Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, chers collègues, je tiens à rappeler les enjeux et l’importance de la question de la santé mentale au travers de quelques données chiffrées déjà citées au cours de nos travaux. L’encadrement légal des soins psychiatriques concerne aujourd’hui plus de 60 000 personnes dans notre pays. Le nombre de placements sous contrainte a augmenté de plus de 40 % entre 2006 et 2011.
Aussi, élaborée dans la précipitation et en réponse à des faits divers dramatiques, la loi du 5 juillet 2011, fondée essentiellement sur le concept de dangerosité, a subi à juste titre les critiques de nombreux professionnels de la santé et de la justice, ainsi que des familles des patients. Après deux ans d’application et en raison de l’inconstitutionnalité de plusieurs de ses dispositions, des correctifs s’imposaient. La présente proposition de loi répond largement à cette exigence.
La mission d’information sur la santé mentale et l’avenir de la psychiatrie a commencé dès février – je le rappelle à son président qui se plaignait de la rapidité de l’exercice, mais qui n’est plus là pour entendre mon intervention – un travail approfondi, sérieux et pluraliste. Ce travail, ainsi que l’examen de cette proposition de loi par les deux chambres du Parlement et par la commission mixte paritaire, ont abouti au texte qui nous est présenté aujourd’hui.
Ce texte rompt avec la politique et la vision sécuritaires qui stigmatisent les malades psychiatriques, lesquels peuvent être – il faut le reconnaître – exceptionnellement voire rarement dangereux, et plus souvent victimes de violences et de maltraitances. Cette proposition de loi traduit de réels progrès pour les libertés individuelles, tout en préservant la protection des personnes. J’insiste sur le mot « personnes », car notre société a malheureusement souvent tendance à considérer que les malades souffrant de troubles mentaux ne sont plus des hommes et des femmes à part entière ; or il s’agit d’abord de personnes malades, qui doivent donc être traitées comme telles et non uniquement comme des fauteurs de troubles à l’ordre public ou de menaces envers la société.
Les avancées de ce texte sont nombreuses : suppression du statut légal des UMD, régime spécifique de levée des mesures de soins sans consentement, place du préfet et du juge, assistance du malade par un avocat accessible à tous – je me souviens encore des promesses de notre ministre, qui nous avait rassurés à ce sujet –, révision du régime judiciaire de contrôle des soins psychiatriques sans consentement. Le délai de contrôle et d’intervention du juge des libertés et de la détention est ramené à douze jours. Quant au lieu de l’audience, ce texte privilégie un emplacement dédié, préservant l’indépendance de la justice au sein de l’hôpital. Particulièrement attachée à la protection de la vie privée des patients et à la garantie d’un traitement digne, je me réjouis de toutes ces mesures qui évitent la confusion entre patient et délinquant.
Enfin, les attentes des patients, de leur famille et de l’ensemble des professionnels concernés sont encore nombreuses. Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors du premier examen de cette proposition de loi par notre assemblée, la question de la santé mentale devra trouver toute sa place dans une grande réforme de la santé, avec une loi sanitaire qui garantisse à la fois la qualité des soins et les libertés individuelles, qui réponde aux besoins des patients et aux attentes des professionnels, qui soit digne d’un pays comme la France, en conformité avec les pratiques européennes et l’évolution de la médecine.
À mon tour, j’adresse mes félicitations à notre rapporteur, Denys Robiliard, pour la qualité du travail qu’il a effectué sans ménagement.
Pour toutes ces raisons, je vous invite, chers collègues, à adopter définitivement cette proposition de loi élaborée par la commission mixte paritaire.