiale encouragée par l'Amérique des années Greenspan a rendu possible est exploité.
Inventivité et impunité : après la crise de 2008, combien de grands patrons de banques ou de traders ont fini en prison ou ont dû rembourser leurs millions ? Presque aucun ! Du plan Bush-Paulson de 2008, d'un montant de 700 milliards de dollars, à ceux de l'Union européenne pour sauver la Grèce ou Chypre, c'est toujours le contribuable qui paie.
La France n'est pas en reste. Il y a vingt ans, les délires de la banque industrie du Crédit Lyonnais ont laissé une ardoise de plus de 20 milliards d'euros aux Français. M. Haberer avait écopé en appel d'un euro de dommages et intérêts ! Il est vrai qu'il avait été inspecteur des finances et directeur du Trésor.
Il n'est pas étonnant de voir que votre texte ne marque, contre ces pratiques, aucune remise en cause majeure. Comment le pourrait-il alors que de nombreux pontes de Bercy attendent leur tour pour pantoufler dans le privé, notamment dans le secteur financier ?
Votre texte a toutes les chances de n'être qu'un leurre, car vous voulez nous faire croire que les banques marcheront au pas, alors qu'en réalité elles mènent la danse.
Les moyens de contrôle dont dispose l'Autorité des marchés financiers sont à l'évidence insuffisants face à la multitude des transactions et aux montages sophistiqués des banques pour leurs activités.
Je ne suis pas fataliste, mais comment un État dont le financement nécessite d'emprunter 170 milliards d'euros cette année encore sur les marchés et qui doit rembourser une dette de plus de 2 000 milliards d'euros pourrait-il se permettre d'être autoritaire face à la puissance des grands établissements financiers ? Ce même État a organisé son emprunt sur les marchés avec la loi de 1973, entre autres instruments juridiques.
Le ministre de l'économie se félicite de créer ici la réglementation la plus contraignante des pays développés. Peut-être, mais par rapport à qui ? Chypre ? La City ? L'Amérique de Goldman Sachs et des subprimes ?
Vous nous avez menés dans une impasse où, malgré les belles phrases et les lois qui sonnent dur, le politique n'a plus la main face aux folles pratiques de la finance.
C'est une lourde responsabilité de trente ans que vous portez avec l'UMP et un fardeau dont les citoyens libres ne veulent plus.
Madame la présidente, madame la rapporteure, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu'il est long le chemin, qu'il est long ! Combien de temps, entre l'indignation et la transparence acquise cette nuit sur les grands paradis fiscaux ? Et combien de temps nous faudra-t-il encore pour passer de la transparence à l'interdit ?
Aujourd'hui, sur ce long chemin, nous avons posé deux bornes. La première consiste à trier le bon grain de l'ivraie en identifiant les fonds spéculatifs en matière agricole et alimentaire. À cet égard, je me réjouis, chers collègues de l'opposition, que vous ayez soutenu l'amendement relatif à ce sujet à l'unanimité en commission des finances. La deuxième borne concerne la transparence sur les activités des banques dans les paradis fiscaux.
Ce soir, nous allons poser un jalon. Je porterai au nom du groupe SRC et, plus largement, je pense, de toute la majorité, la proposition d'étendre cette transparence aux activités financières des multinationales.
Ce projet de loi, après une première lecture, arrive en deuxième lecture devant notre assemblée. Trois leçons peuvent être tirées pour cette cause qui s'est invitée comme un vent favorable dans ce texte en le faisant virer à bâbord.
Premièrement, l'opposition du réalisme et de l'angélisme, auquel certains ont feint d'accorder du crédit, était un faux débat. Le vrai débat consiste à opposer l'économie réelle – celle du travail, de la créativité, de la valeur ajoutée – à toutes les spéculations inutiles, dangereuses et parfois mafieuses.
Il n'y a donc pas de vain combat contre la mondialisation, mais une urgence s'impose : celle d'interroger ses finalités et de dévoiler l'iniquité de ses chaînes de valeur. L'enjeu ici est de tracer la ligne ténue entre l'optimisation et la fraude fiscale ; il est de rappeler que, comme le disait François Perroux, en économie, il y a des choses qui ont un prix, et d'autres qui n'en ont pas.
La deuxième leçon est que seules les alliances font bouger les lignes. Je tiens tout d'abord à saluer les ONG organisées en plate-forme, qui ont su, grâce à leurs militants, ceux qui partagent leur temps et leur argent, nous convaincre petit à petit, pas à pas : ils sont des sentinelles et des passeurs. Je salue également le Parlement et ses pionniers qui siégeaient parmi nous il y a dix ans – Vincent Peillon, Gilbert Le Bris et Arnaud Montebourg – et qui ont ouvert la voie. Enfin, je remercie le Gouvernement, en particulier M. le ministre, qui a su bouger et faire bouger les conservatismes.
Cette avancée n'est pas le fruit de l'action de la France ou de l'Europe, encore moins de la France contre l'Europe ; elle est le fruit de l'action de la France en Europe et avec l'Europe.
Il nous faut cultiver, en ces temps moroses, ces cercles vertueux que sont le triptyque « citoyens, État, entreprises », mais aussi le lien entre l'innovation nationale et la coopération européenne.
Dernière leçon : nous ne sommes qu'à l'aube du combat pour une justice à l'échelle du monde, notre monde. Nous examinerons bientôt le projet de loi contre la fraude et l'évasion fiscale, mais Dacca et ses 1 117 morts fixent une nouvelle frontière : la responsabilité juridique des multinationales vis-à-vis de leurs filiales et de leurs sous-traitants.
Oui, qu'il est long, le chemin ! Nous pouvons dédier cette étape législative aux héros anonymes qui luttent contre les esclavages modernes dans tous les Rana plaza de la planète. Ils sont les héritiers de Georges Guérin, le fondateur de la JOC, né à quelques kilomètres de chez moi, qui disait que « la vie d'un jeune travailleur vaut plus que tout l'or du monde ».
L'esprit de résistance de ces syndicalistes, de ces militants des droits de l'homme qui, sous d'autres contrées, luttent pour la dignité humaine, nous rappelle qu'un autre monde est possible.
Je pense aussi aux gens de mon village, tout simplement, à ceux qui n'ont d'autre choix que de payer leur part d'impôt, pour l'école, les gamins, l'hôpital, la sécurité. Je forme le voeu que jamais plus une aristocratie publique ou privée – parfois les deux à la fois – n'use de ses privilèges au prix de la souffrance et de l'humiliation du peuple. Car cette suffisance dans l'appât du gain nourrit ici le populisme et ailleurs le fanatisme.
La force des mots de Pierre Mendès France est intacte : « À la fin des fins, si l'on veut faire le gouvernement du possible, pour lequel il faut s'adresser à la Nation en lui disant toute la vérité et toutes les obligations qui en découlent pour chacun, le principe doit être l'égalité absolue dans le partage des sacrifices ».
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, nous aurons l'occasion de revenir sur les points qui font débat dans le cadre de la discussion des articles, mais je veux répondre en quelques mots aux interventions liminaires. Je souhaite d'abord remercier la rapporteure et les orateurs de tous les bancs, particulièrement – on le comprendra – ceux des groupes SRC et écologiste.
Le travail accompli en première lecture a été de qualité, et je leur en sais gré. Je veux vous rassurer, monsieur Lamour : le Gouvernement n'a pas été débordé par sa majorité. Peut-être n'êtes-vous pas coutumier de ces pratiques, mais le Gouvernement est à l'écoute du Parlement et prend en compte ses amendements.
La « coproduction » : n'était-ce pas, jadis, une idée de Jean-François Copé ? Je le reconnais volontiers, ce n'est pas une spécialité partagée par tous, mais dans notre cas, elle était tout à fait volontaire et maîtrisée. Au bout du compte, le texte sera plus riche et tout aussi cohérent. Évidemment, des divergences d'appréciation demeurent, mais nous sommes en train de construire une loi qui sera, je crois, une référence.
Je veux rassurer les orateurs de l'opposition ; ils n'ont rien à craindre pour la compétitivité du système financier français. À chaque moment, j'ai veillé à ce que nous agissions vraiment dans le sens de la réforme et du changement, comme Jean Launay, avec ses accents particuliers, y a appelé. Je suis résolument pour la régulation, la maîtrise de la finance et de la spéculation. C'est l'esprit de la campagne du candidat François Hollande que nous mettons en oeuvre aujourd'hui. Mais nous sommes également réalistes, ce qui n'est en rien contradictoire. Nous souhaitons un système financier compétitif, qui soit au service de l'économie, afin que l'économie réelle soit plus prospère.
J'ai relevé chez les orateurs de l'opposition quelques contradictions : certains jugent ce texte trop modeste, d'autres le trouvent idéologique ; certains déplorent sa vacuité, d'autres soulignent un trop-plein. J'y vois la preuve qu'il se situe, en réalité, sur le bon créneau.
Mme Maréchal-Le Pen est partie, mais je dois dire qu'elle commet une confusion assez lourde lorsqu'elle rappelle sans arrêt la situation de Chypre : c'est précisément ce type de régulation qui empêchera les systèmes bancaires de connaître des croissances incontrôlées et incontrôlables, jusqu'à l'hypertrophie, et c'est sans doute ce qui a manqué.
Nous sommes en train de faire à l'échelle européenne, et à l'initiative de la France, l'union bancaire, dont les volets sont la supervision, la résolution – fondamentale – et la garantie des dépôts. Si ce texte anticipe sur ces trois dimensions, c'est précisément pour qu'une telle crise ne puisse pas se reproduire.
Nous devons lutter contre la fragmentation du système financier, contre son hypertrophie, contre l'absence de contrôle. C'est ce que nous voulons faire pour notre pays, dans une logique qui est, je le répète, tout à fait cohérente avec notre vision européenne et notre volonté d'être leaders en la matière.
Mesdames, messieurs les orateurs de l'opposition, je ne désespère pas de vous convaincre, mais je ne suis pas persuadé que vous soyez tout à fait prêts à m'entendre. En première lecture, vous avez condamné l'amendement sur la transparence des activités des banques, arguant que nous étions en train de casser la compétitivité du système bancaire français. Or, je constate que, la semaine suivante, l'Union vous a donné tort.
Je le confesse, il n'y a pas, en Europe, que des gouvernements socialistes, ou de gauche. On peut le regretter.
Quoi qu'il en soit, je discute beaucoup avec des ministres conservateurs ; ce sont eux qui ont entériné les avancées que nous avions proposées. N'ayez donc pas peur – et cela vaut pour les amendements que nous examinerons ce soir : L'Europe et la France avancent de conserve. La France fixe un cap et s'inscrit dans un contexte européen. Ne soyons pas frileux ; nous serions dépassés par la logique européenne. Je préfère que nous la précédions et que nous nous inscrivions résolument dans ce sillon. Voilà l'esprit qui sera le mien ce soir.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
J'appelle maintenant dans le texte de la commission les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées n'ont pu parvenir à un texte identique.
L'article 1er A est adopté.
L'amendement vise à supprimer l'alinéa 7, afin de cantonner la tenue de marché dans les filiales.
La parole est Mme la rapporteure de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
Nous avons déjà eu cette discussion en première lecture. L'ensemble de la tenue de marché n'est pas spéculative. Avis défavorable.
Même avis que la commission.
L'amendement n° 15 n'est pas adopté.
L'objectif du projet de loi est de réduire les risques pesant sur le système financier. La tenue de marché, bien qu'elle soit utile à l'économie dans certains cas, présente un risque pour la banque lorsque cette activité devient trop importante.
Un amendement a été adopté en commission sur ce point, mais il donne à l'exécutif un pouvoir d'appréciation trop important. Il est du devoir du législateur de prendre position. L'amendement n° 17 permettrait, à cet égard, d'envoyer un signal clair aux pays membres de l'Union européenne. Il vise en effet à rédiger ainsi la fin de l'alinéa 7 : « dès lors que les opérations n'excèdent pas un pourcentage du produit net bancaire consolidé fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie après avis de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ; ».
L'amendement est satisfait par le texte, mon cher collègue. Je vous demande donc de le retirer, à défaut de quoi j'émettrai un avis défavorable.
Même avis que la commission.
L'amendement n° 17 n'est pas adopté.
L'amendement n° 64 est retiré.
Sans négliger les avancées du Sénat sur ce point, nous proposons, par cet amendement, de filialiser l'ensemble de l'activité de prêt aux fonds à effets de levier, autrement dit aux hedge funds, qui pratiquent la gestion alternative avec un niveau de risque élevé et exploitent les anomalies du marché et les failles de la réglementation financière.
Selon le cabinet d'analyse financière Eurekahedge, on dénombre 11 500 hedge funds dans le monde. Peu ou pas réglementées, leurs pratiques sont au mieux peu transparentes, au pire franchement opaques. C'est le cas lorsqu'elles concernent les produits dérivés, qui s'échangent le plus souvent de gré à gré, sans passer par des plateformes de trading organisées, et échappent donc à une grande partie des contrôles.
Rappelons en outre que la moitié des hedge funds sont implantés dans des paradis fiscaux ou en offshore, non seulement à cause des avantages fiscaux qu'ils en retirent mais également afin de permettre aux investisseurs d'investir où ils le souhaitent en échappant aux instruments de régulation.
Enfin, on sait qu'un certain nombre de ces fameux hedge funds ont tiré profit de la crise, notamment en spéculant sur les dettes souveraines des pays en difficulté.
En l'absence de mesures d'encadrement rigoureux de ces pratiques par nature spéculative, il nous semble sage d'adopter le présent amendement de cantonnement des activités de prêt des banques à ces fonds d'investissement.
Cet amendement est motivé par notre souci de vigilance, partagé, je le sais, par plusieurs de nos collègues.
Cher collègue, prévoir la filialisation d'un pourcentage des activités de marché répond largement à votre souci. L'ensemble des activités réalisées avec les hedge funds ne sont pas systématiquement de nature spéculative et les risques de débordement sont prévus par le pourcentage de filialisation. Au vu de l'équilibre du texte à ce stade, cet amendement n'est pas nécessaire. Je vous invite donc à le retirer, sans quoi je donnerai un avis défavorable.
Même avis que la commission.
L'amendement n° 50 n'est pas adopté.
Monsieur le ministre, nous apprécions la façon dont le Gouvernement a accepté tout au long de ces débats de renforcer l'arsenal législatif français pour lutter contre les paradis fiscaux – un combat qui est aussi européen.
En cohérence avec les engagements de transparence bancaire pris par le Gouvernement, le présent amendement propose de cantonner dans la filiale les opérations réalisées par la banque pour son propre compte, avec des contreparties situées dans les États qualifiés aujourd'hui de non coopératifs.
Cet amendement pourrait donc donner une arme supplémentaire à notre législation. J'ai bien entendu la manière dont l'opposition appréciait l'offensive menée contre les paradis fiscaux : dans la discussion générale, M. Lamour a donné l'impression qu'il était urgent de ne rien faire.
Pour notre part, nous pensons que cette loi, telle qu'elle se construit, fournira des armes considérables pour permettre une sortie progressive des banques françaises et européennes des paradis fiscaux. Nous proposons simplement d'aller un peu plus loin et un peu plus vite.
Cher collègue, nous avons tous compris l'esprit de votre intervention. Vous mettez l'accent sur deux aspects importants de la loi : la filialisation et la lutte contre les paradis fiscaux.
C'est précisément la difficulté. Le choix a été fait de raisonner en filialisation, c'est-à-dire la séparation par activité et non par nature géographique du tiers. Filialiser les activités uniquement avec les États non coopératifs est techniquement très difficile et ne donnerait pas forcément les résultats escomptés.
Nous avons choisi de rester dans une logique de séparation des activités, et non pas dans une logique de prise en compte du risque du client – ou de l'autre partie à l'opération. Par ailleurs, le ministre a annoncé des avancées très fortes en matière de FATCA européen.
Gardons la logique de l'article 1er, la séparation des activités, et appuyons-nous sur le FATCA européen pour répondre très rapidement au souci qui est le vôtre, mettre fin aux activités avec les États non coopératifs.
Je vous invite à retirer votre amendement pour préserver la logique du texte. Je le répète, le FATCA européen répondra largement à votre souci.
Monsieur le député, je vous demande également de retirer votre amendement, pour les raisons qu'a exposées Mme la rapporteure. Nous allons progresser dans cette direction, d'une façon plus efficace encore et qui répondra à votre préoccupation.
Cet amendement avait été déposé avant que le ministre, au début de la discussion, ne fasse état des avancées européennes et de la volonté très nette de la France de les amplifier dans les mois qui viennent.
Nous y reviendrons lors de l'examen de l'article 4 bis, qui concerne plus directement les filiales, mais il est important pour la suite de ce débat que l'on puisse fixer un cap, un objectif : il s'agit de faire sortir progressivement des paradis fiscaux les banques françaises et européennes. Nous serions très fiers que cet engagement soit pris et respecté au cours de cette législature.
Par ailleurs, madame la rapporteure, il est évident, sur un plan pratique, que les dispositions de l'article 4 bis auront pour effet de mettre sous la pression des opinions publiques nationale, européenne et mondiale l'activité des filiales des banques dans les paradis fiscaux. On le sait, certaines grandes banques françaises possèdent aujourd'hui des dizaines de filiales dans les paradis fiscaux. Elles devront rendre des comptes sur ces activités-là au même titre, espérons-le, que les autres banques européennes. Il y a un effet de tenaille qui n'est peut-être pas encore tout à fait réalisé dans la loi ; c'est pourquoi les règles européennes seront essentielles. Il faut mettre en lumière l'activité des filiales des banques dans l'ensemble des pays du monde – c'est le sens de l'article 4 bis – mais aussi, progressivement, prendre davantage de mesures de prohibition ou de même nature que celle-ci, en direction des pays les moins coopératifs.
