Intervention de Pierre Moscovici

Séance en hémicycle du 6 juin 2013 à 15h00
Rétroactivité des lois fiscales — Discussion générale commune

Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances :

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je me livrerai à l'exercice ingrat, sinon un peu artificiel, de répondre à une discussion à laquelle je n'ai pas entièrement assisté, même si je viens d'écouter attentivement M. Dassault. Je vous prie de bien vouloir m'en excuser, mais je devais, comme cela était prévu depuis plus longtemps que ne l'était ma présence ici, recevoir le président de l'Autorité des marchés financiers, M. Rameix, venu me présenter son rapport annuel. Je viens maintenant relayer ma collègue, Mme Vallaud-Belkacem, qui a suivi les débats avec beaucoup d'attention.

Je commencerai par une réflexion générale, en réponse à ce que vient de dire Olivier Dassault, sur la volonté du Gouvernement de servir l'intérêt général. Le revendiquer pour soi en attribuant aux autres le mistigri de la manoeuvre politicienne est, sinon une argutie ou une ficelle, en tout cas un marronnier de l'art parlementaire. Je ne jouerai pas à cela. Nous sommes les uns et les autres au service de notre pays et de sa compétitivité, et nous souhaitons que les entrepreneurs disposent d'un cadre d'activité et un cadre fiscal qui soient sécurisés et stabilisés. L'entreprise n'appartient à personne. Elle n'est ni de droite ni de gauche, elle appartient à ses actionnaires et à ses salariés. Elle a des dirigeants et surtout, elle a une vocation, celle de créer de la richesse et de la croissance au profit de l'essor et du développement de l'économie du pays.

Une fois que l'on a dit cela, qui définit l'intérêt général qui fatalement nous rassemble, venons-en à l'examen des propositions de loi, dont la proposition de loi constitutionnelle dont vous êtes le premier signataire, monsieur Olivier Dassault. Ce qu'a voulu montrer la majorité au cours du débat, c'est que le droit existant comporte déjà des garanties importantes pour les contribuables et qu'en conséquence l'objectif de stabilité affiché peut être atteint dans le cadre juridique actuel. Elle a souligné au passage qu'en effet, l'actuelle opposition n'a pas manqué d'occasions, au cours des dix années qui se sont écoulées, de faire de telles propositions. Le temps a passé. Il a été long. Et, franchement, si vous estimez, mesdames et messieurs les députés de l'opposition, qu'il s'agit là de dispositions tellement essentielles qu'elles peuvent amener à une modification de notre Constitution, que ne l'avez-vous fait pendant les dix ans au cours desquels vous étiez la majorité, avec un Président de la République de vos couleurs et un gouvernement censé agir dans la direction que vous évoquez !

Je répondrai, par courtoisie républicaine, à ce que je sais des interventions des orateurs. M. Accoyer s'est préoccupé de l'attractivité de notre territoire et a vu dans la non-rétroactivité des lois fiscales la clé pour la reconquérir. En vérité, comme je viens de le dire, les propositions constitutionnelle et organique aujourd'hui soumises à votre examen n'apportent pas grand-chose à l'état actuel du droit, qui est déjà encadré par la jurisprudence constitutionnelle. D'ailleurs, le Gouvernement en est tellement conscient qu'il a décidé, à la suite de la publication du rapport Gallois, de pérenniser cinq dispositifs fiscaux essentiels pour toute la durée du quinquennat, dont le crédit d'impôt recherche, qui est cher à tous ici, sur tous les bancs, et dont le volume augmentera de 2 milliards d'euros au cours de ce quinquennat. C'est aussi la raison pour laquelle nous avons allégé le coût du travail de 20 milliards d'euros, au travers du crédit d'impôt compétitivité emploi. De même que l'entreprise n'appartient à personne, la compétitivité est l'objectif de tous. Le Gouvernement dont je suis membre s'enorgueillit d'avoir fait plus, beaucoup plus, en peu de mois que ses prédécesseurs en beaucoup d'années.

Votre réflexion, monsieur Molac, a suscité le plein accord du Gouvernement. Je vous remercie d'avoir rappelé que les facteurs d'attractivité du territoire français sont puissants. Je le dis souvent, lorsque je suis amené à répondre, dans un climat un peu plus agité qu'aujourd'hui, à des questions d'actualité à l'Assemblée nationale, il y a quelque chose de lassant, de fatigant voire de dégradant à voir sans arrêt l'attractivité de notre territoire attaquée et notre pays dénigré.

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