Intervention de Jacqueline Fraysse

Séance en hémicycle du 29 octobre 2013 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacqueline Fraysse :

Madame la présidente, mesdames et monsieur le ministre, chers collègues, nos concitoyens auraient été en droit d’attendre d’un gouvernement de gauche qu’il prenne des mesures fortes et courageuses pour préserver et étendre notre modèle social. En l’occurrence, ils espéraient des mesures fortes pour améliorer l’accès aux soins, faire sortir l’hôpital public de son sous-financement chronique et garantir à tous une retraite digne et des prestations familiales universelles.

Mais pour mettre en oeuvre cette politique, il aurait fallu en finir avec l’austérité budgétaire menée tambour battant par votre gouvernement, dont le FMI lui-même souligne les effets néfastes. Il est pourtant nécessaire et possible de dégager des moyens nouveaux en mettant à contribution tous les revenus, y compris ceux du capital. Quand on sait que 40 milliards d’euros de dividendes sont distribués par les entreprises du CAC 40, on s’étonne que les ménages modestes et les classes moyennes soient mis à ce point à contribution. On s’étonne que vous ayez refusé tous nos amendements qui proposaient une plus juste répartition des richesses, permettant un financement équilibré de la protection sociale et l’ouverture de droits nouveaux et indispensables.

Faute de faire ces choix politiques justes et audacieux, vous êtes condamnés à rester dans le chemin tracé par vos prédécesseurs. On l’a vu avec le texte sur les retraites, on le voit aujourd’hui avec ce PLFSS. Il suffit pour s’en convaincre de regarder les objectifs de dépenses d’assurance maladie, qui restent strictement inchangés par rapport à ceux votés sous la précédente majorité.

Il est vrai que nous avons noté avec intérêt quelques mesures positives, notamment le début de remise en cause de certaines dispositions incompatibles avec une prise en charge globale des patients, comme la modulation de la tarification à l’activité dans certains établissements de santé, l’expérimentation d’autres modes de rémunération que le paiement à l’acte, ou le parcours de soins pour certaines affections chroniques de longue durée. Je pense également au tiers payant pour la contraception des jeunes mineures, ou encore à la reconnaissance de la place et du rôle des centres de santé dans l’accès aux soins de proximité.

Bien sûr, nous avons voté pour ces avancées. Elles restent néanmoins très limitées, voire homéopathiques, face à la gravité des autres mesures que vous avez fait adopter, notamment la compensation pour les employeurs du coût de la réforme des retraites – qui n’est donc plus financée que par les salariés et les retraités – et la confirmation des 35 milliards d’euros d’abattements d’assiette et d’exonérations de cotisations sociales patronales sans aucun contrôle ni contrepartie.

Elles restent également limitées face à toutes les mesures de désengagement de l’assurance maladie que vous avez maintenues. Ces mesures orchestrées depuis dix ans par la droite, à coup de franchises, de déremboursements et de forfaits hospitaliers, entravent considérablement l’accès aux soins en général et particulièrement pour les plus modestes : toutes les études le montrent !

Vous poursuivez également la politique de fermeture de services et de sous-financement des hôpitaux publics. Comment comprendre que vous ayez refusé tous nos amendements à ce sujet, y compris celui qui proposait de mettre fin à la convergence tarifaire dans le secteur médico-social, et celui sur la défiscalisation des indemnités journalières en cas d’accident du travail, alors que nous avions dénoncé ensemble cette mesure profondément injuste et pénalisante pour les salariés victimes de ces accidents ?

Comment comprendre le refus pur et simple d’aborder la question de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui a pour conséquence le sous-financement de la branche AT-MP par les employeurs ? Comment comprendre le refus de mon amendement à ce sujet ? Encore un cadeau au patronat qui pèse sur la branche maladie et met en cause la santé et la sécurité des salariés.

Non, décidément, vous n’avez inclus dans ce PLFSS aucune mesure pour commencer à tenir votre promesse d’affronter les marchés financiers, aucune mesure qui permette de dégager des moyens nouveaux pour répondre à l’urgence sociale, dans le respect des valeurs d’universalité, d’égalité et d’équité qui fondent notre Sécurité sociale. C’est pourtant ce qu’attendent nos concitoyens, particulièrement celles et ceux qui en 2012 ont choisi de voter pour un changement de majorité.

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