Je retire mon amendement.
L'amendement n° 63 est retiré.
Je le retire, car il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 15 , qui n'a pas été adopté.
L'amendement n° 16 est retiré.
Cet amendement, relatif au trading à haute fréquence, vise à interdire toutes ces dangereuses activités de nature spéculative.
Le projet de loi, en effet, n'interdit que les activités taxables au titre de l'article 235 ter ZD bis du code général des impôts, c'est-à-dire une infime partie des activités de tradingà haute fréquence. Parce que ces activités correspondent à des ordres de marché parfois passés en moins d'une demi-seconde et n'ayant de ce fait aucune traçabilité, la prudence commande de les interdire pour éviter une délinquance potentielle.
Monsieur le député, vous souhaitez élargir le champ de l'interdiction du trading à haute fréquence. Je comprends la logique de votre intervention, mais cette mesure ne serait pas opérationnelle pour le moment, compte tenu du fonctionnement actuel des marchés financiers.
Je profite par ailleurs de cette occasion pour souligner l'importance du travail réalisé par le Sénat puisqu'il a regroupé plusieurs dispositions relatives à l'encadrement du négoce à haute fréquence pour lutter, en particulier, contre l'annulation d'ordres, pratique qui représente aujourd'hui environ 90 % du trading à haute fréquence.
Nous avançons donc très rapidement sur ce sujet. Ces dispositions font partie de celles qui, notamment au niveau de la directive CRD IV, seront abordées de manière transversale en Europe, en particulier sur la place de la City. Attendons pour aller plus loin encore les conséquences européennes et ne déstabilisons pas notre texte pour le moment.
Je vous invite à retirer votre amendement, sinon j'y rendrai un avis défavorable.
Même avis que la commission.
Non, je le maintiens, car nous devons donner un signal très fort à l'Union européenne.
L'amendement n° 18 n'est pas adopté.
Nous avons eu de nombreux débats en première lecture à propos de la spéculation financière sur les marchés dérivés de matières premières agricoles. Poursuivant ce travail, le Sénat a décidé d'étendre les mesures de sanction des abus de marché adoptées à notre initiative aux pratiques de manipulation de cours de matières premières. A également été inscrit un principe de limite de position visant à lutter contre l'extrême volatilité des prix alimentaires. Nous nous réjouissons des progrès réalisés, compte tenu de l'impact des activités bancaires sur les marchés agricoles et alors que le respect du droit à l'alimentation de centaines de millions de personnes est en jeu.
En commission, la semaine dernière, le dispositif a été encore complété par l'interdiction faite aux banques de constituer des stocks physiques de matières premières agricoles. Les banques auront également l'obligation d'indiquer dans leur rapport annuel les moyens mis en oeuvre pour éviter de participer à la spéculation sur le cours des matières premières agricoles.
Si elle est bienvenue, cette mesure de transparence ne nous interdit nullement de franchir un pas supplémentaire en interdisant de spéculer sur les matières premières agricoles car, si le projet de loi interdit la spéculation sur les produits agricoles pour compte propre, il ne touche nullement aux opérations visant à structurer un produit et le vendre à des clients.
Je pose une question au ministre et à la rapporteure : les mesures de transparence adoptées à l'article 4 quinquies B permettent-elles de pallier cette éventualité ?
Je crois pouvoir répondre par l'affirmative à votre question, mon cher collègue, mais nous y reviendrons lors de l'examen de l'article 4 quinquies B.
Les avancées en matière de lutte contre les spéculations sur les matières premières agricoles sont étonnamment fortes dans ce texte. Les objectifs que vous poursuivez sont satisfaits par les articles tels qu'ils sont rédigés. Je vous invite donc à retirer à ce stade votre amendement et nous reprendrons la discussion à l'article concerné.
Même avis que la commission.
L'amendement n° 51 est retiré.
Cet amendement vise à interdire les fonds indiciels reposant pour tout ou partie sur des matières premières agricoles, qui ont pour objet de couvrir les risques de volatilité des cours alors même qu'ils contribuent eux-mêmes à cette volatilité.
Je reconnais que cet amendement est assez « entier », mais il est difficile de distinguer les fonds purement spéculatifs des autres. Sachez simplement que depuis 1996, la part des fonds exclusivement destinés à assurer une couverture est passée de 88 % à 35 %. Les autres ont servi à spéculer, ce qui a favorisé la hausse des prix. Il serait convenable de mettre un terme à ce cercle vicieux. C'est vrai, des amendements adoptés au Sénat ont permis de progresser, d'autres arriveront encore, mais il fallait tout de même insister sur ce point.
Nous ne pouvons malheureusement pas compter sur les seules banques pour se réguler. Quand Oxfam a dénoncé un certain nombre de pratiques, quelques banques ont renoncé, dans les jours qui ont suivi, à des fonds indiciels, ce qui prouve qu'elles ne sont pas très à l'aise avec ces produits.
Le débat qui s'est noué sur cette question en première lecture et au début de la deuxième montre que nous avons bien conscience de la problématique. Rappelons simplement que la volatilité du prix du blé est plus importante que celle du prix du pétrole, sur la période récente, ce qui est en soi scandaleux.
Nous avons cependant bien progressé dans ce domaine. Voyons si l'ensemble des mesures de l'arsenal de lutte contre la spéculation sur les matières premières agricoles que ce texte met en place ont des effets sur le fonctionnement actuel des marchés, voyons quelles seront les conséquences de toutes ces dispositions, en particulier l'interdiction de détenir des stocks physiques : si tout ce que nous avons inventé dans cette loi est sans résultat, il sera toujours temps de rouvrir le débat. Je vous invite, à ce stade, à retirer votre amendement, sinon avis défavorable.
De toutes manières, nous suivrons cette question, notamment dans le cadre du rapport d'application.
Même avis que la commission.
L'amendement n° 5 est retiré.
Le projet de loi prévoit que l'agrément puisse être refusé par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution – ACPR – si les banques n'assurent pas la séparation des activités bancaires de manière satisfaisante. Or, il serait nécessaire que l'ACPR puisse disposer d'une large palette d'instruments de sanctions au cas où les banques existantes ne satisferaient pas à ses exigences.
Cet amendement vise donc à permettre à l'ACPR d'imposer les sanctions prévues aux articles L.612-39 et L.612-40 du code monétaire et financier.
Cet amendement est justement satisfait par l'article L. 612-39, qui dispose que le pouvoir de l'ACPR s'exerce envers toute personne qui a enfreint une disposition législative ou réglementaire au respect de laquelle l'Autorité a pour mission de veiller.
Je vous invite par conséquent à retirer votre amendement.
Même avis que la commission ; cet amendement est en effet satisfait.
L'amendement n° 19 est retiré.
L'article 1er est adopté.
La commission a décidé de maintenir la suppression des articles 1er bis A, 1er bis et 1er ter.
L'article 4 est adopté.
Sur l'article 4 bis A, dont la suppression a été maintenue par la commission, je suis saisie de deux amendements, nos 6 et 92 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Éric Alauzet pour soutenir l'amendement n° 6 .
Cet amendement vise à rétablir une disposition votée par l'Assemblée nationale mais supprimée par le Sénat et qui tend à permettre aux parlementaires de débattre, chaque année, de la liste des États et territoires non coopératifs.
Depuis quelques semaines, quelques mois, ce problème prend chaque jour une acuité toujours plus forte et nous devons être au coeur des débats sur l'évasion fiscale, les paradis fiscaux. Nous devons être très présents sur ces dossiers.
La parole est à M. Guillaume Bachelay pour soutenir l'amendement n° 92 rectifié .
Sourires.
En effet, cet amendement, désormais soutenu par le groupe SRC, avait été adopté en première lecture, mais la commission des finances du Sénat lui a fait un sort.
Il s'agit de permettre, comme l'a fort bien dit notre collègue M. Alauzet, un débat au sein des commissions des finances et des affaires étrangères de l'Assemblée nationale et du Sénat, en présence du ministre, sur l'actualisation de la liste française des territoires et des États non coopératifs.
Si nous voulons lutter efficacement contre les paradis fiscaux, les territoires des listes grise et noire de la finance, nous avons besoin de la liste la plus complète, la plus fiable et par conséquent la plus actualisée possible.
Nous disposons, en France, d'une liste de huit pays, mais il en existe d'autres dont les informations sont différentes, si ce n'est contradictoires. Je pense à celles de l'OCDE ou du Tax Justice Network. Or, certains établissements sans scrupule se jouent de ces divergences. Nous devons donc pouvoir nous appuyer sur une liste nationale. Cet amendement permettrait de répondre à l'exigence de transparence face aux paradis fiscaux tout en renforçant l'efficience du travail parlementaire.
Bref, il s'agit là d'un amendement contre la finance et pour le Parlement, soit deux bonnes raisons de l'adopter.
On me reproche parfois de ne pas être suffisamment à l'écoute ou d'être trop têtue. Eh bien, cette fois, vous m'avez convaincue, mes chers collègues. J'avais donné un avis assez réservé en première lecture, mais je comprends l'importance de ce sujet. Sur le fond, je suis d'accord avec les deux amendements, mais je préfère la rédaction de l'amendement n° 92 rectifié . Avis favorable à celui-ci, donc, et défavorable à l'amendement n° 6 .
J'avais été, moi aussi, assez réservé en première lecture, non pas pour des raisons de fond, mais parce qu'il me semblait que nous aurions d'autres occasions de débattre de ce sujet et que je voulais éviter les redondances. Le Sénat, animé du même souci, avait supprimé cet amendement, mais je comprends l'insistance du groupe SRC. Nous aurons peut-être deux débats, et j'y participerai avec plaisir.
Je m'en remets par conséquent à la sagesse de l'Assemblée.
Je suis l'avis de Mme la rapporteure.
Madame la rapporteure, je me réjouis que vous en veniez à accepter l'idée qu'il faut des listes des États non coopératifs pour mener réellement l'offensive contre les paradis fiscaux ; cette prise de conscience s'est faite très rapidement.
En première lecture, vous aviez évoqué l'effet de ciseau, pour théoriser le rapport entre les banques et leurs filiales. Nous sommes maintenant en train d'inventer la tenaille : les paradis fiscaux sont soumis à une obligation de transparence – publicité, compte rendu précis chaque année par les banques et, on le verra tout à l'heure, par les entreprises multinationales, de leurs activités dans l'ensemble des pays ; une liste, la plus précise et la plus complète possible, sera débattue au Parlement. Nous pourrons ainsi prendre en tenaille, je le répète, les activités des banques lorsqu'elles agissent dans les paradis fiscaux.
Je me réjouis que cet amendement ait l'accord du Gouvernement, sous le regard passif de l'opposition, qui croit que le combat contre les paradis fiscaux relève du gauchisme. Eh bien non, monsieur Lamour, nous faisons simplement notre travail de législateur républicain !
Après l'outil de la couturière et celui du menuisier, je vais ajouter une gomme à l'arsenal : puisque notre collègue Bachelay avait rédigé cet amendement en première lecture, nous allons retirer l'amendement n° 6 .
L'amendement n° 6 est retiré.
Je ne suis pas vraiment un spécialiste du bricolage.
Sourires.
Dire à M. Paul qu'il m'a tout à fait convaincu ne serait pas honnête ; la sagesse suffira, je l'espère.
La sagesse est parfois symbolique, monsieur le ministre, madame la rapporteure. Dans la situation que nous connaissons aujourd'hui et au regard des efforts que l'on demande à certains, c'est un signe positif. Je me réjouis que vous puissiez vous ranger à cette idée.
Après ce moment d'autosatisfaction – mais il y en aura tant d'autres d'ici à la fin de nos débats qu'il faut nous y habituer
Sourires et exclamations sur les bancs du groupe SRC
Monsieur Paul, vous m'avez interpellé tout à l'heure, alors que, pour une fois, je n'avais fait aucune remarque.
Disons que j'ai un crédit. Nous verrons cela plus tard !
Bien que j'aie lu l'exposé sommaire de l'amendement n° 92 rectifié qui, semble-t-il, va être adopté, je n'ai pas très bien compris la teneur de ce débat. Il est en effet indiqué qu'« il existe plusieurs listes, parfois contradictoires : liste française, liste du G20, listes d'organismes divers tels que Tax Justice Network, notamment. » Vous voulez donc établir une énième liste, spécifique au Parlement français. Outre qu'elle permet de se faire plaisir et de débattre à nouveau, vous m'expliquerez quel en est l'intérêt, monsieur Bachelay – je sens que mon propos vous énerve.
Débattre, pourquoi pas ? Mais sous quelle forme cette nouvelle liste sera-t-elle établie et à qui sera-t-elle appliquée : aux établissements français, à d'autres ? Pourrez-vous l'imposer au niveau européen et au niveau mondial ? C'est une autre histoire !
L'amendement n° 92 rectifié est adopté et l'article 4 bis A est ainsi rédigé.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, inscrite sur l'article 4 bis.
Si nous pouvons convenir que réguler les activités bancaires est une initiative utile qui devrait faire consensus, j'appelle toutefois votre attention, mes chers collègues, monsieur le ministre, sur le risque que l'article 4 bis fait courir au système bancaire français et à lui seul.
On ne peut en effet ignorer, dans ce domaine, les enjeux concurrentiels. Vous allez mettre à nu notre système bancaire et les banques françaises. Or vous n'êtes pas sans savoir qu'elles représentent des financements pour nos territoires et pour nos industries et, surtout, 400 000 emplois.
Je ne comprends pas la précipitation avec laquelle vous mettez en oeuvre, à compter de l'exercice 2013 – la publication interviendra au 1er janvier 2014 –, un dispositif franco-français, puisque la directive européenne CRD IV vient d'être adoptée. Cette non-coordination avec l'échelon communautaire me paraît être un handicap supplémentaire.
À l'heure où vous avez demandé un rapport sur la compétitivité de nos entreprises, où vous mettez en oeuvre le CICE – sans le financer, mais il aura un coût pour le budget de l'État –, vous imposez un handicap supplémentaire à notre système bancaire. Quel manque de clairvoyance ! Vous affaiblissez ainsi un secteur économique au nom d'un engagement, d'un dogme – vous l'avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre – éminemment politique.
Vous nous annoncez un continuum quasi parfait entre la France et l'Europe. C'est faux ! Je voudrais que vous m'expliquiez où est aujourd'hui la coordination temporelle entre ce dispositif à mettre en oeuvre dans l'urgence et la directive CRD IV, qui ne s'appliquera au mieux qu'en 2015.
Je voudrais réagir aux propos de nos collègues de l'opposition.
Ce texte marque une évolution notable, madame Dalloz, car, pour la première fois, nous apportons une réponse structurelle aux dysfonctionnements du secteur financier. À cet égard, je tiens à rappeler que M. le ministre nous a invités à user notre droit d'amendement et que nous avons pu ainsi faire avancer les choses et construire ensemble ce texte ; je voulais saluer cette marque de confiance.
L'article 4 bis contribue particulièrement à cette évolution. Le dernier sommet européen a dressé une liste des mesures à adopter – une trentaine d'actions – en matière de coopération pour lutter contre la fraude fiscale, mais nous sommes encore loin d'avoir les moyens nécessaires. Or, il faut le reconnaître, c'est notre pays qui entend prendre l'initiative en la matière. Il est indispensable, particulièrement dans une période où l'on demande des efforts à chacun, de donner collectivement la priorité à la lutte contre les paradis fiscaux, qui se définissent par la conjonction de deux éléments : des taux d'imposition insignifiants et l'absence de transparence et d'échanges d'informations entre États.
Sur ce point, nous avons avancé. L'article 4 bis, qui sera adopté dans quelques minutes, améliore en effet la transparence et permettra de mieux analyser les causes et les conséquences des activités bancaires. Ensuite, l'Europe…
…devra, elle aussi, faire preuve de plus de volontarisme pour lutter contre les taux d'imposition particulièrement bas dans certains États. Le combat est encore devant nous.
Je voudrais revenir sur un aspect que vous venez de souligner, madame Dalloz, et qui n'est pas factuellement vérifié.
La directive CRD IV s'appliquera en 2015, mais elle prévoit que mes trois critères initiaux de transparence des banques définis par l'Assemblée nationale – le chiffre d'affaires, le bénéfice et les effectifs – devront être publiés dans les six mois qui suivront son adoption, probablement en 2014. Ce sont donc bien les données 2013 correspondant à ces trois critères qui devront être publiés par l'ensemble des pays européens.
Sur ce point, le texte français est en accord complet avec la directive CRD IV.
Nous en venons à l'examen des amendements à l'article 4 bis.
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l'amendement n° 53 .
Par cet amendement, nous relayons une demande formulée de longue date par les associations qui militent depuis fort longtemps contre les paradis fiscaux, à savoir l'interdiction pour les établissements de crédit d'avoir des filières dans les paradis fiscaux. Notre collègue Christian Paul a évoqué cette interdiction comme une prochaine étape.
Cette interdiction suppose au préalable une réactualisation ambitieuse de la liste des paradis fiscaux. Nous soutenons le principe de l'organisation d'un débat annuel sur ces listes devant les commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat.
