Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 4 juillet 2013 à 21h30
Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur — Article 1er bis, amendement 354

Manuel Valls, ministre de l'intérieur :

La seule limitation validée par le Conseil constitutionnel est celle qui concerne le cumul des mandats de manière simultanée : elle est destinée à garantir l'exercice satisfaisant de chaque mandat.

À l'inverse – comme l'un d'entre vous le soulignait –, une décision du Conseil constitutionnel incite à une extrême prudence en la matière. Dans sa décision du 18 novembre 1982, le Conseil a en effet considéré que « la qualité de citoyen ouvre le droit de vote et l'éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n'en sont pas exclus pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité, ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l'électeur ou l'indépendance de l'élu ». En l'espèce, le cumul prolongé d'un mandat dans le temps ne semble pas de nature à remettre en question la liberté de l'électeur, qui pourra toujours s'opposer à la réélection du candidat. Il en est de même pour l'indépendance de l'élu, celui-ci se voyant davantage mis en question pour d'éventuels intérêts privés.

D'autres décisions, d'autres juridictions étrangères se sont également ralliées à ce type d'interprétation. La Cour suprême des États-Unis, tout en acceptant la limitation dans le temps du mandat présidentiel fondée sur la constitution américaine, a estimé que celle d'un mandat parlementaire n'était pas conforme à la Constitution – la situation serait similaire en France.

De manière plus politique, des États américains prévoient la limitation du cumul pour les gouverneurs ou pour les maires. Ce choix a toujours été fait par les constituants américains. D'ailleurs, lorsque l'on regarde les exemples – voyez ici Gérard Bapt et François Loncle –, l'un des débats qui s'était tenu aux États-Unis avait été suscité par la personnalité de Ted Kennedy, l'un des plus grands parlementaires du tournant du siècle qui a accompli un nombre de mandats tout à fait exceptionnel – mais il s'agissait du législatif et non de l'exécutif.

Pour conclure, je vous laisse méditer un cas, débusqué grâce au travail de nos services : la Constitution mexicaine reste l'exemple le plus connu d'interdiction faite aux députés et aux sénateurs d'être candidats à leur réélection – de même pour leur président. La logique est poussée jusqu'au bout. Si nous avons des liens étroits avec le Mexique, je ne vous invite pas à faire vôtre cette tradition…

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