Intervention de Colette Capdevielle

Séance en hémicycle du 1er octobre 2013 à 15h00
Simplification et sécurisation de la vie des entreprises — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaColette Capdevielle :

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, avec ce projet de loi, notre Gouvernement affirme son engagement dans un large plan d’aide et d’accompagnement aux entreprises. Outre son ambition affichée de restaurer la confiance et de permettre aux entreprises de se libérer des lourdes charges techniques et administratives qui pèsent sur elles et obèrent leur développement et leur activité au quotidien, ce texte porte un réel message d’avenir et de progrès.

Il s’inscrit dans la continuité du plan pour l’entrepreneuriat féminin présenté par Geneviève Fioraso, Najat Vallaud-Belkacem et Fleur Pellerin, le 27 août dernier ; un plan lui-même construit en cohérence et en complémentarité avec les Assises de l’entrepreneuriat.

Fût-ce un hasard du calendrier, l’occasion est trop bonne pour manquer de faire un rapprochement entre ces initiatives. C’est peu de dire que ce projet de loi qui touche les PME, mais surtout les TPE et vise à simplifier les tâches administratives est attendu par toutes les femmes, nombreuses, qui ont un projet de création ou de reprise d’entreprise.

Si l’on considère le potentiel créatif des femmes et le vivier d’énergies que représente l’entrepreneuriat féminin pour la société et l’économie, notre nouvelle majorité est très bien inspirée de les encourager dans cette voie.

À ce jour, en France, les femmes ne représentent que 30 % des créations d’entreprise. Ce taux stagne depuis plusieurs années alors même que les femmes représentent 51 % de la population et 48 % de la population active. Sur dix entreprises innovantes nouvellement créées, une seule est dirigée par une femme.

Il n’est pas usurpé de comparer le montage du projet, le démarrage et le quotidien d’une créatrice d’entreprise à un "parcours de la combattante". Accompagner, encourager les femmes dans l’aventure entrepreneuriale, simplifier les démarches, c’est lutter pour davantage d’égalité et de responsabilité.

Pourquoi ?

Le monde de l’entreprise fonctionne encore sur des codes masculins, fondés sur l’image d’Épinal de la structure patriarcale gérée « en bon père de famille ». Les femmes y sont mal reconnues, mal considérées et les préjugés ont la dent dure.

Les illustrations de cette réalité sont légion : plafonds de verre auxquels se heurtent les femmes salariées, difficulté réelle d’accès aux modes de financement, aux réseaux professionnels.

Ce manque de confiance a priori, aggravé par le contexte des crises, n’est pas sans conséquence sur la confiance en soi, nécessaire pour la création d’entreprise, et aboutit souvent au renoncement, à l’autocensure et nécessairement à un déficit d’activité doublé d’un manque à gagner incontestable.

Il faut donc agir, agir efficacement, comme vous le faites, monsieur le ministre, et avec souplesse, car la création d’une entreprise représente pour nombre de femmes une opportunité de carrière par le contournement des difficultés réelles d’insertion et de progression professionnelle.

Ambitieux et mobilisateur, le plan pour l’entrepreneuriat au féminin fixe des objectifs forts : la progression de dix points d’ici à 2017 du taux de femmes entrepreneurs ; l’élargissement de l’accès à tous les dispositifs d’aide à la création ou reprise d’entreprise.

Je tiens à signaler ici que cette ambition de simplification, d’organisation et de solidarité existe déjà dans nos territoires, souvent de manière originale et novatrice. Il conviendrait de s’en inspirer largement dans nos travaux.

Au pays basque, que vous connaissez bien, monsieur le ministre, les femmes ont su s’organiser et structurer un réseau social de solidarité et de proximité unique en son genre. Depuis 2001, l’association "Andere Nahia", ce qui signifie "Volonté de femme", met en réseau des femmes chefs d’entreprises et des futures créatrices dans une approche fondée sur le partage, l’échange et la mutualisation d’expériences et de compétences, en matière de comptabilité, de calcul des tarifs, d’hygiène, de sécurité, de normes, d’organisation des réseaux.

Prenant ancrage dans les préceptes de l’économie sociale et solidaire, ces femmes s’informent, échangent, se forment, réfléchissent aux développements et aux limites de leurs projets, chacune mettant son expérience et sa compétence au service des autres. En fait, elles font depuis des années du crowdfunding, sans réellement le savoir. Considérant que les réseaux traditionnels, souvent masculins, sont surtout techniques, les femmes prennent mieux en compte les dimensions humaines, personnelles et familiales indispensables pour réussir, avec pour objectif commun de promouvoir leur place dans le monde économique et leur indépendance financière.

En conclusion, je voudrais dire combien je crois que la confiance en l’entreprise ne repose pas seulement sur des mesures comptables, techniques, voire techniciennes des textes que nous pouvons produire.

La dimension humaine dans l’entreprise est au coeur de ce qui nous occupe aujourd’hui, s’agissant des questions et des enjeux économiques auxquels nous devons faire face. Dans la séquence de progrès qu’ouvre ce projet de loi, au même titre que la formidable ressource humaine que constitue la nouvelle génération, les femmes se trouvent aux premières loges. Pour sécuriser et simplifier, faisons aussi confiance aux spécialistes, faisons confiance aux femmes.

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