Intervention de Paul Giacobbi

Séance en hémicycle du 31 octobre 2013 à 15h00
Transposition de la directive 2013ue du conseil du 20 décembre 2012 modifiant la directive 93109ce en ce qui concerne certaines modalités de l'exercice du droit d'éligibilité aux élections au parlement européen pour les citoyens de l'union résidant dans un État membre dont ils ne sont pas ressortissants. — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

ce sujet techniquement secondaire conduit à poser bien des questions politiques. Transposant une directive du Conseil du 20 décembre 2012, ce texte tend à alléger les formalités requises pour les citoyens désireux de se présenter aux élections européennes. Fort bien ! C’est une simplification de bon aloi : on demande une déclaration là où l’on exigeait auparavant une vérification – parfait !

Effectivement, un citoyen européen peut se présenter dans un autre pays que le sien : c’est possible, cela s’est vu, cela se voit encore ; mais enfin, quelle comparaison faire ? C’est un peu comme les poissons volants : cela existe, mais ce n’est pas la loi de l’espèce – il n’y en a quand même pas beaucoup !

Au-delà de l’obligation de vérifier – préalablement ou bien sur déclaration – si on le droit de se présenter, bien des difficultés se posent. Tout d’abord, la langue : nous vivons dans une Europe dépourvue de langue commune, même si elle compte un certain nombre de langues. De plus, la pratique des langues étrangères dans un pays comme la France est à peu près inexistante.

S’y opposent également les habitudes : l’absence de conscience citoyenne et politique au niveau européen ; le fait qu’il n’existe pas véritablement de partis communs, même si la droite et la gauche sont présentes un peu partout – et même l’extrême droite, par les temps qui courent, car les extrêmes fleurissent. Les passerelles ne sont pas évidentes, chacun ayant ses cas particuliers et ses situations spécifiques.

À titre personnel, étant un Français ayant épousé une Indienne de nationalité irlandaise et possédant une carte de personne d’origine indienne, je me sens donc un peu multinational en droit comme en fait. Pratiquant de plus une langue étrangère – l’anglais –, je ne suis pas effrayé à l’idée que l’on pourrait se présenter ailleurs.

Ce qui m’inquiète en revanche, c’est qu’il n’existe pas de conscience politique : en dépit de nos passeports estampillés « Union européenne », nous ne sommes pas des citoyens européens. Pourtant, d’un point de vue extérieur à l’Europe – de l’Inde, par exemple –, nous sommes Européens, et non Français ou Allemands ou Italiens, car cela revient à peu près au même. À la rigueur, en Inde, on distingue les Britanniques des autres, car cela a une résonance ; mais le reste n’a aucune importance.

Dans un pays comme l’Inde, en effet, les différences entre les États sont infiniment plus importantes que celles existant entre la Suède et l’Italie. Ces dernières parlent en effet des langues appartenant à la même famille, qui se ressemblent en dépit de quelques légères différences. Voilà la réalité !

Qu’avons-nous fait, au-delà de ces dispositions techniques qui, certes, ont leur importance, pour faire émerger une citoyenneté européenne, évidente partout dans le monde, sauf en Europe ?

Ce texte constitue un progrès : jusqu’à présent, on ajoutait à l’absence de conscience politique et à l’obstacle linguistique une complication administrative tout à fait extravagante ! Il s’agissait en effet pour le candidat de démontrer en quelque sorte son innocence, à savoir le droit de se présenter à l’élection, plutôt que de déclarer sa qualité de candidat potentiel en laissant éventuellement à d’autres la possibilité de la lui contester.

Nous avons donc fait un tout petit progrès même si, soyons clairs, cela ne changera rien. Même si cela nous interpelle, ce n’est ni le lieu ni l’heure – tardive –, la veille d’un week-end prolongé, d’en discuter ; je tenais toutefois à appeler l’attention de l’Assemblée nationale sur ce point.

Il va de soi que le groupe radical, européen par nature et tolérant par vocation, soutiendra ce texte.

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