Intervention de Jeanine Dubié

Séance en hémicycle du 25 juillet 2013 à 9h35
Soins sans consentement en psychiatrie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJeanine Dubié :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il nous revient aujourd’hui de nous prononcer sur la proposition de loi relative aux soins sans consentement en psychiatrie, qui s’inscrit dans un contexte particulier, puisqu’elle vise à répondre aux exigences posées par le Conseil constitutionnel dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité.

Le Conseil a en effet jugé, le 20 avril 2012, que certaines dispositions de la loi actuelle n’étaient pas conformes à la Constitution, en ce qu’elles portaient notamment atteinte aux droits de la personne.

Ces dispositions, qui concernent le régime dérogatoire applicable à la sortie des personnes ayant séjourné en unités pour malades difficiles ou déclarées pénalement irresponsables, seront donc abrogées au 1er octobre 2013.

Le Conseil n’a pas remis en cause le principe d’un régime plus strict, considérant que les garanties qui entouraient ce régime étaient de nature législative et non réglementaire.

Le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste note dès lors avec satisfaction qu’un régime juridique spécifique est maintenu pour les personnes pénalement irresponsables, lesquelles ne sortiront de l’hôpital qu’après une étude approfondie de leur situation psychiatrique.

De surcroît, le fait que des dispositions soient limitées aux crimes et aux faits d’une certaine gravité nous semble correct.

Par conséquent, les droits des patients, qui relevaient jusqu’alors du domaine réglementaire, ainsi que la suppression du statut légal des unités pour malades difficiles permettant aux médecins de décider de l’état des patients et de leur admission dans lesdits services de soins particuliers, figureront dans la loi que nous nous apprêtons à voter.

Par ailleurs, il convient de relever que le texte améliore le régime juridique applicable aux soins sans consentement en précisant le régime de la prise en charge des personnes et en mettant en place un dispositif de sortie non accompagnée de courte durée, ainsi que la possibilité pour un détenu d’être hospitalisé en unité hospitalière spécialement aménagée sous le régime de l’hospitalisation libre.

Ces sorties non accompagnées de quarante-huit heures, toujours mises en place en prenant bien soin d’obtenir l’accord des soignants, et qui avaient été supprimées du texte en 2011, seront réintroduites dans la loi.

En outre, le fait que des auditions devant le juge des libertés et de la détention puissent se tenir dans une salle d’audience au sein de l’établissement de santé en présence d’un avocat satisfait également notre groupe. Pour nous, radicaux de gauche, cela correspond aux besoins des patients.

Enfin, la réduction des délais contribuera à l’amélioration du système judiciaire actuel. Cependant, nous nous interrogeons, madame la ministre, sur la capacité dudit système judiciaire à mettre en oeuvre un service public de la justice efficient.

Telles sont les lignes directrices de cette proposition de loi qui nous est aujourd’hui présentée et que le groupe RRDP soutiendra. Elle tend à réformer la loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.

Pour les radicaux de gauche, il est essentiel que ce vide juridique soit rapidement comblé. Ce sera le cas le 1er octobre 2013.

Les modifications apportées par ce texte permettront de réorienter la loi vers le malade. Celui-ci était perçu depuis la loi de 2011 comme potentiellement dangereux pour la société. Or la psychiatrie se doit, sur le plan de l’éthique, de préserver la singularité et l’originalité des personnes qui se confient à elles ou lui sont confiées ; elle ne doit se concevoir qu’en relation avec les personnes en souffrance, leurs familles et amis, ainsi qu’avec les acteurs du champ médico-social et social.

Faut-il rappeler que les soins psychiques s’appuient sur la confiance, non sur la défiance, et nécessitent du temps afin que la relation soit au coeur du processus de soin ?

En tant que législateur, il est de notre devoir de démystifier le terme « schizophrène ». Ce mot, utilisé à tort et à travers et qui a perdu son sens premier de diagnostic, évoque une menace, qui accable les malades et leurs familles, et qui effraie jusqu’à leur voisinage et au-delà. Il faut faire la distinction entre un criminel ayant des troubles psychiatriques et un citoyen qui n’est pas une menace pour la société, mais qui est en souffrance psychique, dans un rapport intime à sa propre personne, à sa propre identité.

Toutes les modifications apportées par cette proposition de loi vont dans le bon sens en objectivant les troubles psychiatriques, tout en respectant les droits de chacun. Elle rétablit sur ce sujet, certes, complexe, des pratiques dignes d’une démocratie.

C’est pour cette raison que le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste votera ce texte.

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