Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à quelques mois des prochaines élections européennes, nous discutons aujourd’hui de la question du droit d’éligibilité aux élections au Parlement européen pour les résidents communautaires non nationaux. Ce texte permettra d’assouplir le dépôt de candidature en France pour des personnes qui n’auraient pas la nationalité française mais seraient citoyennes de l’Union.
Afin de favoriser ces candidatures, la directive du 20 décembre 2012, que nous transposons ici, supprime l’obligation de produire une attestation d’éligibilité fournie par l’État dont le candidat est ressortissant. À la place, le candidat fournira une simple déclaration, à charge pour l’État dans lequel il candidate de vérifier son éligibilité auprès de l’État dont il est ressortissant.
La procédure actuelle était lourde et constituait un frein aux candidatures non-nationales, qui font pourtant la richesse de cette élection. Je le sais pour être membre d’un parti qui, par deux fois, a soutenu aux européennes une candidature non française comme tête de liste. Nous soutenons donc pleinement ce texte, ainsi que les modifications adoptées en commission à l’initiative du rapporteur. Quinze citoyens de l’Union s’étaient présentés en France en 2009 ; nous espérons qu’ils seront beaucoup plus nombreux en 2014.
Au-delà, ce texte est l’occasion pour nous de nous interroger sur le sens des élections européennes, qui sont trop souvent bâclées et purement nationales. La campagne est toujours trop courte, centrée sur les partis français et sur des questions franco-françaises. Les enjeux européens étant absents, peu d’élus européens sont clairement identifiés. Bruxelles n’est pourtant pas une maison de retraite !
Résultat : l’abstention ne cesse d’augmenter aux élections européennes et a culminé à près de 60 % lors de la dernière élection en 2009. Il y a tout lieu de craindre que ce taux soit battu aux élections de mai prochain.
Le mode d’élection, par listes eurorégionales, a été vivement débattu ici même en mars dernier. Ces circonscriptions constituent un frein à la compréhension du scrutin. Elles sont illisibles pour les citoyens, avec des régions allant de Cherbourg à Tourcoing, de Bastia à Saint-Étienne ou de Nîmes à Bordeaux. Elles éloignent plus qu’elles ne rapprochent les parlementaires européens des citoyens, en conduisant à de nombreux parachutages. Elles sont une arme contre les petits partis, en relevant artificiellement un seuil d’éligibilité officiellement à plus de 5 %, mais en réalité de 10 % dans certaines régions comme l’eurorégion Centre. Enfin, elles n’ont aucunement freiné la hausse continue de l’abstention aux européennes.
Nous regrettons donc que ces circonscriptions eurorégionales aient été maintenues, comme nous regrettons certaines réformes, heureusement abandonnées. Dans le projet de loi de finances pour 2014, le Gouvernement avait ainsi récemment proposé de supprimer la propagande papier pour les seules élections européennes. Il est heureusement revenu sur cette idée, après la protestation de plusieurs partis politiques. Il aurait été curieux que seules les élections européennes puissent être concernées par la dématérialisation de la propagande, comme s’il s’agissait de sous-élections !
Au-delà, des ajustements sont possibles pour favoriser de véritables élections européennes. Depuis les européennes de 2009, le traité de Lisbonne a donné plus de pouvoirs au Parlement européen dans la désignation du président de la Commission. En toute logique, un certain nombre de partis européens annonceront, avant les élections de mai, leurs chefs de file pour la présidence de la Commission, des primaires étant même organisées dans certains de ces partis.
Toutefois, en France, si une liste annonce soutenir un candidat pour la Commission, elle ne pourra pas l’inscrire sur son bulletin de vote. Le droit interdit en effet d’inscrire sur le bulletin un nom autre que celui d’un des candidats de la liste dans l’eurorégion. Nous souhaitons donc ouvrir le droit, pour les listes qui le souhaitent, d’inscrire sur le bulletin leur candidat à la présidence de la Commission.
De plus, la campagne audiovisuelle est centrée sur les partis représentés au Sénat et à l’Assemblée, même s’ils ne présentent pas de liste. Il faudrait au contraire favoriser les partis de niveau européen, ou tout du moins les prendre en compte. Tel sera le sens des deux amendements à ce projet de loi que je présenterai au nom de mon groupe – texte que, par ailleurs, je tiens à vous le confirmer, monsieur le ministre, nous soutenons et que nous voterons.