Intervention de Franck Riester

Séance en hémicycle du 24 juillet 2013 à 15h00
Indépendance de l'audiovisuel public — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFranck Riester :

Après avoir affaibli financièrement France Télévisions, c’est la qualité des services de télévision que le Gouvernement semble prêt à hypothéquer. Je veux parler du projet de réaffectation des fréquences, destinées à l’origine à la TNT, vers les opérateurs de télécom. Cette réaffectation aurait un impact désastreux sur le développement de la TNT car elle mettrait un coup d’arrêt sérieux au déploiement de la haute définition et à sa généralisation à l’ensemble des chaînes. J’espère que notre action commune avec les parlementaires de la majorité empêchera le pire.

Ce texte prétend aussi se préoccuper d’indépendance. Madame la ministre, il faut vraiment ne pas avoir froid aux yeux pour se prévaloir d’un quelconque souci de préserver l’indépendance des dirigeants nommés par le Gouvernement, alors même que la politique des nominations dans le secteur de la culture, comme dans les autres secteurs, ne respecte absolument pas ce principe. Pire : tout est fait pour nommer à la tête des administrations et des établissements publics les amis du pouvoir.

Je pourrais aussi parler des Assises de l’audiovisuel, que vous avez évoquées tout à l’heure, madame la ministre, et auxquelles vous n’avez pas pris la peine de convier les parlementaires de l’opposition. On est vraiment loin d’une République irréprochable !

Qui plus est, chers collègues, que ce soit au plan financier ou institutionnel, ce projet de loi ne comporte aucune avancée en matière d’indépendance pour l’audiovisuel public parce que transférer le pouvoir de nomination des présidents des sociétés nationales de programmes au CSA – dont les membres continueront d’être nommés par le Parlement, et le président par le Président de la République – ne rompt en rien le lien entre pouvoir politique et nominations dans l’audiovisuel public.

Ne vous en déplaise, chers collègues de la majorité, le système actuel de nominations par le Président de la République, qui assume la dimension politique des nominations et prévoit des garde-fous efficaces, droit de veto étant donné au Parlement, a au moins le mérite de la transparence. Votre projet de loi, au contraire, ce n’est pas plus d’indépendance, mais plus d’hypocrisie !

J’en veux pour preuve l’amendement déposé en commission par les députés de la majorité, qui – tenez-vous bien – visait à mettre fin aux mandats des présidents des sociétés nationales de programmes, dans un projet de loi prétendant justement se préoccuper de leur indépendance ! L’opposition a contraint sur ce point la majorité à revenir en arrière, mais un nouvel amendement de la majorité prévoit de se réfugier derrière les membres du CSA pour mettre fin à ces mandats. Christian Kert a raison, c’est Ponce Pilate ! C’est l’illustration parfaite de ce que nous dénonçons : avec la réforme que vous proposez, les nominations resteront politiques, mais perdront en transparence. On voit mal en quoi elles seront alors plus légitimes qu’aujourd’hui, si tant est qu’elles ne le soient pas.

Vous voulez l’indépendance ? Noël Mamère veut l’indépendance ? Eh bien, réalisons-la vraiment ! Suivez-nous lorsque nous proposons un mode de nomination des dirigeants de l’audiovisuel public réellement indépendant du pouvoir politique. Nous soutenons la création d’un Haut Conseil de l’audiovisuel public, garant de l’indépendance du secteur public de la communication audiovisuelle et du respect de ses obligations fondamentales devant la société. Cela permettrait d’éviter que le CSA soit à la fois le régulateur et celui qui nomme les présidents de l’audiovisuel public, ce qui constitue un mélange des genres, que nous dénonçons.

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