Intervention de Gilbert Collard

Séance en hémicycle du 6 juin 2013 à 15h00
Rétroactivité des lois fiscales — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilbert Collard :

Mais elle n'est pas suffisamment encadrée, et ce pour une raison très simple. C'est que les notions d'intérêt général et de proportionnalité ne sont pas définies. C'est une espère de fourre-tout légal dans lequel l'humeur peut mettre n'importe quoi. Je vous rappelle tout de même que le Conseil constitutionnel lui-même a décidé que certaines formules à l'emporte-tout n'étaient pas recevables sur le plan de la démocratie juridique, parce qu'elles permettaient d'y ranger toutes les humeurs du moment. Ce n'est pas sécurisant. Et la seule question qui se pose à nous est de savoir si l'on est fidèle aux principes qui régissent la stabilité légale dans une démocratie.

Loi civile : pas rétroactive. Loi pénale : pas rétroactive. Et voilà que d'un coup l'on admet, malgré la définition que donne le Conseil constitutionnel pour autoriser cette rétroactivité, qu'encadrer la rétroactivité des lois fiscales serait absolument contraire aux principes, alors que c'est là même le moyen de les renforcer.

Inutile de reprendre les arguments qui ont été remarquablement développés. Comment – et je crois que c'est le bon sens qui parle ici – peut-on dire aux citoyens qui nous écoutent : « N'ayez pas d'inquiétude, sur le plan pénal, la loi ne rétroagira pas. N'ayez pas de souci, sur le plan civil, la loi ne rétroagira pas. Mais sur le plan de votre argent, de votre portefeuille, de vos impôts, il suffit que cliquette dans l'esprit la notion d'intérêt général pour que vous soyez mis en situation d'inquiétude. » ? Je crois que ce n'est pas sain. Dès l'instant où l'on admet le principe d'une rétroactivité, on met la main dans un engrenage dangereux pour la démocratie.

Encadrer la rétroactivité des lois fiscales, c'est dire qu'on est fidèle, quelle que soit la matière, aux principes qui ont toujours régi la démocratie judiciaire en France.

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