Interdire aux établissements qui n'ont pas conclu avec notre pays une convention d'assistance permettant l'échange automatique de tout renseignement nécessaire à l'application de la loi fiscale française nous semble être une mesure de bon sens, car, par-delà la transparence et l'obligation d'information sur lesquelles le texte a beaucoup progressé, l'enjeu de la régulation est évidemment de mettre fin à l'existence des paradis fiscaux en rendant effective l'interdiction d'implantation.
Là encore, je pense que la France peut et doit jouer un rôle de pionnier. Je voudrais, monsieur le ministre, lancer un appel, au-delà de cet amendement. Il est en effet choquant qu'au sein de l'Union européenne, les pays qui ne satisferaient pas à la règle des 3 % pourraient être pénalisés financièrement, alors que ceux qui ne donneraient pas d'informations en matière de paradis fiscaux ne seraient soumis à aucune pénalité financière. Il y a là quelque chose qui nous échappe.
La proposition de M. Sansu va vraiment trop loin, car il s'agirait d'une entrave très forte à la liberté de commerce, qui s'appliquerait – comme il l'a d'ailleurs rappelé lui-même – y compris vis-à-vis de certains pays de l'Union européenne et de la zone euro.
L'avis de la commission est donc défavorable.
Même avis que celui de la commission.
L'amendement n° 53 n'est pas adopté.
Cet amendement est dans le droit-fil de mon intervention sur l'article 4 bis.
Il s'agit de différer à compter l'entrée en vigueur de la directive CRD IV l'obligation de publication des données sensibles pour les établissements bancaires dans leurs filiales.
Dans votre réponse à mon intervention, madame la rapporteure, vous avez dit qu'il était fort probable que cette directive s'applique à l'exercice 2013, puisqu'elle serait adoptée en 2014. Sauf que son entrée en vigueur est prévue pour 2015 et qu'elle pourrait être retardée au cas où la Commission jugerait ces exigences de transparence néfastes pour la stabilité financière et l'afflux d'investissements. Aujourd'hui, vous pouvez affirmer certaines vérités, mais ni vous ni moi n'avons de certitudes. Pour ma part, j'affirme qu'il y a un risque certain concernant l'aspect concurrentiel de notre système bancaire.
Ne pourrait-on pas imaginer que l'article 4 bis s'appliquera dès la publication ou la transposition de la directive CRD IV, pour ne pas contraindre les banques françaises à révéler plus d'informations que nécessaire et surtout plus que les autres banques européennes ? Je précise que cet amendement rejoint la position du rapporteur du Sénat, M. Yung, qui était favorable à ce dispositif : il suffit simplement de suivre sa préconisation.
La parole est à M. Jean-François Lamour, pour soutenir l'amendement n° 86 .
Tout à l'heure, lorsque Christian Paul est intervenu à propos des filiales situées dans les paradis fiscaux – notre collègue Sansu a repris son argumentaire à l'instant –, vous avez répondu, madame la rapporteure, en précisant que vous travailliez essentiellement sur les filiales par activités et que l'on examinerait par la suite la question des filiales par implantation géographique, parce qu'on n'était pas prêt au niveau européen.
C'est précisément ce que nous essayons de démontrer au travers de ces amendements.
Notre crainte, en effet, c'est que, compte tenu de cette impréparation, qui n'est pas de notre fait, mais qui est due essentiellement à certains pays récalcitrants et à la lenteur inhérente à la construction européenne, nos établissements bancaires soient pénalisés.
Nous avons dit tout à l'heure à la tribune que nous étions en principe favorables au dispositif de contrôle et de filialisation tel que vous le présentez. Mais nous estimons que vous en faites l'application trop rapidement. Vous dites qu'il ne faut pas être frileux, monsieur le ministre, mais vous mettez à nu nos établissements et nos réseaux bancaires par rapport à d'autres. Par nos amendements, nous souhaitons vous mettre face à vos responsabilités en rappelant que vous avez vous-même soulevé le problème par deux amendements récents à l'article 4 bis.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement n° 40 .
Cet amendement rappelle que la directive CRD IV est de niveau européen, chaque État membre ayant la charge de la transposer dans son droit interne. Que nous y soyons d'ores et déjà prêts, madame la rapporteure, cela me convient parfaitement, mais transposer seuls la directive CRD IV sans connaître les grands équilibres risque d'ébranler sérieusement notre système bancaire.
La parole est à M. Jean-François Lamour, pour soutenir l'amendement n° 85 .
Par cet amendement, nous souhaitons que s'applique le principe de réciprocité, qui fonde les conventions fiscales, qui sont bien connues – j'ai eu moi-même à mettre en place celles concernant la régulation des jeux en ligne et rencontré à cet effet le ministre des finances maltais. Ainsi, les États membres parviendraient à un accord sur l'application des dispositions de la directive CRD IV.
Une telle réciprocité permettrait de lisser les défauts que pourrait engendrer l'application de la loi en matière de compétitivité. Il s'agit de bon sens et non d'une contestation de principe, afin de faire en sorte que nos établissements et nos réseaux ne soient pas confrontés à une concurrence artificielle qui plomberait leurs résultats. Il me semble important que vous soyez sensible à cet argument, monsieur le ministre. Nos établissements pourront ainsi traiter d'égal à égal dès lors que les règles sont communes à l'échelon européen. Ce n'est pas le cas si nous appliquons seuls le dispositif.
Quel est l'avis de la commission sur ces quatre amendements en discussion commune ?
Les amendements portant sur la réciprocité sont légèrement différents des deux autres et appellent un argumentaire différent de ma part. Je ne crois pas que l'on puisse comparer le droit communautaire à des mécanismes de convention fiscale.
Le droit communautaire s'impose par essence aux droits nationaux, au-dessus desquels le place la hiérarchie des normes, ce qui n'est pas le cas des conventions bilatérales. L'argument de réciprocité, qui est valable pour des accords bilatéraux, fait fi de l'existence d'un droit communautaire, en l'occurrence la directive CRD IV, qui entrera en vigueur au 1er janvier 2014 et qui s'imposera à tous les pays européens.
Telle est en tout cas ma réponse et j'émets un avis défavorable sur les amendements nos 40 et 85 .
Quant aux amendements nos 41 et 86 , je tiens à assurer à Mme Dalloz que nous avons parfaitement conscience que la France ne saurait appliquer unilatéralement une telle transparence sans que cela pose problème. C'est d'ailleurs pour cette raison que le texte a évolué au cours même de la discussion ; nous n'avions pas la certitude, lors de la rédaction du projet de loi, que la directive CRD IV était stabilisée. Elle l'est à présent. La Commission européenne a topé là, si vous me passez cette expression un peu vulgaire. Le texte existe, la France est en train de l'intégrer dans son droit et il sera en vigueur au 1er janvier 2014, les fameux trois critères compris.
Il est très clair pour nous qu'il ne s'agit pas de faire appliquer la directive aux seules banques françaises. Le texte tel qu'il est rédigé aujourd'hui assure que toutes les banques européennes seront amenées à publier au même moment que les banques françaises, conformément au droit européen. Je vous invite donc, chers collègues, à ne pas maintenir vos amendements. À défaut, avis défavorable.
La directive CRD IV définit un droit européen prévoyant les mêmes obligations que le droit français et s'appliquera en matière d'informations chiffrées les plus sensibles à la même date pour tous les pays, c'est-à-dire à partir de 2015. Au fond, vous formulez, mesdames et messieurs les députés de l'opposition, les mêmes remarques qu'en première lecture.
Elles sont aujourd'hui encore plus infondées, car elles négligent une chose, c'est que nous avons réussi, en un temps record, à faire bouger les lignes à Bruxelles. Nous avons les mêmes préoccupations que vous, croyez-le bien : la compétitivité de notre économie, la capacité de notre système bancaire à faire face à la concurrence européenne et demeurer un acteur important sur la scène européenne et mondiale. Au fond, je crains que vous n'ayez pas pris le train de ce qui se passe en Europe et que vous ne mesuriez pas à quel point les choses bougent. C'est la raison pour laquelle je vous appelle, moi aussi, à retirer vos amendements, faute de quoi je demanderai qu'ils soient rejetés.
Cet amendement propose d'aligner l'ensemble des critères sur les mêmes dates d'échéance de publication. Quoi qu'il en soit, chers collègues de l'opposition, même si les banques françaises publient un an avant les autres banques européennes, cela ne les mettra pas en péril économique, soyons raisonnables ! Pour l'heure, trois critères sont prévus pour 2014, les autres en 2015. Mme la rapporteure parlait tout à l'heure de trois critères qui ne sont pas tout à fait ceux que j'avais imaginés, en particulier la publication du bénéfice net. J'aimerais une précision sur ce point, ou peut-être était-ce une petite erreur.
Je pense en tout cas que l'on peut publier l'ensemble des critères un an avant les autres pays européens. Tout va très vite. Vous dites, chers collègues de l'opposition, qu'il faut prendre son temps. Non ! Il n'est plus temps de prendre son temps. En certaines matières, il faut parfois aller vite, mettre le pied à l'étrier, monter la première marche ! Les autres nous suivront très rapidement.
Dès lors que l'on a décidé d'introduire le dispositif de lutte contre les paradis fiscaux sans attendre l'entrée en vigueur de la directive européenne, il n'y a en effet aucune raison de repousser à 2015 ce qui peut être fait en 2014. Pour les mêmes raisons que celles exposées par mon collègue, je demande la suppression à l'alinéa 4, après les mots : « à partir de 2014 », de toutes les restrictions qui n'ont pas de sens particulier et ne proposent pas une transparence complète dès que possible, ce qui serait le meilleur signe à émettre.
J'ai répondu à nos collègues de l'opposition que je ne souhaitais pas de publication unilatérale des banques françaises.
Par cohérence, je donne un avis défavorable à la publication par les banques françaises un an avant les autres. Nous devons en effet avoir la certitude que tout le monde publie la même année. Par ailleurs, j'ai en effet commis une légère maladresse tout à l'heure à propos des trois critères : il s'agit bien du chiffre d'affaires effectif et de l'implantation géographique.
Même avis que la commission.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 113 .
Il s'agit de revenir au texte de l'Assemblée Nationale, avant modification par le Sénat, à propos de la précision du champ d'application de l'article.
L'amendement n° 61 est retiré.
Lors de nos discussions, nous avons précisé que, parmi les éléments que doivent produire les banques, devaient figurer les effectifs en équivalent temps plein. Nous souhaiterions que la masse salariale soit également produite, ce qui n'est pas tout à fait la même chose que les équivalents temps plein. En effet, certains salaires peuvent représenter des sommes importantes. Ils sont en outre assez éclairants sur les activités des filiales.
Nous nous conformons au texte de l'accord européen, qui ne prévoit pas la publication de la masse salariale. Par cohérence, j'invite notre collègue à s'aligner sur le texte de l'accord européen et à retirer son amendement. Avis défavorable sinon.
Même avis que la commission.
L'amendement n° 20 n'est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 43 et 88 rectifié .
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement n° 43 .
Le Sénat a renforcé la liste des renseignements rendus publics par les établissements bancaires français. Ainsi, on exige la publication, outre de leurs implantations à l'étranger, du bénéfice ou de la perte avant impôt, du montant total des impôts dont les entités sont redevables ainsi que des subventions publiques reçues.
La publication de telles données, entraînée par l'adoption de l'article, creusera le déficit de compétitivité de nos établissements bancaires. Afin d'en limiter la portée, nous proposons d'en revenir à la version initialement adoptée par l'Assemblée nationale ne comportant que les trois critères dont parlait Mme la rapporteure.
La parole est à M. Jean-François Lamour, pour soutenir l'amendement n° 88 rectifié .
Je compléterai le propos de ma collègue Marie-Christine Dalloz.
Monsieur le ministre, vous mettez nos établissements bancaires à nu. Vous nous avez dit que tous les pays le feront au même moment. Dont acte, nous jugerons sur pièces. Nous craignons que cela ne soit pas possible en raison de dérogations prévues par la directive. La Commission européenne dit clairement qu'elle peut surseoir à la publication de la directive, pour un certain nombre de raisons.
Nous nous en tenons à ce que vous avez expliqué, monsieur le ministre, mais vous vous augmentez le nombre de données extrêmement sensibles à publier par rapport à celles que doivent publier d'autres établissements bancaires situés dans d'autres pays. Vous placez donc les nôtres en difficulté face à la concurrence en créant une différence de compétitivité en matière de secrets de fabrication parfaitement légaux, car il n'est pas ici question de paradis fiscaux mais de parts de marché.
Ces données extrêmement sensibles vont au-delà des trois critères évoqués il y a quelques instants par ma collègue Dalloz et leur divulgation peut mettre en difficulté notre réseau bancaire.
Nous vous demandons donc de revenir à la rédaction initiale, plutôt équilibrée, qui prévoyait ces trois critères acceptés par tous, ce qui permet une transparence qui nous est chère, sur tous les bancs de cette assemblée. À vouloir aller plus loin, vous allez malheureusement mettre nos banques en difficulté.
Monsieur Lamour, vous parlez de mise à nu et je vous confirme que nous organisons bien un strip-tease des banques – pas des banquiers, je tiens à le préciser.
Sourires.
Nous voulons faire en sorte que les informations nous permettent de connaître les activités des banques dans le monde entier.
Nous assumons ce choix, parce que la liste des États non coopératifs est trop courte. Aux trois types de données qui devront être publiés en 2014, s'ajoutent trois autres critères qui s'appliqueront en 2015. L'accord européen est conclu. Je suis persuadée que l'ensemble des pays européens respecteront strictement la directive CRD IV. On aura bel et bien une transparence qui permettra de lutter contre l'opacité de certains systèmes bancaires favorisent l'évasion fiscale.
J'émets donc un avis défavorable.
Je ne discuterai pas du point de savoir s'il s'agit de strip-tease ou pas, mais je remarque que vous utilisez toujours le même argument.
Je peux comprendre, et même partager à l'occasion, la crainte que vous éprouvez que nous allions trop loin, au risque de détériorer la compétitivité de nos établissements financiers. Je vous assure que je me suis systématiquement posé cette question. Mais là, c'est vous qui allez très loin, trop loin : si on se rendait à vos arguments, on se retrouverait très vite dans une situation où le droit français ne serait pas conforme au droit européen. Que l'on soit conservateur, je le comprends, mais réactionnaire, non.
J'émets donc un avis défavorable.
Une de nos collègues socialistes nous a accusés de faire du lobbying, tout à l'heure ; c'est facile. Maintenant, M. le ministre nous taxe de réactionnaires.
Pour illustrer mon propos, je vais vous donner un exemple montrant à quel point la publication des données fiscales et sociales peut fragiliser un secteur. Dans le haut Jura, les entreprises du secteur de la lunette sont obligées de déposer chaque année leurs comptes au greffe du tribunal, comme toutes les entreprises françaises. Depuis que ces entreprises lunetières – qui font beaucoup de recherche et de développement pour la création de leurs modèles – publient leurs comptes, toutes leurs concurrentes étrangères viennent chercher des renseignements, renseignements qui ne sont publiés nulle part ailleurs au monde.
Vous voyez bien que ce dispositif, sous couvert de transparence, a un aspect presque pervers, puisqu'il facilite une distorsion de la concurrence au profit des établissements étrangers. C'est cela, la réalité.
Les amendements identiques nos 43 et 88 rectifié ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 1 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement a pour objet de rétablir une formulation qui a été modifiée en première lecture, concernant la publication par les banques des fameux critères, pour que l'obligation de transparence s'applique à l'ensemble des impôts.
Nous avons soutenu l'idée de mettre particulièrement l'accent sur l'impôt sur les sociétés, mais il est utile de préserver la publication de tous les impôts pour voir l'ensemble des logiques à l'oeuvre qui peuvent expliquer la raison de telle ou telle implantation à l'étranger. Nous proposons donc de réinstaurer la publication de tous les impôts.
L'impôt sur les sociétés nous semble être l'information la plus importante pour chasser l'opacité potentielle dans certains paradis fiscaux. Restons-en à l'impôt sur les sociétés. Avis défavorable.
L'amendement n° 59 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 8 est retiré.
L'amendement n° 9 est retiré.
Cet amendement a trait au FATCA européen. Il s'agit de la première traduction dans notre droit interne du volontarisme dont nous avons fait preuve au cours des derniers mois pour développer la transparence et l'échange de renseignements fiscaux.
Vous savez à quel point je suis convaincu que le meilleur instrument de lutte contre la fraude et l'évasion fiscale internationale est le développement de l'échange automatique d'informations. Actuellement, nous vivons sous le régime de l'échange de données à la demande. Qui dit demande dit réponse. Nous sommes donc tributaires de conventions qui peuvent être trop limitées, mal ou lentement appliquées, comme nous en avons de nombreux exemples. La meilleure façon d'y remédier est de passer à un autre stade, celui de l'échange automatique d'informations, ce qui évite toute forme d'arbitraire, de débat, de discussions parfois trop complexes.
Sous l'impulsion de la France, cet échange automatique d'informations est en train de devenir le standard international. Nous avons été les premiers à prendre des initiatives, conjointement avec l'Allemagne, puis avec l'Espagne, l'Italie, la Grande-Bretagne, la Pologne et d'autres pays encore, pour aller dans ce sens. Nous sommes même en train de mettre en place entre nous une plateforme pilote.
Nous avons plaidé – je l'ai fait personnellement – lors du G20 finances à Washington pour que l'on reconnaisse dans le communiqué final – cela n'a pas été si facile – que nous devions aller vers ce standard international. Cela a été repris dans les discussions du G7, puis par le conseil ECOFIN, puis par le Conseil européen du 22 mai.
Il s'agit d'un mouvement qui, je crois, est d'une portée tout à fait historique. Pourquoi cela ? Nous pourrions en débattre longuement. Je dirai que nous sommes à un moment où la morale et l'éthique rejoignent l'intérêt. La morale et l'éthique parce qu'en période de crise, les comportements d'évasion fiscale, de fraude et les excès du secret bancaire sont devenus insupportables à nos concitoyens. L'intérêt bien compris parce que nous avons besoin, pour réduire nos déficits, de poursuivre de façon plus efficace la fraude fiscale dont les montants sont considérables. L'année dernière, 18 milliards d'euros ont été récupérés, soit 2 milliards de plus que les années précédentes, et il y a encore des marges de manoeuvre considérables.
Nous sommes en train de franchir ces pas. Au niveau européen, le dossier de la directive Épargne avance trop péniblement, je le reconnais. J'aurais souhaité que nous puissions l'adopter lors du dernier conseil ECOFIN, mais l'Autriche et le Luxembourg ont conditionné l'adoption de la directive à la réussite de négociations avec des pays tiers. Néanmoins, ce dossier a été repris lors du Conseil européen du 22 mai, qui n'a pas non plus abouti à un accord, mais qui a décidé d'y parvenir avant la fin de cette année 2013. C'est souvent ainsi que les choses se passent.
Il faut que nous tirions toutes les conséquences de ces développements internationaux dans le droit interne. C'est l'objet de cet amendement, qui propose d'introduire la base juridique nécessaire à l'obligation déclarative à la charge des institutions financières françaises pour qu'elles fournissent à l'administration fiscale les données sur les revenus et les actifs financiers des contribuables dont elle a besoin pour répondre aux demandes d'assistance administrative de ses partenaires.
Voilà le sens de cet amendement, qui est la concrétisation en droit interne d'une démarche extrêmement importante. Il s'agit d'être proactif, en avance dans le cadre d'une démarche internationale et européenne dont je peux vous assurer, mesdames et messieurs les députés, qu'elle ne s'arrêtera pas.
Lors de la discussion générale, j'ai évoqué l'importance de cet amendement, qui marque un tournant dans la façon dont la politique fiscale permet de lutter contre l'évasion fiscale.
Mes chers collègues, dans quelque temps, nous aurons à débattre d'un projet de loi sur la transparence financière et contre l'évasion fiscale qui proposera de renforcer certaines sanctions. Mais celles-ci ne pourront malheureusement pas plus s'appliquer en l'absence d'informations en amont. L'information, c'est la clé de la lutte contre l'évasion fiscale. Basculer dans une logique d'inversion de la charge de la preuve, en quelque sorte, c'est donner à l'administration fiscale la possibilité d'avoir ces informations et donc de pouvoir, si nécessaire, prendre des sanctions et mener une lutte efficace.
J'y insiste : cet amendement est absolument fondamental dans la démarche de lutte contre l'évasion fiscale que nous avons engagée. Si cette disposition avait existé, peut-être que certains comportements auraient été découverts plus tôt. Donnons-nous la chance de changer les choses dans le futur et votons pour cet amendement qui, je le répète, est un élément particulièrement important de cette loi bancaire.
Nous voterons pour cet amendement – nous avons bien noté les propos que vous venez de tenir, madame la rapporteure.
Nous jugerons, dans le cadre d'une commission d'enquête, quelle a été la procédure mise en oeuvre dans l'affaire que vous ne citez pas mais que nous avons tous en tête. Nous verrons si le dispositif proposé, qui s'appliquera dans tous les pays, permet d'agir vite et bien et s'il peut empêcher certains comportements frauduleux, voire mafieux quand des réseaux bénéficient des lenteurs administratives.
Ce système doit évoluer au fil des années, à la faveur des révélations et de la mise en place de procédures. Déjà, lors de la prédécente législature, nous étions en phase avec cette évolution. Il ne s'agit donc que d'une avancée, certes non négligeable, et nous l'approuvons.
Il faudra certainement aller plus loin et surtout vérifier, monsieur le ministre, que tous les pays soient contraints de fournir ces informations. Vous avez nommé deux pays réticents, et il y en a certainement d'autres, si ce n'est dans la zone euro, en tout cas dans l'espace européen, qu'il faudra convaincre ou contraindre.
Vous êtes en responsabilité. Il est de notre devoir à tous de faire en sorte que, dans ce domaine, nous agissions vite et bien. Nous voterons pour cet amendement.
Monsieur Lamour, je ne crois pas du tout qu'il y ait eu une allusion à quoi que ce soit, mais je vais vous répondre sur ce que vous évoquez : l'affaire, etc.
Je vais vous dire une chose très importante. J'étais cet après-midi en commission des lois avec Mme Taubira et Bernard Cazeneuve, pour défendre le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale. Il faut comprendre que ce texte ne s'inscrit pas en réaction à tel ou tel cas individuel.
La démarche avait été entamée avant et le texte dépasse largement tel cas ou telle situation. Un cas ou une situation peut illustrer les besoins que nous avons,…
…mais, encore une fois, la réflexion et l'action du Gouvernement sur ce sujet ont commencé en novembre dernier. Je voulais tout de même le préciser.
De ce gouvernement !
L'amendement n° 100 est adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement n° 93 , qui fait l'objet de plusieurs sous-amendements.
C'est, je crois, un autre amendement important. Il est en cohérence avec la direction que nous avons indiquée.
Il vise à identifier, au sein des grandes entreprises, les mouvements financiers qui sont plus que de l'optimisation fiscale, qui relèvent de la fraude fiscale. En effet, les banques n'en ont pas le monopole. Il s'agit donc d'étendre les obligations d'information à une liste d'entreprises qui sera fixée par décret. L'application de ce dispositif serait subordonnée à la publication d'une directive européenne que nous appelons tous de nos voeux.
La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir le sous-amendement n° 109 .
Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai ensemble les quatre sous-amendements que j'ai déposés.
Les amendements nos 109 et 112 sont analogues à ceux que j'avais déposés lors de l'examen du texte sur la transparence bancaire. Je suppose que j'obtiendrai les mêmes réponses, et qu'il n'est donc pas utile que je les présente.
En ce qui concerne les amendements nos 111 et 110 , il s'agit d'affirmer une position peut-être un peu plus tonique en cas de manquement à la loi. Prévoyons ainsi que toute personne intéressée puisse « saisir » l'autorité visée, cela semble déjà un peu plus clair d'un point de vue juridique que le verbe « demander ». Ensuite, prévoyons d'ouvrir une procédure, sans attendre.
Je vois que mon ami Potier acquiesce…
J'émets un avis favorable à l'amendement n° 93 de M. Potier. Je me suis déjà exprimée lors de la discussion générale : information, information, information : c'est absolument nécessaire pour lutter véritablement contre l'évasion fiscale et, peut-être, d'ailleurs, offrir un début de réponse à l'optimisation fiscale, qui fait partie des sujets qui, comme tout le monde le sait, passionnent le président de la commission des finances, qui vient de nous rejoindre. L'amendement n° 93 a précisément pour objet de rendre possible cette information.
S'agissant des sous-amendements, M. Alauzet propose de viser les entreprises multinationales, mais je pense qu'il vaut mieux, ne serait-ce que dans un souci de cohérence de notre démarche générale, que l'on s'en tienne aux mécanismes de sanction qui ont été établis et proposés pour les banques. J'émets donc un avis défavorable aux sous-amendements.
J'avais déjà laissé entendre, dans mon intervention initiale, que je serais favorable à cet amendement. J'y suis même très favorable. Je crois que c'est effectivement tout à fait important.
Je souligne simplement que votre amendement, monsieur Potier, prévoit une articulation entre cette mesure, tout à fait souhaitable, et le futur dispositif européen : la première entrera en vigueur en même temps que le second, pour que les entreprises françaises ne soient pas pénalisées par rapport à leurs concurrentes européennes. Il s'agit donc bien d'envoyer un signal politique fort, très fort, à nos homologues européens, tout en préservant la compétitivité de notre système bancaire, financier et économique. La défense de celle-ci n'est l'apanage, le monopole ou le privilège de personne.
Le Gouvernement émet un avis défavorable aux sous-amendements.
Madame la rapporteure, c'est précisément par cohérence avec les dispositions sur les banques que j'ai fait cette proposition.
Que lisait-on, en effet, à l'alinéa 13 de cet article 4 bis, soit au III bis ajouté à l'article L. 511-45 du code monétaire et financier ? Qu'en cas de manquement aux obligations d'information, l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution décide l'ouverture d'une procédure de sanction.
Au nom de la cohérence, je crois donc que ma proposition s'impose.
L'amendement n° 93 est adopté.
L'article 4 bis, amendé, est adopté.
Les articles 4 ter A, 4 ter BA, 4 ter B, 4 quater, 4 quinquies A, 4 quinquies B, 4 quinquies C, 4 quinquies, 4 sexies A, 4 sexies, 4 septies, 4 octies et 4 nonies sont successivement adoptés.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 99 deuxième rectification du Gouvernement.
Cet amendement technique vise à assurer la cohérence de l'ensemble des dispositions du code monétaire et financier en matière de rémunérations. Sa première partie est destinée à garantir la cohérence du périmètre d'action du comité des rémunérations avec le périmètre d'application des règles de plafonnement des rémunérations, la seconde partie à déplacer l'article introduit par le Sénat en matière de consultation de l'assemblée générale sur les rémunérations pour le placer à la suite de l'article instituant le comité des rémunérations.
Voilà qui permettrait donc de regrouper l'ensemble des dispositions du code monétaire et financier en matière de rémunérations et d'assurer une certaine cohérence de leur champ d'application.
Je formulerai d'une autre manière les propos du ministre.
Entre les deux lectures, le droit européen a avancé. Le Gouvernement propose une transposition parfaite de ces nouvelles dispositions européennes. J'émets donc un avis favorable à cet amendement, de même que j'émettrai un avis favorable sur les amendements suivant du Gouvernement, nos 105, 107 et 115 rectifié.
L'amendement n° 99 deuxième rectification est adopté.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 106 du Gouvernement.
Il est défendu.
L'amendement n° 106 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 107 du Gouvernement.
L'amendement n° 107 , accepté par la commission, est adopté.
Je suis saisie de trois amendements, nos 12 , 54 et 115 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l'amendement n° 12 .
Comme je l'ai indiqué dans la discussion générale, cet amendement vise à s'assurer que l'assemblée générale des actionnaires ne pourra accorder aux dirigeants responsables des banques une rémunération variable supérieure à leur rémunération fixe. La Commission européenne a récemment formulé une recommandation en ce sens, à laquelle le gouvernement français a indiqué qu'il était favorable, mais qui n'a pas pu être entérinée en raison de fortes réticences du gouvernement britannique. Je propose donc que le parlement français pèse de tout son poids pour aider le gouvernement français à convaincre le gouvernement britannique.
Au-delà du problème de décence que posent ces rémunérations du secteur bancaire, faire en sorte que la rémunération variable ne puisse excéder la rémunération fixe répond vraiment à un impératif de maîtrise des risques.
Nous avions déjà déposé en première lecture cet amendement, qui a pour objet de plafonner à un niveau pour le moins raisonnable la part variable des rémunérations des traders et des dirigeants : la part variable ne doit pas dépasser la part fixe.
Une étude de 2011 de l'École d'économie de Paris a mis en évidence que 24 % des 0,01 % les plus riches appartiennent au secteur de la finance, contre 8 % il y a trente ans. La question n'est pas seulement morale. Elle pose un autre problème, celui de la folie spéculative et des risques pris, notamment, par les traders.
Si ni cet amendement ni celui du groupe RRDP ne devaient être retenus, nous soutiendrions, bien sûr, l'amendement n° 115 rectifié du Gouvernement.
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 115 rectifié .
Cet amendement a pour objet d'inscrire dans le droit français le plafonnement des bonus décidé au niveau européen dans le cadre de la directive CRD IV.
Je ne pense pas inutile de rappeler ici que nos discussions ont joué un grand rôle pour faire avancer le débat européen. C'est lors de l'examen du projet de loi en commission des finances en première lecture que la France a décidé qu'elle allait défendre sans ambiguïté le principe du plafonnement « un pour un » des bonus, autrement dit le principe d'une part variable qui ne peut dépasser la part fixe du salaire des dirigeants des banques et des traders. Cela a aussitôt été repris à Bruxelles, et je pense que cela a fortement contribué au déblocage de la négociation. Je suis donc fier que la progression rapide du débat européen nous permette de transcrire dans ce texte une mesure aussi symbolique de notre volonté de réguler la finance et de mettre un terme à ses excès.
Comme l'a rappelé M. Sansu, la limitation de la part des bonus dans la rémunération dans le monde de la finance, c'est l'une des manières, peut-être la plus efficace, d'éviter que des prises de risque déraisonnables envoient l'ensemble des économies mondiales à la faillite, comme en 2008 et 2009.
De ce point de vue, quelle chance nous avons d'avoir vu le texte français et les négociations que vous avez menées, monsieur le ministre, à Bruxelles, progresser aussi rapidement et de conserve ! C'est vraiment le premier texte français de régulation des salaires dans le privé. Cela signifie que la loi peut réaliser ce genre de choses. Il faut s'en féliciter.
J'invite mes collègues Giraud et Sansu, dont la démarche est identique à celle du Gouvernement, à retirer leurs amendements pour se rallier à l'amendement n° 115 rectifié du Gouvernement, auquel j'émets un avis favorable.
L'amendement n° 115 rectifié est adopté.
L'article 4 decies, amendé, est adopté.
Les articles 5 et 6 sont successivement adoptés.
Cette séparation bancaire vise à protéger les contribuables. On ne sait pas très bien ce qui pourra se passer si les choses tournent mal, mais on a bien vu, à l'occasion de la crise chypriote, que les Allemands et les Anglais, d'un côté, et les Espagnols, de l'autre, n'étaient pas tout à fait d'accord sur la question de savoir qui faire payer, la France se situant un peu entre les deux. Tout cela est bien hésitant.
Avec cet amendement, nous aurions les moyens de mobiliser les créanciers seniors dans le cadre d'une résolution et d'une faillite bancaire, même si, je le sais aussi, nos banques sont évidemment excellentes et jamais cela n'arrivera dans notre pays…
Nous avions déjà eu en première lecture cet échange sur la mobilisation des créanciers seniors, monsieur le ministre. Vous m'aviez alors répondu que la discussion était effectivement en cours en Europe, et que les choses n'étaient pas stabilisées. Voici l'occasion de faire le point sur cette question.
Monsieur le ministre, chacun le mesure bien : quand on évoque les crises bancaires, l'une des questions posées est de savoir qui supporte la crise. Nous pensons que ce sont les actionnaires, en premier lieu, et les créanciers des banques, plutôt que les contribuables, qui doivent supporter les conséquences de ces crises. Cet amendement est un appel, pour que vous vous exprimiez sur ce point ou pour que vous nous éclairiez sur les évolutions européennes aujourd'hui attendues et négociées.
En cas de crise, qui, dans l'échelle des créanciers, devra faire des sacrifices ? Il est vrai que cet amendement propose une mesure audacieuse : il s'agit d'intégrer les créanciers détenant des dettes dites « seniors » au processus de résolution. Seraient donc concernés, dans l'ordre, les actionnaires, les détenteurs de dette subordonnée, les détenteurs de dette dite « junior » puis les créanciers seniors.
Nous savons bien que cette entreprise de transformation du droit ne peut se limiter à l'Hexagone et au seul droit français. Je vous le dis d'emblée, monsieur le ministre : il s'agit d'un amendement d'appel. Nous voudrions savoir comment vous envisagez d'obtenir de l'Union européenne et des organismes européens de régulation bancaire des progrès sur ce point. Nous ne voulons pas, bien entendu, limiter cette réforme à la France, nous pensons au contraire qu'elle est indispensable au niveau européen.
Comme l'a dit notre collègue Christian Paul, cet amendement a pour objet de provoquer un échange sur une question particulière. Il s'agit de savoir comment l'ordre de priorité des créanciers sera défini, en fin de compte, au niveau européen, par une résolution.
Par exemple, dans le cas de la crise chypriote, aucun accord n'a été trouvé au niveau européen sur un certain nombre de points comme les dépôts supérieurs à 100 000 euros des particuliers et des PME. En l'état, ces amendements vont donc trop loin et trop vite, parce que leur application serait unilatérale et limitée à la France.
Monsieur le ministre, je pense que vous aurez à coeur de préciser la position de la France dans ces discussions. Les négociations ont lieu à Bruxelles et continuent d'évoluer ; je pense qu'elles finiront un jour par donner des résultats satisfaisants. À ce stade, l'avis de la commission est donc défavorable aux deux amendements.
L'amendement que vous proposez étend le périmètre de la mesure dite de bail-in, qui a déjà donné lieu à une discussion lors de l'examen du projet de loi en première lecture. J'ai eu l'occasion d'expliquer à ce moment qu'il soulevait des difficultés importantes dans l'état actuel des discussions au sein de l'Union européenne.
Pour cette raison – et un ensemble d'autres – je vous propose de retirer cet amendement, à défaut de quoi je préconise son rejet.
Je le maintiens. Cet amendement fixe la date d'application de la mesure proposée au 1er janvier 2016. C'est peut-être trop fort, j'en conviens, mais trop rapide, non ! Prévoir l'entrée en vigueur de cette disposition en 2016, cela laisse du temps…
Cet amendement permettrait d'envoyer un signal, ce qui serait une bonne chose. Je le maintiens donc.
