Intervention de Gilbert Collard

Séance en hémicycle du 6 juin 2013 à 15h00
Rétroactivité des lois fiscales — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilbert Collard :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le professeur Rousseau, qui ne se prénommait pas Jean-Jacques, dans un débat, sous l'autre majorité, sous l'autre présidence de la République, disait : « La non-rétroactivité des lois est un enjeu de civilisation ». Il voulait dire par là que, quelle que soit la question abordée, celle de la non-rétroactivité touche à la conception que l'on a de la civilisation du droit. Pourquoi les lois fiscales échapperaient-elles au principe de non-rétroactivité ? Parce que l'argent fiscal n'a pas d'odeur, est-ce que pour autant les principes, eux aussi, n'auraient plus le parfum de la démocratie ?

Quand les rédacteurs du code civil ont rédigé l'article 2 afin de dire que la loi ne dispose que pour l'avenir, la France sortait d'une période éminemment troublée. Il s'agissait alors de stabiliser, une fois pour toutes, l'univers juridique du pays.

Nous avons le principe de non-rétroactivité des lois civiles, celui de non-rétroactivité des lois pénales : pourquoi a-t-on progressivement accepté, avec l'aval du Conseil constitutionnel, selon un critère d'intérêt général, que certaines lois fiscales pourraient être rétroactives ? La question fiscale est-elle moins importante que la question civile ou la question pénale ? L'inquiétude n'est-elle pas la même face à la loi civile nouvelle, face à la loi pénale nouvelle, que face à la loi fiscale nouvelle ?

Je crois que rien ne peut permettre de déroger à un texte qui protège le citoyen. Rappelez-vous ce que disait le philosophe Alain, qui est tout de même l'un des pères fondateurs du radicalisme. Dans Le citoyen contre les pouvoirs, il disait que le citoyen doit toujours l'emporter par rapport à la force du pouvoir. Or, là, dans un domaine qui touche à l'économie, à la stabilité financière, à la sécurité financière, surtout dans une période où la situation économique est gravissime, on refuse d'encadrer la rétroactivité des lois fiscales.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion