Elles sont importantes : comment s’opèrent les transactions – si transaction il y a – au sein de l’administration de Bercy ? Quelles sont les conditions dans lesquelles la mise en conformité au droit des fraudeurs peut s’opérer ? Comment peut-on garantir la transparence de ces relations ? Comment le Gouvernement entend-il procéder pour que le Parlement dispose de toutes les informations auxquelles il doit avoir accès ?Je veux saluer une nouvelle fois les porte-parole des autres groupes, M. Alauzet, Mme Girardin et M. Sansu, qui ont apporté des éclairages utiles. Ils ont insisté sur la nécessité de poursuivre l’action à l’international et au sein de l’Europe. Ils ont également souligné la nécessité d’une plus grande transparence sur les conditions dans lesquelles les entreprises peuvent procéder à l’optimisation de leur fiscalité, tant la frontière est parfois ténue entre optimisation et fraude fiscale. Cela appelle des moyens supplémentaires pour lutter efficacement contre cette dernière.Les interventions des orateurs de l’opposition étaient très contrastées. Certains sont attachés à la dimension technique du texte et souhaitent sincèrement le faire progresser. Je les remercie. D’autres, plus polémiques, ont fait la preuve que dans l’opposition, même sur des matières sur lesquelles il ne serait pas absurde que nous cheminions ensemble, la volonté de casser le texte, peut-être avant même de l’avoir lu, l’a emporté sur tout autre type de considération.Je voudrais maintenant entrer dans le détail des choses, en évoquant quatre grandes idées, développées par les orateurs des différents groupes.Pour ce qui concerne l’action que nous conduisons à l’international, je le redis, les choses ont considérablement évolué au cours des derniers mois, particulièrement des dernières semaines. L’action de la France n’est pas étrangère à cette évolution très forte des esprits au sein de l’Union européenne. Ce qui s’est passé au G8 ces derniers jours a montré à quel point la parole portée par la France était entendue de nos partenaires du G8 et de nos partenaires européens. Si nous progressons dans l’échange automatique d’informations, ce n’est pas seulement parce que les États-Unis ont fait peser avec le dispositif FATCA une pression jusqu’alors inédite sur les pays, c’est aussi parce que la France a souhaité que, sur les plans européen et international, les conventions d’échange automatique d’informations, harmonisées, deviennent la règle, garantissant ainsi pour chaque pays la possibilité d’être informé des avoirs détenus à l’étranger par ses ressortissants.Nous devons bien entendu formaliser tout cela au sein de l’Union européenne d’ici l’automne. Si nous parvenons à conclure ces conventions – beaucoup d’entre vous nous ont incités à ne pas lâcher prise –, nous pourrons alors mandater l’Union européenne pour qu’elle signe ces conventions avec les pays tiers. Nous disposerons alors d’un maillage étendu, qui nous permettra d’agir plus efficacement contre la fraude et la grande délinquance financière.Dans le même esprit, nous ferons en sorte que des listes d’États et de territoires non coopératifs soient élaborées au niveau européen. La liste que nous publierons en France ne sera rien d’autre qu’un moyen d’atteindre notre objectif, une liste européenne, car c’est à ce niveau que nous pouvons agir de la manière la plus pertinente et la plus efficace.Le deuxième sujet sur lequel des orateurs, parmi lesquels M. Nicolas Dupont-Aignan, sont intervenus est ce que l’on appelle le monopole, ou le verrou, de Bercy. J’ai trouvé dans votre argumentation, monsieur Dupont-Aignan, une forme de paradoxe que je veux soulever, non pas pour le plaisir du débat, mais pour que nous progressions ensemble vers plus d’efficacité, l’objectif que nous nous sommes fixé avec Mme la garde des sceaux.Votre argumentation consiste à dire que le même nombre de dossiers, un millier environ, sont transmis chaque année à la commission des infractions fiscales sans que, pour autant, une peine d’emprisonnement soit jamais prononcée. C’est tout de même paradoxal : outre qu’elle applique, sous forme de pénalités et d’amendes, des sanctions qui ont valeur de peine au sens pénal à plusieurs milliers de contribuables, l’administration fiscale propose que l’on poursuive devant les tribunaux près de 1 000 contribuables tous les ans. Ces dossiers sont transmis à la commission des infractions pénales pour qu’elle les transmette à la justice. Cette dernière fait son travail – excellemment d’ailleurs – dans des conditions difficiles parce qu’elle ne dispose pas, à ce jour, de moyens suffisants. Il se trouve que les peines prononcées ne sont pas à la hauteur de ce que vous souhaitez. Que vous imputiez cela non pas au manque de moyens dont dispose la justice mais à l’administration fiscale est quelque peu singulier.Les services de Bercy travaillent avec une absolue rigueur pour que la justice puisse poursuivre. La garde des sceaux a très bien expliqué quels étaient les moyens que nous allions mobiliser dans le cadre de ce projet de loi afin que la justice soit en situation de faire son travail. Pourquoi faudrait-il que l’administration fiscale justifie l’absence de poursuites, alors que l’on a obéré la justice ?Nous agissons aujourd’hui avec sévérité. Lorsque nous appliquons des pénalités, qui ont valeur pénale, elles sont lourdes. Je souhaite rappeler que la peine la plus élevée que nous ayons imposée à un contribuable indélicat était de 68 millions d’euros. Seuls 10 % des dossiers que nous transmettons à la commission des infractions fiscales ne sont pas transmis à la justice. Dans les autres cas, la justice poursuit dans des conditions d’indépendance absolue, indépendance à laquelle la garde des sceaux et moi-même tenons particulièrement.Comme l’a dit Christiane Taubira, nous souhaitons augmenter les moyens de la justice pour qu’elle puisse agir. Nous ne sommes pas dans une opposition justice contre administration fiscale. La question n’est pas celle du verrou de Bercy. Il n’y a pas de verrou à Bercy.