Cet amendement répond à une préoccupation éthique. Il s'agit simplement de faire en sorte que lorsqu'une banque, une société financière, est soumise à une procédure de résolution, elle ne peut distribuer des dividendes à ses actionnaires ou rémunérer les parts sociales des sociétaires.
Cher collègue, laissons donc à l'ACPR quelques marges de manoeuvre vis-à-vis des établissements dont elle aura la charge dans le cadre d'une procédure de résolution ! Je vous propose donc de retirer cet amendement, à défaut l'avis de la commission serait défavorable. Encore une fois, laissons à l'ACPR les moyens d'agir sur ces questions-là et de prendre des mesures incitatives si nécessaire.
L'amendement n° 11 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l'amendement n° 90 , qui fait l'objet d'un sous-amendement n° 108 rectifié .
Au cours de la première lecture de ce projet de loi, il a été prévu que lorsqu'un administrateur provisoire est chargé d'examiner la situation d'un établissement ou d'une entreprise sous contrôle, aucun versement au dirigeant de cette entreprise ne peut être accompli pendant la mission de l'administrateur provisoire.
Je remercie les membres de la commission des finances d'avoir permis, au terme d'un travail commun, de parvenir à une rédaction consensuelle de cet amendement. De cette manière, l'ensemble des membres du groupe SRC l'ont signé. Il s'agit de préciser qu'« à l'issue de la mission de l'administrateur provisoire, l'assemblée générale décide, à sa première réunion » et suivant l'issue de la mission, « la reprise des versements ». En effet, il ne paraît pas admissible que des dirigeants ayant entraîné leur entreprise dans des difficultés perçoivent des parachutes dorés et des retraites chapeau importantes.
Cet amendement vise donc à conditionner la reprise des versements à une décision de l'assemblée générale.
La parole est à Mme Karine Berger, rapporteure, pour présenter le sous-amendement n° 108 rectifié et donner l'avis de la commission sur l'amendement.
Sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement rédactionnel, l'avis de la commission est favorable.
Le sous-amendement n° 108 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 90 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 8, amendé, est adopté.
L'article 10 est adopté.
L'amendement n° 66 est retiré.
L'amendement n° 26 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 11, amendé, est adopté.
L'amendement n° 27 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 11 bis, amendé, est adopté.
Cet article encadre les conditions d'emprunt des collectivités territoriales et de leurs groupements. Vous fixez ainsi les limites de la contractualisation de ces emprunts. Cette restriction ne pose-t-elle pas un problème de limitation des socles de compétences communales, intercommunales, voire départementales ?
M. le président de la commission des finances, qui est par ailleurs membre du comité des finances locales, s'est interrogé sur le contenu de cet article et il présentera dans quelques instants des amendements.
Monsieur le ministre, à ce stade du débat, je voudrais vous poser trois questions. Premièrement, le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 8 février 2013 affectera-t-il, et dans quelle mesure, les 9,4 milliards d'euros d'emprunts toxiques détenus par la Société de financement local, la SFIL ? Deuxièmement, dans la mesure où l'État détient 75 % des parts de la SFIL, quelles mesures envisagez-vous pour faire face à ce risque important ? Enfin, les dispositions de cet article 11 ter ne risquent-elles pas de provoquer une raréfaction des financements des collectivités territoriales ?
La parole est à Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l'amendement n° 25 .
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis vraiment très opposé à l'idée d'encadrer les prêts aux collectivités territoriales. Le président de l'Association des maires de France, Jacques Pélissard, s'en souvient bien : il y a à peine plus des vingt ans, les collectivités territoriales ont commencé à obtenir, de façon très progressive, la liberté de contracter des emprunts comme elles l'entendaient. Auparavant, une seule banque leur était ouverte : la Caisse d'aide à l'équipement des collectivités locales, qui voulait bien leur dispenser un seul prêt, à taux fixe. L'État craignant que les dépôts de fonds de roulement des collectivités territoriales s'effondrent, il a fallu se battre pendant des années, jusqu'à il y a peu de temps puisque c'est il y a seulement dix ans que nous les avons autorisées – Jacques Pélissard s'en souvient – à recourir aux prêts de trésorerie.
C'est dire à quel point ces libertés ont été chèrement acquises. Les élus locaux, dans leur immense majorité, en ont fait bon usage. Il suffit en effet de regarder l'évolution des comptes administratifs des collectivités au cours des dix dernières années pour voir qu'elles ont pleinement profité d'une meilleure gestion de leur dette et de la baisse des taux d'intérêts.
Certes, il y a eu quelques excès, il y en a toujours ! Mais de quelle nature sont-ils ? Permettez-moi de poser la question suivante : même dans une petite commune, et même pour les gestionnaires qui n'ont pas fait Polytechnique ni ne sont diplômés en finances publiques, peut-il apparaître raisonnable d'emprunter à un taux lié au cours du franc suisse ? Peut-on trouver cela conforme au bon sens, quand on ne paye ni ses employés ni ses fournisseurs en francs suisses ?
Je revendique donc le principe de la responsabilité des élus et j'appelle votre attention sur le paradoxe suivant : ce texte ne vise-t-il pas à réduire, voire à supprimer l'aléa moral pour les banques ? Si ! C'est là tout l'objectif du dispositif de résolution que j'approuve pleinement. Or de quoi sont victimes certaines collectivités territoriales ? Précisément de l'aléa moral, qui consiste à prendre un maximum de risques parce que l'on sait que la collectivité nationale viendra à la rescousse en cas de problème. Ce n'est pas bon ! Je pense que la décentralisation doit aller de pair avec la liberté et la responsabilité des acteurs locaux. Je souhaite donc que nous réfléchissions bien à ce problème et que l'ensemble de mes collègues votent cet amendement de suppression de l'encadrement des prêts aux collectivités territoriales.
J'estime en effet que les membres des exécutifs locaux sont des gens responsables et compétents : l'État n'a pas de raison de les encadrer.
Je rappelle que l'article 72 de la constitution prévoit que les collectivités locales s'administrent…
…dans les conditions prévues par la loi, monsieur le président de la commission des finances ! Le législateur est donc habilité par le constituant à encadrer les conditions d'emprunt des collectivités territoriales.
« La loi protège », monsieur le président de la commission des finances ! C'est Lacordaire qui l'a écrit !
Je comprends votre raisonnement, monsieur le président : les collectivités doivent prendre leurs responsabilités. Il y a, dans mon département, un exemple bien concret des dangers de ce système : une commune d'un peu moins de 10 000 habitants a acheté – s'est fait refiler ! – des produits financiers extrêmement complexes. Plus de vingt ans après, cette commune est toujours dans une situation assez dramatique. Les personnes qui étaient en charge des finances de cette commune n'étaient pas incompétentes, elles ne pouvaient tout simplement pas mesurer l'inventivité de celles qui leur ont fourni ces produits financiers.
Je pense donc, monsieur le président, qu'il faut lire cet article tel qu'il est rédigé. Il n'oblige pas les collectivités territoriales à s'endetter à taux fixe, en leur proposant un seul taux. Il s'agit simplement d'éviter que les instruments les plus complexes, les plus opaques, les plus dangereux pour les collectivités locales, soient employés. Votre amendement de suppression de l'article 11 ter va donc à mon avis trop loin.
Je suis pour la liberté, mais je tiens – comme vous-même – à ce que la loi protège l'intérêt public. L'avis de la commission est donc défavorable.
L'Assemblée nationale a introduit en première lecture une disposition qui vise à assurer la protection des collectivités territoriales contre les emprunts structurés à risque : nous partageons cet objectif. Cet encadrement laisse une grande liberté aux collectivités territoriales dans leur gestion financière, conformément au principe d'autonomie. Il laisse ouverte la possibilité d'une désensibilisation progressive des emprunts structurés. Il vise les produits les plus risqués, qui n'apportent rien à la gestion financière des collectivités, et que les banques ont d'ailleurs cessé de distribuer il y a quelques années, conformément à l'engagement qu'elles ont pris dans le cadre de la charte de bonne conduite entre les établissements bancaires et les collectivités locales, dite « charte Gissler ».
Inscrire dans la loi le principe de cette interdiction constitue naturellement une protection beaucoup plus grande, plus générale et plus durable qu'un engagement contractuel de quelques établissements bancaires.
C'est pourquoi il nous semble nécessaire de maintenir la disposition introduite, à juste titre, par l'Assemblée en première lecture.
J'adhère aux propos de Gilles Carrez, s'agissant de l'esprit de liberté et de responsabilité qu'il convient de reconnaître aux collectivités locales. En sus de ces principes, une disposition importante figure dans le texte : le nouvel outil de l'article 11 quater C, à savoir l'agence de financement des collectivités territoriales. La création de cette agence, demandée par l'ensemble des collectivités, a fait l'objet, en 2012, d'un rapport favorable et a reçu le feu vert du Président de la République lors du Congrès des maires de France en novembre 2012. Cela a permis, après concertation avec le ministre, le dépôt d'un amendement gouvernemental équilibré. Celui-ci prévoit la création de l'agence sous forme de société anonyme, donc sans garantie de l'État, mais accompagnée de directives, d'orientations politiques de la part du conseil d'administration de la société publique. Je parle au nom de Michel Destot, maire de Grenoble, du président de l'Association des maires des grandes villes de France et de Gérard Collomb, à l'époque président de l'Association des communautés urbaines de France. Les principes que nous avons posés s'appliquent toujours. Ainsi, premier point, toutes les collectivités doivent être traitées à égalité de risques, et ce quelle que soit leur population. Second point, l'agence de financement des investissements s'interdit tout emprunt toxique et ne doit pratiquer que des taux fixes ou variables. Nous disposerons ainsi, à l'avenir, d'un outil beaucoup plus sain permettant de répondre aux besoins des collectivités locales.
Tel qu'il est présenté, l'amendement me semble donc quelque peu superfétatoire au regard du dispositif à venir de financement des collectivités locales.
Je ne partage absolument pas le point de vue du président de la commission des finances. En effet, lorsqu'on désire contracter un emprunt, on peut choisir sa devise, un taux variable et un index. Ces trois catégories figurent à l'article 11 ter qui les limite et les encadre.
L'article dispose aussi que, chaque année, un rapport recensant le volume des emprunts dits structurés sera remis au Parlement. Cela permettra d'éviter de découvrir un peu tard des surprises, comme ce fut le cas pour Dexia. Vous conviendrez, monsieur le président, qu'il reste une part de liberté et de sécurité indispensable pour éviter que la puissance publique, après la collectivité, ne soit contrainte de renflouer un certain nombre de comptes.
L'amendement n° 25 n'est pas adopté.
La parole est à M. le président de la commission des finances, pour soutenir l'amendement n° 39 .
Cet amendement de validation législative concerne les prêts toxiques. Il vise à rendre service au Gouvernement. Aujourd'hui, en effet, la situation est totalement bloquée. Vous le savez, la Société de financement local a récupéré 80 milliards d'encours de créances de l'ex Dexia. Sur ces 80 milliards, 8,5 milliards sont considérés comme toxiques. Or le tribunal de Nanterre, même s'il a donné raison sur le fond en confirmant que, lorsque l'on signe un contrat de prêt, on est responsable de part et d'autre, a estimé, sur la forme, que les fax échangés préalablement au contrat de prêt ne mentionnant pas le taux effectif global, il convenait, même si le TEG était précisé dans le contrat lui-même, de facturer le taux de base légal qui est, aujourd'hui, de 0,04 %. Il y a donc un écart de financement et un risque énorme s'agissant de ces 8,5 milliards et la banque qui les a récupérés dans son actif rencontre un problème de refinancement insoluble.
J'appelle votre attention sur un point précis, monsieur le ministre. La SFIL est détenue à 20 % par la Caisse des dépôts. Or, aujourd'hui, les fonds propres de la SFIL s'élèvent à 1,3 milliard. Si la question n'est pas résolue, d'ici à la fin de l'année, les commissaires aux comptes seront contraints de constater des provisions pour plusieurs milliards d'euros, considérant l'écart de refinancement et la facturation des prêts à 0,04 %.
Le département de Seine-Saint-Denis dispose de services financiers parfaitement en mesure d'apprécier ce qu'il signe. On ne me fera donc jamais croire que ce département n'a pas signé ces contrats en toute connaissance de cause. Toujours est-il que se sont engouffrées dans la brèche, derrière la Seine-Saint-Denis, environ quatre-vingt-dix collectivités locales et que, ce qui devient très grave, la SFIL est incapable d'émettre, donc incapable de prêter aux collectivités locales. Faute d'avoir mis en place l'agence de financement évoquée, il y a un instant par Jacques Pélissard, nous sommes contraints de compter sur le bon vouloir de la Caisse des dépôts, laquelle a dégagé 5 à 6 milliards d'euros. Nous sommes donc dans une situation d'extrême fragilité. Le sujet est sérieux, monsieur le ministre, et cela ne peut pas durer ainsi.
Cet amendement vise, en quelque sorte, à vous sortir une épine du pied. Vous devriez, par conséquent, l'apprécier à sa juste valeur !
Le président vient de soulever un sujet important et particulièrement délicat. Je crois toutefois savoir que le Gouvernement l'a précédé dans cette réflexion. Le ministre pourra nous apporter des éclaircissements sur ce point. Toujours est-il qu'il est difficile de traiter cet assez vaste sujet au détour d'un amendement.
À ce stade, je pense que, si des précisions doivent être apportées, ce problème est traité de manière un peu trop unilatérale pour que je puisse donner un avis favorable à cet amendement. Je serai, toutefois, intéressée d'entendre l'analyse du ministre.
Je suis sensible, et je ne plaisante pas, à l'intention du président de la commission des finances et surtout très attentif au problème posé. En effet, les enjeux de finances publiques et ceux liés à la capacité de la SFIL à émettre sur les marchés sont considérables. Même si l'État et la Caisse des dépôts consentent de gros efforts, tant que nous n'aurons pas apporté de solution, cela demeurera, je le sais, assez compliqué. J'espère, par conséquent, qu'il sera possible, dans les prochaines semaines, de développer cet outil financier au profit des collectivités locales. Ce véhicule permettra notamment de désensibiliser de tels prêts.
J'émettrai toutefois deux réserves s'agissant de votre amendement. Il ne permet pas de résoudre intégralement la question posée par la décision du tribunal de grande instance de Nanterre, car il porte uniquement sur les modalités de transmission – télécopies ou messages électroniques – des documents préalables au contrat de prêt. Cela peut laisser de côté différentes problématiques. Je citerai l'exemple des transmissions des mêmes documents par courrier ou par porteur. Même si la décision est elle-même formelle, la réponse ne peut pas être uniquement celle du parallélisme des formes. Par ailleurs, il est nécessaire de trouver un équilibre, auquel vous serez sensible, entre un traitement législatif de cette question et le soutien apporté aux collectivités qui doivent faire face aux emprunts toxiques, particulièrement à celles qui ne disposent pas des moyens financiers pour désensibiliser leur encours structuré. Peut-être devrons-nous recourir à des mesures législatives tout en faisant parallèlement appel à un fonds d'aide à ces collectivités. Il ne me semble donc pas opportun pour ces deux raisons de traiter ainsi, maintenant, par amendement, cette importante question.
Je tenais à vous informer que le Gouvernement, en l'occurrence moi-même, travaille activement avec les élus concernés. Le sénateur-maire de Saint-Étienne, M. Maurice Vincent, président de l'association Acteurs publics contre les emprunts toxiques y est extrêmement sensible.
Je l'ai rencontré tout comme les élus de la Seine-Saint-Denis. Plus de 200 collectivités sont concernées. On ne doit, en conséquence, pas résoudre ce problème comme cela, ici et maintenant. Il convient de poursuivre la concertation, laquelle nous permettra de donner avant l'été une réponse appropriée afin que les collectivités trouvent une solution pérenne au problème des emprunts structurés à risques, à la SFIL d'exercer correctement son activité de financement au sein des collectivités locales et à l'État de préserver ses finances.
Vous avez, monsieur le président de la commission, soulevé une vraie question que je prends tout à fait au sérieux et que je m'efforce de traiter. Je pense, toutefois, qu'il serait maladroit et, en vérité, inopportun de traiter ce sujet par le biais d'une loi avant de s'apercevoir que tout n'a pas été pris en compte.
Je propose donc le rejet de cet amendement.
L'amendement n° 39 n'est pas adopté.
L'article 11 ter est adopté.
Les articles 11 quater A, 11 quater B et 11 quater C sont successivement adoptés.
Les articles 12 et 13 bis sont successivement adoptés.
Cet amendement concerne le contrôle par l'ACPR des banques coopératives et propose de prendre en compte leur spécificité. Comme vous le savez, celles-ci fonctionnent selon le principe de la participation des sociétaires aux instances dirigeantes suivant un processus ascendant, contrairement aux banques classiques européennes, voire françaises, et aux sociétés en général, lesquelles fonctionnent selon le processus descendant. Les sociétaires élisent, depuis la base, au sein de leur caisse locale, les administrateurs locaux, puis régionaux et, enfin, nationaux.
S'il nous semble tout à fait normal d'étendre le contrôle de l'ACPR aux organes centraux des grandes banques coopératives, il nous paraît, en revanche, que la possibilité de refuser l'élection ou de révoquer un administrateur élu d'une caisse régionale contrevient à l'esprit coopératif de ces banques. Le contrôle de l'ACPR sur le directeur et le président, sachant que le principe des sociétaires est parallèle à celui de la direction qui est descendant, permet déjà d'assurer un contrôle quant à la bonne gestion de la banque. De plus, des plans de formation à destination des administrateurs sont organisés. Le refus de validation de la part de l'ACPR remettrait tout simplement en cause le principe démocratique constitutif des banques coopératives. Enfin, nous sommes, comme les membres des banques coopératives, soucieux de préserver la diversité des conseils d'administration de ces caisses régionales, lesquelles ne sont pas uniquement composées de professionnels du milieu bancaire soumis aux mêmes règles que tous les autres établissements ou sociétés, mais de représentants des sociétaires apportant des savoir-faire et des analyses.
Il convient de revenir à l'esprit qui a présidé à la rédaction de l'article 14 initial et de contrôler les personnes qui dirigent les systèmes bancaires et les systèmes d'assurances. Le système mutualiste est particulier, mais les dirigeants sont présents y compris dans les systèmes mutualistes bancaires et assurantiels. Nous avons eu plusieurs échanges sur ce sujet. Nous sommes revenus, au final, au texte initial du Gouvernement, c'est-à-dire au contrôle des organes centraux et des organes mutualistes, sans avis croisé. Le Sénat a déjà soulevé cette question. L'hypothèse d'une formation des dirigeants mutualistes est totalement envisagée à ce stade, en tant que validation du contrôle des personnes. N'allons pas plus loin et ne créons pas un nouveau déséquilibre au sein des structures mutualistes.
J'ajouterai, cher collègue, que j'ai pris la liberté de consulter les différents dirigeants des systèmes mutualistes, notamment des caisses. Ils ne sont pas favorables à une suppression des mécanismes de contrôle, même s'ils veillent évidemment à ce que ce contrôle n'amène pas une uniformisation des profils et respecte bien l'esprit mutualiste.
Gardons l'article 14 tel qu'il existe actuellement, conforme à l'esprit initial. Nous répondons parfaitement à l'objectif de contrôle sans nier la logique mutualiste et même, je crois, en la préservant.
Je suis donc défavorable à cet amendement.
L'amendement n° 32 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 14 est adopté.
Les articles 14 bis AAA, 14 bis AA, 14 ter, 15 et 15 bis C, successivement mis aux voix, sont adoptés.
Il s'agit de garantir le bon fonctionnement du régime de complémentaire retraite des hospitaliers et de légitimer la gouvernance paritaire spécifique de son association souscriptrice, le comité de gestion des oeuvres sociales des établissements hospitaliers publics, le CGOS.
Le Gouvernement souhaite compléter les dispositions introduites au Sénat avec son soutien, qui visent à assurer la bonne information individuelle de tous les associés au régime.
J'étais déjà favorable à cet amendement en première lecture. Je confirme cet avis.
L'amendement n° 98 est adopté.
L'article 15 ter, amendé, est adopté.
Ce texte s'attaque aux frais bancaires, souvent injustes, excessifs et déplafonnés. Des avancées ont été réalisées, notamment par voie d'amendement, et elles sont importantes.
Cependant, il reste un prélèvement injuste et injustifié, que subissent les personnes les plus fragiles, notamment les personnes âgées et celles qui souffrent d'une maladie de longue durée. En effet, les frais pour comptes inactifs s'élèvent de cinq à cent quarante euros par an et peuvent représenter un coût élevé pour certaines catégories de personnes. Je pense que nous avons tous rencontré des personnes malades ayant un compte inactif depuis plus d'un an à qui l'on a prélevé de grosses sommes, que l'on peut considérer comme abusives.
Le présent amendement propose donc de supprimer les frais sur les comptes inactifs, comme c'est d'ailleurs déjà le cas dans certaines banques, qui ne prélèvent plus ces frais car ils ne correspondent plus à des frais réellement engagés.
C'est une question importante, qui a déjà connu des évolutions pour ce qui concerne l'assurance-vie.
En commission des finances, nous avons envisagé de la traiter de manière plus transversale, plus globale, dans une proposition de loi abordant l'ensemble des problèmes des comptes bancaires en déshérence ou inactifs. Nous attendons en effet sur ces sujets un certain nombre d'analyses et d'informations de la part, notamment, de la Cour des comptes. Le Gouvernement s'est engagé à nous accompagner si nous allons dans ce sens.
Je vous propose donc de vous rallier à cette hypothèse, de retirer votre amendement et de travailler à une proposition de loi sur l'ensemble des problématiques des comptes bancaires inactifs ou en déshérence.
Je confirme l'engagement que j'avais pris.
Dès lors que l'engagement est pris de travailler en commun sur cette question, je retire mon amendement.
L'amendement n° 33 est retiré.
Pour notre groupe, l'article 17 est l'une des mesures essentielles du texte. Il ne concerne pas des flux financiers abstraits, lointains, des sommes avec six ou dix zéros, mais tout simplement la vie quotidienne de millions de Français.
Nous sommes très attachés au plafonnement des frais bancaires pour tous les Français, que nous avons adopté en première lecture, avec l'accord du Gouvernement.
Nous avons suivi avec une grande attention les débats au Sénat, qui a proposé une rédaction légèrement différente de celle retenue par notre Assemblée en première lecture. Il a souhaité, en effet, introduire deux niveaux de plafond, un pour les publics les plus fragiles et un qui n'était pas réellement qualifié. Cela nous paraît vider de son efficacité le dispositif que nous avions adopté.
Pour les publics les plus fragiles, avec parfois des surendettements considérables, les banques doivent faire un effort d'une autre nature. Le problème n'est pas le plafonnement des frais bancaires, même s'il faut y veiller aussi, et à ce titre d'ailleurs, monsieur le ministre je considère, comme un grand nombre de mes collègues, que vous retireriez un immense avantage à regarder de près le plafonnement du coût des incidents sur les chèques bancaires, sur les virements et sur les prélèvements, qui relève du pouvoir réglementaire qui est le vôtre et qui est notoirement trop élevé – mais ce n'est pas le débat de ce soir…
Ce soir, nous parlons du plafonnement des commissions sur les cartes bancaires et, pour les publics les plus modestes, il y a des dispositions à prendre. Certaines banques adoptent d'ailleurs parfois des systèmes de paiement par carte avec autorisation systématique. Il y a toute une gamme de paiements alternatifs et, disons les choses franchement, ce double plafond risque au fond de donner bonne conscience. L'on mettra en place un plafond pour les publics les plus modestes et, à quelques centaines d'euros, un plafond qui ne sera pas réellement utile aux Français qui, dans la crise, connaissent des situations de précarité et de chômage.
Voilà pourquoi nous souhaitons revenir à la rédaction initiale et ainsi supprimer la seconde phrase de l'alinéa 2.
C'est un débat que nous continuerons peut-être avec nos amis sénateurs si cet amendement est adopté ce soir, et, à ce stade, je crois qu'il doit l'être.
À moins que l'on ne nous communique de nouvelles informations sur les plafonds envisagés, on voit bien que le double plafonnement peut être efficace et bénéfique comme il peut présenter le risque de mettre l'accent sur la protection des publics à la limite de la situation marginale en ayant un peu moins d'effet sur les classes moyennes.
J'ai évoqué en présentant mon rapport le cas d'une personne ayant 1 200 euros de revenus, qui ne serait clairement pas concernée par un plafond pour les publics fragiles mais qui, en revanche, doit obligatoirement être protégée par un plafond davantage tourné vers l'ensemble des Français.
Je suis donc favorable à cet amendement, persuadée que le débat va se poursuivre efficacement avec nos collègues sénateurs.
Nous avons déjà eu un débat à ce sujet en commission des finances et nous avons décidé qu'il devait avoir lieu en séance. C'est en effet une question essentielle qui mérite que l'on y consacre un peu de temps.
C'est à mon initiative qu'elle a été introduite dans le projet de loi. J'ai tenu, en effet, à ce qu'il propose des mesures de défense des consommateurs – ce qui n'était pas son objet initial – parce qu'il me semblait indispensable qu'une loi de régulation bancaire fasse le lien avec le quotidien des Français. Ma préoccupation première en proposant de plafonner les commissions d'intervention était de traiter la situation des populations les plus fragiles, parce que ce sont elles qui souffrent le plus des commissions à répétition. À l'origine, le plafonnement ne concernait qu'elles.
En première lecture, vous avez élargi le champ du dispositif, en prévoyant un plafond pour toutes les clientèles des banques et en spécifiant que ce serait par opération et par mois. Cela correspondait à une demande politique forte de votre part, que j'ai soutenue.
J'insiste sur ce point, il ne s'agit pas pour le Gouvernement de revenir sur votre souhait de voir l'ensemble des clients bénéficier d'un plafond significativement réduit par rapport à ce que paient aujourd'hui les personnes qui multiplient les incidents. Je m'y engage.
Toutefois, lors de la discussion au Sénat, les sénateurs ont exprimé la crainte que ce plafond ne soit fixé trop haut pour protéger les populations les plus fragiles, et ils ont souhaité revenir à la version initiale du texte, ce qui ne me semblait pas souhaitable, car on aurait perdu le bénéfice politique de la mesure de généralisation, ce que je leur ai expliqué. Un accord politique a donc été trouvé sur un double plafond, qui tenait compte de votre travail tout en protégeant spécifiquement les populations fragiles. On préservait d'autant plus le gain politique que le plafond bas était lié non plus à une catégorie de revenus mais à un moyen de paiement.
Je n'ignore pas que, derrière votre amendement, il y a la crainte qu'un double plafond ne conduise à vider de sa substance le dispositif que vous avez adopté en première lecture. Personnellement, je ne le crois pas, mais il y a des contraintes, avec ou sans double plafond. Cela ne signifie bien sûr pas que nous ne serons pas volontaristes dans la détermination du plafond universel.
Telles sont les réserves, dont, par honnêteté, je voulais vous faire part, qui me conduisent à penser que la mesure votée par le Sénat est équilibrée et répond à vos préoccupations, tout en ciblant les populations les plus fragiles, celles pour lesquelles, initialement, je voulais agir. Je n'ignore pas quelle est votre volonté. Je vous soumets ces arguments et je m'en remets à votre sagesse.
L'amendement n° 91 est adopté.
L'amendement n° 55 est retiré.
L'article 17, amendé, est adopté.
L'article 17 bis AA prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 juin 2014, un rapport sur la tarification des services bancaires dans les départements et collectivités d'outre-mer.
Selon le rapport de Mme Berger, cet article a été adopté à l'initiative d'un collègue sénateur, l'objectif étant d'évaluer l'impact de la loi du 20 novembre 2012, qui a introduit dans le code monétaire et financier un article L. 711-22, aux termes duquel, en outre-mer, les établissements de crédit ne peuvent pratiquer des tarifs supérieurs à la moyenne de ceux que les établissements ou les caisses régionales du groupe auquel ils appartiennent pratiquent dans l'hexagone.
Selon les articles 32 et 33 de cette loi du 20 novembre 2012, articles dont je suis à l'origine, l'Assemblée ayant accepté de voter mes amendements, le Gouvernement peut, par décret, plafonner seize tarifs bancaires de base en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, leur coût étant de deux à dix fois plus élevé dans nos territoires qu'en métropole.
Même si l'argumentation – l'alignement des tarifs – semble limiter le champ du rapport aux départements d'outre-mer, la rédaction de l'article est plus large et peut englober à la fois les départements et les collectivités d'outre-mer. Les collectivités du Pacifique pourraient alors être concernées par ce rapport qui doit être remis au Parlement avant le 30 juin 2014.
Je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, si ma lecture de l'article est la bonne.
C'est la bonne, monsieur Gomes.
L'article 17 bis AA est adopté.
Les articles 17 bis AB, 17 bis A, 17 bis B, 17 quater et 17 quinquies sont successivement adoptés.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement n° 94 .
L'objet de cet amendement est de garantir à l'emprunteur la liberté de choisir son assurance et la transparence des garanties exigées, afin qu'il puisse faire appel à d'autres assureurs que son banquier.
La commission a émis un avis défavorable, en raison du nombre déjà très important d'informations ajoutées au cours des évolutions du texte. Ce ne sont là, après tout, que des informations supplémentaires.
L'amendement n° 94 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Dans le droit fil de l'amendement précédent, mais, je l'espère, avec plus de succès auprès de nos collègues, il s'agit de renforcer l'information des emprunteurs au moment où ils contractent un emprunt. Nous considérons que l'actuelle formulation du texte laisse une part d'interprétation qui peut en affaiblir la portée. L'information sur la liberté de choix doit être fournie suffisamment tôt pour que l'emprunteur puisse mener à bien ses recherches et comparer les offres des établissements. Si l'information lui est fournie dès le premier contact avec le banquier, il aura le temps d'effectuer cette recherche. Nous pourrons ainsi avoir entre les banques une concurrence libre et non faussée.
Rires sur les bancs du groupe GDR.
Ce n'est pas tout à fait la même chose que le précédent amendement et la commission a donné un avis favorable car il s'agit de s'assurer que les délais permettant la concurrence sur l'assurance emprunteur soient les meilleurs possibles et soient respectés.
L'amendement n° 67 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je défendrai également l'amendement no 104 , que nous examinerons un peu plus tard et qui est lié à celui-ci.
Je ne sais pas s'il faut que j'utilise les mots « concurrence libre et non faussée » pour avoir une chance de les faire adopter, mais je vais essayer…
Sourires.
Nous le savons, le taux effectif global est un élément essentiel des offres de prêt. Ce taux doit intégrer dans son calcul tous les frais imposés par la banque à l'emprunteur, y compris les frais d'assurance. Il a perdu, depuis quelques années, une partie de ses vertus en termes de comparaison des offres de prêt ; il est fréquent en effet qu'une banque demande à son client de souscrire une assurance facultative, en réalité obligatoire, pour ne pas avoir à l'intégrer dans le TEG, notamment afin de ne pas dépasser le taux d'usure. Autrement dit, ce sont aujourd'hui les banques qui décident ce qu'il y a dans le TEG.
Afin d'améliorer la comparabilité des offres d'assurance et des taux, le présent texte impose que le coût de l'assurance soit présenté en montant total dû sur la durée du prêt et en taux annuel effectif de l'assurance. C'est une excellente chose car cela permettra une vraie comparaison. Nous proposons toutefois, avec ces deux amendements, d'améliorer le dispositif de transparence en faisant en sorte que le TEG n'intègre pas l'assurance. Nous aurions ainsi un système beaucoup plus clair et lisible avec, d'un côté, un TAEA indiquant le coût de l'assurance et, de l'autre, un TEG permettant au consommateur de connaître et d'évaluer le coût du crédit proprement dit, à savoir les frais de sûreté du prêteur.
La création d'un taux annuel effectif d'assurance n'a aucun effet sur les modalités de calcul du taux effectif global. Nous ne modifions pas les modalités de calcul du TEG, qui doit de toute façon prendre en considération le coût de l'assurance car c'est un coût directement lié au crédit. La dissociation entre TAEA et TEG ne permettrait pas de modifier le calcul du TEG. Ce que vous souhaitez faire ne peut l'être avec ces amendements. Avis défavorable.
L'amendement n° 89 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 84 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Par cet amendement, nous proposons à l'Assemblée de poursuivre l'effort de défense des clients d'établissements bancaires lorsqu'ils contractent un emprunt. La présente proposition, à l'alinéa 22, consiste à obliger la banque à émettre l'offre de prêt modifiée dans un délai maximum de deux jours lorsque l'emprunteur fait une délégation d'assurance. En effet, il y a aujourd'hui dans le texte une lacune évidente qui pourrait entraver la liberté de choix de l'emprunteur, du fait de cette absence de délai rendant possible des manoeuvres dilatoires de la part d'une banque qui, ne voulant pas perdre les revenus qu'elle tire de son assurance de groupe, tarderait à fournir l'avenant, dans l'espoir d'un abandon de délégation de la part de son client.
Nous avons eu la discussion en commission. Votre inquiétude quant à l'absence de délai a été retenue, cher collègue, et nous nous sommes mis d'accord sur un amendement de synthèse du Gouvernement qui ramène à dix jours ouvrés le délai maximum d'acceptation et de notification. Je propose que nous en restions au texte adopté par la commission des finances et que vous retiriez donc votre amendement. Nous sommes parvenus, je crois, à un bon équilibre.
Je suis du même avis que Mme la rapporteure.
L'amendement n° 68 est retiré.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement n° 96 .
C'est le même souci d'équilibre mais en faveur du progrès, de la liberté, de l'égalité. Cet amendement vise à ce que l'on ne puisse refuser les garanties d'une assurance prise dans un autre établissement dès lors que l'organisme prêteur a donné, dans sa publicité, ces mêmes garanties. Il s'agit de favoriser une saine concurrence entre les assureurs.
Défavorable. Cet amendement est lié à l'amendement n° 94 qui vient d'être rejeté par l'Assemblée. Nous sommes cohérents : avis défavorable.
L'amendement n° 96 est retiré.
Nous essayons de donner jour progressivement à une réglementation plus protectrice du client d'établissements bancaires quand il contracte un emprunt. Le présent amendement permettrait de supprimer le délai de six jours imparti pour l'envoi de l'offre modifiée par la banque, délai qui s'ajoute aux huit jours pour répondre à la demande de substitution. Le banquier devrait donc envoyer l'offre modifiée en même temps que sa réponse.
Même avis qu'à l'instant : je propose que nous en restions aux dix jours.
L'amendement n° 69 est retiré.
La parole est à M. Jacques Pélissard, pour soutenir l'amendement n° 2 .
Les amendements qui ont été présentés ont tous eu pour objet de limiter les délais pris par la banque, afin de protéger le consommateur. Mme la rapporteure et M. le ministre rappellent qu'un amendement de synthèse a été adopté, prévoyant dix jours ouvrés. Il faut protéger le consommateur. Dans les textes, il est question de trente jours pour l'offre de prêt, de dix jours pour le délai de réflexion – c'est la loi Scrivener –, mais jamais l'on ne parle de dix jours « ouvrés », ce mot n'apparaît pas. Je propose donc de revenir à ce qui est la règle en matière de protection du consommateur, à savoir des jours calendaires. Autrement, ces jours ouvrés seront en contradiction avec l'ensemble du dispositif législatif pour la protection du consommateur.
Le sujet a été tellement débattu que je doutais de ma mémoire. Je vous lis le texte issu de la commission, monsieur Pélissard : « Si l'offre définie à l'article L. 312-7 a été émise, le prêteur notifie à l'emprunteur sa décision d'acceptation ou de refus et lui adresse, s'il y a lieu, l'offre modifiée mentionnée à l'article L. 312-8 dans un délai de dix jours ouvrés à compter de la réception de la demande de substitution. » Plusieurs propositions avaient été présentées ; nous avons réussi à nous mettre d'accord sur dix jours ouvrés, de manière assez claire. S'il faut en venir, un jour, à un délai encore plus court, pourquoi pas ? Mais restons sur la décision de la commission : avis défavorable.
L'amendement n° 2 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement n° 95 .
L'amendement n° 95 est retiré.
L'amendement n° 57 est retiré.
C'est une approche un peu différente, sur l'alinéa 29. Beaucoup de banques-assurances vendent des produits joints et réalisent leurs marges sur l'assurance. Le rapport de la commission fait apparaître le montant évalué de la marge de l'assurance. Après avoir signé, le client ne peut plus se retirer. Si nous voulons permettre une réelle concurrence dans le domaine de l'assurance des prêts, nous devons offrir aux souscripteurs la possibilité de changer de compagnie d'assurance. Cela créerait plus de fluidité et de transparence, plus de concurrence, au profit du consommateur.
Voilà une proposition portée par cinq des six groupes politiques de notre assemblée. Elle aurait pu être portée par les six, car il existe un réel souci sur cette question.
Le marché des assurances emprunteur est un marché important qui atteint cinq milliards d'euros par an. La plus grande part de ce marché est captée par les banques, avec des produits joints. Néanmoins, contrairement aux autres contrats de même nature – assurances habitation, automobile…, – où la cotisation annuelle est révisable, l'assurance emprunteur est calquée sur la durée d'exécution du prêt qu'elle doit couvrir, et si les assurances emprunteur représentent un intérêt certain pour les compagnies d'assurance, puisqu'elles leur offrent une marge nette d'environ 3 milliards – 50 % ! –, ce n'est pas forcément le cas pour les emprunteurs.
Elles coûtent en moyenne 20 000 euros, soit environ 25 % du crédit. Cela représente 40 % par mois. On parle du pouvoir d'achat de nos concitoyens : nous sommes là sur un point extrêmement sensible. L'objectif de cet amendement est donc de renforcer le droit des emprunteurs en leur permettant, à la date anniversaire du contrat, d'avoir la liberté de choix.
Nous avons eu ce débat sur la loi bancaire, en première lecture, puis sur la loi relative à la consommation. Je sais qu'une étude d'impact doit être réalisée pour la deuxième lecture de cette dernière. Contre les objections qui ont été formulées, je tiens à souligner que la couverture serait la même : les assurés ne seraient pas fragilisés par un changement d'assurance, bien entendu, sinon ils n'en changeraient pas. En outre, l'offre existe – c'est une question qui a été posée par M. Lagarde ce matin.
J'ai l'exemple d'une demande de prêt familial de 40 000 euros. Il y a dix demandes, dix réponses. Et quand on voit les prix, on est stupéfait. La réponse du Crédit agricole – grande banque –, c'est, pour 40 000 euros, 850 euros – avec 600 euros de remise commerciale. Pour les autres demandes, cela va de 180 euros à 330 euros. On est donc bien dans le cadre des 50 % que j'ai évoqués. S'il faut se refaire sur l'assurance parce que les taux ne sont pas assez élevés, cela ne va pas : la transparence est requise, il faut peut-être un taux plus élevé et une assurance à son vrai prix. Les membres de cette famille se sont entendu dire : « Si vous ne voulez pas prendre l'assurance chez nous, ce ne sera plus un taux à 2,10 mais à 2,30 %. » Voilà le résultat.
Le même amendement, M. Alauzet l'a rappelé, a été déposé par cinq des six groupes politiques, je pense donc qu'il devrait recevoir un avis favorable, en tout cas remporter une majorité claire au sein de l'hémicycle.
L'objectif est de permettre la résiliation à la date anniversaire de l'assurance emprunteur, sachant que les établissements bancaires font 50 % de marge, après avoir contracté eux-mêmes auprès de courtiers qui leur fournissent le produit. Monsieur le ministre, vous avez demandé une étude d'impact, mais elle existe déjà et nous en connaissons les chiffres. Il ne nous paraît dès lors pas souhaitable de remettre aux calendes grecques cette disposition.
Cet amendement, dont mon collègue Laurent Grandguillaume ici présent est cosignataire, prévoit la possibilité pour un emprunteur de résilier tous les ans, en cours de prêt, son contrat d'assurance sans avoir à verser d'indemnités ou à payer des frais. Il prévoit aussi la possibilité de dénoncer, dans les mêmes conditions, son adhésion à un contrat d'assurance de groupe.
En effet, le projet de loi dispose en l'état que « jusqu'à la signature de l'offre de prêt, l'emprunteur est libre de proposer une nouvelle assurance », ce qui suppose qu'il ne l'est plus ensuite… L'amendement établit un libre choix annuel pour l'emprunteur, qui doit pouvoir réajuster sa couverture, l'assurance souscrite lui coûtant en moyenne 25 % de son crédit, ce qui représente 40 % de marge mensuelle pour les banques sur six millions de foyers emprunteurs immobiliers.
Cette faculté de résiliation permettrait à certains emprunteurs de sortir de situations délicates, tel le surendettement, et à des personnes en risque aggravé de santé d'accéder à de nouvelles propositions d'assurance, plus étendues et moins coûteuses.
Cet amendement vise à rompre le lien existant entre l'assurance et la souscription du crédit. En effet, bien que non obligatoire, l'assurance emprunteur est imposée à quasiment tous les emprunteurs immobiliers, les banques l'exigeant pour accorder un prêt. Ainsi, pour un couple de jeunes emprunteurs, elle représente en moyenne près de 25 % du coût total du crédit. Réduire ce coût représenterait alors un réel gain de pouvoir d'achat, de l'ordre de 40 euros par mois, soit près de 10 000 euros sur vingt ans. Pour y parvenir, la liberté de choix des emprunteurs est fondamentale.
Cependant, il est clair que les banques créent des obstacles au droit de choisir, l'assurance emprunteur représentant environ 6 milliards d'euros de primes annuelles collectées pour six millions de dossiers.
Notre amendement propose donc de garantir la liberté de choix de l'emprunteur. À cet effet, il est également nécessaire que l'assurance emprunteur soit résiliable et substituable annuellement par l'assuré sans aucune pénalisation possible.
J'entends bien que la demande émane de presque tous les bancs de l'Assemblée, mais je voudrais vraiment insister sur ce que le ministre et moi-même avons dit en commission des finances.
Pour répondre notamment à notre collègue Alauzet, je reconnais que, si la marge est trop importante, il y a bel et bien un problème, mais donner la possibilité de résilier l'assurance en cours d'année ne le résoudrait pas nécessairement. En effet, la meilleure façon de faire baisser la marge, c'est de s'assurer que le risque n'est pas connu par l'assureur. Là est la clef de la problématique de l'assurance : arriver à faire exister un voile d'ignorance sur le risque encouru par le client aux yeux de l'assureur. À partir du moment où celui-ci connaît ce risque, il peut calculer et dégager la marge maximum sur l'assurance qu'il vend à son client. La seule façon d'arriver à créer ce voile d'ignorance, c'est la mutualisation maximale des mécanismes assuranciels.
La possibilité de renégocier une assurance en cours d'année en fonction du type de risque – bayésien ou non bayésien – peut soit renforcer l'ignorance du risque par l'assureur, soit au contraire l'annuler. À ce stade, nous ne savons pas quelle est la probabilité de calcul du risque sous-jacente à l'assurance emprunteur. C'est pourquoi nous attendons le rapport de M. Constans sur le sujet. S'il conclut que le fait de pouvoir renégocier en cours d'année l'assurance renforce la mutualisation, il faudra aller vers la possibilité de résiliation en cours d'année, mais si le rapport aboutit à la conclusion qu'une telle renégociation démutualise le risque et conduirait à ce que certaines personnes ne puissent plus s'assurer, sinon à un prix maximal, tandis que d'autres bénéficieraient d'un prix minimal parce que l'absence de risque serait connue de l'assureur, il faudra ne pas remettre en cause la législation.
Bref, je reste sur la position de la commission des finances qui, à ce stade, est défavorable. Encore une fois, j'entends très bien les points que tous avez soulevés, mais j'insiste sur le fait que nous ne sommes pas encore en mesure d'être sûrs qu'une renégociation en cours d'année ne va pas à la fois démutualiser et en plus faire monter les marges des assureurs.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cette série d'amendements identiques ?
Nous avons là un débat important sur lequel j'ai d'ores et déjà engagé des travaux de réflexion. Je rappelle qu'il est aujourd'hui possible de changer d'assurance en cours de prêt, mais que cela peut nécessiter contractuellement l'accord du prêteur. Ces amendements posent la question de la généralisation de cette pratique. Il faut s'assurer, je l'ai dit en commission des finances, qu'une telle réforme se ferait au bénéfice de l'ensemble des assurés.
De plus, cette proposition pourrait avoir l'inconvénient de développer la concurrence au profit des assurés qui possèdent les meilleurs risques et au détriment des autres, ceux qui, en raison de leur âge, de leur profession ou de leur état de santé, se verraient demander des tarifs plus élevés sans pouvoir véritablement faire jouer la concurrence. C'est d'ailleurs une préoccupation des associations de malades qui, comme vous le savez, suivent ces sujets de très près.
La réforme que vous proposez est de nature systémique. Je déconseille de s'y engager sans avoir fait au préalable une analyse complète et approfondie de la situation actuelle et du possible impact de cette réforme. Ni vous ni moi ne souhaitons nous retrouver ici même dans quelques mois ou dans quelques années, pour revenir en arrière sur une réforme qui n'aurait pas correctement pris en compte ces risques faute d'avoir été bien préparée.
Mais je suis très conscient qu'il y a une volonté forte sur tous les bancs, comme l'a dit Nicolas Sansu, d'avancer sur ce sujet. Je sais par ailleurs que nous arrivons presque au terme du débat sur ce texte et que vous ne voulez pas vous retrouver sans faculté d'agir par la loi dans les prochains mois. Je vais donc vous faire une proposition que j'avais amorcée pendant les débats en commission : que vous retiriez ces amendements au profit d'un amendement déposé dans les prochains jours sur le projet de loi « Consommation », qui demandera au ministre des finances de rendre avant la fin de l'année au Parlement un rapport sur l'ensemble des aspects de cette question et sur les modalités d'une éventuelle réforme. Je m'engage à le remettre dans des délais compatibles avec la deuxième lecture du projet de loi « Consommation » – j'en ai évidemment parlé avec Benoît Hamon. Ainsi, vous pourrez décider ou pas, en fonction des résultats de cette étude, de mettre en oeuvre une telle réforme.
Vous voyez que je ne vous demande pas du tout d'abandonner le projet mais de me donner un peu de temps, en attendant un très prochain véhicule législatif, pour éviter de commettre des erreurs ou des approximations. Le projet de loi « Consommation » me paraît à cet égard un très bon véhicule. Au vu de mes engagements à poursuivre ce chantier de fond sur l'opportunité d'une telle réforme et sur ses modalités de mise en oeuvre, je vous propose de retirer vos amendements au bénéfice de la poursuite du débat dans le cadre du prochain texte, sachant que j'ai pris, je le redis, deux engagements très précis : il ne s'agit pas de différer le débat à l'infini, mais de préparer un rapport sur une mesure qui serait en toute hypothèse compatible avec l'examen du projet de loi « Consommation » avant sa deuxième lecture.
Qu'il faille prendre un peu de temps pour mesurer toutes les conséquences de mon amendement ne me dérange pas, c'est même souhaitable, mais je ne voudrais pas que l'on se base sur des arguments qui ne sont pas convaincants. Le risque de démutualisation existe sans doute, madame la rapporteure, mais il n'est pas de la même nature ni de la même portée financière que le problème que j'ai évoqué. Je vous donne des chiffres précis pour une personne dont le risque est identique pour les différentes compagnies d'assurance : la banque propose un prêt lié de 850 euros avec une remise commerciale de 600 euros, mais il y a dix autres offres disponibles : un contrat d'Allianz à 288 euros, un deuxième de la même société à 206 euros, un troisième à 331 euros, et il y a Cardif, l'AMAF… tous deux à trois fois moins cher pour le même risque. Il y a donc véritablement un problème, les 100 % de bénéfice sont une réalité.
Certes, la démutualisation est à prendre en compte, mais il s'agit de deux problèmes qu'il faut traiter différemment.
J'entends bien M. Alauzet, mais il évoque seulement un problème commercial : chaque établissement d'assurance fait une offre, au client de choisir la meilleure. Je remercie Mme la rapporteure de m'avoir vraiment bien éclairé sur le risque suscité par la fragmentation de l'offre. Le fait de fragmenter quasiment tous les ans le risque et de voir l'emprunteur changer de compagnie d'assurance aurait un coût que quelqu'un devrait bien payer : ce serait l'emprunteur puisque chaque compagnie calculerait le manque de mutualisation des risques au travers d'une prime de base supérieure. Cela mérite une étude d'impact. C'est ce que nous propose M. le ministre. Il faut en effet mener une étude pour savoir si, oui ou non, ce serait profitable à l'emprunteur.
Je soulève un autre problème lié au changement d'assurance : par nature, à partir du moment où l'on change de compagnie, on est dans l'obligation de passer un examen médical, donc peut-être de voir révéler des détériorations de son état de santé. Le risque voilé que vous évoquez, madame la rapporteure, comment sera-t-il dès lors pris en compte par la compagnie d'assurance ? Encore un risque que va prendre l'emprunteur, et je souhaite qu'il soit évalué, monsieur le ministre, au travers de l'étude que vous allez mener.
Je pense que nous sommes quasiment tous d'accord pour estimer que la possibilité de rechercher une meilleure offre est une bonne idée pour le consommateur, mais on voit les risques qu'entraînerait cette fragmentation, je pense au pari mutuel urbain qui redistribue une masse d'argent parce que celle-ci n'est pas fragmentée.
Comme Jean-François Lamour, j'ai été convaincu par l'argumentation de notre rapporteure. Il est vrai que le risque de fragmentation, de démutualisation, peut poser problème pour les personnes qui ont les profils les plus risqués, donc les plus vulnérables. Je pense que la proposition du ministre est bonne. Le sujet étant extrêmement complexe, j'espère que le rapport pourra nous permettre d'y voir clair mais aussi de répondre à la question, quelque peu différente, soulevée par M. Alauzet : mieux apprécier la teneur des marges, probablement dans certains cas tout à fait excessives, indépendamment des questions de mutualisation.
J'ai bien entendu les explications de Mme la rapporteure et de M. le ministre. En attendant l'étude d'impact, et dans la mesure où l'amendement adopté ce matin en commission des finances dans le cadre du projet de loi sur la consommation devrait permettre, à l'issue des débats sur ce projet de loi, d'aboutir à l'objectif poursuivi, je retire l'amendement n° 60 .
L'amendement n° 60 est retiré.
L'amendement n° 4 est retiré.
Si je souscris à la démarche qui a été proposée de mener une étude d'impact, je vais tout de même maintenir l'amendement n° 34 . Certes, il est théoriquement possible de choisir au départ, mais neuf personnes sur dix ne le font pas – s'agissant d'un contrat lié, elles ne regardent que le taux – et ce n'est qu'un ou deux ans plus tard qu'elles se posent la question. Si leur situation médicale se dégrade, elles ne changent pas d'assurance, et il n'y a pas de problème.
Le seul risque pour le consommateur, c'est que les taux bancaires soient proposés à leur vrai prix.
Je veux dire un mot de cette question, car il me semble qu'il peut y avoir une confusion à son sujet. Aujourd'hui, les personnes porteuses de risques ne parviennent pas à souscrire l'assurance emprunteur de la banque…
…alors que les personnes sans problème de santé particulier peuvent y accéder. L'argument qui a été avancé sur ce point ne me paraît donc pas très pertinent.
J'entends bien la nécessité d'une étude d'impact mais, puisque mon collègue Alauzet maintiens son amendement, je vais faire de même. Nous verrons bien, ultérieurement, si la loi relative à la consommation répond au besoin qui se fait sentir.
L'amendement n° 104 est retiré.
L'article 18 est adopté.
Les articles 18 bis et 20 sont successivement adoptés.
L'article 21, amendé, est adopté.
L'article 21 bis AA est adopté.
Nous avons évoqué tout à l'heure le plafonnement des frais bancaires. L'amendement n° 71 , vise, quant à lui, à améliorer la transparence relative aux frais bancaires, en élargissant le périmètre de l'information délivrée aux consommateurs en amont du prélèvement des frais. En effet, cette information préalable ne va pas suffisamment loin : nous estimons qu'elle ne doit pas concerner que les frais liés à des irrégularités et incidents, mais également tous les frais bancaires existants, récurrents ou non : frais de change, frais de retraits dans des distributeurs hors réseau, etc. Il convient que soit établie une liste, lisible et compréhensible par tous, des sommes souvent considérables acquittées chaque année au titre des frais bancaires, en dehors même des incidents.
La commission des finances estime que le Sénat est parvenu à un équilibre satisfaisant en prévoyant que le consommateur est informé sur les seuls frais liés aux irrégularités et incidents. Augmenter les informations transmises au consommateur, comme le propose cet amendement, peut à notre sens avoir pour effet de diluer la portée des informations importantes : c'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
L'amendement n° 71 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 21 bis A est adopté.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 101 rectifié .
Le présent amendement a d'abord pour objet d'ajuster l'appellation des représentants de la Direction générale des finances publiques – la DGFIP – au sein des commissions de surendettement afin de tenir compte de l'achèvement de la mise en place du réseau unifiée à la suite à la fusion des réseaux déconcentrés de la direction générale de la comptabilité publique et de la direction générale des impôts.
Il vise également à permettre aux délégués du préfet et du DDFIP au sein des commissions de surendettement de pouvoir, en cas d'empêchement, être remplacés dans des conditions fixées par décret. Vous le voyez, cet amendement n'est peut-être pas fondamental par sa substance, mais il n'en est pas moins formellement nécessaire.
Sourires.
L'amendement n° 101 est adopté.
L'amendement n° 81 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 22, amendé, est adopté.
Les articles 22 bis et 22 ter sont successivement adoptés.
Le surendettement est à l'origine de situations de détresse qui ne peuvent laisser indifférents le Parlement et le Gouvernement. Pour lutter contre cette situation, il faut privilégier une coresponsabilisation des deux acteurs du prêt : le prêteur et l'emprunteur. On voit, bien trop souvent, des organismes peu regardants accorder des crédits à des personnes dont la situation financière n'offre manifestement aucune garantie de remboursement. Et ces mêmes organismes, en cas de défaillance de l'emprunteur, se tournent ensuite vers la société pour obtenir réparation.
Afin de responsabiliser les établissements de crédits, nous proposons d'exiger qu'ils étudient avec précision la situation financière des souscripteurs et décident, en connaissance de cause, d'octroyer ou non le crédit qui leur est demandé. S'il apparaissait que l'établissement de crédit n'avait pas procédé à cette vérification, il serait, dès lors, responsable de la non-solvabilité éventuelle du souscripteur et ne pourrait donc pas engager de procédures de recouvrement, sauf si le souscripteur a délibérément fourni de fausses informations le concernant. Tel est le sens de notre amendement n° 74 .
Comme cela a été dit à M. Vigier, qui a défendu cet amendement en commission des finances, le travail important accompli dans le cadre du projet de loi sur la consommation va permettre d'avancer de manière constructive. Votre souhait d'évoluer vers un fichier positif est partagé par nombre d'entre nous et, sur ce point, je vais passer la balle à M. le ministre, afin qu'il nous confirme que ce projet de fichier positif sera bien abordé dans le cadre de la loi sur la consommation. Le cas échéant, il serait préférable d'attendre l'examen de cette loi pour trouver une solution au problème que vous évoquez – et dès lors, la commission émettrait un avis défavorable à votre amendement n° 74 .
Je confirme que la création d'un registre national des crédits est prévue dans le cadre de la loi relative à la consommation : le Gouvernement déposera, lors de la première lecture devant votre assemblée, un amendement en ce sens, que M. le ministre délégué chargé de ce sujet et moi-même sommes en train de peaufiner. Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 74 .
Nous prenons acte de l'engagement du Gouvernement – dont je vous remercie, monsieur le ministre – de reprendre le dispositif que nous proposons dans le véhicule législatif que va constituer la loi sur la consommation. Par conséquent, nous retirons notre amendement n° 74 .
L'amendement n° 74 est retiré.
En contrepartie de la responsabilisation du prêteur, qui faisait l'objet du précédent amendement, il est nécessaire de lui donner les moyens de s'informer de la situation d'endettement des emprunteurs. Le fichier existant ne le permettant pas, nous proposons la création d'un fichier national qui présenterait l'avantage de donner aux établissements de crédit des éléments d'appréciation pertinents au moment de la décision d'octroi du crédit.
Cette idée est défendue de longue date par les centristes. Nous avons pris note de la volonté du Gouvernement de la mettre en oeuvre dans le cadre du projet de loi relatif à la consommation et, compte tenu de l'engagement pris à ce sujet par M. le ministre, je retire l'amendement n° 75 .
L'amendement n° 75 est retiré.
L'article 22 quater est adopté.
Les articles 23 et 23 bis sont successivement adoptés.
L'article 23 ter, amendé, est adopté.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 114 .
L'amendement n° 114 , débattu en commission des finances à l'initiative du rapporteur général, vise à attirer l'attention de notre assemblée sur les comptes bancaires inactifs, en étendant à ces comptes le dispositif prévu à l'article 23 quater pour les contrats d'assurance-vie en déshérence. Alors qu'il y a environ 20 000 centenaires en France, 100 000 comptes sont détenus par des centenaires : c'est là un sujet non seulement complexe, mais comportant également un important enjeu financier.
La commission des finances – je parle sous le contrôle de son président – a formulé une demande auprès de la Cour des comptes, sur la base de l'article 58 de la LOLF, afin d'obtenir une étude des comptes bancaires inactifs et contrats d'assurance-vie en déshérence.
Le rapporteur général voudrait proposer des évolutions législatives sur le sujet, sous la forme d'une proposition de loi. Me faisant le petit facteur du rapporteur général sur cette question, je vous demande si vous voulez bien nous confirmer cette possibilité, monsieur le ministre.
Nous avons débattu de cette question en commission des finances et, m'adressant au petit facteur que vous êtes, madame la rapporteure
Sourires
, je vous saurais gré de bien vouloir transmettre ma réponse au rapporteur général – une réponse qu'il connaît déjà, au demeurant –, à savoir que j'estime, comme lui, que les choses ne sont pas tout à fait mûres pour légiférer sur ce point. Il nous faut, en particulier, attendre les conclusions de la Cour des comptes.
Si ces conclusions plaidaient en faveur de la nécessité d'une loi, nous procéderions à une concertation entre nous afin de déterminer le meilleur moyen d'agir. Je serais, dans ce cas, personnellement favorable à ce que les mesures législatives qu'il conviendrait éventuellement de prendre soient l'occasion, pour le Parlement, de faire preuve d'initiative, sous la forme d'une proposition de loi. Cette position semblait agréer Christian Eckert en commission des finances et j'espère qu'il en sera toujours ainsi quand vous la lui transmettrez, madame la rapporteure. En l'état actuel, je vous invite à retirer l'amendement n° 114 .
L'amendement n° 114 est retiré.
Les articles 24 bis, 24 ter et 25 sont successivement adoptés.
Comme il est d'usage, l'article 26 prévoit que, dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, les mesures relevant du domaine de la loi permettant d'étendre, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de la présente loi, pour celles qui relèvent de la compétence de l'État, à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna.
Je veux simplement appeler l'attention du Gouvernement sur la longueur, qui me paraît excessive, de ce délai de dix-huit mois – même si, je le sais, la charge de travail du ministère est sans doute considérable – et demander à M. le ministre s'il est envisageable que les dispositions particulièrement importantes de cette loi – je pense notamment à celles du chapitre Ier, sur le plafonnement des frais d'incident et offre de services bancaires pour la clientèle en situation de fragilité – soient mises en oeuvre dans un délai plus rapide, de façon à ce que les populations les plus fragiles de nos territoires se trouvant en situation de récession économique significative, telle la Polynésie française, puissent bénéficier rapidement d'une protection particulière. Une telle disposition serait évidemment très appréciée par les autorités responsables de ces collectivités.
L'article 26 est adopté.
L'article 30 est adopté.
L'article 31, amendé, est adopté.
L'article 32 est adopté.
Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-François Lamour.
Comme je l'avais affirmé en première lecture à l'occasion de la présentation d'une motion de rejet préalable – je l'ai d'ailleurs répété lors de la discussion générale –, ce projet de loi n'est pas satisfaisant. Fait notable, il l'est encore moins à la sortie qu'à l'arrivée…
Empressement et durcissement sont les deux travers qui transforment un texte reposant sur un principe acceptable – comme j'ai également eu l'occasion de l'affirmer – en un texte militant, nuisible à la stabilité des réseaux bancaires français et, par voie de conséquence, à l'économie nationale dans son ensemble.
Mesdames et messieurs de la majorité, vous qui n'avez que le mot « emploi » à la bouche, malheureusement sans aucun résultat à ce jour, vous avez encore trouvé le moyen d'affaiblir notre compétitivité.
Lors de votre intervention au début de la discussion générale, il y a quelques heures, monsieur le ministre, vous avez exprimé le souhait que la France ne constitue pas un isolat par rapport aux autres États membres de l'Union européenne. De fait, elle l'est, et le sera au moins au cours des deux prochaines années, soit le temps que la directive CRD IV soit applicable sur le seul territoire de l'Union. C'est sur ce point précis que le groupe UMP a concentré son travail en deuxième lecture.
Lors de nos débats, nous avons en effet proposé deux correctifs, frappés au coin du bon sens : soit différer l'entrée en vigueur des obligations de transparence à la charge des banques, pour les coordonner avec l'évolution de la régulation dans les autres pays européens, soit la conditionner à un principe de réciprocité qui, dans l'espace concurrentiel européen, paraît de bon aloi. Vous avez refusé ces deux propositions.
Nous avons proposé deux autres aménagements. Le premier consistait à revenir sur les trois éléments socles d'information, ajoutés par le Sénat, afin d'atténuer quelque peu le désavantage compétitif subi par les réseaux bancaires français. Le second portait sur la modification de l'alinéa 4, afin que les informations dues soient communiquées au ministre de l'économie et des finances plutôt que publiées en annexe des comptes consolidés. Ces deux aménagements ont également été rejetés en commission des finances et, il y a quelques instants, en séance publique.
Mesdames et messieurs de la majorité, nous abordions ce débat avec l'espoir, certes ténu, que nos propositions seraient écoutées : nous avions tort. Non contents d'avoir durci les obligations d'information à la charge des banques – pas des banques en général mais des seules banques françaises –, vous avez étendu ces obligations aux multinationales dont le siège est établi en France, c'est-à-dire, pour résumer, à nos grandes entreprises. Est-ce vraiment raisonnable ? Est-il opportun d'engager la France dans cette voie ? N'avez-vous pas, finalement, cédé à un désir quelque peu immodeste et narcissique de tout faire maintenant, pour ne le devoir qu'à vous-même ?
Madame la rapporteure, le désir d'inscrire son action dans une continuité historique n'est un atout que lorsqu'il conduit à l'adoption de solutions efficaces et pragmatiques.
Mes chers collègues, la version finale du texte n'est pas seulement symbolique de la cacophonie qui règne entre le Gouvernement et sa majorité, ce qui serait un moindre mal, elle est surtout – j'insiste sur ce mot – un mauvais signe envoyé à notre économie.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe UMP votera contre ce texte.
Au nom du groupe SRC, je veux remercier M. le ministre d'avoir éprouvé le désir « narcissique et immodeste » d'apporter un peu de régulation au secteur bancaire. Il est en effet des moments où il faut savoir imposer aux milieux économiques des restrictions auxquelles ils ne consentent pas, ou tout au moins qu'ils ne souhaitent pas, à condition qu'elles aillent dans le sens de la protection des consommateurs ou de notre système financier. C'est le cas de cette loi qui demeurera, me semble-t-il, l'une des grandes lois de ce quinquennat.
La position du groupe UDI a été explicitée par M. Philippe Vigier à plusieurs reprises. Je veux toutefois redire que, s'agissant de ce texte, nous sommes bien loin des engagements pris par François Hollande durant la campagne électorale. Comme le dit l'adage, « l'on fait campagne en vers et l'on gouverne en prose » : ce texte en constitue une remarquable illustration.
Tout n'est toutefois pas à jeter, dans la mesure où un certain nombre de dispositions présentent un intérêt, comme les intervenants du groupe UDI l'ont indiqué tout au long de l'examen du texte, tant en commission qu'en séance publique.
Voilà pourquoi nous adopterons une position mesurée, qui se traduira par l'abstention.
J'ai eu l'occasion, lors de la discussion générale, d'indiquer tout le bien que je pensais de ce projet de loi qui s'inscrit dans un cycle de la maîtrise de la finance. Nous n'en sommes d'ailleurs qu'au début, et nous en aurons la confirmation dans quinze jours, lors de l'examen du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales.
Nous nous trouvons dans une période marquée par la conjonction de facteurs extrêmement favorables, où tous les clignotants sont au vert, ce qui nous donne l'espoir d'aller très loin. De fait, si l'on m'avait dit il y a six mois que nous serions parvenus à ce stade aujourd'hui, je ne l'aurais sans doute pas cru. Nous sommes allés au-delà de ce que nous attendions. Même si l'on peut toujours estimer que c'est insuffisant – on peut comprendre que ce soit le cas aux yeux de certains –, on est tout de même allés très loin.
Des améliorations ont été apportées lors de cette deuxième lecture, exclusivement par le groupe SRC, ce que je regrette quelque peu. Je n'ai d'ailleurs pas très bien compris pourquoi l'adoption d'un amendement de la rapporteure, dont l'objet se limitait à la publication des résultats, a fait tomber nos amendements portant sur l'introduction de la transparence dans les sociétés. Je n'ai pas compris le lien de causalité entre les deux et pourquoi ces amendements sont tombés. Je n'ai pas non plus compris l'argument d'incohérence qui a été opposé à mon amendement qui portait, précisément, sur la mise en cohérence de cette nouvelle disposition sur la transparence des sociétés avec l'amendement sur la transparence bancaire.
Je voterai évidemment en faveur de ce texte – qui est une belle loi –, mais, pour les deux motifs que je viens d'évoquer, je le ferai avec un tout petit peu moins d'enthousiasme que je ne l'aurais souhaité.
Le projet de loi est adopté.
Je veux remercier l'ensemble des députés présents lors de cette deuxième lecture et saluer ceux d'entre eux qui sont restés jusqu'à cette heure avancée, en particulier les députés de la majorité, nombreux ce soir.
Contrairement à ce qui peut parfois se produire, cette deuxième lecture n'a pas donné lieu à de simples corrections techniques du texte adopté en première lecture : elle aura constitué – au-delà de quelques ajustements introduits ça et là – une nouvelle étape, éminemment politique, dans la dialectique de la régulation de la finance.
C'est un texte ambitieux – même si je ne parlerai pas d'un texte « en vers » –, qui va véritablement changer les choses. Notre discussion de ce soir a permis de poursuivre, au plan national, le travail entrepris il y a plusieurs mois au niveau européen, par cet effet miroir entre les problématiques européennes et nationales : je pense aux amendements sur la transparence, aux dispositions relatives aux bonus ou encore à l'amorce d'une législation s'apparentant au FATCA américain, qui constituent des progrès considérables voulus par votre assemblée.
Je salue le travail de l'ensemble des députés, en particulier celui de votre rapporteure, qui s'est révélée, tout au long de l'examen du texte, extrêmement solide. Cela aura permis d'enrichir considérablement ce texte.
Si ce texte a grossi – il est passé de 26 à 86 articles –, il a néanmoins conservé du muscle, ce qui est une performance assez extraordinaire, que chacun appréciera ici
Sourires.
Le travail n'est toutefois pas terminé : il va se poursuivre au Sénat, puis en CMP, où seront réglés les derniers points en suspens. Il va également être poursuivi par le vote d'autres textes – on vient d'ailleurs de reporter des dispositions significatives vers le projet de loi sur la consommation – et, surtout, aux plans européen et international. On a bien conscience que ce travail est en constante évolution, comme l'illustrent les projets de loi sur la consommation ou de lutte contre la fraude fiscale, qui viendront rapidement devant votre assemblée.
Pour l'heure, nous pouvons clore l'examen de ce texte avec, me semble-t-il, la satisfaction du travail accompli : c'est en tout cas ce que je ressens de manière très forte, et je vous en remercie.
Je veux à mon tour remercier l'ensemble des personnes qui ont apporté leur concours à cet examen en deuxième lecture : les services de l'Assemblée qui ont apporté leur appui de manière très précise sur les aspects techniques, l'ensemble des groupes – chacun ayant apporté à sa manière un éclairage nouveau sur un texte historique – et l'opposition, pour son comportement particulièrement élégant en commission des finances il y a quelques jours.
De manière plus générale, je veux dire que ce texte, qui demeure trop peu connu du grand public, commence à peine son entrée dans l'histoire. Il est plus gros, plus musclé… et débute surtout un long sprint. La bonne nouvelle réside dans le fait qu'avec ce texte, la France fait la course en tête pour plusieurs mois, pour ne pas dire plusieurs années.
Prochaine séance, jeudi 6 juin à neuf heures trente :
Proposition de loi relative à la neutralité religieuse dans les entreprises et les associations ;
Propositions de loi constitutionnelle et organique tendant à encadrer la rétroactivité des lois fiscales.
La séance est levée.
La séance est levée le jeudi 6 juin à une heure dix.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron